Drôles de vacances. Qui me laissent un drôle d'impression. Au fond, je ne sais vraiment pas quoi en penser, c'est bien trop... étrange, inattendu. Je n'irais pas dire non plus que ça me déplaît, mais ça me perturbe, du moins, plus qu'autre chose, parce que les événements se sont accélérés si vite après mon départ de Poudlard que j'ai à peine eu le temps de comprendre, encore moins celui d'assimiler.

Je quittai l'école de magie plein d'interrogations, de projets, d'obligations, de regrets... Et alors que je pensais à peine commencer à mettre de l'ordre dans tout ça, la situation s'est aussitôt agravée. Je me suis accordé quelques semaines de vacances avant de m'engager dans la carrière qui a été choisie pour moi... au ministère de la Magie, cela va sans dire. Je me préparais mentalement à devoir épouser Lexie... à oublier Walburga, que j'évite comme la peste, la pauvre, depuis qu'elle m'a avoué ses sentiments pour moi (alors qu'au fond, je n'arrive pas à oublier cette conversation, qui me troptte constamment, encore et encore, dans la tête)... Et là, tout bascule.

Les parents de Lexie sont décédés. Je n'ai rien compris à ce qui leur est arrivé, je ne sais pas ce qu'ils ont fait pour s'attirer l'ire du nouveau mage noir. Peut-être qu'ils ont refusé de le rejoindre ? Auquel cas je m'inquiète pour la suite. MAis ce n'est pas la question. Lexie a annulé nos fiançailles, et cette décision a éveillé en moi des sentiments contradictoires. Je suis soulagé, oui, et malgré moi un peu vexé. Mais puisque l'annulation des fiançailles est acté, je choisis de laisser primer le premier sentiment. Qui m'ouvre des portes que j'avais tenté de verrouiller à double tour du mieux que je le pouvais.

Je le sais, je n'ai qu'une chose à faire, et j'en ai trop envie depuis bien longtemps : il faut que je parle à Walby. Peu importe ce qui se passera après ça, il faut que je la voie.

Je lui ai donné rendez-vous aux Trois-Balais, où nous avions pris l'habitude de passer une grande partie de notre temps libre quand nous n'avions pas encore pris nos distances. Je l'attends, fébrile. J'ai hâte de la revoir et en même temps j'angoisse par rapport à ce que va être notre conversation. J'ai peur aussi qu'elle ne vienne pas...

Je ne lâche pas la porte des yeux. Et enfin elle s'ouvre.

La nouvelle avait fait l'effet d'une bombe, et n'avait laissé personne insensible, Walby la première. Les parents de Lexie Hepburn avaient été assassinés, personne ne savait exactement pourquoi, même si les indices laissaient comprendre par qui. En tout cas, même si Walby ne compatissait pas réellement pour cette famille qu'elle ne connaissait pas vraiment, elle avait été sensible aux conséquences de cet événement. Le mariage entre Orion et Lexie, qui devait avoir lieu prochainement, avait été annulé. Walby en avait en partie honte, mais elle était au fond sincèrement heureuse de cette nouvelle. C'était ce qu'elle avait voulu, après tout... que, d'une manière ou d'une autre, ces noces n'aient pas lieu. Alors, elle n'avait pas envisagé un cas de figure à ce point radical... mais au moins, c'était fait.

Qu'est-ce que ça changeait pour elle au bout du compte ? La vérité, c'est que Walby n'en savait trop rien. Quand Orion lui avait proposé de la rejoindre pour aller boire un verre aux Trois-Balais, forcément, elle s'était laissée gagner par un léger espoir, mais elle ne voulait pas se laisser dépasser non plus par les circonstances. Orion était attaché à Lexie, il le lui avait dit, alors il avait peut-être juste besoin de retrouver une amie, sa meilleure amie.

Dans tous les cas, Walby ne pouvait que répondre au rendez-vous. Orion lui manquait, il lui manquait même cruellement en réalité. Après qu'elle lui ait avoué ses sentiments pour lui, ils étaient passé de tout à rien tous les deux, et ils avaient cessé de s'adresser la parole. Résultat des courses, il avait cruellement manqué à Walby. Alors elle ne voulait pas passer à côté d'une occasion de le voir, surtout qu'il avait besoin de sa présence et qu'elle le savait.

Arrivée aux Trois-Balais, elle constata qu'il était déjà là, alors elle vint s'installer en face de lui, un sourire accroché aux lèvres.

-Salut, dit-elle pour commencer. C'était bizarre de l'avoir en face d'elle, surtout compte tenu de la manière dont s'était déroulée leur dernière conversation. Mais elle était contente cela dit qu'ils puissent se revoir. Comment tu vas... ?

Dans le ton de sa voix, on sentait le sous-entendu. Elle savait qu'il vivait un moment compliqué. Et elle avait envie d'être là pour lui, peu importe ce qu'ils s'étaient dit. Ce qu'elle lui avait dit, surtout.

Elle arrive enfin, quand je la vois, mon coeur manque un battement. Elle est belle. J'ai toujours su qu'elle était belle, mais je la trouve encore plus belle que d'habitude. Mais je ne m'emballe pas. Je ne sais pas du tout comment les choses vont se passer. Je sais seulement que les choses vont se passer, parce qu'il le faut. C'est nécessaire qu'on mette les choses à plat, une bonne fois pour toutes. Je pense que ça ne peut que nous rendre service à tous les deux et que c'est vraiment important, même très important.

Il faut vraiment que la situation se décante, qu'on prenne le temps de discuter, qu'on ait la conversation que je me suis abstenu d'avoir avec elle, que je fuis alors que je devrais faire tout l'inverse. Je ne sais pas trop de quelle manière je vais m'en sortir exactement mais je dois faire tout mon possible pour m'exprimer et choisir les bons mots. Ce n'est pas forcément ce pour quoi je suis le plus doué, mais je n'ai pas le choix. Elle est là, et je ne reculerai pas.

-Je vais bien... J'hésite à lui répondre "Et toi ?". Mais ce serait tourner autour du pot. Et j'ai déjà un peu trop le sentiment de le faire. C'est pas facile mais je dois quand même y aller. Plus je vais attendre, plus ce sera compliqué au bout du compte. Tu dois savoir que le mariage a été annulé... Bon, autant dire qu'au lieu de tourner autour du pot, je mets à la place les pieds dans le plat. Et ça ça me plaît bien. Walby, écoute, je dois te parler... de ce que tu m'as dit, la dernière fois...

J'ai l'estomac et la gorge noués, je ne sais pas comment je vais me sortir de là. Je devrais continuer, mais je n'y arrive pas. J'ai peur... ça me fait flipper, oui, de lui dire la vérité, même si elle a eu ce courage avant moi. Et que je l'envie beaucoup à ce titre. Je préfère déjà entendre sa réponse, peut-être parce qu'une part de moi aurait envie qu'elle le comprenne sans que j'ai besoin de l'exprimer plus longuement. C'est lâche de ma part. Mais j'ai toujours été un peu lâche.

-Je vais bien...

Quand il lui disait ça, Walby n'arrivait pas à le croire totalement. Même s'ils ne s'étaient pas parlé pendant plusieurs mois tous les deux, il était quand même son meilleur ami avant tout autre chose, et elle le connaissait par coeur.

Donc quand il n'allait pas bien, elle le voyait, et là, elle sentait qu'il était... peut-être pas mal mais au moins perturbé, mal à l'aise. En même temps, c'était évidemment normal. Parce que son mariage avait été annulé, ce qui remettait en question tous ses projets... et parce qu'il était en sa compagnie, et que la dernière fois qu'ils s'étaient retrouvés face à face, elle lui avait avoué qu'elle était amoureuse de lui. Un sujet qu'elle avait l'intention d'occulter autant qu'elle le pourrait. Oui, c'était son intention, mais Orion n'avait pas l'air de l'entendre de cette oreille car ce fut lui, de lui-même, qui s'exprima à ce sujet, après lui avoir en premier lieu parlé du mariage avorté.

Tu dois savoir que le mariage a été annulé...

Elle hocha la tête. En effet, elle le savait. Elle ne pensait pas nécessaire de faire le moindre commentaire. Elle pourrait lui dire qu'elle était désolée pour lui, mais elle mentirait, et si Walby avait beaucoup de défauts, elle n'était pas quelqu'un d'hypocrite. Elle préférait ne rien dire, et c'était mieux parce qu'il devait s'engager sur un terrain très nouveau, et particulier, c'est sûr.

Walby, écoute, je dois te parler... de ce que tu m'as dit, la dernière fois...

Elle sentit son coeur céder. Il cognait si fort contre sa cage thoracique qu'elle ne savait vraiment pas comment il était possible que son interlocuteur ne l'entende pas. Il voulait parler de ce qu'elle lui avait déclaré. Walby, elle, aurait préféré enterrer ce sujet pour de bon.

-C'est pas la peine, Orion, vraiment... J'ai pas envie que tu t'en veuilles parce que tu partages pas mes sentiments. J'aimerais bien qu'on... qu'on oublie tout ça, tu sais. Tu me manques... Elle marqua une légère pause, consciente qu'elle était en train de s'embrouiller dans son discours. Et je suis vraiment désolée, pour le mariage. Je sais que tu tenais beaucoup à Lexie...

Au point que ça lui avait très sévèrement brisé le coeur et aurait pu avoir des séquelles sur le long terme.
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La réaction de Walby me serre le coeur. Même si elle se montre forte au possible (en même temps, ça a toujours été comme ça, elle a toujours été plus forte que moi), je vois bien qu'elle a souffert et qu'elle ronge son frein, et moi j'ai vraiment le sentiment d'être le roi des idiots. Ce n'est pas qu'un sentiment, d'ailleurs... je sens bien que je le suis. Et maintenant, il faut que je rattrape mon erreur autant que je le peux. Elle suggère d'oublier, mais ce n'est pas mon intention. Je le veux d'autant moins qu'elle me parle de "partager ses sentiments", ce qui veut dire qu'elle les ressent toujours, non ? Je m'accroche au possible à cette pensée. Tout sera possible si elle est vraie. Quand elle ajoute qu'elle me manque, j'ai envie de la prendre dans mes bras, de la serrer très fort et de ne plus jamais la lâcher.

-Pas vraiment, non, je décide de lui répondre en toute honnêteté. Lexie est une fille sympa, mais, j'ai jamais été amoureux d'elle ou quoi, on s'était dit que ce serait juste plus facile si on prétendait être ensemble.

Je marque une pause. Je veux que cette information soit très claire, je ne veux surtout pas qu'elle puisse croire que je me rabats sur elle parce que j'ai perdu Lexie ou n'importe quelle autre idiotie du genre.

-Tu me manques aussi, et j'ai pas envie d'oublier ce que tu m'as dit.

Je sens que ma voix tremble légèrement. J'ai peine à rester totalement détendu. Cette situation est inédite pour moi, et je me pose tout un tas de question. J'ai envie et même hâte de sauter le pas. D'un autre côté, j'ai un peu peur aussi, forcément, de ce qui va suivre, de ce que ça va signifier pour nous. Si ça ne marche pas, je vais perdre ma meilleure amie, et je détesterais ça, et en même temps, je ne peux plus vivre avec ces non-dits, je dois me jeter à l'eau.

-En fait, j'arrête pas d'y penser..., j'ajoute doucement avec un très fin sourire. Quand je reprends la parole, je reconnais à peine ma propre voix, mais je ne vais plus reculer, maintenant. Je t'aime, Walby...

-Pas vraiment, non.

Prudente, Walburga observait Orion sans rien dire. Elle préférait ne rien déduire, ne rien envisager. Si par malheur elle devait se tromper, elle tomberait une nouvelle fois de trop haut, et une seule fois suffisait. Malgré tout, c'était difficile de ne pas se faire au moins un peu sa propre interprétation des propos d'Orion. Pas vraiment quoi ? Ce qu'elle avait envie d'entendre, c'est qu'il n'avait pas été vraiment attaché à Lexie, mais ce n'était pas vraiment logique. Ou bien c'était juste l'amertume qui parlait parce qu'elle l'avait largué. Quoi qu'il en soit, il n'était pas question d'en tirer des conclusions trop hâtives... même si tout ça, cette conversation, c'était pour elle la combinaison du malaise et de l'espoir. Les deux ne faisaient pas réellement bon ménage.

Lexie est une fille sympa, mais, j'ai jamais été amoureux d'elle ou quoi, on s'était dit que ce serait juste plus facile si on prétendait être ensemble.

Elle eut d'un coup le sentiment que son coeur se mettait à battre de nouveau. Elle pourrait peut-être remettre en question les paroles du jeune homme, suggérait qu'il se jouait d'elle par facilité, parce qu'il avait perdu ce qu'il avait cru avoir, mais... ça faisait tellement plus de sens de l'entendre dire qu'il avait joué la comédie... Même si du coup, il lui avait menti, et ça, c'était une information qu'elle digérait un peu plus difficilement.

-Tu me manques aussi, et j'ai pas envie d'oublier ce que tu m'as dit.

Cette fois, la prudence l'avait complètement délaissée, et il n'y avait plus que l'espoir pour subsister. Et elle s'y accrochait, s'y agripper avec une ferveur totale. Elle ne pouvait que croire en ce qu'il disait, que deviner ce qu'il voulait lui dire, et s'il s'était contenté de ça, elle aurait été déjà heureuse, bien plus qu'elle n'avait su l'être ces dernières semaines, bien plus qu'elle ne l'avait jamais été, en fait.

-En fait, j'arrête pas d'y penser... Je t'aime, Walby...

Il l'aimait. C'était comme dans un rêve, un rêve qu'elle avait déjà fait, tout un tas de fois, mais en vrai, c'était beaucoup plus agréable, c'était incomparable. Walby avait l'impression qu'il lui avait poussé des ailes, tout à coup. Et le sourire qui dévorait son visage devait parler pour elle.

-Je devrais t'en coller une pour m'avoir menti, dit-elle en n'essayant pas du tout d'être convaincante.

Car au lieu de venir lui en coller une, elle choisit de presser ses lèvres contre les siennes, cédant à une envie qui la démangeait depuis longtemps.

Le sourire me rend la confiance que j'avais totalement perdue en sa présence. Ce n'est pas un sourire moqueur ou nerveux, il n'affiche ni défiance ni amusement, c'est juste le sourire de la sincérité. Celui que je lui préfère et ne lui avais pas vu depuis bien trop longtemps. Alors forcément, je me détends, je souris davantage à mon tour, et quand elle m'embrasse, j'ai le coeur qui s'emballe. J'ai l'impression qu'on aurait dû commencer par là depuis vraiment très longtemps. Mais j'aime à me dire que, quelque part, on peut terminer par là aussi, que c'est une belle aventure qui commence, ici et maintenant, et que je la lui dois.

Entre autres choses, car en fait, je dois tellement à Walby... Et je le lui ai si mal rendu jusqu'ici. Honnêtement, j'aurais parfaitement compris qu'elle ne me pardonne pas mon attitude. Même si tout ça n'était qu'une vaste comédie, ça n'excuse rien, parce que je lui ai menti et que je lui ai fait du mal. Tout ce que je ne me serais jamais imaginé capable de faire à son adresse. Je n'en suis vraiment pas fier...

Mais je n'ai pas vraiment le temps de culpabiliser, en réalité, car en cet instant, ses lèvres sont posées sur les miennes et mon coeur s'emballe comme ça n'avait jamais été le cas jusqu'ici. Elle me rend heureux, tout simplement, et je regrette d'avoir eu besoin de tout ça pour que cette certitude s'impose à moi de la sorte. Je lui rends évidemment son baiser, et j'oublie le temps qui passe. Cela pourrait être quelques secondes à peine. Peut-être aussi qu'il s'agit de longue minutes. Cela m'est égal car je ne pense plus à rien, et certainement pas à ce qui nous entoure, qui nous a trop longtemps freinés ou opressés. Ici et maintenant, je sais où est ma place, et surtout je sais ce que je veux, et sans l'ombre d'un doute, je n'y dérogerais pas.

-Tu peux encore, je le mériterais, je souris quand elle me dit qu'elle aurait dû m'en coller une. Oui c'est vrai, mais je préfère qu'elle s'abstienne. Ou bien... on peut juste oublier toutes ces histoires et... repartir de zéro, qu'est-ce que tu en penses ?

Moi, en tout cas, j'en pense que c'est définitivement le mieux que nous puissions faire.

Orion l'embrassa en retour. Le coeur de Walburga battit à tout rompre. Elle n'y croyait plus, à ce moment, et pourtant, c'était bel et bien en train de se passer. Elle avait l'impression que ce moment aurait dû arriver bien plus tôt ou ne jamais arriver, mais ça n'avait plus d'importance, parce qu'ils étaient ensemble. Elle était bien entre ses bras et contre ses lèvres, et elle n'aurait envie d'être nulle part ailleurs.

Elle se sent vraiment heureuse, et elle a le sentiment que rien au monde ne serait capable de la faire descendre de son petit nuage. Elle avait l'impression qu'elle ne s'était jamais sentie aussi bien de toute sa vie. Et elle n'avait vraiment aucune envie que ça s'arrête, qu'on éclate notre bulle de bonheur.

-Tu peux encore, je le mériterais.

Elle lui sourit. C'est vrai qu'il le mériterait effectivement, mais elle serait bien incapable de mettre sa menace à exécution. Walby ne réussissait plus à reprocher quoi que ce soit à Orion. Il était là, maintenant, ils étaient ensemble, tous les deux. Alors le reste n'avait plus vraiment d'importance, pas vrai ? Oui, pour elle, maintenant, ça n'avait plus la moindre importance.

-Ou bien... on peut juste oublier toutes ces histoires et... repartir de zéro, qu'est-ce que tu en penses ?

-J'en pense que c'est une très bonne idée, répondit-elle avec le sourire, heureuse de ce retournement de situation.

Même s'ils n'avaient pas besoin de repartir complètement de zéro, en réalité, ils pouvaient juste zapper l'épisode des fiançailles et la période durant laquelle Orion avait prétendu sortir avec Lexie. Sans façon, ce n'était pas du tout nécessaire. Mais elle voulait repartir sur les bases de leurs complicités, de leurs conversations animées, et de ce baiser qu'ils venaient d'échanger.

-Comment ça va se passer ? demanda-t-elle finalement. Avec nos parents ?

Ce n'est pas qu'elle voulait précipiter les choses, mais ils savaient tous les deux comment les choses allaient se passer exactement. Le mariage d'Orion annulé, ils lui chercheraient une autre fiancée, et elle-même, maintenant qu'elle avait fini ses études, était "sur le marché". Ils avaient plutôt intérêt à officialiser... s'ins voulaient éviter les problèmes.

Une très bonne idée. Je n'attendais pas d'autre réponse de la part de Walburga. Je sais que c'est peut-être un peu présomptueux, mais en même temps, je crois aussi que nous sommes d'accord sur le fait que nous avons perdu suffisamment de temps comme cela tous les deux, et nous n'avons pas envie d'en perdre encore davantage. On s'est suffisamment pris la tête pour des raisons indépendantes de notre volonté. Ces raisons n'existent plus, à présent, alors il n'est vraiment pas nécessaire d'en rajouter. Nous pouvons juste... profiter de ce que nous avons plutôt que de réfléchir encore trop longtemps à ce que nous n'avions pas. C'est derrière nous, et si nous nous débrouillons bien, alors, il n'y aura pas de drame inutile dans notre histoire.

Nous ne sommes pas obligés de repartir complètement de zéro, mais je pense que nous nous y entendrons très bien tous les deux pour savoir quels moments effacer et quels moments, en revanche, retenir. Car il y a plein de choses qui méritent quand même d'être retenus. Nous ne sommes pas tombés amoureux en un claquement de doigts. Ce n'est pas comme ça que les choses pouvaient encore se passer.

Alors, Walby me pose la question que je n'avais pas envie forcément de formuler aussi tôt, mais qui mérite quand même qu'on se la pose. Nos parents. Leur parler ou se taire ? Notre histoire n'est pas forcément quelque chose que j'ai envie de partager pour l'instant, surtout qu'elle commence tout juste sous cet angle, mais je comprends où elle veut en venir. Mes parents vont vouloir réparer l'"erreur Lexie" au plus vite et sans nous laisser le choix du tout. Alors en gros, il faut espérer qu'on ne fasse pas une erreur monumentale (mais je n'y crois pas du tout) et leur en parler.

-J'avais pas trop ça en tête tout de suite, je t'avoue, je lui réponds avec un sourire. Mais c'est pas comme si on allait pouvoir le leur cacher très longtemps, de toute façon.

On ne va pas commencer à raser les murs... Je ne pense pas que nos parents désapprouveront notre relation. Nos parents qui veulent qu'on veille à la pureté de notre sang ne trouveront que du positif à allier un Black et une Black... et puis, on est des cousins éloignés, on a largement fait pire dans notre famille, déjà.

-J'avais pas trop ça en tête tout de suite, je t'avoue.

Walby s'en doutait et, honnêtement, elle préférait ça. Elle non plus n'avait pas forcément envie d'avoir ça en tête, elle avait bien envie de se contenter de profiter du moment présent... mais pas simple pour elle de faire comme si de rien n'était. Elle avait envie qu'ils partent sur de bonnes bases, qu'ils soient d'accord sur ce qu'ils attendaient de leur relation exactement. Et pour ça, elle avait préféré poser cartes sur table histoire de.

Elle ne voulait pas mettre un malaise ou quoi que ce soit du même genre, ce n'était pas du tout comme cela qu'elle voyait les choses, et elle préférait largement qu'ils savourent, avec une légèreté appropriée, leur relation nouvelle. Elle voulait juste qu'ils soient sur la même longueur d'ondes, qu'ils ne commettent pas d'erreur, d'un côté comme de l'autre, parce que ça pourrait trop vite leur retomber sur le coin de la figure. Et évidemment, ce serait une très très mauvaise chose.

Mais c'est pas comme si on allait pouvoir le leur cacher très longtemps, de toute façon.

Non, en effet. Et cette réponse lui suffisait. Ils officialiseraient s'il le fallait et quand il le fallait, ils pensaient de la même façon, ils appréhendaient leur relation de la même manière. Donc c'était très bien, parfaitement bien comme ça. Elle pourrait rentrer dans les détails, spéculer sur l'éventuel comportement de leurs familles respectives, mais elle n'avait envie de leur faire une trop grande place dans leur histoire à l'heure actuelle. Ce n'était pas du tout nécessaire. Et ils avaient mieux à faire de leur temps pour l'instant, pas vrai.

-On verra ça plus tard, décréta-t-elle dans un sourire pour faire comprendre à Orion qu'elle n'avait pas envie de s'épancher davantage sur la situation. C'est bon, elle n'avait pas besoin de plus que ce qu'on lui accordait, ça lui suffisait comme cela.

Pour couper court à toute discussion davantage poussée, elle clotura le discours en scellant les lèvres de son petit ami tout beau tout neuf d'un nouveau baiser. Pour l'instant, c'était ça qui avait de l'importance : lui, elle, et les baisers qu'ils échangeaient. Et c'était absolument tout;

On verra ça plus tard. Oui, ça me va. Ce n'est pas mon genre de remettre les choses à plus tard, d'accepter de me concentrer juste sur le moment présent sans me focaliser sur l'avenir. Mais je peux bien faire une exception, pour cette fois. J'ai envie de faire une exception pour cette fois. Je suis sur un petit nuage, je n'ai pas envie que qui que ce soit vienne faire exploser la bulle confortable dans laquelle je me suis confortablement lové jusqu'ici.

On peut bien voir ça plus tard, en effet, parce que plus tard, de toute manière, ça n'a pas l'air d'exister, à l'heure où je parle. Il y a moi, il y a elle. Le reste s'estompe, se brouille un peu plus à chaque baiser échangé. J'oublie oùnous sommes, j'oublie tout ce qui nous a éloigné. J'oublierais presque tout ce qui nous a rapprochés également, parce que tout ce qui a existé avant ce moment n'a plus l'air de compter vraiment. Et j'ai l'impression que plus rien n'existera après, même si je sais que c'est faux... Et tant mieux, d'ailleurs, parce que même si ce n'est définitivement pas ce qui me préoccupe maintenant, j'ai quand même hâte à tout ce qui nous attend ensuite. Avec Walby, j'arrive à me projeter. Je l'ai fait avant même de savoir que c'était une chose que j'étais en droit de m'autoriser.

Donc, on met le cerveau en veille et on profite. Finalement, j'y parviens sans vraiment de difficultés. En même temps, qu'est-ce qu'il pourrait y avoir de vraiment difficile à ça ? Le temps se dissout, je ne sais pas vraiment combien de minutes s'écoulent avant que je ne détache mes lèvres des siennes, et que nous nous éloignions l'un de l'autre, pas de beaucoup cela dit.

-Est-ce que ça te dit qu'on aille faire un tour ?

Rien de vraiment particulier, juste marcher côte à côte, être ensemble, profiter, rien d'autre. Je pense vraiment en avoir besoin. N'avoir besoin que de ça. Juste passer du temps avec elle, ne rien faire de particulier, flâner, vivre, profiter. Purement et simplement, sans autre motivation, sans autre certitude, parce qu'on n'en a pas besoin d'autres quand on est ensemble, voilà tout.

Tout remettre à plus tard n'était pas forcément la situation, mais pour le moment, Walby n'avait vraiment pas envie de se prendre le chou pour rien. Elle voulait savourer le moment, pas se donner des noeuds au cerveau ou laisser le doute et la crainte prendre le pas sur toutes ses envies et toutes ses résolutions. Pour le moment, elle est sûre de ce qu'elle veut et de ce qu'elle doit faire. C'est beaucoup, déjà, elle n'a pas envie de gâcher ça, d'une façon ou d'une autre. Ce qui arriverait arriverait, et il viendrait bien assez vite, le moment où ils devraient aller parler à leurs familles respectives tous les deux.

Mais ce n'était pas pour tout de suite dans tous les cas, et en attendant, Walby pouvait bien faire ce qu'elle voulait comme elle le voulait, il n'y avait pas d'obligation particulière... Ils faisaient les choses comme ils le sentaient, en fonction de ce qui leur tenait réellement à coeur, et c'était... tellement bien. C'était un soulagement. Le poids qui pesait sur son coeur depuis des mois s'était tout à coup évanoui. Tout était devenu plus simple, plus agréable. Elle n'échangerait cette sensation-là contre rien au monde, pour elle c'était clair et net. Orion avait fait du mieux qu'il le pouvait dans la situation compliquée où ils étaient. Mais c'était bon, c'était passé. Et maintenant, il y avait les projets qu'ils n'avaient pas voulu faire, et la chance qu'ils choisissaient de s'accorder, aussi.

-Est-ce que ça te dit qu'on aille faire un tour ?

Walburga afficha un nouveau sourire et hocha la tête. L'idée lui plaisait, elle lui plaisait beaucoup, même. Elle aimait l'idée de ne rien faire de particulier, juste passer du temps avec lui, parce qu'elle le voulait, parce qu'elle le pouvait... Elle voulait juste... profiter du moment présent. Il faisait beau, elle était avec Orion. Juste, faire un tour, se promener avec lui, juste ça. C'était un bonheur duquel elle n'avait vraiment aucune envie de se priver.

-Allons-y, approuva-t-elle en se redressant.

Dans le même mouvement, elle attrapa la main du jeune homme dans la sienne et la serra le plus fermement possible, comme pour s'assurer qu'il ne lui échapperait plus maintenant.
Ils pouvaient y aller.