Ce matin n'était pas heureux pour cette chère Morticia. C'est donc tout naturellement que le reste de la journée avait été exécrable. Bon, il faut dire que le professeur avait profité de la soirée de la veille pour largement se mettre minable. Avec Aiden, ce n'était plus possible n'importe quand alors elle faisait attention, mais il y avait des limites. Alors pour le coup, elle avait un peu de mal. Sans compter qu'il fallait que ça tombe un jour de grand soleil. Alors de la lumière agressive pleins les yeux. Sans parler du bruit. Beaucoup de bruit.

Ce bruit qui semblait la suivre jusque dans la salle des profs. Alors que c'était un endroit où elle pouvait trouver un minimum de calme. Pas aujourd'hui, non. Parce qu'aujourd'hui, Daryl Lynch faisait des expériences. Autant l'ancienne bibliothécaire était particulièrement agaçante, autant lui c'était pire! Il bougeait tout le temps. Et quand il ne bougeait pas il parlait. Ou criait, au choix. Imaginez un peu l'état de la tête de Morticia au lendemain de cuite phénoménale. C'était assez phénoménal aussi. Grrr, ce type! Elle n'en pouvait plus.

La pauvre femme avait déjà évité de justesse cet illuminé et sa machine infernale deux fois. Mais comme il n'y a jamais deux sans trois, il avait finit par la percuter. C'était inévitable me direz-vous. C'est vrai. Ce qui ne l'empêcha pas d'être énervée.

"J'espère n'pas vous 'voir blessée, chère c'llègue. L'aérod'namique de cet engin est clair'ment à r'voir, sans parler d'l'atterrissage."

Saisissant tout de même la main qui lui était tendue, Morticia pestait à voix basse... sans pour autant se relever tout de suite, encore trop étourdie.

-J't'en foutrait moi de l'aérodynamique. C'est l'atterrissage de ma main sur ta joue que je vais revoir.

La jeune femme se gardait bien de parler à voix haute pour le moment. Mais elle n'en pensait pas moins. Ce type était insupportable. Elle aurait tellement aimé lui coller son poing dans la tête. Mais elle n'était pas d'humeur.

"Miss Morticia Mathews, c'est c'la ? La F'cheuse vous entoure d'son ombre agonisante, 'reusement que mes performances en chaise r'lante ne vous ont pas précipité dans ses bras. Allez, rel'vez-vous !"

La Faucheuse. Tu m'en diras tant. N'importe quoi celui-là. Insupportable cet homme. Vraiment. Mais Morticia se releva tout de même, assez peu confortablement installé par terre.

-Oui et bien à force d'agoniser c'est peut-être elle qui finira par mourir avant moi. Mais je ne pense pas que vous puissiez parler de véritable performance.

Une fois relevée, Morty retira vivement sa main de celle de son interlocuteur. Mais dans son mouvement brusque elle réveilla une douleur dans le dos due à sa chute. Elle réprima une grimace et porta sa main à l'endroit douloureux. Pauvre type!

Morticia était rarement aimable en général. Aujourd'hui encore moins que d'habitude. Mais qui pouvait être de bonne humeur après une cuite pareille? Et bien pas elle en tout cas. Et surtout pas face à Daryl Lynch. Mais qu'est-ce qu'il pouvait être énervant celui-là!
En revanche, elle avait toujours cette répartie parfois désagréable. Ça, c'était naturel chez elle. Le plaisir d'être désagréable était plus fort que tout. Et si lui était complètement excité, elle était encore très calme. Peut-être cela allait-il changer. Mais peut-être pas. La gueule de bois était tenace...

"J'parie que l'aérodynamique d'votre main sur ma joue formerait une son'rité très intéressante à entendre, une v'ritable symphonie de douleur et de souffrance...En fait, vous pourriez presque êt' la prochaine Mozart...ou Beethoven, vu vot' brutalité, Miss Mathews..."

...Quel humour... Erwan aurait fait mieux... quoique... enfin bref. Soit il était vraiment nul, soit il la provoquait. Le fait est qu'elle n'était pas d'humeur à lui en mettre une. Du moins pas tout de suite. Plus tard peut-être viendrait-elle vers lui juste pour lui coller une superbe gifle avant de repart comme si tout était normal. Mais pas tout de suite. Pour le moment, elle avait l'esprit un peu endormi... et mal au dos. Abruti!

-Ne me tentez pas Lynch. Vous finirez bien par entendre ce concerto.

Vous avez déjà essayé d'être menaçant avec une main sur les reins à cause d'une douleur? Et bien je ne vous le souhaite pas parce que ça ne marche pas bien. Si elle sortait comme ça et maintenant, Morticia risquait à coup sûr une comparaison avec une vieille femme. Après son duel avec Purdey, ce n'était pas vraiment de cela dont elle avait besoin. Ils avaient tous décidé de lui en faire baver en même temps ou quoi?!
Alors qu'elle essayait de s'appuyer sur une table pour être un peu plus à l'aise deux minutes, elle vit Daryl attraper une tasse de café. Elle bénit ensuite le collègue qui avait eut la présence d’esprit de lui retirer. Bon, il s'était pris un bon coup de canne, mais au moins la caféine n'était pas dans le sang de cet enquiquineur! Elle ne prêta alors plus aucune attention à ce type et se contenta de soupirer un bon coup.

" 'Ttendez, j'connais une bonne formule pour ça..."

A la fois surprise et terrifiée, Morty finit assise sur la table tant elle avait sursauté violemment. Par réflexe, une fois dans cette position qui était étrangement désagréable, elle sortit sa baguette au cas où il tente quelque chose. Et finalement, ce fut lui qui sabota tout seul son sort. Il se prit les pieds dans on ne sait trop quoi et envoya son sortilège sur son propre casier. Quel nul. Et en plus ce casier avait pris feu. Mais il était complètement barge celui-là!

"Euh...Oups ? Aguamenti !"

Ah bah oui, Oups. Et il voulait lui lancer ça? Mais il avait été envoyé pour la tuer où elle se faisait des idées. Oui, oui, bien sûr qu'elle se faisait des idées. Ceci dit, elle trouvait plutôt inquiétant de le voir éteindre le début d’incendie qu'il avait provoqué en voulant l'aider elle. C'était logique, non? Le fait est qu'elle était resté complètement outrée sur sa table.

"Ca va, vot'dos ? Z'êtes sûr d'pas vouloir un p'tit massage ? Ma femme les ado... !"

Mais qu'est-ce qu'il venait lui parler de sa femme? Et puis d'abord, avec cette cambrure tout sauf naturelle et cette main qui avait retrouvé sa place dans le bas de son dos, il était assez évident que ça n'allait pas. Bon, en même temps, elle n'avait pas spécialement envie qu'il s'y intéresse à son dos. Morticia mis sa main libre sur son visage dans un soupir.

-Non mais je ne veux pas savoir ce que vous faites avec votre femme!

Elle n'avait donc rien remarqué du trouble qui avait saisit son interlocuteur. Et pourtant, elle était observatrice cette jeune femme. Mais là non, rien. Mis à part cette saisissante douleur. Un vrai malade ce mec.

"Bref, b'soin d'un massage ? J'vous promets, j'suis plus doué avec mes mains qu'ma baguette !"

et bien c'était mieux pour lui en tout cas. Parce qu'avec les dégâts qu'il avait réussit à faire dans ses propres affaires, il ne fallait pas qu'il espère toucher à son dos. Morticia descendit de sa table et tordit une nouvelle fois son visage quand elle se redressa. Ça faisait mal! Elle le détestait ce type. Vraiment! Elle commençait à espérer qu'Elena jugerait bon de s'occuper de lui aussi.

"Faites-moi c'fiance, ma p'tite demoiselle..."

Avec ses manches retroussées et ce rire, il avait l'air bien motivé le petit. Et puis il venait déjà vers elle. En même temps, au point où elle en était, pourquoi pas. Aller voir Zelda ne lui plaisait pas non plus d'ailleurs. Au fond, elle risquait juste d'encore avoir mal après. Soupirant une dernière fois elle se décida à rester en place.

-Faire confiance serait un bien grand mot ceci dit...

Pour être honnête, Morticia trouvait l'idée de se faire masser ou quoi que ce soit d'autre par ce type la dégoûtait un peu. Mais aller trouver Zelda pour les mêmes raisons serait presque pire finalement. Alors étant désespérée, elle se laissa pour ainsi dire faire. Enfin, si on veut. Il ne fallait pas abuser. Disons qu'elle n'avait pas eut le temps de refuser. Cet abominable bibliothécaire à roulettes était déjà les manches retroussées et les mains dans son dos. Geste particulièrement gênant d'ailleurs. C'est qu'il s'agissait du bas du dos et donc d'une zone sensible quoi qu'il arrive. Une zone à laquelle on ne donnait pas l'accès normalement. Mais disons qu'elle n'avait plus le temps de réfléchir. Prise entre la gêne et la douleurs lorsqu'il trouvait le moyen d'effectivement toucher les bons endroits. Ce qui obligea parfois Morticia à pousser quelques gémissements et quelques jurons.

"Mes intentions sont tout'fait nobles, j'vous le jure. J'cherche juste à tâter l'terrain pour éviter une malh'reuse bêtise, v'voyez ?"

Nobles, bien sûr. Éviter une bêtise, t'as raison. C'était à peine crédible. Mais maintenant qu'elle y était, elle n'y pouvait plus grand chose. Sans compter qu'il n'était pas vraiment très doux cet homme-là.

-Vous parliez de votre femme il n'y a pas même une minute et vous voulez que je vous crois maintenant? Je vous trouve un peu trop aventureux et je le maintient.

Après la phase de découverte, il s'était effectivement mis à être plus doux. Étrange, oui. Surprenant aussi. Et encore plus dérangeant, c'était plutôt agréable. Ou disons que cela soulageait un peu la douleur. Au final c'était agréable donc. C'était trop fort ça... il fallait que de tous les boulets de cette école ce soit lui qui pose se mains sr ses reins. La honte... et puis il s'était fait un peu plus... rude. Là, Morticia avait commencé à s'agiter, à grimacer un peu aussi. Et Daryl Lynch finit pas s'arrêter. Le plus idiot là-dedans, c'est qu'avec sa rigueur des derniers instants il avait réussit à lui nouer les muscles. C'était supprimer une douleur pour en remettre une autre. Complètement idiot.

"Vot'dos s'porte l'mieux ? C'est l'moins que j'pouvais faire, après cet accident d'chaise roulante bien malencontreux...Ca m'apprendra à nég'cier mes freinages et mes v'rages."

Oui, oui, c'est cela. On va dire que ça allait mieux, hein. Pff, tant pis, ça finirait chez Sparkley. Ou alors Morticia pouvait rester comme ça et attendre que ça passe... Elle verrait. Pour l'instant, c'était dans un sourire forcé qu'elle avait essayé de lui répondre en se redressant douloureusement.

-Oui oui, beaucoup mieux, merci. Contentez-vous d'apprendre à négocier ce que vous voulez ailleurs...

Bah oui, qu'il aille faire ses bêtises dans sa bibliothèque la prochaine fois enfin. Au moins il ne blesserait personne. Parce que plus personne ne voulait y aller à la bibliothèque... au moins, si un élève l'embêtait, elle saurait quoi faire. Et puis on ne pourrait pas lui reprocher d'envoyer ces petites têtes blondes chercher des livres! Diabolique...

"Paraît qu'la personne qui travaillait 'vant moi à la bibli a eu d'sacrés soucis ? S'est passé quoi ? J'dois craindre que'que chose ?"

Mais pourquoi. Pourquoi avait-il besoin de bouger dans tout les sens comme ça. Le claquement de ses chaussures sur le parquet n'arrangeait pas la migraine du professeur. Morticia fut d'ailleurs obligée de porter sa min à son front et de fermer les yeux. Qu'il en profite. Un jour elle lui sauterait à la gorge et il bougerait moins!

-Pitiez, arrêtez de bouger comme ça. Ça vous arrive de tenir en place?!!!

Causes toujours. Ceci dit il resta en place cette fois. Déjà mieux. Morticia redressa donc son regard vers le sien. Ce type était bien agité en tout cas. Il faudrait surveiller les stocks de caféine à l'avenir...

"Y a une malédiction, c'ça ? Ouuuuuh, l'bibliothécaire est maudit, les livres vont l'attaquer, les mites vont l'ronger et il va finir en quatre heures pour l'diable, ouuuuh !"

Une malédiction ou juste un coin où il ne fallait fourre son nez. Si il avait un tout petit peu d'intelligence il resterait dans son coin et laisserait Elena dans le sien.

-Et ne... riez plus, non plus.

C'était d'une telle agressivité comme son. Il obligea Morty à reporter brièvement sa main sur sa tempe. Une fois les résonnances parties, elle reporta son attention sur l'homme qui se tenait toujours face à elle.

-J'aurais envie de vous dire que oui. Malheureusement notre ancienne collègue à fait une mauvaise chute suite à un malaise. Si vous êtes cardiaque je ne ferais que vous conseiller d'éviter les tables.

En fait il serait tellement amusant de savoir qu'il irait mettre son nez dans des affaires qui n'étaient pas les siennes et tomberait sur Miss Gordon... bah quoi? On peut rêver, non?!

Je vous ai déjà dit à quel point Morticia trouvait ce type insupportable? Oui? Tant mieux. Ceci dit, je ne le redirais jamais assez. Sans rire, il n'était là que depuis très peu de temps et il avait déjà trouvé le moyen de se la mettre complètement à dos. Et encore, c'était bien peu dire. Si elle s'écoutait, elle l'étranglerait sur le champ. Et si elle s'écoutait dans un moment comme celui-là, elle se changerait et le boufferait vivant. Mais petit à petit. Pas comme une louve affamée. Déjà parce qu'elle n'avait pas faim, mais aussi parce que ça ne serait pas aussi drôle. Mais vraiment document. Pour convenablement se venger de ce pauvre type. Est-il encore utile de préciser que Morticia ignorait le décès de sa femme? Et est-il utile de préciser que même si elle l'avait su elle n'en aurait tout simplement rien eu à faire? Non, effectivement.

"A vos ordres, M'dame. Et j'vous jure, j'pens'rais jamais à vous d'une façon déplacée. J'suis lié, v'voyez ? Et j'suis un homme fidèle."

Mais... mais... mais... mais rien que ça manière de parler était insupportable!! Morticia n'avait pas besoin de connaître sa vie enfin, c'était lui que ça regardait, pas ses collègues! Comment avait-il trouvé une femme pour le supporter... grande question à laquelle elle ne chercherait pas de réponse. Et ce geste se montrer la bague en posant la main sur le cœur. Plus enfantin qu'Aiden. Ou au moins avec Aiden ça ne choquerait pas et elle aurait même trouvé ça mignon. Avec Daryl c'était juste... exaspérant.

-Oui, ravie de la savoir, j'avais vraiment besoin de cette précision.

Soulignons simplement l'extrême ironie de son ton... c'est suffisant pour comprendre la situation il me semble.

" 'Faudrait m'attacher pour qu'je tienne en place, Miss ! Mais bon, j'voudrais pas vous donner d'mauvaises idées, hein ? 'S'agirait pas que vous m'saucissonniez d'un coup, j'm'en port'rais mal, moi !"

Effectivement, il ferait bien de ne pas lui donner de mauvaises idée. Parce qu'il pourrait être saucissonné et giflé avant de se faire bouffer au sens le plus littéral du terme. Et qu'est-ce qu'elle aimerait lui faire regretter tout ces mouvements et ses rire insupportables! Elle se contenta de secouer la tête un peu déçue.

"Faut pas jouer les clowns tristes, Miss, ça donne juste envie d'vous tirer les joues et d'vous chatouiller pour essayer d'vous faire rire ! M'tentez pas, hein ?"

Qu'il essaye un peu pour voir. Il était certain qu'il ne regretterait pas. Il se prendrait un bon coup là où il ne fallait pas et fin de l'histoire.

-Je vous le déconseille. Vous apprendrez vite que je ne suis pas quelqu'un à tenter non plus.

Et elle était des plus sérieuses. Tenter une femme comme Morticia dans un sens aussi tordu et sadique n'était pas prudent. Mais alors pas du tout. Un accident était si vite arrivé.

"J'suis pas cardiaque, j'serais déjà mort d'puis longtemps, sinon..."

Sans blague. Et ça serait pas plus mal d'ailleurs. Oui, elle était méchante, et alors. De toute façon, même si elle l'ignorait, il était du même avis. Pourquoi se priver? Surtout qu'il était retourné sur sa machine infernale et s'était mis à tourner sur lui-même... un malade. Mais pour le coup c'est Morty qui allait être malade si il continuait.

"J'me demande c'qui peut causer c'tte malédiction...Qui sait, la bibli a p't'être été construite sur un cimetière indien ou un truc dans l'genre ? J'vais peut-être être possédé par un esprit maléfique, c'serait le pied !"

Oh oui, le pied! Qu'il arrête de bouger comme ça! Morticia se passa un coup les mains sur le visage pour essayer de se réveiller un minimum. Et heureusement, il finit par se relever.

"En tout cas, c'bien sympa d'parler avec vous, vous m'faites rire. Vraiment."

Super. Il la trouvait sympa maintenant. Mais pourquoi?! Le monde entier devait lui en vouloir, c'est pas possible. Morticia soupira sans chercher à cacher son ennui.

-Vous faites plus ce que j'appelle un monologue en fait. Vous ne voudriez pas aller monologuer avec, je ne sais pas moi, Miss Gordon?  Je suis sûre qu'elle serait ravie d'écouter votre flot de paroles dénué d'intérêt.

Et un petit sourir ironique pour la route, un! Mais il faut dire qu'Elena n'avait pas une gueule de bois aussi carabinée que Morty.

Daryl bougeait, parlait, riait, rebougeait. C'était lourd à la fin pour une femme dans un si piteux état que Morticia. Il jouait avec ses nerfs là et il finirait par atteindre ses limites. Assez rapidement si ça continuait. Qu'elle ne sache pas les cause de tant d'excitation n'était pas important. Au bout du compte sa réaction aurait été la même. Il l'exaspérait. Mais c'était comme ça. Il ne fallait pas la chercher, c'est tout. Parce que dans l'état où elle était et si il continuait, il allait aussi l'entendre. Un boulet, voilà ce qu'il était. Un boulet prétentieux et très mobile.

"Vous n'êtes pas très gentille avec votre pauvre collègue, Miss Mathews. J'suis sûr que Miss Gordon vous maudirait pour les cent générations à venir si j'vous prenais au mot et que j'lui avouais que c'était vous qui m'avez s'ggéré c'te merveilleuse idée..."

Bof. De toute façon, Elena serait bien obligée de se le coltiner alors bon. Et si il y étai vraiment allé, ave un peu de chance, il serait tombé au mauvais moment ou aurait posé la question de trop. Mais non, il n'avait pas envie de la quitter. Il lui fit même un sourire. Si il n'était pas marié Morticia lui aurait certainement déjà donné ce qu'il cherchait visiblement: une bonne gifle. Et il bougeait encore et encore. Ce qu'il pouvait lui taper sur le système. Morty se contenta de grogner pour lui répondre. Assise sur la table, la jeune femme pris sa tête entre ses mains avec une moue boudeuse.

"En tout cas, c'est bien sympa d'monologuer avec vous, Miss Mathews. 'Savez, z'êtes vraiment l'genre de personnes à qui on a envie d'tout dire, d'tout raconter...C'bizarre, hein ? Comme j'suis l'genre de personnes à qui on aimerait surtout faire fermer sa grande bouche à l'aide de scotch ou d'autres trucs dans le genre..."

Alors ça, pour être bizarre, c'était bizarre. Mais il avait parfaitement raison. Elle aimerait vraiment pouvoir lui clouer le bec pour de bon à cet abruti. Et ce n'était pas du scotch qui allait suffire. Le bouffer je vous dit, elle avait envie de lui sauter dessus pour le bouffer. Une calamité, un chieur de première, une teigne surexcitée. Et elle n'aimait pas le voir s'approcher comme ça. Il était encore à une distance raisonnable, mais tout de même. Elle n'aimait pas qu'on l'approche en général.

-C'est bien ma veine, fallait que j'ai une tête de psy. Vous ne voulez pas aller vous confier à... Sundarkens! Elle est très gentille. Je suis sûre qu'elle vous plaira, c'est tout à fait le genre de personne qui pourrait vous supporter.

C'est vrai que quand on y pense, cette femme était certainement aussi insupportable. Plus vieille, peut-être, mais certainement plus à même de comprendre l'esprit farfelu de son interlocuteur.

"Bon, allez, à vot'tour d'monologuer un peu ! Vous avez un copain ? Quelqu'un dont l'existence p'rrait justifier que vous vous méfiez d'mes massages ou d'mes approches innocentes ?"

Euh... quoi? Bon, il y avait deux solutions là. Soit elle l'envoyait bouler encore un fois, soit elle lui en racontait un peu plus en espérant qu'il arrêterait. Un copain. Non mais elle avait une tête à avoir un copain? Morticia quoi, celle qui avait passé la soirée de la veille à se bourrer seule dans un bar parce qu'elle était seule et humiliée. Et si il n'y avait pas Aiden le lendemain, elle aurait certainement recommencé dès la fin des cours.

-Bon, si vous me laissez tranquille après pourquoi pas. Je vis seule, j'en suis très contente et je méfie de vous plus que de vos actes. C'est comme ça qu'on m'a élevé et vous n'aurez rien de plus de ma part. Voilà donc maintenant que votre curiosité visiblement maladive a trouvé ses réponses vous allez vous exciter ailleurs?

Morticia n'aimait pas franchement cette conversation. Elle l'ennuyait plus qu'autre chose. C'était une conversation de sourds. Tout cela avait commencé avec cette saleté de chaise. Mais en tout cas, il lui tapait sur le système. Et sa cuite était trop grosse pour tolérer ce petit jeu très longtemps. C'était un emmerdeur. Un emmerdeur de première même. Et il avait l'air d'adorer ça. Ce que ça pouvait être agaçant. Il était agaçant et elle ne tiendrait clairement pas longtemps.

En temps normal, Morticia était une femme sanguine. Pour beaucoup c'était une qualité affreusement recherchée. Pour d'autre une véritable plaie. Visiblement, pour lui, c'était recherché. Pas comme tout le monde pouvait rechercher cette particularité, mais il la recherchait tout de même. Parce qu'elle pouvait lui tenir tête. Elle ne se laisserait pas marcher sur les pieds et détestait obéir. Elle se pliait parfois aux exigences de son travail. Mais elle n'avait pas besoin de respecter totalement ses collègues. Et surtout pas un homme comme lui. Un danger publique et une teigne. Au moins autant qu'elle. Sauf qu'elle était bien calmée par sa cuite de la veille et qu'il avait bu bien trop de café.

"Ma curiosité maladive n'est jamais r'pue, si vous voulez tout savoir, surtout avec des lit'de café dans l'sang, Miss Mathews ! J'ai mille et mille questions à vous poser à vot'sujet ou sur l'monde qui nous entoure : aimez-vous les livres ? Quel est vot'dessert préféré ? Pourquoi l'ciel est-il bleu ? L'oeuf ou la poule ? Des questions, que des questions, des réponses, puis encore des questions !"

Morticia ne pris pas même la peine de lui répondre. Elle se contenta de soupirer. Soupirer d'agacement surtout, et puis de fatigue aussi. C'était un idiot. Un parasite. Un crétin. Et le dessert préféré de Morticia ne le regardait absolument pas. Pas plus que son goût pour les livres.

"Oh, j'veux bien m'exciter ailleurs, mais uniquement si vous v'nez avec moi ! J'n'aime pas être seul, surtout quand j'ai envie d'bavarder...Allez, s'il vous plaît, r'stez à mes côtés ! J'vous pai'rais un café ou autre chose et, je l'jure, j'me calmerais..."

Oh non mais ça allait bien là. Et puis il était tout sauf crédible quand il disait qu'il allait se calmer. Et ce regard débile. C'était trop fort ça. Et bien elle ne craquerait pas. Morty sourit, amusée de voir à quel point il était stupide. Elle descendit de sa table et voulut partir.

"Je crie au viol si vous ne restez pas...Qu'est-ce qu'un pauvre jouvenceau comme moi p'rrait faire contre une lady comme vous ? Le mot "victime" est inscrit sur mon front prochain'ment dégarni..."

pff, ça serait tellement crédible. Il était bien connu que Morticia était une violeuse invétérée. Quelle ironie quand on savait qu'elle était toujours vierge à 34 ans. Comme quoi, il ne la connaissait pas. Et il ne la connaîtrait jamais. La vie de Morticia Mathews était secrète et le resterait.

-Mais criez donc, ne vous gênez pas. Seulement j'ai une gueule de bois plus que carabinée et si vous ouvrez la bouche je vous bouffe, c'est clair?

Là-dessus Morticia se poussa et pris son sac, prête à effectivement quitter les lieux.

-Je ne suis pas le genre de personnes que vous devriez provoquer Mr Lynch. Élèves et professeurs vous le confirmeront sans mal.

À lui de choisir de ne pas faire de bêtise...