La Saint-Valentin n'avait jusqu'ici pars représenté grand chose pour Lou... Enfin si, c'était un jour qu'elle redoutait un peu... Avant Tom, parce qu'elle se sentait terriblement seule, quand elle était avec Tom, parce que ce dernier se fichait complètement de cette fête qu'il devait considérer comme absurde (comment comprendre que l'on puisse célébrer l'amour quand on n'était pas capable de le ressentir), et après Tom parce qu'elle se sentait de nouveau seule...

Mais cette fois, c'était différent, cette fois, Lou était sincèrement impatiente de célébrer la Saint-Valentin, et pour cause, pour la première fois de sa vie, elle allait passer ce moment en compagnie d'un homme qu'elle aimait et surtout (et c'était le plus important) qui l'aimait vraiment en retour.

Bien sûr, se montrer en public alors qu'ils n'étaient pas officiellement fiancés, et même, alors que Lou était officiellement fiancée à un autre, c'était un risque éventuel, mais que la jeune femme prenait avec plaisir, puisqu'elle ne demandait qu'à passer ce moment certes simple mais romantique en compagnie d'Abraxas.

Il lui avait donné rendez-vous dans un restaurant chic, et Lou comptait bien se mettre sur son trente et un... pour ne pas faire tache dans le décor, bien sûr, mais aussi parce qu'elle souhaitait que son petit ami n'ait d'yeux que pour elle en cet instant.

La famille Hamilton n'était pas la famille de sang pur la plus fortunée, mais suffisamment dotée mais tout de même assez pour que la jeune femme puisse s'acheter une tenue digne de l'occasion. Une robe émeraude fluide et élégante, un collier de perle assorti... En se jaugeant dans le miroir au moment d'ajuster sa coiffure, elle parvint à se trouver jolie, chose qui n'arrivait presque jamais à Lou.

Elle arriva pile à l'heure au rendez-vous, et Abraxas l'attendait déjà. Son sourire s'élargit en le voyant. Il suffisait qu'il soit là pour qu'elle ait envie de sourire, c'était improbable... et terriblement satisfaisant. Il lui sourit en retour, s'approcha d'elle et déposa ses lèvres sur les siennes.

« Bonsoir, tu es magnifique. »

Ses joues rosirent légèrement. C'était pile la réaction qu'elle attendait.

"Tu n'es pas mal non plus", répondit-elle en attrapant son bras tandis qu'ils entraient dans le restaurant. Ce soir, elle ne voulait pas penser à Terrence, à la crainte qu'elle gardait de ne pas suffire à la famille Malefoy. Ce soir, elle ne voulait penser qu'à eux, dans un heureux égoïsme. "Cet endroit est magnifique, tu n'as pas fait les choses à moitié."

“Tu as l’air surprise, c’en serait presque vexant. Mais bon, pour cette fois, je veux bien te pardonner, parce que c’est la Saint-Valentin.”

Lou adressa à Abraxas une mine faussement boudeuse. Ce n'est pas qu'elle était surprise, elle se contentait de faire un constat. Cet endroit était effectivement magnifique, et il n'avait effectivement pas fait les choses à moitié. Aurait-elle vraiment dû faire mine de ne pas le remarquer.

Non, elle n'était pas surprise, ou bien seulement d'être celle pour qui il déployait tant d'effort et de bonne volonté. Elle n'était pas toujours sûre de le mériter, même si elle appréciait toujours plus d'être celle qui lui donnait envie de faire tout ça. Il n'avait pas son pareil pour la faire se sentir unique. Elle se révélait déjà avant qu'ils ne se rapprochent, mais il l'aidait encore plus distinctement à s'affirmer, à se sentir belle, exceptionnelle, et elle ne le remercierait jamais suffisamment pour cela.

“D’ailleurs, qu’est-ce que tu as dit à tes parents ? Parce que j’apprécierais pouvoir te garder toute la nuit, et te laisser repartir que demain.”

"Je leur ai dit que j'avais un rendez-vous galant.", répondit simplement Lou avec un fin sourire aux lèvres. "Ils ont eu la délicatesse de ne demander aucun détail... ou l'absence d'esprit de m'imposer un couvre-feu. Que je n'aurais pas respecté de toute manière."

Lou était tout sauf un exemple de désobéissance, mais elle avait aussi appris à prendre ce qu'elle voulait, comme elle le voulait, quand elle le voulait. Le déroulé des événements et la manière dont s'agençait sa vie semblaient lui donner raison. Elle avait plus qu'intérêt à suivre son instinct. Il lui rendait de fiers services. Et en cet instant, il lui réservait des moments qu'elle n'aurait envie d'échanger contre aucun autre, sans aucun doute possible.

La jeune femme serra sa main dans celle d'Abraxas par dessus la table et plongea son regard dans le sien. Cette soirée, peu importe la manière dont elle se déroulerait, serait forcément parfaite, parce qu'elle se trouvait en compagnie de qualité. Elle n'aurait certainement pas envie d'être ailleurs, et surtout pas en présence de qui que ce soit d'autre. Surtout pas.

"Je suis à ton entière disposition jusqu'à quand bon te semblera."

Galant, Abraxas déposa furtivement ses lèvres sur le dos de sa main. Elle voulait bien croire qu'il n'ait pas forcément été gentleman avec toutes les filles qu'il avait fréquentées, mais avec elle en tout cas, il était d'une élégance et d'une douceur exemplaire. Et elle se sentait parfaitement bien et à sa place, ici, avec lui.

Elle avait vraiment le sentiment que même si tout le faste autour de ce rendez-vous pourrait participer d'un certain sentiment de mise en scène, il n'en était rien, parce que leurs sentiments, eux, étaient parfaitement authentiques, et rendait n'importe quelle situation à première vue trop "romantique" (même si être "trop" romantique était une observation biaisée) confortable et douce.

« Rien ne pourrait me faire plus plaisir. Et je compte bien en profiter. »

Là encore, Lou ne remettait pas en question l'emphase avec laquelle Abraxas s'exprimait, elle avait vraiment envie de croire qu'il le pensait, et que rien ne pourrait lui faire plus plaisir, en tout cas ici et maintenant, et c'était son cas à elle aussi. Il lui était d'ailleurs infiniment facile d'occulter tout le reste au seul profit de ce moment alors qu'ils se trouvaient en présence l'un de l'autre.

Il n'y avait pas grand-chose à faire pour qu'ils sachent profiter de la présence l'un de l'autre, par ailleurs, en tout cas pas dans l'esprit de la jeune femme, qui se contentait très bien de simplement rester là en compagnie du jeune homme. Même s'ils ne devaient échanger que trois mots, elle parviendrait à s'en satisfaire, parce que les silences ne semblaient jamais pesants en compagnie d'Abraxas. Tout coulait de source, tout allait de soi quand elle était à ses côtés, et c'était une pensée aussi douce que réconfortante.

Malgré tout, elle restait curieuse de la manière dont la soirée allait se dérouler. Simple dîner ou bien Abraxas avait-il l'intention de continuer de lui en mettre plein la vue comme c'était déjà le cas avec ce grand restaurant.

"Je te fais confiance pour ça. Et j'ai hâte de voir ce que cette soirée va nous réserver."

Elle lui adressa un sourire, voulut dire autre chose, mais un serveur vint vers eux et remplit leurs verres de champagne. Lou le gratifia d'un sourire avant de reporter son attention sur Abraxas.

"A quoi est-ce qu'on trinque, alors ?"

« A nous ? Je ne vois pas de meilleur sujet. Et puis, ce sera en cohérence avec le thème de cette soirée. »

Cette soirée avait-elle vraiment un thème autre que leur souhait mutuel de passer du temps ensemble ? Certes, c'était la Saint-Valentin, alors la thématique était, plus largement, l'amour, mais c'était une considération bien accessoire pour Lou, qui n'aurait pas appréhendé ce rendez-vous autrement s'il avait été à une autre date.

L'essentiel était qu'ils passent du temps ensemble et qu'ils profitent de la compagnie l'un de l'autre, pas plus, pas moins que cela. Et en effet, à quoi pourraient-ils davantage être susceptibles de trinquer si ce n'est à eux ?

"A nous", reprit Lou avec un sourire rayonnant aux lèvres avant de venir faire tinter son verre contre celui de son petit ami.

Elle avait parfois encore du mal à croire que tout ceci était bien réel, qu'il ne s'agissait pas seulement du fruit de son imagination. Oui, ils étaient ensemble depuis un moment, maintenant, mais c'était dans des moments tels que celui-ci qu'elle mesurait sa chance.

Elle ne pensait pas avoir fait quoi que ce soit pour méritait l'attention et l'affection d'Abraxas et pourtant elle l'avait, et à présent, elle ne se voyait tout bonnement pas vivre sans. Il était plus important à ses yeux que... Eh bien, absolument tout le reste, en réalité.

Elle ne savait pas trop ce qu'elle était capable de lui apporter en réalité, mais il ne semblait pas en demander davantage que ce qu'elle lui donnait, alors au final, ce n'était pas mal.

Elle but une gorgée de son verre avant d'entamer la conversation, en espérant ne pas plomber l'ambiance avec un sujet désagréable, mais elle ne l'évoquait pas comme un problème, plus comme un fait encourageant.

"Tu sais, j'ai eu une conversation avec Terrence, récemment, j'ai appris pas mal de choses sur sa situation. Annuler les fiançailles devrait être un jeu d'enfants en fin de compte."

Pour peu que l'épouser soit une pression qu'il ne veuille pas s'infliger, elle pourrait lui offrir une porte de sortie, même si les parents Hamilton se mettraient sans doute très vite en quête d'un nouveau fiancé pour remplacer celui qui n'avait pas su faire l'affaire pour leur fille.

« Ah oui ? Et qu’as-tu donc appris de si compromettant pour lui pour que cela brise des fiançaiiles ? »

Lou réalisait bien qu'elle était parvenue à intriguer Abraxas. Il faut dire que, alors qu'ils s'étaient imaginés faire face à une situation bien trop complexe pour se tirer sans mal de ce pétrin marital, les circonstances jouaient finalement très aisément en leur faveur.

Techniquement, elle ne devrait rien dire à Abraxas. Terrence lui avait fait promettre de ne parler de tout ceci à personne, mais si Lou voulait bien tenir sa langue avec n'importe qui, elle estimait Abraxas suffisamment au courant pour l'en tenir informé. Et si finalement, la nouvelle devait s'ébruiter par sa forte, elle n'en éprouverait qu'un scrupule très relatif, honnêtement, parce que Terrence avait recherché le bourbier dans lequel il s'enfonçait, et si les autres devaient ne pas apprendre la nouvelle par elle, ils le feraient autrement dans tous les cas, et ce ne serait pas forcément mieux.

Donc non, elle ne comptait pas cacher ce qu'elle avait appris à son petit ami, sans oublier le fait qu'elle considérait que c'était en ayant pleinement conscience de la situation qu'il se rassurerait... au point de ne plus envisager de l'épouser ? Elle avait un peu peur de cela - même s'ils avaient été pris de court par les circonstances, elle n'avait aucune envie de revenir sur ce point. Mais en même temps, mieux valait qu'il soit au courant de tout, de tout sans aucune exception.

"Il est tombé amoureux d'une moldue."

Le ton qu'elle employait ne cachait rien de ce qu'elle pensait de cette situation. Il fallait vraiment être stupide pour non seulement s'enticher d'une moldue, mais être prêt, en plus du reste, à abandonner son nom, sa fortune et sa réputation afin de vivre cette passion absurde jusqu'au bout... Elle trouvait cela un rien pathétique, mais c'était la vie de Terrence, après tout. Et dans l'intervalle, eux, ça les arrangeait : ils avaient tout à y gagner.

"Il a l'intention de tout abandonner pour elle. On est d'accord que c'est complètement stupide, mais qu'il continue de l'être, ça nous arrange", reprit-elle avec un fin sourire.

Rien n'était fait encore, bien sûr, il faudrait encore que Terrence ait le cran de se dresser contre ses parents, et ce n'était pas forcément pour tout de suite, mais en en parlant avec lui, il avait su la convaincre que c'était bien son intention, et qu'il ne se défilerait pas.

« C’est répugnant… »

Cette réflexion, si spontanée, de la part d'Abraxas eut le don d'amuser Lou. Elle ne l'aurait pas forcément exprimé en ces termes, mais elle n'irait pas dire qu'elle en pensait moins de son côté. Elle était loin d'accorder à Terrence Fern un crédit qu'il ne méritait pas à ses yeux, mais elle était plus reconnaissante que répugnée.

Elle avait en effet besoin de profiter de l'opportunité qu'il lui donnait de tourner cette situation en leur faveur. S'il était capable de saborder leurs fiançailles à leur place, il était certain qu'il lui rendrait un fier service. Et à tous les deux.

« C’est répugnant… mais j’admets que c’est arrangeant pour notre situation. Néanmoins, ton nom sera sûrement associé à lui le temps qu’on oublie vos fiançailles, ce qui n’est pas très plaisant, mais bon, ce ne sera que temporaire. »

Oui, effectivement, il fallait s'y attendre. Et dans les temps qui viendraient, Lou serait dans la nécessité d'entendre tout son entourage de sang pur évoquer le nom de son "promis" en sa présence. C'était bien souvent comme cela que les choses se passaient dans leurs grandes familles. Et de quoi parlerait-on d'autre, bien sûr, que de ces grandes nouvelles, pas vrai ?

C'était plutôt absurde, mais c'était un fait, et un fait que Lou devait constater et accepter, même si ce n'était pas évident que de consentir à courber l'échine... On dirait qu'elle était plutôt douée pour ça, mais Lou était capable de plus de caractère que ce qu'on pourrait soupçonner, et en matière de rébellion, notamment, elle n'était pas forcément la dernière, quoi que l'on puisse en penser, et l'on pouvait se révéler parfois surpris de ce dont elle se révélait capable pour sa part.

"Tant que cela ne te dérange pas, je suppose que je saurais m'en accomoder également", confirma-t-elle avec un hochement de tête. "Le plus judicieux dans tous les cas est de faire profil bas pour le moment."

Elle esquissa un sourire qui se voulait rassuré, mais elle ne le serait que dès lors que tout ceci serait derrière elles, et c'était encore loin d'être gagné pour le moment, même si elle continuait d'y croire dur comme fer malgré tout. Jusqu'ici, les choses ne s'étaient pas si mal passées pour eux, après tout. Ils trouveraient quoi faire pour que les choses demeurent ainsi.

"Et de palier à l'éventualité que tout ne se passe pas forcément comme prévu."