Retrouvailles entre amis [pv : James]

Retrouvailles entre amis

J

ames rit légèrement jaune à la plaisanterie de son ami. Elle savait bien qu'elle était somme toute innocente, pas même innocente, mais forcément, vu les circonstances, James la trouvait déplacée sans qu'elle le soit pour autant. Elle n'avait même pas de raisons de l'être, d'ailleurs, puisque Derek ne lui inspirait absolument pas ce genre de pensées, et même s'ils devaient se retrouver un jour dans le même lit pour une raison x ou y, il ne se passerait absolument rien, mais... bref, mauvais choix de blague... même si James doutait tout de même que Derek ait une moins bonne descente que lui... ou que qui que ce soit ait une moins bonne descente que lui, d'ailleurs.

Sur ce point, il ne faisait aucun doute qu'il se révélait particulièrement pathétique, à vrai dire. Mais il aurait tout le temps d'y repenser (et de regretter) le lendemain. Pour l'heure, il ne refuserait certainement pas de trinquer avec Derek, à leurs retrouvailles, à leur amitié, et à leur projet qui avait de très bonnes chances de rapidement virer au fiasco étant donné que Derek continuait de surestimer les talents littéraires de James, qui n'étaient pas si exceptionnels, au fond. Enfin, en tout cas en était-il convaincu, ce n'est pas comme s'il avait un jour vraiment tenté d'écrire de manière professionnelle.

-C'est vrai, répondit James, un peu nostalgique de l'époque où la vie n'avait pas fait son oeuvre et ne les avait pas tous menés sur des chemins différents. Oh, James continuait de voir Derek ou encore Elros aussi régulièrement qu'il le pouvait, mais il était évident que ce n'était pas pareil qu'avant, et c'était en soi parfaitement logique. Chacun avait son métier, ses occupations, ses joies, ses problèmes. Les amitiés sont importantes, pour cette raison, James avait toujours cherché à les entretenir du mieux possible. Il aurait peut-être mieux tenu la distance que nous, au passage. Il faudrait qu'on s'organise quelque chose, d'ailleurs, tant que tu es dans le coin. Car il était évident que l'insaisissable briseur de sorts ne leur facilitait évidemment pas la tâche non plus de son côté, à courir aux quatre coins du monde, à conjurer d'anciens maléfices comme s'il en pleuvait. Ce n'était pas James et son métier de libraire ou Elros et son poste au ministère qui compliquaient les choses, pour le coup. D'ailleurs, j'imagine que tu sais qu'il va se marier, ajouta-t-il.

Ce qui annonçait déjà d'office leur prochaine biture éventuelle. Quoiqu'il ferait mieux de bien se tenir à cette occasion (ce qui en règle générale ne lui posait pas vraiment soucis par ailleurs. ne serait-ce que parce que Lindsay serait très certainement de la noce elle aussi... logique).

code by Mandy

-J’ai entendu dire, mais ce vieux pirate ne m’a presque pas tenu au courant ! s’exclama le chercheur de sort, l’air presque indigné. D’un autre côté, il faudrait pour ça que ses hiboux puissent me trouver.

Ce qui n’était pas évident, il fallait bien l’admettre. Le briseur de sorts était sans doute plus difficile à trouver que certains criminels en cavale. C’était comme ça : Karen à Poudlard, l’appartement lui semblait vide et si la solitude devait être sa seule amante, il la préférait sur la route plutôt que lovée contre lui sur le canapé. D’ailleurs, c’était lui qui avait pris l’initiative de cette sortie à James, mais il ne lui en tenait pas rigueur : le hibou de Derek était un vrai athlète doté d’un sens de l’orientation hors-pair, des qualités essentielles pour voyager avec le briseur de sorts. Le hibou moyen aurait du mal à suivre un rythme aussi soutenu et à trouver un tel destinataire.

Elros allait donc se marier… Une pensée sinistre fit grimacer Derek. On disait bien « jamais deux sans trois », mais il espérait que leur ami ne marcherait pas dans leurs pas et connaîtrait un mariage plus heureux que le leur. Bien entendu, la situation n’était pas la même : Elros était bien plus mature aujourd’hui que James et Derek à leurs mariages respectifs, à peine sortis de l’école de sorcellerie. Encore que la promise ne fût pas franchement d’âge mûr. L’éducation traditionnelle que son père lui avait inculquée aurait frissonné à cette pensée, mais le trentenaire avait épousé une Née-Moldue avant de divorcer : il était bien placé pour savoir qu’il était mieux pour le bonheur de chacun de vivre avec son temps. Si son ami et sa promise étaient heureux ainsi, Derek ne voyait pas en quel nom il pourrait s’opposer à leur union. Il n’était pas de ceux qui croyaient au privilège du sang, ou qui pensaient avoir l’autorité nécessaire pour juger les mœurs d’autrui. « Vivre et laisser vivre », telle aurait pu être sa devise… Ce qui expliquait sans doute pourquoi il avait tant d’ennemis parmi les Sangs-Purs.

Puisqu’on parlait d’ennemis… ça risquait d’être quelque chose, au mariage. C’était le mauvais côté d’entretenir les amitiés année après année. Certains, comme James et Derek, s’entendaient encore comme cul et chemise, mais on s’exposait à des conséquences fâcheuses à chaque querelle. Lindsay serait-elle là ? Cette perspective n’enchantait pas franchement Derek, même s’il ne pouvait reprocher à Elros de l’avoir conviée. A vrai dire, le briseur de sorts n’avait presque pas parlé à la jeune femme depuis son divorce avec James… il fallait dire que ce qu’elle faisait avec Gabriel ne plaidait pas franchement en sa faveur aux yeux du trentenaire. Et il y aurait sans doute d’autres amis du couple qui s’étaient sentis obligés de choisir, comme Derek.

Il faudrait que chacun fasse abstraction de sa sensibilité personnelle pour ne pas gâcher le plus beau jour de la vie d’Elros.

-Ça va être quelque chose, ce mariage. Allez, on en reprend un ? ajouta-t-il en montrant son verre vide. Il ne s’agirait pas d’aller au mariage sans entraînement préalable !

Retrouvailles entre amis

J

ames s'était douté, bien sûr, qu'Elros avait parlé à Derek de son mariage, il n'empêche qu'il était tout de même soulagé d'en avoir la confirmation. Il n'était pas le dernier, quand il était question de commettre des bourdes involontaires, et il s'en serait sincèrement voulu s'il avait dû révéler accidentellement ou presque une information qu'Elros, pour une raison x ou y, n'aurait pas voulu communiquer à son ami. Il aurait tout à fait pu vouloir le lui annoncer en personne et ne pas en avoir eu l'occasion, après tout. Mais non, Derek était parfaitement au courant de la situation et enthousiaste également.

Le foirage d'un mariage ne signifiait pas que l'on ne puisse pas se réjouir de celui des autres, après tout, et c'était assez rassurant de se dire que les échecs respectifs de ses amis en la matière n'aient pas dissuadé Elros de s'engager sur la voie du sacrement matrimonial - avec, il fallait l'espérer, plus de succès qu'eux... Mais James voulait y croire. Il gardait quelques réticences concernant la future épouse, surtout au vu de son jeune âge, certes, mais il avait tout de même envie de penser que l'événement serait heureux, et prétexte à passer un bon moment pour eux tous.

C'est sûr, ce mariage, ça allait être quelque chose. James envisagea de faire un commentaire mais il n'en eut guère le temps car Derek, déjà, suggérait une nouvelle tournée. James réagit à cette proposition par une légère grimace, pour autant, il ne protesta pas au moment de se faire reremplir son verre. Ils n'étaient plus franchement à ça près, à ce stade. Pour le moment, il se sentait surtout euphorique, pas encore spécialement malade, ce qui en ce qui le concernait étaitdéjà un exploit. Il ne devrait peut-être pas tirer sur la corde, de fait, mais au point où ils en étaient.. disons qu'ils n'allaient certainement pas s'arrêter en si bon chemin.

-Il va falloir s'entraîner sacrément, d'ici là, dans ce cas, observa James avec un sourire au coin des lèvres. A mon avis, quelques verres ne seront sûrement pas de trop. Tu te doutes que Lindsay sera présente au mariage...

Ce n'était pas une surprise, puisqu'Elros et Lindsay étaient amis. Des amitiés communes, il y en avait un paquet dans leur cercle. La plupart avaient pris le parti de James, contre toute attente, après le divorce. James, au fond, lui qui connaissait tous les tenants et aboutissants de l'affaire, trouvait cela injuste. Mais il n'avait pas fait grand-chose pour défendre son ex-femme malgré tout. Certes, la situation s'était légèrement détendue avec Lindsay, dernièrement, mais il ne se faisait tout de même pas d'illusion... ça n'allait pas être la grande joie non plus de mettre tout ce petit monde dans la même salle. James espérait qu'Elros avait bien potassé son plan de table.

code by Mandy

Derek acquiesça d’un hochement de tête dans un premier temps. Oui, il se doutait que Lindsay serait là, il était justement en train d’y penser.

-Ça ira, vous deux ? Tu m’as dit que vos relations s’étaient détendues, mais tu ne me feras pas avaler qu’il n’y aura aucun malaise lorsque vous vous croiserez au mariage -parce que vous allez vous croiser, il ne faut pas se faire d’illusions. A moins que tu n’envisages de venir avec une cape d’invisibilité !

Le briseur de sorts descendit une nouvelle gorgée. Il commençait tout doucement à se sentir un peu nauséeux… Il était d’ailleurs étonnant de voir qu’ils parvenaient encore tous deux à tenir une discussion cohérente et articulée. Soit James avait progressé depuis la dernière fois, soit c’était Derek qui commençait à vieillir.

-Le problème de ce genre de sport, c’est qu’à notre âge les courbatures restent longtemps !

Dites donc, il était divinement drôle ce soir… Heureusement que James avait deux verres dans le nez, il avait plus de chances de laisser passer de telles vannes sans les charrier sans pitié que dans un autre contexte.

-Enfin, pour en revenir à notre problème de politique extérieure… Comment ça se passe, en ce moment, avec Lindsay ? C’est un signe que ça s’apaise, qu’elle te laisse voir Gabriel ? Tu penses que vous pourrez passer un mariage à la même table sans que ça tourne en pugilat ou en crise de larmes ?

Parce qu’il fallait être sincère, on chialait pendant un divorce, même lorsqu’il se décidait d’un plus ou moins commun accord.

Il n’y avait plus qu’à espérer que l’alcool suffirait à apaiser la situation. Cela permettrait soit de mettre tout le monde d’accord, soit de délier les langues et de provoquer un scandale par manque de retenue. C’était à double tranchant.

Sans doute une expression moldue héritée de Garance, ça.

Comme si c’était le moment de penser à Garance… C’était de Lindsay et James qu’il s’agissait. Lindsay, James et tout le petit monde qui gravitait autour d’eux et avait été influencé dans un sens ou dans l’autre par leur divorce. Derek se demanda si il était plus sage, dans pareille situation, de rester lucide ou de se mettre une biture pour oublier avec qui on passait la soirée…

Retrouvailles entre amis

J

ames haussa les épaules. Il n'avait pas la moindre idée de la manière dont les choses allaient se passer au mariage d'Elros concernant Lindsay. C'est vrai, ils avaient réussi à avoir une conversation plus ou moins civilisée tous les deux, mais ce n'est pas pour autant que la rancœur et ce qu'elle gardait de colère envers lui s'était miraculeusement évaporé. Le tout pourrait bien être exacerbé ou pondéré par leurs connaissances communes. Difficile à dire. Assister à ce mariage serait difficile pour Lindsay dans tous les cas, qu'il doive lui rappeler l'échec de leur union où son second mariage fauché à son début dans les plus injustes circonstances... Il fallait espérait que tout aille bien, mais le libraire ne pariait pas dessus, effectivement. Alors pour ce qui était du malaise que suggérait Derek, James voulait bien croire qu'il serait malheureusement au rendez-vous, qu'ils le veuillent ou non.

-Franchement, j'en sais rien. Je dirais que ça va quand même nettement mieux. Si le mariage avait été y a un an, ça aurait été l'enfer, là... on va pas se sauter dans les bras mais j'imagine qu'on devrait réussir à agir en adultes responsable.

Beaucoup trop de paroles prononcées, avec un débit beaucoup trop rapide. Quand l'alcool faisait son effet sur James, avant le moment de s'effondrer où de régurgiter toute la boisson avalée, il avait effectivement tendance à parler beaucoup trop, beaucoup plus qu'en temps normal (ce qui n'était pas vraiment difficile, car James n'était franchement pas un grand bavard, quand bien même il savait l'être davantage avec ses amis, heureusement). Un flux de mots incontrôlable qui, quand on avait de la chance, avaient du sens, comme maintenant, même s'ils restaient prononcées comme si James s'engageait dans une sorte de course contre la montre absurde, qu'il ne pourrait remporter que contre lui-même.

-Elle me manque, tu sais. Voilà, on en arrivait au moment où il commençait à en dire trop. Et encore, au moins, tout bourré qu'il était, il n'avait au moins par remplacé ce "Elle" par un "Il" qui l'aurait aussi vite compromis. Car c'était bien Lindsay qui lui manquait. Mais ce n'était pas elle qui lui manquait le plus. Je regrette pas du tout d'avoir divorcé, on était pas faits pour être ensemble. Mais avant, on passait tout notre temps ensemble, et ça depuis Poudlard. On se disait tout. C'était ma meilleure amie... Et on est passé de tout à rien, comme ça, avec le pauvre Gabriel au milieu...

Il fallait vraiment, vraiment, qu'on le fasse taire. Quand il était sur sa lancée, ce n'est pas seulement qu'il parlait trop et trop vite, mais qu'il avait tendance à s'épancher comme il n'était pas forcément nécessaire qu'il le fasse. Même si Derek pouvait être bien placé pour le comprendre.

code by Mandy

-Oh, je ne demande pas à ce que tu lui sautes dans les bras ! Tant que le mariage se déroule bien… On réussira à passer un bon moment, on va bien se marrer même. Et puis, on trouvera bien l’occasion d’embêter un peu Elros !

Derek n’était pas tout à fait sûr que le mariage se passerait aussi bien que ça, mais il était résolu à tout faire dans ce but. Et puis, son ami était assez soucieux, il n’avait pas besoin d’en rajouter une couche.

Le débit de parole de James augmentait. Il commençait à être pompette, on y était. Derek l’écouta en silence débiter des paroles qui se firent tout à coup plus graves. Lindsay lui manquait… rien d’étonnant à cela, d’autant plus qu’ils étaient en effet très proches avant d’entamer une relation amoureuse. Derek ignorait dans quelle mesure les confidences de son ami était facilitées par l’alcool, mais il était certain d’une chose : si le libraire se confiait, c’est qu’il en avait besoin. Aussi, Derek n’envisagea pas un seul instant de l’interrompre ou de changer de sujet. Il attendrait que James ait dit ce qu’il avait à dire.

Garance lui manquait, à lui aussi. Et pourtant, ils n’avaient pas été amis avant leur union -ils s’entendaient bien, mais ils avaient été mariés avant d’être amis. Derek ne pouvait qu’imaginer quelle double peine cela devait être de perdre celle qu’on aimait en plus de perdre une bonne amie.

Gabriel…. La situation du gosse avait de quoi faire pitié, elle aussi. Le briseur de sorts se sentait parfois révolté en y pensant. Pauvre môme victime du divorce de ses parents avant même sa naissance, incapable ensuite de voir son père dans les premiers mois de sa vie. C’était assez fou, quand on y pensait. Karen connaissait James presque aussi bien que s’il avait été son oncle. Le libraire avait été là pour ses premiers pas, ses premiers accomplissements, il lui avait offert un cadeau pour son entrée à Poudlard. Karen demandait souvent de ses nouvelles lorsqu’elle rentrait pour les vacances, et elle le voyait de temps en temps. D’ailleurs, il faudrait qu’il demande à Elros si la jeune fille était conviée au mariage…

Derek, lui, n’avait jamais vu Gabriel. Bien entendu, il ne souffrait pas comme James, mais cela le dérangeait de ne pouvoir être pour Gabriel ce que James avait été et continuait d’être pour Karen. Il espérait pouvoir se rattraper d’ici quelques temps, lorsque son ami aurait finalement réussi à négocier une part plus égale dans l’éducation de sa progéniture. Derek ne se mêlait pas directement de cette querelle. James ne le voudrait pas.

En attendant que la situation évolue, le briseur de sorts allait écouter le flot de confidences qui se précipitait sur les lèvres de James. Ce dernier était de toute évidence d’humeur bavarde.

Retrouvailles entre amis

N

on, c'est sûr, James et Lindsay ne sauteraient certainement pas dans les bras l'un de l'autre, et c'était tant mieux d'ailleurs, car si ça devait être le cas, ce serait franchement gênant. Pour tout le monde et pour eux-mêmes, au passage. Essayer d'être un minimum civilisé serait déjà pas mal. D'autant plus que Gabriel serait peut-être présent lui aussi ? En fait, James n'en savait rien, il n'avait pas posé la question, ni à Elros, ni à Lindsay. Dans tous les cas, ils se devaient de faire honneur à Eros et à sa future épouse, ce n'était pas eux qui devaient être au centre de l'attention, et James se doutait que Lindsay devait autant que lui vouloir que leur ami commun passe le meilleur moment possible, sans que leurs petits drames personnels n'entrent en ligne de compte. Enfin, il y avait encore du temps dans tous les cas. Quand James faisait l'état des lieux de tout ce qui s'était produit entre le moment où son ami lui avait annoncé ses fiançailles et ce jour, il préférait ne pas s'avancer sur quoi que ce soit. Il devinait que ce serait certainement une mauvaise idée quoi qu'il en soit. Déjà, s'il réussissait à être ne serait-ce qu'un peu joyeux et heureux de sa situation d'ici-là, ce serait déjà un excellent début.

Dans tous les cas, ce n'était pas là-dessus qu'il se concentrait puisque, à la place, James avait décidé, presque contre son gré, de se lancer dans un laïus à n'en plus finir, caractéristique de la forte consommation d'alcool qui avait été la sienne et dont les effets dévastateurs se découvraient en cet instant.

Si James avait encore la lucidité de le vouloir, James prierait intérieurement pour que Derek l'interrompe de peur de commencer à entrer dans des confidences trop dangereuses, ou bien de proférer des conneries plus grosses que lui. Mais Derek ne l'interrompait pas. Au contraire. Il le laissait parler, et parler, et parler. Que ce soit parce qu'il était réellement intéressé par ce qu'il avait à dire ou bien que lui-même soit dans un état second et ne soit plus en mesure de tenir une conversation. Dans tous les cas, le résultat était là. James était en plein monologue, comme sur le divan d'un psy, et il n'y avait personne pour l'arrêter tant qu'il était encore temps. Et donc, comme on ne l'arrêtait pas, il continuait, il continuait.

-Tu le verrais... Il est adorable, Gabriel. Mais il est tellement grand, maintenant. C'est bête, mais je crois que j'avais l'impression qu'il m'attendrait pour grandir, tu vois... Je sais que ça a pas de sens, mais au moment de le revoir, je m'attendais à revoir ce tout petit être qu'il était quand je l'ai pris dans mes bras la première fois. Mais maintenant, il commence à marcher, à essayer de s'exprimer, c'est... Il marqua une légère pause dont il profita pour boire une nouvelle gorgée, comme si ça pouvait être la chose à faire. Il ne m'a pas reconnu, il sait même pas qui je suis. C'est normal, forcément. Mais j'aurais voulu... je sais pas, qu'il comprenne tout de suite qui j'étais pour lui. Qu'il m'aime instantanément comme moi je l'aime. Il reposa son verre. Je lui en veux, pour ça, à Lindsay, alors que je devrais pas. Cette situation, c'est de ma faute. Tout le monde s'imagine que Lindsay a été trop cruelle avec moi, mais elle aurait pu l'être beaucoup plus mais tu vois, en vérité, elle est pas comme ça. Elle aurait pu me détruire, ruiner ma réputation, et elle l'a pas fait.

code by Mandy

Le cœur de Derek se serra en écoutant son ami. Ne pas être reconnu par son propre fils… Être incapable de rester à ses côtés pendant ses premiers mois… Ce devait être une torture. Oh, bien-sûr, Derek n’avait pas été le père le plus présent, en raison de son métier, mais il voyait régulièrement sa fille tout de même. Et puis, il avait choisi ce mode de vie et, même s’il s’en mordait parfois les doigts, il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même, tandis que James devait tout à la cruauté de Lindsay. Mais le trentenaire avait l’air de dire que Lindsay n’était pas la fautive… Cela agaça Derek. Comment pouvait-on proférer de telles insanités ? Voilà que James allait s’estimer responsable de son propre malheur, comme si quoi que ce soit pouvait justifier d’être coupé de son enfant ! Derek répliqua sans même attendre que James ait fini :

-Ne dis pas de bêtises ! Tu ne peux pas dire que tout est de ta faute. Dans un divorce, la responsabilité est partagée, mais rien ne justifie qu’elle t’empêche de voir Gabriel. Ne te cherche pas une part de responsabilité dans ce qui n’est qu’une injustice criante.

Cependant, alors même qu’il disputait son ami -pour le bien de celui-ci-, il tiqua. Sa voix et celle de James s’étaient entrecroisées un instant, puisqu’il lui avait coupé la parole, mais la dernière phrase du libraire se fraya un chemin jusqu’à son oreille. Lindsay aurait pu détruire James… mais ne l’avait pas fait ? Qu’aurait bien pu faire la jeune femme ? Bien entendu, ils avaient été mariés, alors elle connaissait sans doute des détails intimes sur James, mais qu’aurait-elle pu savoir susceptible de détruire le libraire ? Quel sombre secret cachait James, qui dépassait ce que chaque femme savait de son mari ?

Le rythme cardiaque de Derek accéléra soudainement -il s’aventurait manifestement sur un terrain glissant, et l’instinct du briseur de sorts lui soufflait que son ami s’apprêtait à lui dire quelque chose de particulièrement critique. L’adrénaline s’élança dans ses veines et Derek l’accueillit comme le tenancier d’un bar accueille une vieille habituée. Les effets de l’alcool furent instantanément dissipés et l’esprit de Derek se prépara -il savait bien qu’une fois le pic passé, la migraine le remplacerait, mais il aurait tout le temps de s’en soucier plus tard. Pour l’instant, il lui fallait redevenir silencieux à nouveau, car James avait quelque chose à dire, et ce quelque chose, Derek le sentait, allait requérir toute son attention.

Retrouvailles entre amis

O

n avait beau dire que, dans un divorce, les torts étaient partagés, James avait tout de même bien du mal à voir les choses ainsi. Il avait peut-être trop tendance à se jeter la pierre, mais en même temps, il avait conscience que Lindsay avait été une épouse exemplaire. Quand lui avait parfaitement déconné. Inévitablement déconné, en réalité, car il n'aurait pas pu faire autrement, en vérité. Il fallait que leur histoire touche à son terme, il le fallait car James avait menti à Lindsay en se mentant à lui-même. Mais la manière dont ça s'était passé... c'était moche, vraiment moche.

Alors oui, James endossait la presque-entière responsabilité de leur divorce. Ce n'était pas Lindsay qui avait trompé son époux, c'était lui qui avait trompé Lindsay. Ce n'était pas Lindsay qui lui avait menti tout le temps de leur relation sur ses préférences (quand bien même ça avait été un mensonge dont lui-même n'avait pas conscience). Ce n'était pas elle non plus qui avait pris la décision de divorcer alors que le couple venait à peine de découvrir qu'elle était enceinte. Alors oui, elle n'avait pas été irréprochable quand, par exemple, elle avait insisté pour qu'ils aient un enfant dans le seul but de le garder, et ce n'était pas une chose à faire. Mais comment il pourrait le lui reprocher alors que Gabriel était, avec Ethan, la plus belle chose qu'il ait jamais eue dans sa vie ? Ensuite, Lindsay avait été plus... violente, c'est vrai.

Mais il l'avait cherché. Non, vraiment, il avait beau retourner la situation dans tous les sens, il était responsable. Alors oui, tout lui semblait injuste. Mais il ne savait plus pour qui. En fait, il ne savait plus grand-chose à grand-chose. Il était beaucoup, beaucoup trop bourré pour ça... et ça risquait fort de lui porter préjudice et de lui exploser à la gueule s'il continuait comme ça. Sauf que c'était bien ça le problème. Même s'il ne le devait surtout pas, il continuait quand même. Comme le sombre abruti alcoolisé qu'il était. Quand on disait que l'abus d'alcool était dangereux pour la santé, ce n'était pas des blagues. Ce pourrait même être dangereux pour l'amitié.

-Ce qui est injuste, c'est qu'elle continue de s'en prendre plein la figure alors que c'est la femme la plus digne et la plus droite que je connaisse. Je la dégoûte maintenant, j'en suis sûr, mais quand elle a quand même accepté que je vois notre fils, alors qu'elle aurait tout à fait pu... le dire à tout le monde, apprendre ma déviance à tout le monde. Elle aurait pu nous foutre dans la merde jusqu'au cou, Ethan et moi, mais elle a rien fait...

Il eut un léger haut-le-coeur. Sa situation allait de mal en pis.

-Je me sens pas très bien...

code by Mandy

Lindsay, droite et digne, alors qu’elle séparait Gabriel de son père ? Mais cette fois-ci, Derek ne dit rien. Il comprenait maintenant qu’il avait manqué une information capitale, une pièce décisive du puzzle. Et qui était Ethan, d’abord ? James avait mentionné un collègue qui s’appelait Ethan, une fois ou deux, mais voilà tout… S’agissait-il du même Ethan ? Que s’était-il passé ? James et le fameux Ethan avaient-ils fait une connerie ? Un crime, peut-être ? Ou bien… L’idée surgit dans la tête du briseur de sorts, mais il la refoula lorsque James se plaignit de son état. Il se leva d’un bond et tira sa baguette, avant de l’agiter pour desserrer le col de la robe de son ami.

-Hé, respire vieux, t’es fin bourré, tout va bien, respire…

Voilà que le libraire allait lui claquer entre les pattes. Derek intima le silence à son propre estomac. Clairement, mélanger alcool et adrénaline avant de remuer le tout en se levant brusquement, c’était sa pire idée de la semaine. Il allait s’agir de tenir encore dix minutes. Le temps de s’assurer que James allait survivre à la nuit, et d’avoir le fin mot de l’histoire. Qu’avait-il pu se passer entre James et Ethan pour provoquer le divorce et les représailles de Lindsay ? Oh, il y avait bien une hypothèse… On n’en parlait pas souvent, mais tout le monde savait que ça arrivait. C’était même loin d’être un secret. Fallait-il le rappeler ? Derek était un homme observateur. Et James avait quelque chose à se reprocher, indéniablement, mais en même temps la façon dont il avait prononcé le prénom « Ethan »…

-Allez vieux, calme-toi.

Derek s’immobilisa derrière son ami, près à intervenir s’il fallait tout à coup entamer les gestes de premier secours. Certains clients les regardèrent bizarrement. Forcément, deux trentenaires bourrés, avec le plus costaud debout derrière le deuxième, comme s’il s’apprêtait à l’agresser, ça avait de quoi faire jaser. Le briseur de sorts sourit à une vieille sorcière qui le toisait par-dessus ses lunettes avant de s’accroupir à côté de son ami, de manière à être plus ou moins à sa hauteur tout en étant assez prêt pour le rattraper s’il devait tomber dans les pommes.

-Alors, il s’est passé quoi avec ce Ethan ? Il ménagea une pause avant d'achever : Vous avez eu une histoire, c’est ça ?

Il ne fallait pas prendre Derek Hayes pour un lapin de six semaines. Que personne n’en parle ne signifiait pas qu’il ignorait que certains hommes avaient des histoires avec d’autres hommes.

Retrouvailles entre amis

R

espirer. Oui. Il fallait qu'il respire. Encore fallait-il qu'il parvienne à contrôler son souffle. Il avait le sentiment de ne plus être maître de rien et encore moins de son propre corps. Il avait à peine conscience de ce qu'il faisait, de ce qu'il disait... Il avait l'impression de n'être plus qu'un pantin désarticulé, et que quelqu'un d'autre avait pris le contrôle de ses propos, de ses pensées et de ses actes. Prendre une grande inspiration, une grande expiration, lui ferait sans doute du bien. Encore fallait-il y parvenir convenablement. Oui, il était sérieusement bourré... il ne se rappelait pas la dernière cuite similaire qu'il avait prise. Il était déprimé et à jeun, ça n'avait sans doute as aidé, effectivement.

Alors qu'il essayait de se concentrer sur sa respiration, il avait peine à intégrer ce qui se passait autour de lui, ou encore ce que Derek lui disait. Il ne sembla revenir au moment réel qu'à l'instant où le nom d'Ethan fut prononcé. Ce fut comme un électrochoc. Il avait parlé d'Ethan ? Il avait vraiment fait ça ? Il n'avait plus la moindre idée de ce qu'il avait pu dire ou faire, entre ses pensées incohérentes et le flux de parole qui s'était échappé de ses lèvres... il ne faisait plus vraiment de distinction entre ce qu'il exprimait et ce qui était...

Ce "Vous avez eu une histoire"... s'il n'était pas aussi alcoolisé, ça aurait pu le dégriser direct. Cela eut au moins le mérite de le tirer au moins quelques secondes de son délire éthylique, alors qu'il sentait une vague d'angoisse le saisir des pieds jusqu'aux orteils. Il ne semblait pas y avoir vraiment de jugement dans la voix de Derek, mais comment savoir ? De tote évidence, il avait compris. Etait-ce pour autant qu'il était capable de l'expliquer, de l'exprimer ? Ethan n'était pas juste un homme avec qui il avait eu une histoire. Ethan était toute son histoire... Une histoire qui finissait mal, prévisiblement mal.

-J'ai... besoin de prendre l'air, décréta-t-il sans réussir à répondre à la question de son ami.

Il n'attendit pas la réponse de Derek, d'un pas rapide, il se précipita à l'extérieur du bar. Déjà, il était plus simple de respirer. Loin du tumulte, du brouhaha ambiant, de la musique. C'est au moment de lever les yeux vers le ciel sombre et chargé de cette nuit de décembre qu'il réalisa que les larmes lui étaient montées aux joues.

-Il vaut mieux que je rentre, je crois, dit-il sans même savoir si Derek l'avait rejoint ou s'il était juste en train de parler tout seul.

Qu'il s'en aille pour ne pas affronter la vérité. Qu'il parte pour ne pas voir le regard que Derek posait sur lui changer définitivement.

code by Mandy

[

-James, attend !

Mais James ne l‘écoutait plus. Le libraire se précipitait vers la sortie du bar sans prêter attention aux clients inquiétés par les derniers rebondissements.

-Pardon madame, pardon monsieur… Rassurez-vous, c’est rien de grave, mon ami est juste malade… pardon…

Les quelques secondes que le briseur de sorts mit à se frayer un chemin vers la sortie lui parurent durer beaucoup plus longtemps. James était sorti comme un bolide, et Derek devait le rattraper avant que son ami n’ait le temps de transplaner. Les deux hommes avaient à parler. En plus, dans son état, le libraire risquait de se désartibuler bêtement, et alors qui, sinon Derek, pourrait lui porter secours à cette heure-ci ?

-Eh, si vous sortez, vous payez.

C’était bien le moment ! On n’avait plus le droit de prendre l’air deux minutes ? James le rembourserait plus tard, Derek donna de mauvaise grâce son argent au serveur. Et étouffe-toi avec !

Il n’avait plus l’esprit clair, il était trop inquiet pour son ami. Il sortit sans même répondre au « au revoir » pincé du barman, manifestement ravi de voir les deux énergumènes quitter son établissement.

Dommage, l’ambiance était sympa, mais je pense qu’il faudra trouver un autre coin pour la prochaine fois.

Derek déboucha finalement dehors. Il resserra les pans de sa cape, qu’il avait pris le temps d’emporter en sortant. Il avait aussi pris celle de James : l’inconscient allait mourir de froid avant d’avoir pu dire « Hibou », si Derek ne lui rendait pas son vêtement. L’empressement de Derek tomba net en voyant son ami, dos à lui, le visage manifestement tourné vers le ciel. Le briseur de sorts adopta un pas plus lent pour s’approcher de James. A partir de maintenant, il marchait sur des œufs d’acromentule. Il allait falloir calculer chaque mots, avancer précautionneusement, comme un félin approchant sa proie, pour retenir James le temps de parler. La tâche aurait été aisée pour un Moldu, mais l’ami de Derek pouvait disparaître en moins de temps qu’il n’en faut pour claquer des doigts, et le trentenaire sentait que s’il laissait James lui échapper cette fois, il aurait du mal à le rattraper.

-Tu ne veux pas rester encore cinq minutes ? On devrait parler un moment. Après, je te raccompagnerai chez toi. Il vaut mieux que tu ne rentres pas tout seul dans cet état.

Retrouvailles entre amis

L

a voix de Derek rappela James à la réalité. Il tourna vers lui un regard humide et alcoolisé. Il n'avait pas la moindre idée de ce qu'il foutait là. Ou de ce qu'il foutait tout court. Il était... ailleurs. Ce qu'il savait, en revanche, c'est qu'il fallait définitivement qu'il rentre chez lui... enfin, chez lui, dans la chambre d'hôtel qu'il occupait pour le moment faute de mieux. Il fallait qu'il décuve. Et le lendemain, il se lèverait avec une bonne gueule de bois et la honte au cœur. Il ne savait même pas comment il parviendrait à regarder Derek dans les yeux la prochaine fois qu'ils se verraient. Alors pour ce qui était de travailler sur un projet en commun, n'en parlons même pas.

Il fallait qu'il rentre, oui, mais une chance pour Derek, sans doute, il n'avait pas l'intention de transplaner... il n'était même plus sûr de savoir comment il fallait faire. Et puis... déjà qu'il avait sérieusement la nausée, il n'osait pas imaginer ce que cela donnerait s'il devait s'amuser à ajouter du transplanage par-dessus. Rien de bon, certainement. Il n'habitait pas si loin, marcher ne lui ferait clairement pas de mal, encore moins si cela pouvait lui permettre de dessaouler ne serait-ce qu'un peu. Mais seul, ce serait sans doute préférable. Sauf que Derek n'avait pas l'intention de le laisser partir comme ça. Compréhensible. Si la situation était inversé, jamais James ne laisserait Derek dans l'état où il se trouvait. Même si James avait bien du mal à analyser à quoi il ressemblait en cet instant, à mesurer l'étendue exacte des dégâts.

James se tourna vers James en essuyant ses joues d'un rapide revers de manche. Il s'en voulait terriblement de s'être donné en spectacle comme ça, et il savait que ça pourrait être pire s'il laissait Derek le raccompagner. Pourtant, il n'avait pas la force de protester, surtout si Derek devait insister de nouveau, ce qu'il ferait sans doute au vu des circonstances. Il finit par hocher doucement la tête.

-Je suis désolé... J'ai complètement gâché la soirée, observa-t-il, dépit.

Qu'il se plaigne de son état et rentre dans sa phase "je m'excuse à tout-va" - phase qu'il pouvait avoir même en étant sobre, au demeurant, c'était sûrement bon signe, à vrai dire. Parce que ça voulait dire qu'il avait au moins la lucidité de comprendre un minimum l'état dans lequel il se trouvait. Bon, ce n'était pas assez, pas du tout même, mais c'était déjà ça, malgré tout. En attendant, il essayait aussi de noyer le poisson. Il n'était pas sûr de vouloir "parler", justement. Il aimerait pouvoir effacer les mots qu'il avait prononcés. Il y avait bien des choses, pour tout dire, qu'il voudrait effacer.

code by Mandy

-Ne t’excuse pas, vieux. T’as pas gâché la soirée.

Derek s’approcha prudemment, comme on s’approche d’un animal blessé et, une fois sûr que James n’allait pas lui filer entre les doigts, posa son bras sur les épaules de son ami.

-C’est un peu ma faute, aussi ; je n’aurais pas dû commencer sur les Pur Feu sans échauffement !

Derek connaissait bien James et sa tendance à s’excuser même lorsque cela n’était pas nécessaire. Il savait bien, pourtant, qu’en dehors de Karen, la priorité de Derek était ses amis ! Alors qu’on puisse penser qu’il ait été agacé de passer du temps avec l’un d’eux, même dans un si piteux état… ça aurait pu être insultant s’il ne s’était agi de James.

Le libraire ivre n’était manifestement pas disposé à parler ; à vrai dire, il avait même l’air parti pour fuir la conversation. Derek n’était pas du genre invasif… en règle générale. Mais cette affaire était de toute évidence sérieuse. Maintenant qu’il avait eu quelques instants pour digérer l’info, elle ne lui paraissait plus si catastrophique que ça. Après tout, James était et resterait son ami et le briseur de sorts se devait, par amitié, d’accepter la différence de son ami. Après tout, ça ne pouvait pas être si problématique que cela… ce n’était pas comme si le trentenaire était le seul à avoir déjà eu une aventure avec un homme. On entendait régulièrement parler d’histoires de la sorte. Il allait falloir apprendre à dépasser ses préjugés sans blesser James, pour sauvegarder une amitié que Derek n’aurait abandonnée pour rien au monde. Si Derek avait été bagarreur à Poudlard, il s’était rangé en grandissant, mais James était sans doute l’une des personnes pour qui Derek serait capable de chercher les ennuis, si la situation l’exigeait. Par exemple, si un sorcier mal intentionné avait l’idée de profiter de la situation pour les détrousser… D’ailleurs, ils feraient mieux de se diriger vers le logement de James. Ce serait plus sûr.

-Viens, mon pote, on va bouger, reprit-il sans lâcher son ami. Tu te souviens où t’habites, au moins ? Je vais te raccompagner, et on va causer tranquillement, à notre rythme.

Il paraissait mal avisé de se presser dans une telle situation. Il faudrait veiller à ne pas blesser James, qui avait dû faire preuve d’un courage exemplaire pour se confier ainsi à son ami. Ils avaient le trajet de retour pour parler et puis, quelle que soit l’issue de la soirée, Derek comptait bien se présenter le lendemain chez Fleury et Bott pour prendre son premier cours de littérature.

Retrouvailles entre amis

D

erek avait beau dire, James était tout de même assez convaincu du fait que la soirée était totalement ruiné, et qu'il devait être clairement tenu pour responsable de cela. Ce n'était pas ce qu'il avait voulu, mais de toute évidence, il avait présumé de ses dispositions physiques et mentales. Bien sûr, quand son ami et lui discutaient allègrement du projet fou d'écrire un livre ensemble, il réussissait à se sentir bien et à oublier Ethan et tous les problèmes qui lui traversaient l'esprit.

Mais avec quelques verre dans le nez, voilà que le naturel et les vraies préoccupations avaient pris le dessus. Et James n'avait vraiment pas voulu ça. Il avait espéré passer une soirée sereine avec son ami, sans rien pour la gâcher, et voilà où ils en étaient à présent. Oui, cette soirée était ruinée. Elle prenait fin par sa faute, et James se sentait au bout de sa vie, prêt à vomir tripes et boyaux et à pleurer toutes les larmes de son corps.

-Y a... pas grand-chose à dire..., répondit James un peu maladroitement.

C'était stupide de faire l'autruche maintenant alors que Derek lui avait clairement fait comprendre qu'il n'était pas dupe et avait compris la situation dans son intégralité, mais tant que le sujet ne serait pas abordé frontalement, James arrivait encore à s'imaginer être capable de faire tout simplement abstraction... C'était con. Après tout, la réaction de Derek n'avait pas semblé même ne serait-ce qu'un peu dégoutée. Possible qu'il soit tout à fait capable de comprendre, et même de compatir. Mais il avait déjà vu comment le regard des quelques-uns dans la confidence avaient changé sur lui. Et il n'avait pas la moindre envie de voir la même chose se produire avec son ami.

-J'... j'ai une chambre dans un hôtel, pas loin d'Hyde Park.

Ou comment faire comprendre sans subtilité et sans complètement le réaliser que James avait touché le fond. Au point même de ne plus avoir de chez-lui où vivre. Il s'en rendait bien compte, sa vie partait dans toutes les directions...

Raison de plus pour compter sur la bienveillance d'un ami, évidemment. Encore fallait-il qu'il sache admettre à quel point il en avait effectivement besoin. Ce qui n'était pas complètement gagné, on peut le dire. Même bourré comme un coing et l'esprit absolument pas net, il continuait de s'inquiéter du regard des autres, et surtout de ceux qu'il aimait, sur lui, sur ses désirs et sur ses choix. Et c'en devenait invivable.

code by Mandy

Le cœur de Derek se serra en entendant James bafouiller son adresse. Et en même temps, il s’en voulut un peu. Son ami n’avait même plus de chez-lui : comment pouvait-il ne même pas être au courant ? Qu’il était difficile de suivre la vie des autres, lorsqu’on passait la moitié de son temps au bas mot loin de chez soi. Au moins ce mode de vie avait-il permis à Derek de faire le tri. Envolées, les amitiés de façade et les relations cordiales avec ses anciens camarades de Poudlard. Seuls ceux qui tenaient vraiment à lui, au point de faire les efforts nécessaires pour rester en contact, étaient restés dans sa vie.

Quelle ironie… Ses amis proches étaient restés, tandis que la mère de sa fille avait fini par partir avec les relations superficielles… Mais bien-sûr, Derek avait du mal à en vouloir à Garance -à vrai dire, la source de ses ennuis étaient plutôt à chercher du côté du monstre d’incompétence qui avait prononcé le divorce. C’était vrai, un homme avait des devoirs vis-à-vis de sa famille. Et si, en travaillant dur pour atteindre un poste et gagner un salaire tout à fait correct, il pensait avoir assuré son rôle de chef de famille, il craignait d’avoir négligé ceux d’époux et de père.

Reste à assurer en tant qu’ami.

Il n’y avait pas grand-chose à dire, hein ? C’est ce qu’on verrait.

-Je n’ai pas le cœur à te laisser seul maintenant, mon pote. Alors je vais te raccompagner chez toi, et après je te laisserai tranquille. Mais t’as pas intérêt à refuser mon aide, sinon je t’assure que je vais jamais te foutre la paix, vu ? J’ai plein de temps à passer devant la vitrine de Fleury&Bott ces prochains jours, t’as intérêt à la jouer réglo, ajouta-t-il d’un ton qui se voulait ferme mais trahissait une réelle bienveillance.

Il parlait tout en continuant à soutenir James. Maintenant qu’il savait où il devait se rendre, il pouvait guider son ami -ce qui leur faisait gagner du temps, il s’en rendait déjà compte.

Mine de rien, le libraire n’était pas le seul à avoir bu. Bien-sûr, Derek était plus résistant, d’autant que la décharge d’adrénaline que les frasques de James lui avaient value avait dissipé les brumes de son esprit, mais le briseur de sorts n’en demeurait pas moins alcoolisé -un fait que son début de migraine se chargeait de lui rappeler sans scrupules.

Plus qu’à espérer que James arrête de tourner autour du pot.

Retrouvailles entre amis

D

erek lui confirma qu'il n'avait pas l'intention de le laisser seul, du moins pas tant que James ne serait pas rentré chez lui - en un seul morceau si possible. Au fond, et malgré les circonstances, les propos de son ami le rassuraient, d'une part parce qu'il ne prenait pas la fuite en dépit de ce qu'il semblait avoir deviné à son sujet, d'autre part parce qu'en vérité, il ne se serait pas senti la force de rentrer chez lui seul. Déjà, s'il ne se paumait pas en chemin, ce serait un exploit. L'air frais de cette nuit de décembre lui remettait doucement les idées en place, certes, mais la sensation de nausée et de vertige était loin de l'avoir abandonné pour autant. Et donc, clairement... James avait besoin de Derek, même si les circonstances le poussaient en partie à vouloir le fuir à toutes jambes.

James esquissa un léger sourire. Il n'avait pas l'intention de débattre avec Derek, dans tous les cas, s'il l'avait voulu, il était assez évident que ce serait un combat perdu d'avance. Autant admettre d'office sa défaite... Même si cela devait peut-être également le pousser tacitement à admettre d'autres choses, qu'il s'obstinait à garder sous silence alors que la boîte de Pandore avait manifestement été ouverte, et qu'il serait certainement impossible de la refermer de sitôt.

Pendant un temps, James fit tout de même le choix de jouer les rois du silence et de ne rien dire du tout tandis qu'ils progressaient en zigzaguant le moins possible (mission extrêmement difficile pour James) jusqu'à Hyde Park, mais au bout d'un moment, le silence devenait encore plus pesant que des aveux. Ce n'était pas en ignorant un problème qu'il finissait par disparaître, et James était bien placé pour le savoir. Il avait refoulé sa sexualité et ses véritables inclinations presque toute sa vie, n'empêche qu'elles avaient fini par faire surface, et même si ce n'était pas comparable, cette situation révélait quelque chose de similaire.

Ce n'était pas en tournant autour du pot ou en feignant l'ignorance que James retirerait ce qu'il avait dit, et il voyait mal comment il pourrait noyer le poisson encore longtemps. Cela ne ferait que rendre leurs prochains échanges terriblement gênants, gênants parce que James lui-même serait bien trop gêné pour se comporter comme un individu normalement constitué... Après un soupir profond, comme surgi de nulle part, il rompit donc le silence.

-Je... je te dégoûte pas... ? suggéra-t-il sans franchement de détour.

code by Mandy

Le silence prolongé de James mit à rude épreuve les nerfs déjà bien éprouvés du briseur de sorts, et Derek passa inconsciemment en mode pilote automatique le temps d’atteindre Hyde Park. Un moment, il ne parvint à penser à rien d’autre qu’à son corps : son bras qui soutenait James (ou s’appuyait sur lui, comment savoir), ses pieds qu’il s’agissait de poser l’un devant l’autre et pas trop vite si possible.

Lorsqu’ils étaient sur le point d’atteindre Hyde Park, James rompit finalement le silence, tirant Derek brusquement de sa transe temporaire. Et la phrase de James était tellement inattendue, tellement abrupte, tellement brutale qu’il fallut un instant à Derek pour atterrir correctement.

-Hein ?

Bon, il allait falloir être plus réactif que ça.

-Qu’est-ce que tu racontes, vieux ? Pourquoi tu me dégouterais ?

C’était un peu hypocrite, comme question. Bien-sûr qu’il savait pourquoi James pensait ça. Pour beaucoup de gens, les semi-aveux de James auraient suffi à en faire un individu répugnant. Mais ces gens pensaient avec la tradition, avec l’éducation, avec les règles écrites. Or -fallait-il le rappeler ? Le briseur ne sorts n’aimait pas les livres. Il pensait avec ses impulsions, avec son sang mêlé qui bouillonnait à l’idée que son ami puisse avoir une si basse opinion de lui-même qu’il craignait d’être méprisé par ses proches.

Mais après tout, il n’y avait pas de fumée sans feu, n’est-ce pas ? Le cœur de Derek se serra en songeant que, si James redoutait tant que cela sa réaction, cela signifiait probablement qu’il avait été confronté au mépris ou au dégoût de certains de ses proches lorsque ceux-ci avaient appris ses inclinations particulières.

Dont Lindsay, sans doute.

Tout s’expliquait. Sans doute Lindsay avait-elle été l’une des premières à découvrir le pot-aux-roses. Et si Derek ne voyait pas en quoi cette découverte devait influencer leur amitié, il comprenait un peu mieux le souci que cela pouvait poser dans le cadre conjugal.

Bien-sûr, il fallait dire que Derek jouissait d’une ouverture d’esprit légèrement supérieure à l’essentiel de ses contemporains. Lorsqu’on avait été marié à une Née-Moldue avant de divorcer sans ressentir le besoin de retrouver quelqu’un, tout cela en travaillant avec des Prewett et des Carrow… On finissait par se détacher un peu des apparences et des conventions. A vrai dire, Derek les envoyait se faire foutre, tous ces Sang-Purs et leurs apparences ridicules. Il était obligé de vivre avec, mais il n’avait pas perdu le dégoût profond de cette hypocrisie qui l’avait poussé, à l’école, à se battre au mépris des maléfices, coups de poing et heures de colle avec des petits Yaxley et des Prewett -décidément une sale engeance, ceux-là.

-Tu ne me dégoûtes pas. C’est un truc qu’il faut que tu gardes en tête. Tu ferais peut-être mieux de t’asseoir.

Il s’interrompit pour inviter son ami à s’installer sur les marches d’un perron, maintenant qu’ils étaient à Hyde Park.

-Je te cache pas que je m’y attendais pas, reprit le briseur de sorts. J’ai jamais connu quelqu’un qui… Enfin, un homme qui aime les hommes, quoi.

Il était un peu maladroit, mais il était décidé à la jouer réglo à son tour, et ça impliquait d’assumer sa méconnaissance totale du sujet.

-Donc ouais, je vais pas mentir, c’est surprenant et ça fait un peu bizarre. Mais hé, conclut-il en ponctuant sa phrase d’une claque amicale sur l’épaule de son ami, j’imagine que ça date pas d’hier. Alors t’es mon bon vieux James même comme ça, j’étais juste pas au courant avant, me l’avouer maintenant ne change pas ta personnalité, que je sache !

Retrouvailles entre amis

P

ourquoi est-ce qu'il le dégoûterait ? C'était presque insultant de l'entendre, comme si James était un idiot à chercher à préserver son secret à tout prix, comme si ce monde était suffisamment tolérant pour accueillir ses inclinations à bras ouverts, comme si ces dernières n'expliquaient pas l'horreur dans le regard de Lindsay quand elle avait compris, les lettres anonymes, le départ du seul homme qu'il avait jamais aimé, et tous ceux qu'on avait envoyés à la mort pour le simple fait d'aimer quelqu'un du même sexe. Si vraiment, Derek n'était pas dégoûté par lui, au fond, James serait heureux, vraiment, et soulagé, mais il se sentait... comme pris en faute, comme s'il faisait tout un plat de rien du tout, alors que ce n'était pas rien du tout, au contraire, ça avait tout bouleversé dans sa vie, plus qu'il ne l'aurait imaginé possible.

James s'exécuta de bonne grâce quand Derek suggéra de s'asseoir un peu. Ça ne lui ferait pas de mal, effectivement. Bon, cesser de marcher lui rappelait combien sa tête lui tournait, mais malgré tout, ça lui faisait du bien de se poser un peu, même s'il n'était plus très loin de chez lui, à présent. Enfin, "chez lui"... ce qui s'en rapprochait le plus à l'heure actuelle.

Derek ne s'y attendait pas, James pouvait le comprendre, lui-même ne s'y était pas vraiment attendu, pour être honnête. Il avait si longtemps refoulé sa sexualité qu'il n'en avait réellement pris conscience que récemment. En revanche, quand Derek affirmait qu'il ne connaissait aucun homme qui aimait les hommes... James songeait qu'il pourrait bien être surpris. Quand on y regardait d'un peu plus près, on découvrait des présumés déviants dans des strates tout à fait inattendues de la société. C'était surprenant, ça lui faisait bizarre... ça, James était tout à fait capable de l'entendre, il estimait même que c'était normal, à vrai dire. Il se serait posé des questions dans le cas contraire. Mais il ne semblait pas révulsé, ou encore inquiet de voir tout à coup James lui sauter dessus sous prétexte qu'il appartenait au sexe qui l'attirait.

Il ne répondit rien quand Derek ajouta que ça ne datait sans doute pas d'hier. Tout dépendait... C'était sans doute là depuis sa naissance mais... pour le reste... Enfin, du moment que le comportement de son ami ne changeait pas à son adresse, alors soit.

-Ouais... Tout le monde a pas la même réaction que toi, tu sais. Même moi, j'aurais pas eu la même réaction que toi, avant. James était même assez convaincu qu'il aurait bêtement fui Derek à l'époque plutôt que de voir la vérité en face, comme un bon gros crétin. Mais... il lui adressa un sourire. Il se rendait bien compte qu'il lui témoignait bien mal sa gratitude en cet instant précis. Merci beaucoup... ça me touche que tu réagisses comme ça.

code by Mandy

Derek resta silencieux le temps que James parvienne à s’assoir avec quelques difficultés. Le libraire était manifestement aux prises avec de bien sombres pensées, et le briseur de sorts jugea plus sage de le laisser tranquille le temps qu’il parvienne à mettre de l’ordre dans son cœur et son esprit. Après tout, la situation était suffisamment compliquée comme ça et, si Derek ne voyait pas pourquoi il devrait tout à coup trouver son ami répugnant, il paraissait évident que ces confidences avaient nécessité de la part du trentenaire d’importantes ressources de courage. Il était bien naturel que James ait maintenant besoin d’un moment pour reprendre ses esprits.

James n’ajouta rien non plus à la dernière remarque du briseur de sorts et celui-ci craignit un instant d’avoir blessé son ami. Peut-être était-il maladroit ? Comment savoir ? Derek n’avait jamais été confronté à un tel aveu jusqu’ici, et il ne s’était pas franchement préparé à cela en arrivant sur le chemin de traverse il y a quelques heures -le temps était d’ailleurs passé étonnamment vite, quand il y repensait. C’était l’avantage de le passer avec un bon ami : le temps ne s’attardait pas. Sauf depuis quelques instants, que le silence pesant de James faisait paraître beaucoup plus longs.

Le briseur de sorts retint de justesse un soupir. Pas qu’il soit agacé du comportement de son ami ; mais la soirée commençait définitivement à être longue, en plus d’avoir été mouvementée, et le briseur de sorts aspirait chaque seconde un peu plus à retrouver son lit.

Derek adressa un sourire sincère à son ami lorsque celui-ci objecta que tout le monde ne réagissait pas forcément bien. C’était sans doute vrai, et avec le recul il réalisa que sa réaction n’avait pas dû paraître si évidente que ça à James. Quelle vaste connerie… Bien entendu, il serait plus qu’étrange de voir un homme en épouser un autre, mais l’existence de ce genre de passions n’était un secret pour personne, alors pourquoi s’en montrer choqué, tant qu’elles ne sortaient pas de la sphère du privé ? L’hypocrisie, l’hypocrisie encore et toujours. La même qui obligeait les Sang-Pur à mépriser les Sang-Mêlé, et qui obligeait les Sang-Pur à mépriser le divorce et l’union avec les nés-Moldus quand bien même plus d’un serait prêt à vendre père et mère pour un tel péché.

Touché à son tour par les remerciements de son ami, le briseur de sorts posa une main amicale sur l’épaule de ce dernier :

-Entre vieux frères, on se serre les coudes, non ?

Maintenant, une question se pressait sur les lèvres de Derek : qui était cet Ethan ?

Retrouvailles entre amis

J

ames adressa un sourire à Derek. Il ne savait vraiment pas ce qu'il avait fait pour mériter un ami tel que lui, et les mots lui manquaient pour exprimer sa reconnaissance. Si Derek avait décidé de le fuir, de le juger, ou de lui poser cette foule de questions embarrassantes qui accompagnent les situations qu'on ne comprend pas forcément, et auxquelles le libraire n'aurait pas eu la force de lui répondre, James n'aurait pas été franchement ravi, mais il n'aurait pas blâmé Derek. Mais cette situation lui prouvait combien Derek était un ami fiable, attentif, digne de confiance et combien il était chanceux de l'avoir.

Maintenant, puisque Derek savait déjà une partie de la vérité, ce ne serait sans doute pas plus mal de jouer le jeu des confidences. Avec le malaise qu'il avait jeté précédemment. Mais à l'heure actuelle, et même s'il était décidé à le faire plus tard, il ne se sentait définitivement pas la force ou le courage d'apprendre à Derek toute l'histoire. Il lui parlerait d'Ethan, de leur histoire, de son rôle dans son divorce avec Lindsay, de leur séparation... à ce stade, il n'avait pas franchement de raisons de se taire encore et parler lui ferait certainement du bien. Mais il lui en parlerait plus tard. Là, pour le moment, il n'en ressentait ni la force ni l'énergie. Il n'avait d'ailleurs plus la force et l'énergie de grand-chose, pour tout dire. Il avait juste envie de rentrer chez lui, de s'effondrer sur son lit, et de s'abandonner au sommeil, même si, en dépit de son état, il doutait fort que Morphée lui offre ses bras aussi vite qu'il le voudrait. Le lendemain aurait de bonnes chances d'être compliqué, entre la gueule de bois et le rappel douloureux de ce qu'il avait fait. Mais... cette nuit était déjà suffisamment compliquée, pas la peine de penser au lendemain en plus du reste, ce n'était vraiment pas nécessaire.

James laissa passer un moment de silence qu'il ne chercha pas à rompre, quand bien même c'était sans doute ce que Derek attendait de lui. Il lui dirait tout. Mais pas maintenant, pas cette nuit. Cette nuit avait été suffisamment mouvementée comme ça, au point qu'il ne savait même pas ce qu'il allait advenir de leurs projets de début de soirée. James espérait vraiment que la sympathie et la tolérance de Derek n'étaient pas qu'un écran de fumée qui finirait inévitablement par s'estomper.

-Je vais rentrer, dit-il finalement le jeune homme en se relevant. Mon hôtel est juste là, lui apprit-il en pointant du doigt un bâtiment à quelques mètres, qui effectivement était bel et bien son hôtel. On reparlera de tout ça... sobres, d'accord ?

Oui, c'était préférable, mais dans tous les cas, il lui promettait qu'ils n'enterreraient pas ce sujet sous le sable. Maintenant n'était juste pas le bon moment.

code by Mandy

Derek attendit patiemment que James se décide à rompre le silence. Quand il le fit, ce n’était malheureusement pas pour tout lui expliquer, mais pour prendre congé. Encore que, malheureusement, c’était vite dit… Derek aussi commençait à sérieusement fatiguer. Il allait sans doute prendre le risque de transplaner directement dans sa chambre. Ce n’était pas plus mal, finalement, que Karen soit absente… Encore qu’il n’aurait sans doute pas bu autant s’il avait eu la responsabilité de sa fille. Ce n’était ni l’heure ni le moment de se pencher sur toutes les raisons qui l'avaient poussé à boire plus que de raison ce soir, mais il lui faudrait se poser les bonnes questions à l'avenir.

Il leva la tête vers le bâtiment désigné par James. Il espérait que la chambre de son ami était assez confortable et sécurisée, surtout vu l’état du libraire… Mais James avait raison. Rien ne pressait, ils auraient tout le temps de se revoir et de parler de tout ça -si possible, autour d’un jus de citrouille, cette fois. Il semblait au briseur de sorts que sa tête allait exploser si on y ajoutait une seule information, et il était convaincu qu’il pourrait encore avoir l’utilité de son encéphale dans les années à venir.

Derek se demanda ce qu’il allait advenir de leur projet de recueil de nouvelles. Aussi mouvementée que la soirée ait été, il trouvait toujours l’idée formidablement plaisante, d’autant que ce n’était pas le moment de renoncer à leurs projets ensemble, alors même que leur relation semblait avoir été frôlé la catastrophe avec les révélations de James. Il profita alors de sa réponse pour y glisser une allusion, histoire de faire comprendre à James qu’il n’abandonnait pas le projet :

-Repose-toi bien vieux, prend soin de toi. On trouvera sans souci l’occasion de poursuivre cette discussion. Ecoute, je ne te promets pas de me pointer à l’ouverture chez Fleury & Bott, mais je passerai une fois que j’aurai réussi à me lever… En espérant que tu aies réussi aussi ! s’amusa le briseur de sorts, frappé par un soudain éclair de lucidité sur leur état déplorable.

Il tendit ensuite la main à son ami pour l’aider à se relever. Dès que James serait rentré dans le bâtiment, Derek pourrait transplaner directement dans son lit en espérant ne pas se désartibuler au passage sous l’effet de l’alcool.

Contenu sponsorisé

» Dîner entre amis? (Paige & James)
» Retrouvailles entre frère et soeur
» Des retrouvailles entre anciens élèves. Feat Rubeus
» Un verre entre amis (pv Abraxas)
» Une confrontation entre amis..... Ennemis? [PV Manfred]

Retrouvailles entre amis [pv : James]

Retrouvailles entre amis [pv : James]

Sujets similaires

Sujets similaires