A priori, rien ne destinait Nobby Leach a une vie particulièrement remarquable. Des parents ouvriers d’origine irlandaise, venus à Londres en quête de travail, qui se sont démenés pour leurs enfants, ce qui donna lieu à une enfance assez modeste, mais somme toute heureuse, entouré d’un frère devenu plus tard pilote et d’une sœur infirmière. De celle-ci, passée dans les cités ouvrières de Londres, Leach garde un souvenir un peu ému, mais fier, et un sentiment d’appartenance de classe qui ne l’a jamais quitté par la suite. Pourtant, rapidement, Nobby eut la conviction qu’il était différent de Walt, son frère, et de Eleanor, sa sœur. Il n’était d’ailleurs pas le seul à le voir : autour de lui, il se passait toujours des choses étranges, comme la fois où il parvint à faire voler des tourtes directement depuis l’étal du marchand de rue jusqu’à leur fenêtre, au troisième étage de leur vieil immeuble, ou que le chat se retrouva mystérieusement affublé d’une crinière alors qu’il avait trouvé un livre d’images qui montrait toutes sortes d’animaux sauvages, dont des lions…Nobby ne s’en faisait guère : pour lui, tout cela était assez naturel, au fond, même s’il ne comprenait pas tout. Seul le regard parfois étrange des autres enfants du quartiers l’attristait un peu .D’un naturel sociable, il n’appréciait guère d’être parfois mis à l’écart. Du côté de ses parents, les questions et les inquiétudes pleuvaient à propos de ce fils dont ils ne savaient pas trop quoi faire, surtout en 1915, alors que la Première Guerre Mondiale venait d’éclater. Au final, quand un des enseignants de Poudlard – était-ce Armando Dippet, déjà ? Nobby ne s’en souvient plus, et ses parents n’ont jamais réussi à retenir son nom – vint annoncer à la famille Leach que leur fils était un sorcier, ils le prirent avec une relative bonne grâce. Cela signifiait qu’un de leurs enfants feraient des études, ce qui n’était pas gagné vu la pauvreté de la famille Leach, et serait sans doute protégé de la guerre qui viendrait.

Nobby fut effectivement protégé de la guerre et fit effectivement des études. Entré à Poudlard en 1916, le choixpeau envoya directement cet enfant sociable mais bagarreur à Gryffondor. Il y eut un parcours tout à fait honnête, mais fut plus remarqué par son côté rebelle et intrépide que pour ses résultats, quoique honorables.

A Poudlard, Nobby Leach découvrit aussi avec beaucoup de violence que le monde moldu n’était pas le seul où le mépris et la lutte des classes jouaient un rôle. L’arrogance des sangs purs, leurs moqueries sur ses origines, pauvres et moldues, leur manière de tenter de le rabaisser, a marqué au fer rouge le gamin qu’il était. De là, il a juré de réussir et de tous les faire taire, de prouver qu’il pouvait faire aussi bien qu’eux. Et comme il n’était pas du genre à se laisser faire, dès Poudlard, il s’est mis à répliquer, et à agir dès qu’on le provoquait. Les sang purs l’ont toujours fait rire ou agacer. Souvent nuisibles, et parfois lâches, il ne s’est jamais laissé impressionner, quitte à souvent faire perdre des points à Gryffondor, ou à finir en retenue. Bouc-émissaire des uns, Nobby a été le champion des autres. Il faut dire que ce braillard grande gueule, prompt à rire, à cogner, à la colère, mais à pardonner aussi, à de quoi séduire, quitte à faire comme ces ennemis et parfois à être un peu malhonnête, nécessité faisant loi – mais jamais envers les plus faibles, jamais cruellement. Décidé à briller et à faire son chemin, il s’est finalement parfaitement intégré dans le monde sorcier, qui l’a fasciné immédiatement, sans pour autant qu’il ne renie ses origines moldues, même si ses parents n’ont jamais compris ce qu’il faisait exactement : il a dit flic, et ça ils ont compris.

Au départ, Nobby avait sans doute un bel avenir de joueur de Quidditch devant lui ; mais un accident lors de sa cinquième année, où il s’est brisé net la jambe, a brutalement et prématurement mis fin à sa carrière d’attrapeur : s’il peut aujourd’hui marcher sans difficulté, il lui est impossible de remonter sur un balai sans souffrir. Adieu donc la célébrité et la gloire sportive. Ne lui restait pas grand-chose, sinon un vrai talent dans les matières pratiques, une envie de mater un peu les fauteurs de troubles, de rendre service aux gens comme lui, de les représenter, et toujours cette envie de montrer à tous de quoi il était capable. On lui refusa l’entrée chez les Aurors à cause de sa jambe. Qu’à cela ne tienne, ce serait la police magique.

Bien que toujours un peu rebelle, Nobby y a fait une assez belle carrière depuis son entrée au Ministère. Parfois un peu ingérable, son style plait aux hommes, et il est proche du public. Il est donc rapidement monté en grade, malgré toutes sortes de réprimandes qu'il a écarté d'un revers de main, car sa méthode fonctionne, et il a fini par obtenir ce qu'il voulait : la direction de la police magique. C'est une victoire pour Nobby. Parti de rien, il a désormais tout pour lui, un poste, une femme, une fille, la réussite ! Et il ne compte pas s'arrêter là, non, il leur prouvera à tous qu'il faudra toujours compter sur lui. Pourquoi pas Ministre, après tout ? Ce serait mieux qu'un de ces sang purs, et au moins, lui il fera quelque chose d'utile pour tous...

En parlant d'utilité, Nobby a rapidement rejoint la résistance lorsqu'elle s'est créée. Il a vu ce que donnait la guerre avec Grindelwald. Il a vu à quel point le monde moldu avait été ravagé à cause d'Hitler. Walt a été blessé pendant la guerre, son petit frère, l'aviateur, et est désormais cantonné à un travail d'instructeur pour l'armée. Son père a été tué sur le coup lors du Blitz ; sa mère,seule et malheureuse, l'a suivi de près, de chagrin. Alors Nobby considère qu'il n'a pas le choix. Il faut faire quelque chose, c'est tout. Et c'est aussi simple que ça, il ne se pose pas d'autres questions.