Pomona était en vie. C’était acté. C’était… c’en était presque irréel en un sens, mais il n’y avait plus aucun doute à ce sujet. Pomona était en vie. Après un long moment de surprise, de joie intense à l’idée que leur fille était en vie, le couple Fitz ne pouvait évidemment pas se contenter de poursuivre leur vie comme si de rien n’était. Depuis le départ de Pomona, beaucoup de chose avait changé. Mais c’était sa mort qui avait brisé quelque chose en eux, entre eux même. Ils avaient réussi à tenir le coup, mais ça n’avait vraiment pas été facile. Et maintenant, il se retrouvait dans la situation où cette fille en question était en vie et où ils ne pouvaient évidemment pas rater leur chance de nouveau.

Parce que c’était une chance, assurément. Cela ne pouvait pas en être autrement, Esther et Bradley avaient une nouvelle chance de pouvoir revoir leur fille, lui dire ce qu’ils n’avaient jamais pu lui dire. Esther ne savait pas exactement comment les choses allaient se passer, si Pomona accepterait de leur parler, ce serait déjà une très bonne chose. Mais pour cela, comment la voir ? Parce que forcément après la surprise et la joie de découvrir officiellement que Pomona était encore en vie, il y avait beaucoup de question à se poser.

Un constat était évident cependant, Henry en savait plus que ce qu’il n’avait dit. Ils ne pouvaient pas en avoir la certitude non plus, mais ça semblait évident. Le directeur du bureau des Aurors, McDowell, était mis en examen pour complicité dans l’absence de Pomona et ces autres sorciers de la prison d’Azkaban. Et cet homme était un ami proche de Henry. Il semblait évident que l’homme en savait beaucoup plus qu’il n’avait dit. Et c’était en un sens la seule piste qu’ils avaient pour pouvoir retrouver leur fille et pour pouvoir lui parler de nouveau. Ce fut donc avec ces convictions que Bradley et Esther avaient décidé de se rendre auprès de Henry, dans le but de lui poser ces questions qui les tourmentaient, dans le but de pouvoir revoir leur fille. Esther ne savait pas comment ça allait être possible, elle ne savait même pas si Pomona accepterait de leur parler même si c’était possible, mais il fallait bien qu’ils fassent quelque chose. Justement, ils étaient restés beaucoup trop à l’écart autrefois, ils n’avaient pas agi comme il le fallait, ils devaient se rattraper.

Et cette fois-ci, ils agissaient ensemble. Esther aurait pu laisser Bradley venir seul voir son frère, mais outre le fait qu’elle ne jugeait pas que ça soit forcément une bonne chose pour qu’ils puissent vraiment avancer, c’était surtout parce qu’il était hors de question qu’elle reste éloignée de tout cela. Elle se devait de participer à tout cela, c’était son rôle et elle ne laisserait pas son époux devoir faire tout de son côté. Elle tenait à être présente, elle tenait à entendre Henry s’expliquer.

Ce fut donc ensemble qu’ils arrivèrent sur place, devant la porte chez de chez Henry (ou Pomona avait vécu pendant longtemps). Esther lança un regard à son époux, l’invitant à frapper.

Je ne sais pas vraiment ce qu'il faudrait ajouter à cette situation pour la rendre plus chaotique encore. Je crois bien qu'on atteint des sommets. C'est si improbable, si surréaliste, que je me demande parfois si tout ça est bien arrivé, si vraiment nous en sommes là, Pomona perdue on ne sait où, et Chris démis de ses fonctions, dans l'attente d'un procès qui lui coûtera peut-être plus encore que sa carrière. Et tout le reste. Toutes les conséquences, sur la Résistance, et donc sur le monde de la sorcellerie plus largement. Je reconnais ne savoir qu'observer les choses sous le jour égoïste de ma petite personne. Je me sens bien plus concerné par Chris et Pomona que par n'importe quoi d'autre. Que par n'importe qui d'autre.

Préoccupé, quand on frappe à ma porte, je m'attends à toutes les possibilités. Il y en a pourtant une qui ne m'est pas venue à l'esprit immédiatement, et qui est pourtant la plus évidente entre toutes. Bradley... Quand je les découvre, lui et Esther de l'autre côté de la porte, j'ai à peine le temps de comprendre ce qui est en train d'arriver que c'est le point de Bradley qui m'arrive en plein visage. Et les insultes, puis les questions fusent.

Je me recule d'un pas pour éviter de me prendre un pain supplémentaire tout en massant mon visage endolori du bout des doigts. Forcément, il ne fallait pas longtemps pour qu'ils comprennent que j'étais dans la confidence, tout ce temps. Mais j'aurais tout de même ne pas en arriver là.

-Calme-toi, pour commencer, je réponds le plus posément possible avant de refermer la porte derrière nous afin d'éviter de faire profiter à tout le voisinage d'une conversation qui dans tous les cas ne devra surtout pas atteindre toutes les oreilles.

Je pousse un soupir et reprend la parole, je pourrais leur offrir de s'asseoir, ou de boire quelque chose, mais l'ambiance n'est pas aux conventions superficielles, manifestement. Alors j'accepte de répondre.

- Pas depuis le début, mais j'étais au courant, oui. Tu m'excuseras de ne rien t'avoir dit, mais lors de notre dernière conversation, tu as qualifié Pomona de criminelle et de terroriste, tu comprendras que j'aie préféré me taire, je dis le plus calmement possible. Et ce n'est jamais que la vérité. J'ignore où elle est, j'ajoute en regardant alternativement Bradley et Esther. Croyez-moi, je voudrais vraiment le savoir...

Bradley frappa à la porte de Henry, ce dernier ouvrit la porte et Esther sursauta en voyant son époux envoyer si vivement son poing dans le visage de son frère. Bon… elle comprenait évidemment la colère de Bradley vis-à-vis de son ainé, parce que ce dernier leur avait menti, parce qu’il était au courant que leur fille n’était pas morte et qu’à aucun moment il ne leur avait avoué la vérité. Ils avaient cru avoir perdu Pomona pour de bon, ils avaient vécu des mois si difficiles et jamais Henry n’avait prit la peine de leur permettre de souffrir moins. Quand Esther repensait à la conversation qu’elle avait eu avec son beau-frère, se disant maintenant qu’il avait parfaitement conscience que sa fille était en vie, elle en voulait effectivement à l’homme de ne pas lui avoir enlevé un poids sur le cœur. Cela dit, ce ne serait évidemment pas constructif si Bradley se montrait si violent avec son frère.

Instinctivement, Esther attrapa le bras de son époux, comme pour tenter de le retenir de frapper encore une fois Henry, même si elle savait bien que ça ne servirait surement à rien, pendant qu’il questionnait l’homme. Où était-elle ? Ils avaient besoin de savoir, il fallait qu’ils revoient Pomona, qu’ils fassent quelque chose pour elle. Depuis qu’ils l’avaient cru morte, Esther n’avait pas réussi à vivre normalement, elle s’était contentée de survivre avec tous les regrets sur le cœur, parce qu’il y avait tant de chose qu’elle aurait dû faire pour sa fille et qu’elle n’avait rien fait. On leur offrait une seconde chance, ils ne pouvaient pas passer à côté. Esther n’ajouta rien, se contenta de regarder son beau-frère fermer la porte, avant d’enfin répondre à la question de Bradley… enfin presque.

Esther tiqua légèrement en entendant Henry affirmer que son mari avait traité Pomona de criminelle et de terroriste. Elle savait bien que ce n’était pas ce que Bradley pensait, sinon il ne se serait pas donné du mal pour obtenir des preuves pour démontrer que Pomona était innocente. Mais elle passa outre ces paroles.

« Comment tu veux qu’on te croie, alors que… pendant tout ce temps tu savais qu’elle était vivante et tu n’as rien dit ? » Esther fut incapable de retenir sa voix de se briser un peu en prononçant ses mots. La dernière fois qu’elle s’était retrouvée en face de Henry, ils avaient parlé de Pomona, ça l’avait légèrement soulagé sur le moment, mais rien n’avait réellement pu la guérir. Alors qu’il en aurait eu la possibilité. Il avait dit qu’il n’était pas au courant depuis le début, mais encore une fois ils ne pouvaient pas vraiment le croire sur parole. « Mais admettons que tu ne sois pas au courant… d’autres personnes le sont n’est-ce pas ? »

Si Henry ne mentait pas, qu’il ne savait pas où était Pomona, quelqu’un le savait. Et eux, ils devaient parler à ce quelqu’un.

Les circonstances ne plaident pas en ma faveur, je veux bien le reconnaître. Et même, au fond, j'apprécie la colère de mon frère et de ma belle-soeur, qui me prouvent une bonne fois pour toutes un attachement envers Pomona dans lequel il m'est arrivé de douter par le passé. Bien sûr, ça ne change pas grand-chose au fin mot de l'histoire, mais je préfère qu'ils soient en rogne contre moi plutôt qu'ils ne le soient contre ma nièce (même s'il m'arrive de l'être moi-même, je ne sais m'empêcher de lui en vouloir d'avoir agi comme elle l'a fait, à disparaître sans prévenir, et sans me laisser l'opportunité de l'aider, convaincue d'erreurs que je lui aurais totalement pardonnées).

-Moins de monde était au courant, mieux c'était. Vous dire la vérité, c'était la mettre en danger, et vous mettre en danger par la même occasion, je tente de me défendre, mais sans estimer être convaincant.

Oui, c'était une chose que je pensais réellement, mais je ne pensais vraiment pas pour autant que toute cette situation serait pardonnée ou comprise. J'ai agi en faisant ce que j'estimais être le mieux dans une situation que l'on peut qualifier de critique, et je ne pense pas que j'aurais agi différemment en d'autres circonstances, au bout du compte. Tout ça, ça m'a dépassé, ça nous a tous dépassés, et on ne pouvait pas imaginer que la situation dégénérerait encore à ce point.

-Personne n'est au courant d'où elle se trouve, pas à ma connaissance en tout cas. Je pousse un soupir. Je vais nous préparer du thé, autant en discuter en étant tranquillement installé, je décide afin de me donner un semblant de contenance.

Une fois tous assis dans le salon face à une tasse de thé, j'en prends une première gorgée avant de dérouler mon récit, même si je me doute qu'il va être, à leurs yeux, décevant.

-J'ai appris la nouvelle de l'"arrestation" de Pomona en même temps que tout le monde. J'ignorais tout de ce qu'elle faisait ou vivait à ce moment-là, elle me l'avait bien caché. C'est après un peu plus d'un mois que Chris... - Christopher McDowell - m'a avoué avoir aidé Pomona et les autres à éviter le baiser du détraqueur. Pomona a initié un mouvement de résistance, et Christopher l'a protégée. Elle était cachée dans une résidence hyper-protégée dont nous étions très peu à connaître l'adresse... Mais... Elle est partie. Du jour au lendemain, elle est partie sans avertir personne ou presque, et sans laisser d'adresse.

Esther s’attendait à ce que Bradley fonce à tout moment sur Henry pour le frapper à nouveau, mais ce n’était clairement pas la bonne attitude à avoir. La colère envers Henry était légitime, mais ils avaient pour le moment besoin d’explication et de réponses à leur question, ce n’était pas en frappant l’homme qu’ils les obtiendraient. Alors la sorcière espérait quand même que son époux allait parvenir à se contenir un minimum, pour qu’ils puissent enfin connaître toute la vérité. Ils devaient enfin savoir ce qui s’était réellement passé, qu’on arrête de leur mentir et de leur cacher des choses. Quand Esther repensait au moment où elle était venue voir Henry, le cœur lourd, au risque justement de briser un peu plus sa relation avec Bradley, elle sentait son cœur se serrer en se disant que l’homme savait à ce moment-là qu’elle était en vie et qu’il ne lui avait rien dit du tout…

Mais il ne fallait pas penser à tout cela, ils devaient avoir des réponses. Bradley demanda que Henry leur raconte tout depuis le début, affirmant qu’il leur devait bien ça, Esther hocha de la tête pour confirmer les propos de son époux. Henry affirma que moins de monde était au courant, mieux c’était, qu’en leur disant la vérité, il aurait mis Pomona et le couple en danger. Esther fronça des sourcils, elle parvenait difficilement à lui faire confiance. L’homme semblait sincère depuis leur arrivé, mais c’était quand même difficile de se fier simplement à sa parole, quand il avait menti pendant tout ce temps. Il ajouta que personne ne savait où elle se trouvait maintenant, avant de proposer de s’installer autour d’une tasse de thé pour discuter de tout cela. Ce serait peut-être une bonne chose en effet, histoire qu’ils puissent mettre au clair toute cette histoire. Esther attendit simplement que Henry reprenne la parole une fois qu’il eut servi le thé, elle n’était pas encore capable de prendre elle-même sa tasse pour boire. Elle avait juste besoin qu’il réponde à ses questions, elle avait besoin de savoir ce qui était arrivé.

Ainsi, il avait donc appris la nouvelle de l’arrestation de Pomona en même temps que tout le monde. À ce souvenir, Esther senti un frisson la parcourir. Même si ça faisait déjà un temps qu’ils n’avaient pas parlé avec leur fille, ce fut à ce moment-là qu’elle pensa l’avoir perdu pour de bon. McDowell apprit à Henry un peu plus d’un mois après – si tôt donc, il le savait depuis tellement longtemps –, que Pomona avait échappé au baiser du détraqueur, qu’elle avait initié un mouvement de résistance… qu’elle se trouvait dans un endroit hyper protégé. Et maintenant elle était partie, et il ne savait pas où. Esther avait la tête qui tournait, c’était tellement d’information, trop d’information…

« Je… je ne comprends pas tout… »

Esther se sentait complètement perdu, quelle était cette histoire de résistance, contre quoi ? D’endroit super protégé, et de départ au point que maintenant Henry ne savait vraiment pas où elle se trouvait ?

Esther est désemparée, cela se voit dans son regard et dans sa voix quand elle dit ne pas tout comprendre. Et je ne peux que le comprendre car je suis tout aussi désemparé qu'elle. Même si j'ai plus d'informations à ma disposition, je suis loin de tout comprendre. Cette situation me dépasse complètement, en même temps qu'elle me fait peur. J'ai peur pour Pomona, et cette situation est particulièrement délicate... Je ne suis pas du tout sûr que cette situation soit susceptible de s'arranger. Henry et Esther arrivent après la tempête, et moi, je ne sais pas exactement ce que je pourrais faire pour arranger la situation, quoi qu'il puisse advenir au bout du compte.

-Je vous l'ai dit, je n'ai pas toutes les informations moi-même... Elle est partie parce qu'elle estime... avoir trahi la Résistance et ses convictions. Mais c'est faux, elle est seulement... Trop sévère avec elle-même. Elle est partie pour nous protéger, mais c'est elle qu'elle met en danger.

Je dis ces mots d'un trait, et je sais qu'ils ne doivent pas vouloir dire grand-chose, mais c'est difficile d'expliquer toute la situation à brûle-pourpoint à mes interlocuteurs. Je suis dans l'histoire depuis particulièrement longtemps.

-La résistance, c'est la résistance contre le sorcier qui sème la terreur dans tout les mondes sorcier et moldu. Pomona est très informée sur la question, elle l'avait percé à jour avant tout le monde. Elle a fondé ce mouvement de résistance. Elle a participé à rendre ce monde meilleur...

Est-ce que je dois lui parler de Seth et de ce qu'elle m'a appris sur ses sentiments pour lui ? Je devrais le dire, en effet... Mais je pense que je devrais dispenser une information après l'autre, et ne pas trop en dire d'un coup... Je veux leur laisser le temps d'assimiler la situation sans réellement savoir de quelle manière présenter les choses tant cette situation me dépasse. Elle me dépasse par de très nombreux aspects. J'aimerais bien souvent comprendre cette situation dans le détail, mais c'est plus difficile qu'on ne le voudrait.