I

l fallait bien que ça arrive, évidemment. C'était inévitable. Eileen l'avait attendue et appréhendée en même temps, la rentrée. Quand elle s'enfermait dans sa chambre des heures durant sans pour autant réussir à oublier les disputes incessantes de ses parents. Elle avait envie de s'éloigner d'eux le plus possible. Non, elle n'en avait pas simplement envie, elle en avait en fait cruellement besoin. D'un autre côté, il n'y avait pas grand-chose à Poudlard pour véritablement la réjouir.

Elle n'avait pas forcément envie de retourner en cours (même s'il y en avait certains qu'elle aimait suivre tout de même), elle n'avait pas spécialement envie de retrouver ses camarades de classe (clairement, elle n'en avait pas envie du tout en réalité, il n'y en avait pas un seul pour lui avoir manqué, c'était l'évidence même)... Il n'y avait que son club de bavboules qu'elle était impatiente de rejoindre. Et encore, c'était juste pour l'amour du jeu, certainement pas par amitié envers ceux qui avaient rejoint son club.

Bref, c'était reparti pour un tour, et la jeune fille n'était pas franchement enthousiaste d'être de retour. Ses premiers cours de l'année avaient commencé, et déjà, la dose de travail demandée était conséquente, c'est évident. Au fond, ça arrangeait Eileen, ça allait clairement l'occuper, et ce n'était pas plus mal. C'était d'ailleurs dans l'optique de s'avancer dans ses premiers devoirs de l'année qu'elle s'était installée dans la salle commune des vert et argent.

Elle détestait traîner dans la salle commune, mais la bibliothèque était fermée à cette heure de la soirée, le couvre-feu était dépassé, elle n'avait donc pas le choix. Elle s'était trouvée une place, à l'écart, et espérait qu'on ne viendrait pas l'y déranger pour la peine. Elle ne tenait en grande affection presqu'aucun de ses camarades. Exception faite, peut-être, de Darryl, mais malheureusement, sa seule compagnie ne lui suffirait certainement pas à trouver cette situation véritablement vivable.

Et elle n'allait certainement pas l'être davantage au vu de qui venait le rejoindre à présent. Elle leva les yeux vers Alphard, l'insupportable Alphard. Elle ne comprenait définitivement pas comme Darryl et lui pouvaient être potes. Pour Eileen, Alphard était l'incarnation de ce qu'on fait de plus insupportable.

-Dégage, Black, l'accueillit-elle immédiatement en guise de préambule.

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A

u lieu de s'en aller comme Eileen le lui avait si gentiment demandé, Alphard prit ses aises et décida de s'installer à côté d'elle. Forcément... Elle l'avait peut-être cherché, mais honnêtement, ce n'est pas pour autant qu'elle était heureuse de voir son "camarade" s'asseoir à côté d'elle plutôt que d'aller emmerder quelqu'un d'autre. Elle était très bien, toute seule, dans, son coin, elle n'avait absolument rien demandé à personne, et elle aurait été enchantée de passer sa soirée à ne parler avec absolument personne. Mais non, évidemment. Alphard, c'était de la vermine, un parasite dont il n'était vraiment pas simple de se débarasser, malheureusement.

Alphard déclara qu'elle lui avait manqué. Evidemment, elle n'en croyait pas un seul mot. Elle était tout de même ravie d'être tranquille loin de lui et ne pas avoir à supporter son caractère de tête à claque. Mais visiblement, la fête était finie, et elle était partie pour une bonne année à se coltiner des gens comme lui, qu'elle était juste proprement incapable de supporter, qui l'agaçaient au plus au point, pour un bon milliard de raisons. Et encore, si Alphard s'arrêtait là. Mais non, il fallait toujours qu'il en rajoute. Franchement, c'était épuisant. Elle n'avait vraiment pas envie de s'engager dans une joute verbale à rallonge avec lui. Sans façon. Mais on ne lui donnait pas forcément le choix, elle l'avait bien compris.

-J'allais très bien il y a quelques minutes et maintenant, bizarrement, je ressens comme un profond agacement... je me demande vraiment d'où ça peut bien venir, répliqua-t-elle dans un soupir sans daigner lever les yeux du livre qu'elle était en train de lire.

Elle n'allait pas non plus lui accorder le privilège de le regarder dans les yeux. Dans tous les cas, elle voulait le voir disparaître de son sillage le plus rapidement possible. Mais le connaissant, ça n'allait pas être aussi simple que ça, malheureusement. Elle reprit le cours de sa lecture comme si de rien n'était. Elle avait déjà entendu dire que l'ignorance était le meilleur des mépris. Est-ce que c'était vraiment le cas ? Difficile à dire, mais elle tentait toutes les stratégies possibles. Là, tout de suite, sa seule envie était qu'on la laisse tranquille, surtout si c'était Alphard qui devait venir lui courir sur le haricot. Ne lui en déplaise, elle ne changerait pas d'avis.

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I

l y avait beaucoup de choses qui faisaient d'Alphard Black un adolescent particulièrement insupportable et agaçant, mais parmi ces dernières, il était certain qu'il y avait l'incapacité totale du garçon de savoir quand s'arrêter, c'était bien simple, plus il était convaincu de vous agacer, plus il continuait de le faire. Bien évidemment, Eileen pourrait changer de méthodesn décider par exemple de l'ignorer pour s'en débarrasser un peu plus vite... mais elle avait dans l'intuition que cela ne changerait rien. Alphard Black l'avait dans le collimateur, et elle n'avait pas d'autre choix que de faire avec, même si ça ne lui plaisait absolument pas.

Forcément, il en rajoutait des couches et des couches, il était tellement content de son petit numéro. Et que je m'interroge sur ce que t'as mangé, et que je fasse comme si je ne savais pas que je suis la source de ton profond agacement. Il était doué pour lui mettre les nerfs en pelote, le bougre. Ceci dit, elle ne voulait pas lui donner gain de cause en s'énervant.

Alors peut-être que répliquer par des saillies du même acabit était rentrer dans son jeu. En même temps, c'étati comme ça que la vert et argent avait toujours fait : elle avait tendance à répondre à tout et à tout le monde par l'ironie et le sarcasme. Alors ça avait peu de chances de changer.

-La seule chose qui pourrait me motiver à parler avec toi, Black, serait que nous soyions les derniers êtres vivants de cette planète et que converser avec un autre humain soit la seule façon pour moi de conserver ma santé mentale. Et même là, je ne suis pas certaine que ce serait un prétexte suffisant.

Elle était sans doute contradictoire en cet instant puisque, pour lui faire comprendre qu'elle n'avait aucune envie de parler avec lui, elle utilisait déjà beaucoup plus de mots que nécessaires. Mais peu importe. L'essentiel n'était pas d'être prise au sérieux, juste de renvoyer la balle.

Parce que quoi qu'elle dise, dans tous les cas, Alphard continuerait de jouer la provocation comme elle n'en avait que trop l'habitude. Au moins, faute de rendre cet échange agréable, leurs piques respectives avaient le mérite de lui donner un caractère un peu plus... disons... divertissant... Encore qu'elle pesait ses mots (en pensée) en choisissant ce terme spécifique.

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E

ileen s'était un peu attendue à la réponse de Alphard, et elle devait bien reconnaître qu'elle l'avait bien cherché, d'une certaine manière. La vert et argent savait bien que lui parler pour lui dire qu'elle ne voulait surtout pas lui parler, lui assurer ne vouloir lui accorder d'intérêt tout en lui accordant de l'intérêt, ça allait forcément lui retomber dessus, d'une manière ou d'une autre.

Elle ne peut pas dire grand-chose pour se défendre, juste se dire, en son fort intérieur, que quoi qu'elle ait pu dire ou faire exactement, ça n'aurait rien changé au fait qu'il lui aurait tenu la jambe, parce que ça le faisait marrer, à ce fichu crétin. Enfin, maintenant, elle ne pouvait que serrer les dents et attendre qu'il se lasse et décide de faire autre chose de sa vie. Ce qui allait bien finir par arriver, non ? Elle n'était certainement pas intéressante au point qu'il choisisse d'insister trop longuement. Elle n'y croyait pas une seule seconde pour sa part, en tout cas.

Elle leva les yeux au ciel quand Alphard lui assura que s'ils devaient vraiment être les derniers individus vivants sur cette planète, il serait ravi d'être le spectateur de l'apocalypse en sa compagnie. Honnêtement ? S'il ne lui inspirait pas à ce point d'agacement, il était probable qu'Eileen trouverait les paroles d'Alphard amusante. Mais l'adolescent avait su susciter chez elle une telle exaspération au fil des ans que ce cas de figure n'avait juste aucune chance de se présenter encore, même en faisant les plus grands efforts possibles et imaginables, vraiment. Sa patience avait atteint ses limites depuis très longtemps, avec lui, c'est tout.

-Si on était les deux dernières personnes sur cette planète, Black, je serais ton apocalypse, je ne tiendrai pas deux secondes avant de te faire manger la poussière, répliqua-t-elle de son habituel ton neutre, toujours en lui refusant le moindre regard.

Ce cas de figure ne se présenterait évidemment jamais, mais il ne fallait pas se leurrer, jamais Eileen ne supporterait d'avoir uniquement Alphard pour compagnie. Déjà, elle ne supportait la compagnie de personne en règle générale, alors là, pour ce qui était de mettre sa patience à rude épreuve... clairement, il n'aurait vraiment pas besoin de faire beaucoup d'efforts. Déjà là, ici et maintenant, il y arrivait très bien.

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ileen se contenta de grincer des dents sans faire aucun commentaire quand son interlocuteur lui assura qu'il l'imaginait très mal réussir à faire mordre la poussière à qui que ce soit. Elle aimerait vraiment être capable de lui donner tort, rien ne lui ferait plus plaisir, même, mais objectivement, force lui était de reconnaître qu'il avait bien évidemment raison. En effet, c'était la pure et simple vérité, elle n'était clairement pas quelqu'un de violent. Verbalement peut-être, parce qu'elle aimait bien adresser à ses interlocuteurs des piques bien senties, mais physiquement, elle était aussi frêle qu'un moustique, évidemment qu'elle n'irait pas très loin comme ça.

Ceci dit, elle persistait et signait tout de même. Si elle devait se retrouver seule en présence d'Alphard parce que, par elle ne savait quel coup du sort, il ne resterait plus qu'eux sur terre, elle était capable de l'affirmer haut et fort, elle serait capable d'avoir l'ascendant sur Alphard. Dans le genre qui parlait beaucoup et qui n'en foutait pas une, le vert et argent n'était pas mieux loti qu'elle, et une colère contenue qui finit par exploser pouvait faire des ravages. Merlin fasse dans tous les cas qu'ils ne se retrouvent jamais dans une situation telle que celle-ci car ni l'un ni l'autre ne seraient véritablement capables de le supporter si ça devait être le cas.

-J'en pense que même en me proposant toute la fortune mal acquise des Black, je préfèrerais intégrer un elfe de maison à l'équipe que de t'y laisser une place, répondit-elle simplement quand Alphard suggéra d'intégrer l'équipe de bavboules.

En vrai, elle ne refusait pas vraiment de membres dans son club, il fallait bien que ce dernier survive, donc quiconque voulait l'intégrer était techniquement le bienvenu, mais elle savait pertinemment, ceci dit, qu'Alphard se fichait pas mal de ce jeu dont il ne devait même pas connaître les règles de toute façon. Il savait juste que s'il fallait aborder un sujet sensible avec elle, celui-ci arrivait en bonne place, en bonne place parce que c'était finalement le seul centre d'intérêt qu'on était capable de lui trouver. Heureusement, cela dit, qu'Alphard n'était pas sérieux (il ne l'était jamais en même temps). Elle n'aurait vraiment pas aimé avoir à le supporter.

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ileen leva les yeux au ciel quand Alphard s'amusa à affirmer (car c'était sûr qu'il ne le pensait pas vraiment, il se contentait de se faire marrer toute seule - ce qui n'était sans doute pas plus mal, parce que la jeune femme était convaincue du fait qu'il ne parviendrait jamais à faire marrer qui que ce soit d'autre) qu'elle était méchante avec lui. Elle voulait bien reconnaître qu'elle n'était pas spécialement tendre, c'est vrai (en même temps, elle ne l'était avec personne), mais clairement, elle n'était pas foncièrement méchante, elle n'aimait pas, seulement, qu'on vienne troubler sa solitude tant aimée...

Surtout pas quand c'était pour avoir ce genre de conversation. Alphard ne l'emmerdait pas sans le faire exprès, il savait pertinemment ce qu'il faisait. Et pour la peine, il lui courait singulièrement sur le haricot. Elle espérait qu'il se lasserait très vite et trouverait une autre cible à enquiquiner, parce qu'elle se sentait déjà à bout de patience alors qu'ils ne parlaient que depuis quelques minutes seulement... pas besoin de beaucoup pour qu'elle n'en puisse plus de toute manière, elle avait beau être calme, elle n'était certainement pas sociable pour autant.

-Je t'en prie, ne te gêne surtout pas, répliqua Eileen dans un soupir, non sans lui avoir adressé un sourire moqueur quand le jeune homme avait affirmé qu'elle niait son potentiel.

Elle ne le niait pas, non, on ne pouvait pas nier une chose qui n'existait pas, après tout, et le potentiel d'Alphard, Eileen n'y croyait pas du tout. Peu importe dans quel domaine, d'ailleurs. A ses yeux, le seul talent du vert et argent résidait dans son aptitude à faire chier son monde. Sur le court terme, c'était peut-être viable, mais à la longue, elle en doutait quand même nettement.

-Rien ne me ferait plus plaisir que de te voir lamentablement échouer dans la moindre de tes initiatives, alors je t'en prie, n'aie surtout aucun scrupule pour moi, j'ai vraiment hâte de voir ça.

Elle pouvait bien aller au bout de la provocation, elle savait pertinemment que c'étaient des paroles en l'air. Alphard se fichait royalement des bavboules, contrairement à elle, qui y accordait une grande importance, et elle ne le voyait pas s'investir dans quoi que ce soit.
   

   

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ileen se demandait sincèrement comment les amis d'Alphard faisaient pour le supporter plus de cinq minutes. Vraiment, ça relevait du mystère le plus impénétrable et incompréhensible à ses yeux. Elle savait en plus qu'il était proche de personnes qui ne lui ressemblaient absolument pas du tout, et ça rendait ce mystère encore plus épineux. Comment, par exemple, Darryl faisait-il pour avoir de véritables conversation construites avec lui sans que ça le rende complètement dingue. De toute évidence, elle n'aurait pas la réponse à ces interrogations, il n'empêche qu'elle les estimait particulièrement légitimes.

Là, elle faisait tout son possible pour que le vert et argent lui foute enfin la paix, et elle avait la nette impression de brasser du vent. Quoi qu'elle puisse dire ou faire, ça ne changerait rien, il s'agripperait jusqu'à se lasser... et pas parce qu'elle se serait lassée elle; Et pour cause, elle s'était lassée dès l'instant où Alphard avat commencé à lui adresser la parole. Bon, il n'était pas si exceptionnel à ce titre, Eileen avait un seuil de tolérance aux autres excessivement limité. Mais tout de même...

-Tu m'en vois incroyablement surprise, répliqua-t-elle sans en penser mot, d'un ton neutre en diable. Qui aurait cru que tu serais du genre à abandonner un projet à l'instant même de l'évoquer, à croire que tu n'as pas la moindre force de caractère. Vraiment je suis abasourdie.

Bien sûr, elle le savait, elle ne pouvait le nier, elle était clairement en train de provoquer Alphard, et il y avait mieux pour l'encourager à partir. Mais en même temps, quitte à supporter sa présence, c'était tout de même plus simple de l'envoyer chier de toutes les manières que comprenait sa panoplie (et elles étaient nombreuses, c'était un des seuls arts dans lesquels elle se savait exceller sans avoir le sentiment de se vanter). Cela dit, même si elle se montrait volontairement cynique, ça ne changeait rien à la sincérité de son propos : la jeune femme considérait effectivement qu'Alphard était un bon à rien. Il provoquait son petit monde, et après ? Elle ne pensait pas pour autant qu'il soit concrètement capable de quoi que ce soit et elle ne pensait pas qu'il était en passe de changer quoi que ce soit à tout ça. Bon, elle non plus, ceci dit, mais quand bien même.
   

   

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