Il était évident qu’il n’y avait pas réellement moyen de s’ennuyer pour les voyageurs temporels, du moins pour lui. Parce que Harry avait conscience que ce n’était pas forcément le cas pour ceux qui n’avaient pas de travail, mais en tout cas Harry ne s’ennuyait pas une seule seconde entre sa formation au bureau des Aurors et tout le reste. En même temps, il ne voyait pas vraiment comment il pourrait le faire. Ses pensées étaient constamment tournées vers le fait qu’ils devaient arrêter Voldemort, qu’ils devaient trouver un moyen de le tuer (ce qui n’allait pas s’avérer si facile que cela apparemment, d’après ce qu’ils avaient découvert), avant de pouvoir rentrer chez eux. S’ils arrivaient à rentrer chez eux. Et surtout, s’ils rentraient chez eux tous ensemble…

Parce qu’il y avait autre chose qui accaparait l’esprit de Harry, le fait que Ginny ne donnait plus de signe de vie depuis qu’elle avait découvert ses mensonges. Le jeune homme savait bien qu’il était sans doute le moins bien placé pour la chercher, pour tenter de la contacter, mais en même temps il ne pouvait pas s’empêcher de s’inquiéter pour elle. Il ne savait pas du tout si elle allait bien, il ne pouvait pas s’empêcher de se dire qu’elle avait peut-être fait une mauvaise rencontre et que c’était pour cela qu’elle ne donnait de nouvelle à personne. Parce que qu’elle ne cherche pas à le joindre, c’était une chose, mais son frère elle n’avait aucune raison de l’éviter. À moins que Ron lui cache qu’il soit encore en contact avec Ginny, ce n’était pas complètement impossible. Dans tous les cas, Harry ne pouvait pas s’empêcher de tenter d’envoyer des bouteilles à la mer et il en avait quand même fait pas mal. Alors, ce jour-là, après sa journée au bureau des Aurors, il décida de se rendre à la poste pour voir si quelqu’un ne lui avait pas laissé quelque chose… si Ginny ne lui avait pas laissé un message. À lui ou aux autres. Il tentait le tout pour le tout, même s’il se doutait qu’il allait rentrer bredouille.

Quand il arriva à la poste, son regard se posa sur la personne qui se trouvait au comptoir. Il avait un air familier, mais Harry ne comprit pas tout de suite qu’il le connaissait. Ce fut quand il s’approcha un peu et surtout quand l’homme prit la parole qu’il le reconnu… oh bordel. Harry fut incapable de contenir sa surprise et manqua presque de faire un pas en arrière d’ailleurs. C’était Rusard sous ses yeux et clairement, il ne pouvait pas s’empêcher de le dévisager. C’était sans doute bête, mais… il était devant Argus Rusard l’horrible concierge de Poudlard et ce dernier était jeune (mais tout aussi renfrogné visiblement, ce n’était pas la vieillesse son soucis décidemment). Harry avait fait de nombreuses rencontres étranges depuis son voyage dans le temps, que ça soit McGonagall jeune ou encore Miss Figg. Mais là c’était pire que tout.

« Heu… » Harry tenta de reprendre un peu contenance quand même, pour prendre la parole. « Je voulais savoir… s’il n’y avait pas un paquet pour moi. »

Il était évident que Harry ne devrait pas dévisager le jeune homme sous ses yeux, mais le simple fait de se dire que l’homme sous ses yeux était jeune, c’était justement ce qui le poussait à le dévisager. Il avait vraiment du mal à se rendre compte qu’il se trouvait bel et bien en face de Rusard. À force, le survivant avait quand même l’habitude de croiser des personnes jeunes qu’il connaissait bien plus vieux dans son époque. Que ça soit Albus Dumbledore – bon, d’accord, lui ne comptait pas parce que l’homme avait l’air aussi vieux que dans cinquante ans –, Minerva McGonagall ou encore Miss Figg qu’il avait croisé, il y avait donc maintenant Argus Rusard. En un sens, Harry devrait donc avoir l’habitude et ne pas avoir ce sentiment si étrange. Et pourtant, il l’avait encore bel et bien et c’était même pire que tout avec Rusard. En grande partie sans doute parce que le jeune homme et le concierge n’avaient jamais réussi à s’entendre. En même temps, Harry partait du principe que personne en dehors de son horrible chatte n’était capable de supporter l’homme sous ses yeux. Et visiblement, ça ne devait pas dater de son passage à Poudlard. Puisqu’on ne pouvait pas dire que le jeune homme travaillant à la poste magique était particulièrement aimable.

Bon, Harry devait bien reconnaître qu’il n’était pas le plus doué non plus, puisqu’il n’avait même pas pris la peine de donner son nom à l’homme sous ses yeux. Mais quand même, Rusard n’avait pas besoin de lui parler de cette manière. Autant dire que même maintenant, Harry n’avait aucune raison de s’entendre avec cette personne. Ça tombait bien, il n’avait pas besoin de s’entendre avec lui en même temps.

« J’ai un nom oui. » Dit-il alors, ne pouvant pas s’empêcher de se sentir un peu vexé par les propos de Rusard. Non il n’attendait pas à ce qu’on le reconnaisse comme ça, d’un coup d’œil. Plus maintenant en tout cas, puisque dans cette époque il n’était plus question de Harry Potter le survivant, il n’y avait aucune raison qu’on le connaisse. Et à choisir, le jeune homme avait bien envie qu’on ne le reconnaisse pas dans le futur, qu’il ne soit pas l’enfant aillant survécu à la mort. Le garçon qui avait perdu ses parents, mais qui était encore en vie. « Je m’appelle William Black. » Répondit-il alors. « Alors, il y a un colis pour moi ou non ? » Demanda-t-il un peu sèchement sans doute.

Parce qu’il ne parvenait pas à juste faire comme si de rien n’était et comme si les propos de l’homme sous ses yeux ne l’avaient pas agacé. Comme si la façon qu’il avait de lui parler ne l’agaçait pas. Et pour le coup… Harry n’était plus le simple élève de Poudlard en compagnie du concierge de l’école de magie, Rusard avait plus ou moins son âge. Ça changeait un peu la donne quand même.

Black, oui, c’était le nom que Harry prétendait porter, et qui était à ses yeux une fierté parce qu’il l’avait choisi par rapport à Sirius. Mais évidemment, le jeune homme avait conscience que ce nom n’était pas forcément plaisant à entendre pour certaine personne et quelque chose lui disait que Rusard n’avait pas spécialement eu la sympathie des sorciers de sang pur. Mais tous les Black n’étaient pas les mêmes, la preuve avec Sirius quand même. Et d’autres personnes aussi, toutes les personnes qui se trouvaient brûlé de la tapisserie de la famille en somme. Comme Cedrella Black, la grand-mère de son meilleur ami, que le jeune homme n’avait pas en tête, sinon il aurait peut-être pris la peine d’aller la voir pour savoir si elle avait vu Ginny.

Harry ne dit rien quand Rusard décida finalement d’avoir voir s’il y avait un coli à son nom, quand bien même il n’avait pas beaucoup d’espoir. De toute façon, s’il devait se retrouver avec un colis dans les mains, Harry ne saurait pas réellement comment réagir tant la situation était particulière. Il n’aurait vraiment pas cru tomber sur Argus Rusard, le futur concierge de l’école de magie. Même si au moins, il y avait quelque chose qui ne changeait pas, il était évident que son interlocuteur était une personne particulièrement désagréable et il n’avait pas attendu d’être vieux pour ça. Même si ça n’avait sans doute pas aidé. Le jeune homme attendit le temps qu’il dû attendre, avant d’entendre Argus Rusard affirmer qu’il n’y avait pas de colis et qu’il fallait croire « qu’on n’avait pas voulu penser à lui ». Harry serra des dents en entendant ces mots. Il n’avait aucune idée de qui il était et il lui parlait comme ça. Au moins, quand il était concierge à Poudlard, Harry voulait bien croire qu’il avait une raison de ne pas l’apprécier (autre que le fait qu’il soit un sorcier), parce qu’on ne pouvait pas dire qu’il avait eu l’habitude de suivre le règlement. Mais là, il n’avait juste aucune raison d’être désagréable.

Mais bon, Harry devrait juste se contenter de passer son chemin, de partir, de ne pas se préoccuper de ce qu’il venait de voir. Ce n’était pas la première fois qu’il se retrouvait avec une personne de son futur ici, bien plus jeune. Et ça n’allait sûrement pas être la dernière fois non plus. Il ne devait pas s’en préoccuper donc, il devait simplement se contenter de passer son chemin. Sauf que non, finalement, il fut incapable de ne pas dire quelque chose.

« Vous savez, vous gagnerez clairement à vous montrer plus agréable ! »

D’accord, Harry n’avait pas du tout besoin de dire ce genre de chose, il n’avait pas besoin de commenter une seule seconde la situation, mais en même temps il n’avait pas pu s’en empêcher. Même s’il se doutait que ça n’allait sûrement servir à rien.

Bon, d’accord, clairement Harry ne devrait rien dire du tout. Mais comment ne rien dire alors qu’il se retrouvait devant un Argus Rusard à peine plus âgé que lui, avec le même comportement que celui qu’il avait à Poudlard pendant ses études. Bon, ce n’était peut-être pas tout à fait le même en réalité, mais Harry n’avait aucune difficulté à voir l’homme qu’il avait connu pendant ses études et qui râlait à longueur de temps concernant sa condition, concernant les autres. Bon, le jeune homme savait bien que l’homme avait quand même une vie pas forcément évidente, enfin il pouvait comprendre que ça n’avait pas toujours été facile, mais ce n’était pas une raison pour se comporter de cette manière. Harry n’aurait rien du dire, mais en même temps il n’avait pas pu s’en empêcher. La vie du futur concierge de Poudlard allait quand même être plus facile si jamais il était moins… comme il l’était en fait.

Le jeune homme se mangea donc clairement dans la figure qu’il aurait dû ne rien dire, qu’il aurait dû « se la fermer ». Rusard affirma qu’il n’avait aucune raison de se montrer agréable avec les gens comme lui. Clairement, Harry s’était souvent demandé pourquoi le concierge de l’école de magie le détestait et en un sens, il avait forcément pensé que ça pouvait avoir un rapport avec le fait qu’il était connu. Après tout, il n’était autre que le survivant, il avait donc une réputation et Harry n’avait pas pu s’empêcher de se dire que ça avait dû jouer dans le fait que le concierge le détestait ou non. Sauf que là, en cet instant précis, Rusard avait clairement la même attitude que quand il allait le connaître dans le futur, alors que Harry ne lui avait rien fait ici et maintenant. Bon, il ne s’était pas retenu de sa petite remarque, mais ça ne lui valait – à ses yeux – pas un « comme toi ».

« Je ne vois pas vraiment ce que j’ai pu faire pour mériter ça. » Affirma-t-il, alors, ne cherchant pas spécialement à se montrer agréable. Ce n’était pas contre le jeune homme sous ses yeux non plus, mais il ne pouvait pas s’empêcher d’être touché par cette conversation. Il ne parvenait pas à être indifférent, c’était bien ça le souci. Et c’était clairement parce qu’il connaissait Rusard, du moins qu’il connaissait le Rusard du futur et qu’il avait bien trop le sentiment de retrouver ici et maintenant d’ailleurs. « Si vous n’aimez pas qu’on vous dise quoi que ce soit, vous n’avez qu’à vous montrer plus sympa. »

Bon, d’accord, Harry avait parfaitement conscience qu’il ne risquait pas d’arranger la situation, ici et maintenant, mais tant pis. Il avait envie de dire ce qu’il avait à dire, tout simplement.

Harry se doutait bien que quoi qu’il dise, ça n’allait pas changer grand-chose. Que Argus Rusard était têtu, il y avait quand même peu de chance qu’il change simplement parce que le jeune homme prenait la peine de lui parler, de lui donner des conseils. Enfin, en un sens Harry devait bien avouer qu’il était un peu perturbé de se rendre compte que la personne sous ses yeux soit d’aussi mauvais caractère, autant de temps avant. Rusard n’était pas qu’un simple vieux concierge aigri, il l’était depuis toujours. Bon, son statut de Cracmol ne devait sans doute pas aider, mais quand même…

Harry n’avait pas pu s’empêcher de prodiguer ces conseils, de dire quelque chose. Il ne devrait pas sans doute, mais ce n’était pas donné tout le monde quand même d’avoir l’occasion de croiser la version jeune d’une personne qui n’allait pas manquer de pauser des soucis dans le futur. Enfin, Rusard n’était qu’un moindre souci, mais s’il pouvait potentiellement faire changer le caractère de Argus… ça pouvait quand même arranger ses affaires. Enfin… c’était maintenant, il n’allait pas revenir en arrière non plus, mais Rusard méritait quand même d’être quelqu’un d’autre, d’être un peu moins teigneux.

Enfin, dans tous les cas, quoi qu’allait dire le survivant, son interlocuteur n’allait pas être réceptif, c’était l’évidence même. D’ailleurs, au vu de la manière dont il lui répondit c’était évident. Harry pourrait potentiellement chercher à insister un peu plus, mais il n’allait pas le faire, parce qu’il n’y avait pas grand-chose à dire.

« Je disais ça comme ça moi c’est tout. » Répondit-il, en haussant les épaules. Il savait bien que ça n’allait pas changer quoi que ce soit qu’il le disait, qu’il ne devrait pas insister, mais en même temps c’était plus fort que lui. Il n’y pouvait rien. Cela dit, il savait aussi que ce n’était pas ainsi qu’il allait arranger quoi que ce soit et surtout, que ça n’allait rien apporter du tout. « Je vais vous laisser tranquille. » Parce qu’il n’avait aucune raison d’insister plus que de raison, qu’il devait quand même passer son chemin. « Vous direz bonjour à Miss Teigne de ma part. » Ajouta-t-il, sans vraiment trop savoir si c’était une bonne chose.

Il ne savait même pas si le chat était déjà dans la vie de son interlocuteur, et il avait conscience que c’était quand même un peu dangereux, que ce n’était pas vraiment raisonnable. Mais tant pis, le jeune homme l’avait dit maintenant et sur ces mots, il tourna les talons parce qu’il se doutait qu’il n’y avait rien à ajouter de toute façon.

La phrase de Harry sembla faire son petit effet. En même temps, il devait bien avouer que c’était un peu le but de la manoeuvre. Le jeune homme savait que c’était inconscient, qu’il ne devrait pas dire une telle chose et qu’il prenait des risques. Mais en même temps, au pire ? Ça n’allait pas changer grand chose non plus, il y avait déjà eu des conséquences à leur arrivé dans cette époque et beaucoup de personnes étaient déjà au courant. Bon, en même temps, le survivant n’avait pas spécialement l’intention de dire à Rusard qu’il venait du futur et qu’il allait être l’une de ses têtes de turc quand il sera élève à Poudlard et lui concierge. Ce n’était pas utile, il n’allait rien gagner à cela. Mais... bon, il n’avait pas pu s’empêcher de l’attaquer un peu. Si l’homme n’avait pas décidé de répliquer quelque chose, sans doute que Harry se serait contenté de partir, de passer la porte et surtout de ne jamais revenir.

Mais Rusard reprit la parole en lui demandant qui il venait de traiter de teigne. Est-ce que c’était vraiment cela qu’il avait compris, qu’il pensait sincèrement qu’il l’avait traité de teigne ? Harry ne savait pas où en était la vie de Rusard, si Miss Teigne était déjà dans sa vie ou pas. Au vu de sa réponse, ça semblait quand même plus pencher sur l’optique que la chatte n’était pas encore dans la vie du jeune homme, sinon il aurait compris ce qu’il avait dit. Harry s’arrêta donc, pour se retourner vers le futur concierge et lui répondre.

« Il n’y a pas grand monde ici. » Répondit-il, avec un ton de suffisance.

Pourquoi se retiendrait-il après tout ? Argus Rusard ne semblait pas être plus agréable maintenant que dans le futur, et vu comment il allait en chier avec lui quand même quand il allait être élève à l’école, le jeune homme pouvait bien en profiter un peu maintenant. Ça n’avait rien de réellement intelligent, c’était même clairement puéril, mais en même temps il avait juste envie de le faire donc, il le faisait. Au pire, ça n’allait pas changer grand chose donc, parce que même s’il affirmait à Rusard qu’il venait du futur et que l’homme allait être un concierge horrible à Poudlard avec une Miss Teigne horrible comme animal de compagnie, il était évident qu’il n’allait pas le croire. Qui pouvait croire une chose pareille ? Ceux qui étaient au courant les croyaient, mais c’était parce qu’ils avaient eu des preuves, sauf que Harry n’avait pas l’intention d’en donner à son interlocuteur.

Harry avait conscience qu’il allait beaucoup trop loin, qu’il devait simplement prendre ses cliques et ses clacs et s’en aller, ne pas continuer de parler avec Rusard. Parce qu’il n’était pas l’homme qu’il avait connu pendant sa scolarité, pas encore, et qu’il ne gagnerait rien. Sauf qu’en même temps, c’était plus fort que lui. Quand il voyait comment réagissait Rusard alors qu’il n’avait rien fait, alors qu’il n’était même pas Harry Potter. Non parce que le jeune homme n’avait pas pu s’empêcher de se dire que le concierge de l’école avait eu aussi envie de s’acharner sur lui simplement parce qu’il était connu, parce qu’il était le survivant. Mais là, il n’y avait pas de raison. Enfin, si, il y en avait une, officiellement, le jeune homme était un Black, ce qui ne devait pas vraiment l’aider à mieux l’apprécier. Dans tous les cas, Harry devrait arrêter… mais c’était difficile.

Rusard le qualifia de « petit crétin » ce qui avait quand même le don de l’agacer. Non mais pour qui il se prenait au juste ? En prime, il lui affirma que ce n’était pas parce qu’il était né avec une petite cuillère en argent dans la bouche qu’il devait se laisser manquer de respect. En soit, il n’avait pas tort, sauf que Harry n’était en aucun cas dans cette situation. Au clair, le jeune homme le jugeait simplement sous son nom et c’était quelque chose que Harry ne supportait pas. Surtout que tous les Black ne se ressemblaient pas. D’accord une partie de cette famille était tarée, il ne pouvait pas dire le contraire. Mais s’il avait choisi ce nom, c’était pour Sirius qui n’était clairement pas comparable avec le reste de sa famille. Cela dit, Rusard ne pouvait pas connaitre tout cela, donc… mais quand même. Harry était énervé contre le futur concierge et ça se saurait s’il était capable de réfléchir avant d’agir.

« Qu’est-ce que tu en sais de ma vie hein ? » Demanda-t-il vivement, en abandonnant définitivement le vouvoiement. Au final, ils avaient presque le même âge, Harry n’avait pas spécialement besoin de prendre la peine de le vouvoyer, même si dans l’idée c’était bizarre parce que Harry avait quand même en tête le futur concierge de Poudlard. « Tu juges simplement à mon nom ? Bah figure toi que je ne suis pas né avec une cuillère en argent dans la bouche. Et ce n’est pas pour autant que j’ai décidé de devenir un petit con. Contrairement à toi. »

Harry avait conscience qu’il ne devait pas continuer sur cette même tournure, mais il ne pouvait tout simplement pas s’en empêcher. Il n’avait aucune envie de laisser Rusard continuer de lui parler de cette façon, qu’il commence à s’imaginer il ne savait quoi à son sujet. Même si forcément, ce n’était pas comme si Rusard était au courant de quelque chose dans sa vie.

Harry devait calmer le jeu, il le savait. Il ne devait pas insister plus avec Rusard, il savait bien qu’il était en train de jouer avec le feu, mais en même temps… eh bien, il ne pouvait pas s’en empêcher. Au final, c’était évident, Rusard était vraiment insupportable qu’il soit vieux ou non. Il avait des préjugés et il avait décidé de le mettre dans une case simplement parce qu’il s’était présenté comme un Black. Alors d’accord, Harry pouvait comprendre que ça soit difficile de se dire qu’un Black pouvait être quelqu’un de bien, mis quand même. C’était le cas aussi à sa première année à Poudlard, Rusard l’avait eu dans le collimateur simplement parce qu’il était Harry Potter. C’était le même donc et Harry n’avait pas l’intention de se laisser maltraiter.

Pare que là, il se disait qu’il avait quand même la légitimité de lui répondre. Ce n’était pas le concierge de l’école quand il avait onze ans, ce n’était pas Rusard qu’il fallait éviter dans les couloirs de Poudlard. Ce n’était qu’un crétin travaillant au bureau de poste et décidant de mal lui parler simplement parce qu’il n’aimait pas son nom. Rusard lui affirma qu’il n’allait pas le plaindre pour la simple et bonne raison qu’il était un petit crétin. Bien, comme il voulait, il ne prendrait pas la peine de se montrer plus agréable non plus clairement. Et pire encore, ce fut quand Rusard le menaça en lui disant que s’il continuait de le traiter de petit con, il allait lui refaire l’éducation que ses parents friqués n’avaient pas eu le temps de lui donner. Le sang de Harry ne fit qu’un tour dans son corps. Quand on lui parlait de ses parents, c’était rare quand même qu’il fasse l’air de rien. Alors bien sûr, Rusard n’avait aucune idée du fait que ses parents étaient morts, pour la simple et bonne raison que ces derniers n’étaient même pas encore nés pour le moment. Mais quand même…

« Je t’interdis de parler de mes parents comme ça ! » Répliqua-t-il vivement et sous le réflexe, le jeune homme sorti même sa baguette de sa poche pour la pointer sur Rusard. D’accord, il était en train de déconner complet, mais le jeune homme n’y pouvait rien. Quand on parlait de ses parents, surtout comme ça, il ne pouvait pas s’empêcher de réagir un peu trop vivement. Et il faut dire que Rusard n’avait pas manqué de mettre ses nerfs à vif. Tant pis… si ça pouvait lui faire comprendre qu’il devait changer et ne pas avoir un comportement de crétin, ça serait une bonne chose en un sens. « Je te l’ai dit, tu ne sais rien, alors arrête d’agir comme un petit con. » Répéta-t-il en forçant le ton sur la dernière insulte qu’il lui lançait pour bien lui prouver qu’il n’avait que faire de ses menaces et que ce n’était pas ça qui allait l’arrêter.

Harry aimerait bien affirmer que sortir sa baguette à tort et à travers – celle en bois bien sûr, n’imaginez rien de dégueulasse – n’était pas une habitude chez lui, mais malheureusement… disons qu’il avait tendance à agir un peu trop sur le coup de ses nerfs à vifs. Rusard l’avait clairement agacé, il avait tenté de lui dire des choses sympa (bon, il s’y était pris comme un manche, mais c’était évident que le survivant n’allait pas le reconnaître), et il le traitait comme ça. À se demander si Argus Rusard était quelqu’un qu’on pouvait sauver, s’il n’était pas né avec un caractère de merde comme il le lui connaissait en tant que concierge de l’école. Bon, Harry pouvait, s’il se mettait un peu à la place de Rusard, comprendre que sa vie n’avait sans doute pas été agréable et qu’il puisse être aigri, mais en même temps il en avait tellement bouffé pendant ses cinq années d’école qu’il ne pouvait pas juste l’ignorer. Et il aurait bien aimé pouvoir lui faire comprendre qu’il devait mieux agir avec les autres, histoire de sauver un bon paquet d’élève traumatisé par le cracmol.

Mais ça ne marchait clairement pas et il se retrouvait là, dans le bureau de poste, à pointer sa baguette sur Argus. Harry ne pouvait évidemment pas prendre le risque d’attaquer et il n’avait pas l’intention de le faire, c’était clairement un moyen beaucoup trop facile de prendre le dessus sur son interlocuteur parce qu’il savait parfaitement qu’il ne pouvait pas faire acte de magie. Rusard lui lança donc qu’après il disait que c’était lui qui agissait comme un petit con. Harry serra des dents, surtout parce que le jeune homme avait beaucoup trop raison dans ses propos, il affirmait que Rusard agissait comme un con, et lui sortait sa baguette comme ça. Mais… il n’aurait pas dû parler de ses parents tout simplement, le juger bêtement alors qu’il ne connaissait pas simplement parce qu’il était jaloux. Bon, clairement Harry devait calmer le jeu.

« C’est ça, tant pis pour toi. » Se contenta-t-il de dire, ne parvenant pas réellement à décider de s’excuser de quoi que ce soit. En même temps, si Rusard ne le faisait pas, il ne voyait pas pourquoi il prendrait la peine de le faire de son côté.

En tout cas, valait mieux tout simplement abandonner les frais ici et maintenant. Il baissa sa baguette, la rangea dans sa poche et tourna les talons. Ça ne servait à rien d’insister plus, il avait même déjà beaucoup trop insisté en réalité. C’était évident qu’il n’aurait pas dû avoir cette conversation avec Rusard, même si au vu de la situation c’était un peu difficile de se retenir. Au moins c’était clair, Rusard ne changerait pas et serait forcément le concierge aigri qu’il connaissait. Heureusement qu’il ne lui avait pas donné son vrai nom, sinon il se doutait que le futur aurait été pire.