Lou avait tout essayé dans l'espoir de réparer sa baguette, mais en vain, les efforts qu'elle avait fournis afin de lui redonner figure... baguettaire (?) s'étaient soldés par de cuisants échecs, et quelques brûlures et bleus au passage, car sa baguette, en refusant de lui obéir convenablement, avait retourné quelques-uns de ses sorts contre elle.

En bref, ce n'était plus possible. Même si l'idée ne lui plaisait pas du tout, la jeune femme devait se faire une raison, il était grand temps qu'elle dise adieu à son ancienne baguette et s'en achète une nouvelle. Elle avait déjà trop traîné, d'ailleurs. Dans les conditions actuelles, ce n'était pas comme si elle pouvait se permettre d'en avoir une qui ne soit qu'à vingt pour cent efficace. Ce n'était déjà pas une bonne chose pour un sorcier lambda, mais encore moins pour quelqu'un comme elle...

En espérant que la prochaine ne subirait pas le sort de celle qui l'avait précédée. De ce point de vue-là, elle ne pouvait rien garantir. C'était un entraînement particulièrement musclé avec Xena qui avait entraîné la "blessure" de sa précieuse baguette, et des entraînements musclés, elle en aurait malheureusement d'autres. Au début, ça n'avait été qu'une simple fissure, puis avec le temps, ça avait augmenté, le crin de licorne menaçait de s'en échapper constamment, bref, ce n'était pas beau à voir.

Il était grand temps, mais Lou n'était pas très enthousiaste à l'idée de se rendre chez Ollivander pour faire l'acquisition d'une nouvelle baguette. Pas parce que cela exigeait des moyens qu'elle ne posséderait pas, la famille de Lou avait nettement de quoi faire. Mais parce que cette baguette, elle l'avait depuis ses onze ans, elle l'avait accompagnée dans toutes les périodes importantes de sa vie. En cet instant, elle avait un peu l'impression d'abandonner une amie, une soeur, et elle n'aimait pas ça du tout. Mais bon, quand faut y aller.

Elle s'était donc rendue sur le chemin de traverse et passait maintenant le pas de la boutique. Elle s'attendait à tomber sur l'homme qui lui avait vendu sa baguette à l'époque, et à qui elle serait bien incapable de donner un âge tant, dans son esprit, il avait toujours dû être vieux, mais à la place, ce fut une jeune femme de son âge, et que Lou connaissait bien, qu'elle trouva derrière le comptoir.

"Elizabeth ?" demanda Lou, sincèrement étonnée. "Tu travailles ici, maintenant ?"

- Oh, Lou ! Oui, j’ai commencé à travailler ici il y a à peu près un mois, mi-décembre !

Lou était surprise, mais agréablement surprise. Il est vrai qu'elle ne s'était pas attendue à retrouver Elizabeth dans ces conditions. Elle s'était imaginée, sans spécialement de raison, qu'il n'y avait que les Ollivander pour travailler chez Ollivander's. Mais après tout, il n'y avait pas forcément de raison, et connaissant son ancienne camarade, Lou estimait qu'elle devait faire du bon travail, du très bon travail, même.

Lou, avec le temps, avait gagné une certaine admiration pour les femmes qui prenaient leur destin en mains, se trouvaient du travail, gagnaient ainsi leur indépendance. Elle avait grandi dans des cercles qui respectaient des conventions sociales très différentes. Ses parents ne supporteraient certainement pas de la savoir travailler. Ils attendaient qu'elle soit épouse (ce qui était en bonne voie... d'une manière ou d'une autre, même si toute cette histoire lui donnait des noeuds au cerveau et l'angoisse au ventre quand elle y réfléchissait un peu trop longtemps), puis qu'elle devienne mère. Aucun autre choix n'était concevable. Pour autant, Lou n'avait jamais été autant séduite par l'idée de faire ses propres choix, indépendamment des intentions parentales.

"Félicitations, alors !" répondit Lou qui devinait en entendant Elizabeth s'exprimer de la sorte qu'elle s'épanouissait véritablement dans ce métier qui était à présent le sien, et c'était tout ce que la jeune femme pouvait bien lui souhaiter, évidemment. "Et ça te plaît ?" La réponse semblait évidente, mais Lou posait la question tout de même, avant de se rappeler les raisons de sa présence, pour commencer. "Je compte sur toi, en tout cas."

Elle tira de sa poche sa baguette brisée pour que son amie constate l'étendue des dégâts. Rien qu'à la voir, cela fendait le coeur de Lou. Elle aimait tellement cette baguette... Tant de souvenirs lui étaient attachés. Cela ne lui plaisait vraiment pas de devoir la remplacer, mais il fallait bien faire avec, malheureusement. Un sorcier n'était rien sans sa baguette, et Lou était tout sauf devenue un pro de la magie sans baguette. Elle essayait déjà de devenir la meilleure sorcière et la meilleure combattante qu'elle pouvait espérer être, et c'était déjà un travail de longue haleine.

"Comme tu peux le constater, j'ai absolument besoin d'une nouvelle baguette."

- Oui, j’aime beaucoup. C’est vraiment intéressant, j’ai l’occasion d’apprendre plein de nouvelles choses, et de comprendre un peu mieux comment fonctionnent les baguettes ; même si je ne suis encore pas une experte.

L'enthousiasme d'Elizabeth faisait plaisir à voir. Elle semblait avoir vraiment trouvé sa voie. Lou ne pouvait qu'admirer cela, elle qui ne pensait pas un jour travailler, parce qu'on l'avait éduquée à penser que ce n'était pas son rôle de le faire. Malgré tout, elle admirait la motivation et la volonté, c'étaient des qualités qu'elle exerçait chez elle également, même si elle avait encore beaucoup de chemin à parcourir de ce point de vue en particulier.

Elle apprenait donc de nouvelles choses, devenait plus forte et plus avertie sur la manière dont on fabriquait les baguettes. Un art auquel Lou, de son côté, était complètement hermétique, et ne cherchait pas vraiment à s'intéresser.

Mais si Elizabeth, de son côté, avait trouvé sa voie, alors c'était vraiment la meilleure des choses, et Lou, surtout, choisissait de lui faire confiance, même si elle avait conscience du fait que son amie débutait et ne devait pas tout savoir non plus. Dans tous les cas, si elle était là, à ce comptoir, et que les Ollivander lui faisaient confiance, elle aussi pouvait leur faire confiance, après tout.

- Par Merlin, comment as-tu fait ça ?

Lou afficha un sourire gêné, forcément, elle s'attendait à cette question. Quelque part, elle était soulagée d'avoir affaire à son amie, en l'occurrence, car elle se disait qu'un Garrick Ollivander, par exemple, serait peut-être capable, en un coup d'oeil, de savoir exactement ce qui était arrivé à sa propre baguette. Et c'était une conversation qu'elle ne voulait pas partager.

Ce qui n'étonnera personne étant donné tout ce que ça impliquait, y compris son appartenance à deux camps antagonistes mais tout aussi diabolisés l'un que l'autre. Mais bref, donc, elle allait se contenter d'une fausse excuse, et espérer que ça passe. Surtout que Lou ne voulait absolument pas qu'Elizabeth s'inquiète en s'imaginant qu'on l'avait attaquée ou quoi que ce soit (même si c'était le cas d'une certaine manière).

"J'ai commencé à prendre des cours... d'autodéfense. Comme tu peux voir, c'est pas encore trop ça", dit-elle avec un sourire désolé.

- Effectivement, mais ne t’inquiète pas… Tu parlais d’une nouvelle baguette, mais je pense que la tienne devrait pouvoir être réparée.

A cette nouvelle, Lou ne put s'empêcher d'afficher un sourire. Pour elle, c'était fichu, sa baguette était dans un tel état qu'elle allait forcément devoir être remplacée. Elle était très certainement influencée par sa condition de fille unique de sang pure, c'était à ça qu'on l'avait habituée, en quelque sorte : quand quelque chose ne fonctionnait pas, on ne cherchait pas de solution, on remplaçait immédiatement. A quoi bon s'ennuyer avec cela puisqu'on avait très largement les moyens, en somme ?

Mais pour le coup, sa baguette n'était pas un simple objet disposable, c'était quelque chose de beaucoup plus important à ses yeux. La jeune femme n'avait jamais possédé d'autre baguette, elle n'avait pas spécialement envie de devoir se familiariser avec un autre objet de même nature, certes, mais qui ne l'aurait pas accompagnée dans son quotidien, dans les moments les plus importants de sa vie.

Donc oui, si sa baguette pouvait être "sauvée", Lou serait la première à en éprouver la plus vive et la plus honnête satisfaction.

Lou regarda Elizabeth faire, assez impressionnée par l'expertise qu'elle semblait avoir rapidement acquise. Elle avait l'air de parfaitement savoir ce qu'elle faisait, et même si Lou n'était pas totalement rassurée, elle décidait quand même de lui faire confiance, au moins un minimum.

- Ne t’inquiète pas, c’est normal.

Lou fut tentée de poser des questions concernant ce qu'était cette fameuse pâte de laquelle on recouvrait sa baguette, mais une part d'elle se disait que moins elle en savait, mieux c'était. Ce qui lui importait, c'est qu'on lui rende sa baguette dans le meilleur état possible, rien d'autre. Le reste avait une moindre importance en comparaison.

- Cependant, je ne vais pas pouvoir la réparer moi-même, il va falloir que je la confie à Garr... Monsieur Ollivander, pour qu’il essaie … Il te faut une baguette, en remplacement, tu ne peux pas rester sans. Prête à te faire choisir de nouveau ?

"Du moment que c'est juste en remplacement, ça me va très bien", répondit Lou, bien plus motivée à rejouer le jeu du choix de la baguette si ce n'était pas pour la garder indéfiniment. "Et je suis prête. Mais je te préviens, quand j'ai choisi ma baguette en première année, j'ai retapissé toute la boutique sans le vouloir."