Angus aurait pu être un garçon tout ce qu'il y avait de plus normal, si tant est que la normalité existait réellement, et il l'avait d'ailleurs été jusqu'à la fin de sa scolarité à Poudlard. Calme, sans histoire, serviable et amical... Mais l'enfant qu'il était alors avait justement du renoncer à l'innocence et la monstrueuse vérité qui avait alors éclaté l'avait profondément détruit et changé. Il ne serait plus jamais le même. Il fallait oublier l'image qu'on avait pu avoir de lui quelques années plus tôt. Le petit garçon avait disparu à tout jamais, laissant place à la haine, la douleur, l'amertume. Seul l'amour pour sa sœur ne tarirait jamais. Angus restait tout de même aimable et il n'était pas pour autant associable, mais ne jamais se fier aux apparences, c'est ce dont il fallait se souvenir lorsqu'on parlait du jeune Davis. Son sourire cachait bien souvent un cri de colère. Chaque moldu masculin était devenu une menace à ses yeux et, au fil des années, la race toute entière se voyait offrir sa méfiance. Devenir oubliator n'avait pas été un simple hasard ou une simple opportunité, Angus ne se gênait pas pour foutre un peu de pagaille dans les souvenirs des moldus trop curieux ou tout simplement malchanceux. Ce n'était pas de la simple méchanceté, c'était un besoin. Besoin de se venger d'un père qu'il avait à peine eu le temps de voir souffrir. L'ancien Poufsouffle n'était pas mauvais en soi. Il était détraqué par une vérité qu'il n'avait pas pu empêcher d'exister, une vérité qui le poursuivrait jusque dans sa tombe et qui ne le laisserait probablement jamais en paix. Plus rien ne pouvait vraiment l'atteindre à présent. Il était comme immunisé contre la douleur, cette dernière envahissant déjà son cœur depuis bien trop d'année. Essayer de le blesser ne servait à rien et mieux valait se méfier de sa colère, mais essayer de blesser sa sœur était tout bonnement un appel au meurtre. Qu'on se le dise.

La manipulation ne fait pas partie du fonctionnement d'Angus puisque la sincérité est sans doute sa principale qualité, au point parfois cependant de blesser les gens qui l'entourent. Il vous dira toujours ce qu'il pense et dira donc très rarement ce que vous rêvez d'entendre. Caresser les gens dans le sens du poil n'est absolument pas son genre et vous saurez donc d'emblée s'il vous apprécie ou non. Mais attention, si vous appartenez à la première catégorie, ne vous attendez pas pour autant à de l'affection. Pour les autres, l'ignorance est son maître mot, à partir du moment où vous restez dans votre coin et que vous n’empiétez pas sur son espace. Si vous sentez que le courant ne passe pas, n'essayez pas d'arranger les choses, ce serait peine perdue, et vous perdriez de l’énergie pour rien.

Il n'y a pas de secret. Faire partie de l'équipe de quidditch en tant que batteur pendant cinq ans donne des muscles et des muscles, Angus en avait donc beaucoup ! Fort heureusement, sa grande taille harmonisait le tout, lui donnant une silhouette fort agréable à regarder. Les femmes et les hommes se retournaient souvent sur lui tant son corps était enviable. Il ne possédait pourtant pas les codes habituels de la beauté, les traits de son visage étant assez épais et marqués, mais il y avait dans ses yeux une étincelle où se mêlaient tristesse et colère, donnant à son visage un charme fou. Et son sourire... Oh son sourire... Il pourrait faire fondre n'importe qui. Malheureusement, ceux qui avait la chance de le voir réellement et franchement étaient bien rares. Les cheveux blonds, les yeux d'un bleu intense – comme sa si chère petite sœur –, le teint légèrement mat... Une petite perle que beaucoup auraient tenté d'avoir si monsieur n'avait pas été aussi peu enclin à l'amusement. Seules les personnes proches, à qui il était encore capable d'accorder sa confiance, pouvait apercevoir un Angus à la hauteur de son physique. A le regarder, le jeune homme imposait le respect et il était d'ailleurs rare que les gens s'en prennent à lui. Mieux valait l'avoir dans son camp, en effet. Son physique n'était absolument rien pour lui pourtant, même s'il fallait avouer qu'il appréciait cette grande force dans son corps, mais jamais il n'en avait user pour manipuler ou charmer qui que ce soit et jamais il ne le ferait, c'était une promesse à lui même.

Angus est le premier né de l'union d'une sorcière de sang pur et d'un moldu, coupé avant même sa conception de sa famille maternelle aux allégeances légèrement mangemoriques, précurseurs d'une cause qui n'existait pas encore vraiment. Mais comment ressentir le manque d'une famille que l'on a jamais connu et qui, en plus de cela, n'a pas su faire passer l'amour pour une fille et une sœur avant la cause des sorciers et la haine pour les moldus ? Non, Angus n'avait jamais ressenti le moindre vide en lui et l'amour que lui portèrent ses parents le comblèrent de bonheur et ce d'autant plus lorsqu'ils lui offrirent une petite sœur, six ans après sa propre naissance, petite sœur qu'il chérit comme la prunelle de ses yeux dès l'instant où ces derniers croisèrent les siens. Comment pouvait-on haïr à ce point les moldus quand le plus grand exemple qu'il avait en face de lui n'était que bonté et amour ? Il y avait quelque chose là dedans qui lui échappait totalement. Mais c'était là l'innocence de l'enfance, ces années où les parents apparaissent très souvent comme des dieux dans l'esprit et les yeux des bambins. Pouvait-il seulement y avoir dieu plus horrible que ce père dont l'amour était bien trop fort et bien trop violent ? Il n'était pas difficile de faire en sorte de conserver l'image idyllique du père quand l'enfant passait les trois quarts de l'année à l'école de sorcellerie Poudlard, et c'était d'ailleurs cet exil qui avait permit l'engrenage de tant d'atrocités. Non, il n'était pas difficile de manipuler un enfant, tout comme il n'avait pas été difficile de transformer l'amour en haine lorsque la vérité avait été révélée. La vérité ? Cet homme, ce moldu, n'était rien d'autre qu'un porc doublé d'un pervers, qui profitait de l'absence de son fils et de l'aveuglement de sa femme pour profiter du corps de sa propre fille, sans aucun scrupule, comme si cela était tout à fait normal. Il lui suffisait de prendre son mal en patience lorsque le plus grand de ses enfants revenait passer les vacances dans la maison familiale, une patience qu'il ne put plus se permettre lorsque Sasha, elle aussi, rentra à Poudlard et ne fit acte de présence que durant les vacances scolaires. Comment faire alors pour assouvir ses besoins lorsqu'aucun des enfants n'étaient plus présent sans l'autre ?

Angus avait, comme tous les jeunes sorciers, emménagé à Poudlard à l'âge de onze ans, alors que Sasha n'en avait encore que cinq, et y avait entamé son apprentissage de la magie avec brio. C'était un bon élève, tout ce qu'il y avait de plus normal et jamais aucun professeur n'eut à se plaindre de son comportement ou de ses aptitudes. A la maison, lorsqu'il rentrait pour les vacances, c'était du pareil au même et le jeune garçon aimait à passer du temps avec sa encore si minuscule petite sœur. Les années passèrent à une vitesse fulgurante et la septième et dernière année dans cette école qui l'avait si bien accueilli touchait déjà à sa fin, lorsque la toute première de Sacha s'achevait elle aussi. Un dernier été avec les parents et Angus prendrait son envol, dans une direction dont il ignorait encore tout. Mais la tranquille et jolie vie qu'il avait mené jusqu'à présent allait souffrir d'une révélation des plus blessantes. Le jeune homme qu'il était à présent n'était plus si facile à berner et lorsqu'il vit son père sortir de la salle de bain quelques minutes seulement avant sa sœur, il sentit presque son cœur s'arrêter de battre. Sa sœur, son ange, son amour, la moitié de sa vie et de son cœur... Cette petite fille si jeune encore... Comment avait-il pu faire ça ? Le regard terne de Sasha en disait long. Cela durait depuis bien trop longtemps... Il ne savait trop si ce qui lui faisait le plus mal était de se rendre compte que l'homme qu'il avait chéri durant toutes ces années n'était en fait que la pire des raclures ou le fait que sa sœur ne lui en ait jamais touché un seul mot... Non, il ne savait pas ce qui le blessait le plus, mais il sentait la colère en lui, une colère qu'il n'avait encore jamais ressenti, une colère qui ne le quitterait jamais. L'amour s'était bel et bien transformé en haine et la haine allait faire couler beaucoup de sang. Angus était assez grand maintenant pour tenir tête à son père sans aucune crainte, bien qu'il n'en ai jamais ressenti le besoin auparavant, et l'altercation augmenta en violence au fil des minutes, jusqu'à ce que le premier objet qui tomba sous la main du jeune diplômé s'écrasa sur le crâne de son père, encore et encore, jusqu'à ce que mort s'ensuive. Jamais plus Angus ne serait le gentil jeune garçon sans histoire, jamais plus il ne ferait confiance à personne. Seule sa sœur comptait à présent, cette si petite fille qui venait elle aussi de causer la mort, celle de leur mère qui pendant trop longtemps s'était tu et qui, poussée par Sasha, s'était cogné l'arrière du crâne sur le coin d'un meuble. Légitime défense, c'est ce qui fut déclaré et Angus, maintenant adulte, obtint la garde de sa sœur sans problème et toutes les économies de leurs parents leur revinrent de droit.

Le jeune homme de vingt-cinq ans maintenant, devenu oubliator, vit à présent avec Sasha dans une petite maison de Londres, partageant tous deux la passion étrange du sang. Etaient-ils tous les deux devenus fous ? Non, juste torturés, profondément torturés... Et comment ne pas l'être !