I

l ne savait pas pourquoi il avait fait ça. De manière générale, il ne savait vraiment pas pourquoi il prenait ces chemins spécifiques, et pourquoi il orientait sa vie d'une telle manière. Ça faisait un moment que le sens de sa vie était complètement flou, et sans June pour y remettre un peu d'ordre, il serait certainement complètement paumé à l'heure actuelle. Mais même elle ne suffisait pas à ranger ce désordre intérieur, ce fouillis au creux de son crâne. Ce n'était déjà pas bien glorieux quand il avait appris que sa mère était une criminelle et avait décidé de la tuer, c'était encore moins glorieux depuis que sa mère était sortie du coma, et dans un tel climat, dans une telle atmosphère, il ne fallait sans doute pas s'étonner qu'il agisse de façon totalement inconsidérée. En jouant le jeu de Lexie, en lui laissant entendre qu'il voulait rencontre Tom Jedusor et devenir un "chevalier", comme il le disait, il ne savait pas vraiment dans quoi il s'embarquait. Il savait seulement que, sur le moment, il n'avait pas voulu être honnête, il avait voulu jouer avec le feu sans trop savoir où ça le mènerait. Il n'était pas certain de pouvoir et savoir se cantonner à un rôle d'agent double, il ne savait pas ce qu'il attendait, lui qui n'avait aucun intérêt personnel sur toutes ses affaires, il avait seulement une sorte de revanche personnelle à prendre sur la vie. Et il le faisait peut-être au mépris d'autres personnes. Il n'en savait rien. Il devait rencontrer Jedusor bientôt, et le moment serait décisif. Il préservait pour le moment la blancheur lactée de son avant-bras, mais avant l'été... Et en attendant, il éprouvait encore l'envie de se défiler. Il fallait qu'il revoit William Black, qu'il lui parle, car c'était, après tout, lui qui avait immiscé le doute dans son esprit, et ce qui se déroulerait certainement prochainement serait également de son fait. Même s'il ne pouvait pas forcément accuser le rouge et or de ce qui pourrait bien être sa propre et seule erreur. Quand Andreï croisa William (ou en tous cas pensait-il encore qu'il se prénommait de cette façon) au détour d'un couloir, il saisit donc une opportunité qui ne se représenterait peut-être plus.

-William ? l'interpella-t-il en arrivant à son niveau, l'attrapant par le bras pour attirer son attention vers lui. La méthode était peut-être un peu trop... forcée... mais il n'avait pas beaucoup de solutions à l'heure actuelle. Il fallait vraiment qu'il lui parle. C'était peut-être la dernière occasion avant les vacances. Il faut que je te parle.

Il s'étonnait vraiment lui-même d'avoir su adopter un ton à ce point décidé, déterminé, mais ce n'était plus vraiment le moment d'être hésitant, à ce stade. Il était allé vraiment trop loin dans tous les cas.

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I

l n'avait rien eu besoin de dire sinon qu'il souhaitait s'adresser à son interlocuteur, ce dernier avait immédiatement compris, du moins Andreï le pensait-il, puisque le rouge et or l'invitait à présent à le suivre à travers le couloir jusqu'à une salle de classe vide. En effet, discuter au milieu de la foule des élèves n'aurait pas été la méthode la plus discrète, et la discrétion était de mise au vu des circonstances. L'affaire était grave, le jeune homme en avait bien conscience, il n'avait pu que prendre toute la mesure de la situation à mesure que la situation avait évolué et que les propos du jeune homme s'étaient vu confirmés par l'intervention de Lexie Hepburn. Andreï, cédant à une légère paranoïa, regarda attentivement autour de lui une fois la porte refermée derrière eux et se permit de tirer sa baguette de sa poche pour jeter autour d'eux un sortilège d'insonorisation. Il ne voulait pas que leurs conversations retombent entre des oreilles indiscrètes, surtout si celles-ci ne se privaient pas de tout rapporter à celui qui était dorénavant son nouveau maître.

- Il y a plusieurs semaines, une fille de ma maison, Lexie Hepburn, est venue me parler. Elle m'a fait tout un pitch sur l'importance du sang pur, et sur le fait qu'elle appartenait à un groupe qui luttait pour les "vraies valeurs". Forcément, j'ai pensé à ce que tu m'as dit.

Il marqua une pause, hésitant... lui-même avait encore peine à croire qu'il s'investissait à ce point dans tout cela alors qu'il y comprenait si peu de choses. Il avait seulement le besoin d'agir, de bouleverser l'ordre en place, de faire un pied-de-nez en des valeurs dans lesquelles il ne voulait surtout pas croire, parce qu'elles avaient créé un monstre, un monstre qui avait eu la cruauté de devenir une mère, sa mère, et de lui faire subir les pires ignominies, les pires humiliations. Il jeta de nouveau un regard à droite et à gauche, même s'ils étaient définitivement les seuls dans cette salle de classe vide, puis il avait relevé la manche de sa chemise. Sur son avant-bras était tatouée la marque des ténèbres, sombres, alarmante, et dont il gardait encore le souvenir douloureux, comme un marquage au fer.

-C'est sa marque... Il prit une grande inspiration. Je veux pas les laisser faire. Je ne veux pas devenir comme... Il n'acheva pas sa phrase. Même après tout ce qu'elle lui avait fait subir, il était toujours incapable de dénoncer sa mère. Si toi ou d'autres tentez de l'arrêter, alors je vais vous aider.

Son ton était emprunt d'une détermination qu'il était bien rare de lui trouver, dans de telles proportions tout du moins. Il ne pouvait plus se contenter d'être le spectateur de sa vie. Il en avait eu conscience quand il avait pris la décision de tuer sa propre mère. Il en était plus certain encore à présent, peut-être à cause de son échec. Il ne voulait pas en affronter un autre.

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P

armi tous les scenarios qu'Andreï avait envisagés (et il en avait envisagé beaucoup, c'était malheureusement l'un de ses plus grands défauts, il avait tendance à se poser beaucoup trop de questions), le pire pour le vert et argent aurait été de trouver William Black et d'entendre de sa part que tout ce qu'il lui avait dit lors de leur précédente conversation n'était rien d'autre qu'un immense canular, auquel il ne fallait pas prêter le moindre crédit. Bref, il craignait de se retrouver seul avec cette marque sur l'avant-bras pour le lier à tout jamais à une cause dans laquelle il ne croyait même pas. S'il avait pris tant de risques (et il s'étonnait toujours autant lui-même d'avoir su en prendre autant étant données les circonstances), c'était qu'il avait su que William et ceux qui "luttaient" à ses côtés lui prêteraient main forte, qu'il prendrait réellement part à quelque chose et ne prétendrait pas seulement. Qu'aurait-il fait si tout cela avait été illusoire ? Il n'en avait pas la moindre idée. Il aurait été perdu, sans doutes. Il ne l'aurait pas supporté, il subissait dors et déjà assez de déconvenues comme cela. Même si oui, bien sûr, on ne pouvait nier que c'était lui qui les cherchait.

Mais l'attitude de Harry face à son discours et à sa démonstration plus que probante (la marque qu'il portait constituait tout de même une preuve ce qu'il y a de plus accablante, et, visiblement, elle n'était pas étrangère à celui qui l'observait présentement) ne manquait pas d'être claire, et devait dissiper comme il se doit les craintes et appréhensions qu'il avait pu éprouver en décidant d'aller aborder le rouge et or. Visiblement, il était satisfait de la situation, une situation dont Andreï comprenait de mieux en mieux l'ampleur, même s'il était convaincu que bien des choses pouvaient lui échapper encore. William l'affirmait, il avait besoin de toute l'aide possible pour parvenir à ses fins, lui et ceux de son groupe de résistants, somme toute. Et Andreï voulait bien le croire, il devinait que la situation dépassait de très loin l'imagination de bien des élèves qui peuplaient l'école de magie... élèves dont il avait fait partie lui aussi, d'ailleurs, avant de comprendre la réalité... et d'être incapable de l'ignorer.

Son aide serait inestimable, et Andreï comprenait bien en quoi. Après tout, avoir quelqu'un qui soit directement infiltré chez l'ennemi, un espion, somme toute, c'était forcément utile, voire nécessaire, ne serait-ce que pour mieux comprendre les plans et les intentions de Jedusor (puisque, manifestement, le jeune homme n'en savait pas tout, lui non plus). Andreï allait jouer le rôle de taupe, d'infiltré, d'agent double. Il ne se serait jamais imaginé porter une telle casquette, mais ce n'était au final pas pour lui déplaire. Même si les risques ne manquaient pas de l'inquiéter tout de même. Pouvait-il vraiment être sûr d'être à la hauteur de ce que l'on attendait de lui ? Non, bien sûr que non...

-Dis-moi ce que je dois faire. demanda-t-il alors, définitivement résolu.

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A

ndreï écouta très attentivement tout ce que Harry pouvait avoir à lui dire. La suite des opérations allait en grande partie dépendre de ses directives. Non pas que le vert et argent apprécie d'obéir à qui que ce soit, mais il savait que la cause qu'il avait choisi de défendre (toujours sans trop savoir pourquoi) nécessitait qu'il sache faire preuve d'autant de discipline que possible. Il fallait que le groupe soit organisé, structuré, sans quoi l'édifice serait aussi fragile qu'un simple château de carte, et ce n'était pas envisageable. Il s'en rendait bien compte, même si l'ampleur de la situation le frappait au visage comme une claque magistrale, il allait avoir un rôle-clé. De ce qu'il comprenait, aucun autre résistant n'avait sa place auprès des chevaliers de Walpurgis. Il serait le seul et unique espion, le seul et unique infiltré, il était par conséquent plus que nécessaire qu'il ne se laisse pas trahir. Les directives de William/Harry étaient relativement simples, il devait se "contenter" de récolter le maximum d'informations possible, il devait agir en qualité d'observateur plutôt qu'en qualité d'acteur. Au fond, ça l'arrangeait, cela lui paraissait tout de même moins risqué.

Le rouge et or ajouta qu'il devrait rencontrer Pomona Fitz. Pomona Fitz ? À la tête de la résistance ? Andreï ne l'aurait jamais supposé. Non pas qu'il la connaisse vraiment (et manifestement, il la connaissait encore moins qu'il ne le pensait de prime abord), mais ils avaient partagé la même maison pendant plusieurs années, quand même, et elle lui avait donné l'impression d'être avant tout quelqu'un d'austère et solitaire, qui n'avait vraiment rien d'une meneuse, et encore moins dans un combat contre Tom Jedusor. Quoi qu'ils n'avaient effectivement jamais eu l'air de s'entendre, et que même si Pomona était de sang pur, il ne l'avait jamais vu côtoyer les réceptions et grandes festivités des gens comme ...lui, de ces grandes familles de haute réputation, disons. Mais soit, il la rencontrerait. Il n'avait de toute façon plus le choix, à ce stade, ce devenait véritablement nécessaire afin de pouvoir avancer comme il se doit. Il s'était lancé à l'aveuglette, mais il ne pouvait plus se permettre d'abandonner autant de choses au hasard. Ce serait fou. Même, ce serait particulièrement absurde et stupide.

Enfin, le dernier point qu'évoqua Harry ne manqua pas de faire grimacer légèrement le vert et argent. Même si, au fond, c'était évident. Il fallait qu'il passe pour le Chevalier modèle. Pas seulement dans l'intérêt des résistants, mais dans son propre intérêt. Si sa couverture était découverte, il ne donnait pas cher de sa peau. Mais il appréhendait déjà ce que cela allait signifier pour lui. Et certaines perspectives étaient à ses yeux terrifiantes.

-D'accord. répondit-il, malgré tout décidé. Pouvait-il seulement renoncer à ce stade, de toute façon ? Non, bien sûr que non. Et s'il m'ordonne de faire quelque chose... de vraiment amoral ?

De tuer quelqu'un, par exemple...

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E

n vérité, Andreï n'avait pas besoin de la réponse de son interlocuteur pour savoir à quoi s'en tenir, mais un élan d'optimisme et de naïve (élan on ne peut plus rares chez lui, c'est une certitude) lui avait donné à penser qu'il y avait peut-être une solution annexe, une solution à laquelle il n'aurait pas pensé, qui ne mêlerait pas les regrets et l'amertume à la hargne et à la détermination. Il comprenait à peine pourquoi il faisait ce qu'il faisait, oui, mais il savait qu'il en avait envie, qu'il ne changerait pas d'avis (comme si c'était encore possible...) parce qu'il sentait reposer sur ses épaules un fardeau que sa mère lui avait transmis. Anya Armyanski était un monstre, il voulait à tous prix se prouver qu'il ne deviendrait pas comme elle, que contrairement à ce que tout le monde semblait penser - y compris Jedusor, apparemment - il n'était pas voué à faire le mal et à s'accomplir dans les même horreurs que sa génitrice. Pour cela, il s'était saisi impulsivement du premier moyen venu de le prouver, au mépris des risques et des difficultés qu'il allait, à coup sûr, rencontrer.

Seulement, oui, c'était une belle et noble chose que de vouloir défendre le bien et détruire le mal (si l'on décidait d'adopter un point de vue à ce point manichéen, et c'était bel et bien le point de vue d'Andreï), c'en était une autre que de le faire de la bonne manière, d'y parvenir sans se perdre en chemin. Il ne pouvait entièrement se leurrer, il s'était engagé sur une pente glissante, dont il risquait fort de ne pas sortir indemnes. En fait, les séquelles étaient inévitables. Il ne pouvait endosser tout à coup le rôle de chevalier blanc sans espérer que le blanc ne soit noirci d'hémoglobine. Pour ne pas devenir comme sa mère, il allait devoir prétendre être comme elle, et sa cruauté devrait, en façade, être la sienne. C'était inévitable. Et c'était la crainte d'Andreï. Et si, à force de porter ce masque, il oubliait ce qui devait se trouver en-dessous ? Non, ça ne devait pas arriver. Heureusement, pour éviter cela, il osait croire pouvoir compter sur les rares membres de son entourage, à commencer par June, bien sûr (comment réagirait-elle quand elle saurait ? Il n'osait trop y penser pour le moment), mais aussi sur William et les autres résistants. William, qui, malheureusement, lui adressa la réponse tant crainte mais au fond inévitable : oui, il devrait obéir à tous les ordres que lui donnerait Voldemort. Même les pires d'entre eux. Même les plus violents et terribles d'entre eux.  S'il ne tuait pas, c'est lui qui serait tué. Andreï osait espérer que, au moins dans un premier temps, Tom Jedusor ne lui confierait pas de telles missions. Mais il ne fallait pas se leurrer, même si ses missions devaient être exemptes de violence, elles seraient forcément être à l'encontre de sa morale. Autant s'y faire tout de suite, l'accepter. Andreï baissa les yeux, serra les poings. Quand il les releva pour croiser le regard de William, on pouvait lire dans le sien une certaine détermination.

-Compris. répondit d'une voix qui concordait un peu moins avec son regard, puisqu'il la découvrit quelque peu enrouée. Est-ce qu'il y a d'autres choses que je dois savoir ?

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A

ndreï sentit son estomac se serrer d'angoisse. Faire en sorte qu'il ne parvienne pas à lire dans son esprit ? Parce qu'il en était capable ? Au fond, ce n'était pas si improbable que cela si l'on prenait compte de tout ce dont Tom Jedusor, malgré son jeune âge, semblait capable, si l'on tenait compte de tous les crimes dont il s'était dors et déjà rendu coupable. Mais l'idée ne lui avait pas du tout effleuré l'esprit... Il s'était déjà dit qu'il allait devoir apprendre à mieux mentir... Mais fermer complètement son esprit, il n'avait pas imaginé en arriver là. Il était plus que sûr, à ce stade, qu'il s'était engagé sur une voie on ne peut plus dangereuse, et la marque des ténèbres à son avant-bras en témoignait, il ne pouvait pour autant pas faire marche-arrière. Il avait décidé de son sort, il avait été conscient que les dangers seraient nombreux... Mais il mentirait en affirmant qu'il avait complètement pris conscience de la teneur de certains. Il était proprement décontenancé par cette nouvelle information, même s'il faisait au mieux pour ne pas en donner l'air. Dans tous les cas, il ne pouvait quoi qu'il en soit pas reculer. Il était allé trop loin. Il fallait qu'il assume tous les risques, voilà tout, même ceux qu'il n'avait pas envisagé. Tom Jedusor savait lire dans les esprits... Autant dire qu'Andreï allait l'éviter autant que possible jusqu'à ce qu'il ait appris l'occlumancie. Il ne devinait que trop bien le sort qui lui serait réservé si le préfet en chef des verts et argent avait idée de son double-jeu, de son rôle d'espion. Et il ne voulait pas davantage trahir William ou la résistance (dont il ne connaissait finalement encore aucun membre, en tous cas le pensait-il), il n'y tenait pas. Il avait fait les choses trop vite, de façon sans nulle doute irréfléchie, cela ne l'empêchait en rien de vouloir les faire bien, tout au contraire. Andreï hocha la tête quand son interlocuteur suggéra qu'ils se revoient durant l'été afin d'apprendre au jeune homme ce qu'il aurait sans doute dû se laisser enseigner AVANT de se frotter ainsi de si près au danger, de s'y plonger tête la première sans même faire preuve d'une once de jugeote. Il n'était pas particulièrement fier de lui là, maintenant, c'était rien de le dire.

-D'accord. approuva-t-il. Il était entièrement d'accord, oui, même si décaler ce moment aux vacances scolaires, même si elles approchaient à grand pas, lui donnait l'impression de devoir patienter une éternité. Tout ce temps durant, il faudrait qu'il évite de croiser la route de Tom Jedusor. Autant ne pas sortir de son dortoir tout court, en ce cas. Où veux-tu qu'on se retrouve ? Et quand ?

S'ils devaient vraiment éviter le moindre contact d'ici la prochaine fois, autant régler ces détails aussi vite que possible. Il est certain qu'il vaudrait mieux, pour l'un comme l'autre, prétendre ensuite ne rien avoir à faire l'un avec l'autre, ce qu'ils avaient fait bien longtemps, d'ailleurs. Jamais le vert et argent n'aurait pu imaginer qu'ils en arriveraient là, qu'il partagerait un tel secret avec le rouge et or. Mais les choses changent, à la vitesse de l'éclair, et il pouvait d'autant mieux le savoir qu'il n'y avait pas que ce pan de sa vie pour avoir changé (trop) rapidement, ces temps derniers.

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A

ndreï avait pertinemment conscience que la situation allait exiger de lui une discipline et un dépassement de soi supérieurs à tout ce dont il s'était imaginé capable avant de parler pour la première fois avec William, avant sa conversation avec Lexie Hepburn. Il avait le sentiment étrange que ces deux discussions appartenaient à un passé lointain, comme s'il avait très brutalement tourné une page de son existence pour en vivre une nouvelle. Peut-être parce que c'était assez vrai, au fond. Même s'il ne pouvait pas encore se rendre totalement compte de ce qu'il attendait, même s'il ne réalisait pas encore quels sacrifices nécessiterait son enrôlement chez les mangemorts, il savait bien que tout allait changer, après une telle décision. Mais c'était certainement ce qu'il lui fallait : faire table-rase, tout simplement. Oublier sa mère, son enfance, ceux qu'il avait considérés comme sa famille, et se concentrer sur des objectifs plus nobles qui sachent et puissent compenser les fautes qu'il n'avait pas commises, mais dont il se sentait malgré lui tributaire, par l'impérieuse force des choses. Il ne restait plus qu'à décider d'un lieu et d'une date de rendez-vous. Le plus simple étant de se décider dès maintenant pour ne pas éveiller les soupçons sur eux plus tard. C'était encore difficile à accepter en tant que tel, car Andreï n'avait pas vraiment encore vécu la situation, mais il était à présent un agent double, il allait falloir que la discrétion devienne une seconde nature, chez lui, sans quoi, sa petite carrière d'infiltré tournerait sans doute court avant même qu'il ait eu le temps de dire "quidditch".

Sans lui répondre directement, William chercha dans son sac de quoi écrire. Andreï devina qu'il était en train de noter l'adresse de leur rendez-vous futur, au moment où les choses se corseraient, où tout serait devenu plus concret, et où l'apprentissage de l'occlumancie deviendrait une nécessité absolue pour éviter le moindre risque. Le vert et argent s'empara du papier que son interlocuteur lui tendit et lut attentivement l'adresse qui y était notée. Elle ne lui disait rien. Le jeune homme ne savait pas le moins du monde à qui appartenait ce manoir du comté de Surrey, mais quoi qu'il en soit, d'ici à ce qu'ils se retrouvent, il aurait retenu l'adresse par cœur. Il avait bien conscience que rien ne serait plus compromettant que d'égarer ce morceau de parchemin, ce serait la manière la plus simple et la plus stupide de se mettre en danger en même temps que William et les autres résistants. Dès qu'il se serait imprégné des mots inscrits sur ce papier, il brûlerait ce dernier. En attendant, il se contenta de le plier minutieusement et de le fourrer au creux de sa poche avant d'acquiescer. Pas de date encore, mais il était sans doute encore trop tôt pour ce genre de précision. Qu'importe, la date serait plus simple à communiquer discrètement.

-Entendu. approuva-t-il d'un ton quasi professionnel, qui voulait témoigner d'une assurance qu'il ne possédait peut-être pas tout à fait. À bientôt, alors.

Et sur ce, il tourna les talons sans demander son reste, conscient que, s'il croiserai peut-être William dans les couloirs d'ici la fin de l'année, ce serait à l'adresse qui lui avait été donnée que se passerait leur prochaine conversation. Et que se joueraient bien des événements, il était tenté de le croire.

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