Il était plutôt fier de son entrée en scène le Manfred. L'histoire entre les Farnsworth et Linus était connue de presque tous les quatrièmes et cinquièmes années. Aussi, même si Melody ne lui avait pas demander un service, Manfred aurait été au courant de l'affaire. Et s'il avait eu affaire à Linus, nul doute qu'il l'aurait attaqué plus ou moins sur le sujet de sa rupture récente et de sa cause. Etre tombé sur la photo, et à un moment où Linus semblait essayé de faire le ménage dans ses souvenirs était une chance qu'il appréciait à sa juste valeur, et qui lui facilitait grandement la tâche.

Lorsqu'il sortit sa baguette, Manfred se força à rester plus ou moins calme. Certes, Linus restait Linus, un adolescent naïf et qui avait sûrement un peu peur de lui au fond, mais chacun pouvait succomber à une crise de colère et agir de manière irréfléchie. Quand le sort reparo sortit du bout de bois, Manfred ne put retenir un sourire moqueur et où perçait un brin de supériorité. Linus était faible... D'un autre sort, le Poufsouffle envoya son bien dans sa main. Fronçant les sourcils, Manfred lui jeta un regard interrogateur. L'attitude de Carthridge l'agaçait autant qu'elle l'amusait.

- Tu ne touches pas !

Manfred leva les yeux au ciel (ou plutôt au plafond). D'un regard lassé, il regarda Linus se baisser pour remettre son précieux petit cadre bien réparé au fond de sa valise, et comme une précaution ne suffisait pas, il repoussa sa valise en sécurité sous son lit. Bon. Monsieur avait finit ses simagrées ? Non, parce que, mine de rien, Manfred avait un boulot à faire... A savoir agacer le plus possible le pauvre Poufsouffle.

- N'as-tu pas autre chose à faire?

Il s'était relevé, et le regardait à présent. Bon... S'avançant un peu, Manfred vint se planter près du lit du cinquième année. Il s'adossa négligemment contre le poteau du baldaquin, un air détaché sur le visage. Pliant les doigts, il observa un court instant les ongles de sa main gauche, avant de planter brusquement son regard dans celui de Linus.

- Et bien. Je pensais que tu me réserverais un meilleur accueil, Linus...

Il s'avança de quelques pas vers son ancien ami, jusqu'à se planter face à lui. Il le jaugea rapidement du regard. C'était facile... Et au fond de lui, il aimait sentir le pouvoir qu'il avait sur les autres. Sentir la peur chez ceux qu'il croisait. Bon, après, Manfred n'avait que quinze ans... La peur qu'il développait chez ses congénères n'était pas forcément très développée...

- Mais apparemment, ma présence ne te fais pas plaisir.

D'une bourrade sur l'épaule, Manfred poussa Linus en arrière, où le rebord du lit vint le saisir derrière les genoux, le faisant atterrir sur les fesses sur son matelas. Il accueillait bien volontiers la différence de taille qui venait de s'instaurer entre eux deux, le faisant se sentir supérieur au pauvre Linus. Alala. Si Melody n'était pas venu lui parler, Linus aurait sûrement vécut tranquillement son année scolaire. Après tout, Manfred n'allait pas chercher les ennuis où ils se trouvaient. Il préférait mener sa petite vie, détester ce qui lui arrivait de magique et de pourrir les personnes qui se trouvaient sur son chemin.

Croisant les bras, il demanda, un air renfrogné sur le visage.

- Je me trompe ?

- Non, mais oh...

Il avait élevé la voix avant de se relever immédiatement, comme s'il s'était assis sur un ressort. La soudaine proximité entre lui et son camarade lui fit reculer d'un petit pas, ses sourcils se fronçant sous l'effet de la contrariété. Et il se froncèrent davantage encore lorsque Linus le poussa et se dégagea. Il aurait aimé qu'il ne se rebelle pas, qu'il se contente d'être le garçon naïf, crédule et innocent qu'il avait été. Celui qu'il pouvait faire tourner en bourrique. Ca lui aurait simplifier la tâche. Parce que bon, là, en cet instant précis, il en avait marre. Certes, emmerder le monde, c'était son domaine de prédilection, mais à chaque personne, il fallait un traitement adapté, pour qu'il puisse le blesser au maximum. Et là, Manfred avait la flemme de chercher. Et malheureusement pour Melody, c'était en partie à cause d'elle que la tâche était plus ardue. Car c'était la jeune fille qui l'avait fait sortir de sa bulle de protection, en quelque sorte. Un court instant, il se demanda à combien s'élevait le minimum syndical d'efforts qu'il devait fournir...

- Non, tu ne te trompes pas ta présence n'est pas requise.

Il s'était écarté, partant se réfugier près du mur. Tâchant de garder un air de défi, planté tel qu'il l'était face à lui, les bras croisés. Mouais. Décidément, Manfred préférait le Linus d'avant. Même si dans un sens, il n'en avait plus rien à faire à présent qu'ils n'étaient plus dans la même année...

Regardant Linus dans le fond des yeux, lui marqua un temps de pause. Lui laissant le temps de prendre la mesure de ce qu'il venait de faire. Lui laissant de temps de réfléchir, et peut-être d'avoir un peu peur. Et puis, lentement, ses sourcils se détendirent. Il fit jouer ses doigts, les pliant et les dépliant au fur et à mesure qu'il s'avançait vers Linus. Quelques mètres, à peine deux ou trois. Avalés en quelques enjambées, en quelques secondes. Sa paume droite vint percuter le mur, juste à côté de l'endroit où se trouvait la tête du Poufsouffle. Et, hargneux, il lui lança :

- Non mais pour qui tu t'prends, Carthridge ?! J'suis pas l'elfe de maison dévoué à son maître, à qui on dit d'aller voir à la cuisine s'il y est !

Le nez froncé, il fixa Linus méchamment avant de continuer d'un ton mordant.

- J'sais même pas comment tu fais pour te r'garder dans la glace le matin... Rien qu'ta tête me donne envie de vomir. Ah ouais, mais... Ma présence n'est pas requise... J'oubliais. Mais descend de tes grands chevaux ! Tu seras toujours qu'un pauvre Sang-Mêlé de sorcier raté. Qu'un gamin sans consistance, sans personnalité, dont tout l'monde finit par se désintéresser.

Il avait fait une pause, retirant sa main du mur pour laisser son bras retomber le long de son corps. Et de sa main gauche, il avait épousseté négligemment le tissus avant d'ajouter quelques mots. La crème de la crème serait qu'il se mette à pleurer... Mais Manfred s’accommoderait facilement du reste à vrai dire.

- T'es rien Carthridge. Rien. Et tu sais quoi ? Tout l'monde s'en fiche...