Quand elle voyait ces pauvres gamins courir dans tous les sens avec enthousiasme, allant d'une boutique à l'autre avec un sourire béat sur les lèvres, visiblement heureux de procéder à leurs emplettes pour la rentrée, Louisa n'avait qu'une envie : les taper les une après les autres... ou alors prendre le plus petit d'entre eux et l'utiliser pour frapper les autres. Je sais, c'est contradictoire d'avoir une telle aversion pour les enfants alors qu'elle-même avait seulement 12 ans, mais elle n'y pouvait rien. Elle se trouvait plus mâture que chacun de ces gosses stupides, et comme les gens un peu plus élevés mentalement et psychologiquement, la perspective de faire ses courses pour la rentrée l'ennuyait royalement. L'idée de devoir prendre sa maman par la main pour l'accompagner d'une boutique à l'autre... c'était trop pour elle.

C'est pour cette raison, d'ailleurs, que la bleue et bronze avait décidé de prendre les devants. Sans vergogne ni scrupule, elle avait cherché dans le porte-feuille de sa génitrice la somme nécessaire à l'achat de ses fournitures scolaire quand l'infirmière était encore endormie. Très tôt, donc, elle avait grimpé à bord du magicobus en direction du chemin de traverse. Sa mère lui en voudrait, sur le coup, mais elle devrait bien admettre que sa fille lui rendait service. Qui aimait se ruiner en fourniture scolaire pour ses enfants et passer sa journée à aller de boutiques en boutiques.

Louisa, comme une grande, s'était donc acheté ses nouveaux livres, ses nouveaux ingrédients de potions, ses nouvelles robes de sorcière (elle avait prit quelques centimètres depuis l'année précédente), ses nouvelles plumes... bref, tout ce qu'il lui fallait pour être parée au cours de l'année à venir.

Il était environ midi quand elle eut tout fini. Elle allait pouvoir rentrer chez elle... certes, elle aurait du retard, et sa mère devait être folle d'inquiétude à l'heure qu'il était, mais tant pis. Ce ne serait pas la première, ni la dernière fois que ça arriverait. Harassée par le poids des nombreux sacs et sachets qu'elle devait se trimballer, la serdaigle partit en quête d'un endroit où s'asseoir, histoire de reprendre son souffle avant de remonter à bord du magicobus. Malheureusement pour elle, tous les bancs près desquels elle passa était occupés... elle se résigna finalement à s'asseoir à côté d'une jeune fille dont le visage lui était familier. Elle devait être une élève de poudlard.
L'ignorant sublimement, elle scruta le fond de ses sachets, histoire de vérifier qu'elle n'avait rien oublié avant son départ... mais la demoiselle à côté d'elle était visiblement bien plus sociable que la bleue et bronze.

-Salut! moi c'est Ginger et toi?
-Louisa... répliqua seulement la fille de l'infirmière, que son asociabilité n'invitait pas à se montrer plus expansive.

-Tu n'es certainement pas à Serpentard, je te connaitrais, dans ce cas...

Bien joué, Sherlock. Louisa comprit, à ce très léger indice, que son interlocutrice, Ginger de son petit nom, était chez les verts et argents. C'est drôle. La bleue et bronze n'aurait pas parié deux secondes là-dessus. Généralement, ceux de la maison des serpents étaient loin d'être bien sociaux et de vouloir faire la conversation au premier venu. D'ailleurs, si quelqu'un d'extérieur assistait à cette scène, il parierait sûrement que c'était l'inverse, que Ginger était à Serdaigle et Louisa à serpentard. Le choixpeau avait hésité, d'ailleurs, à l'envoyer dans cette maison, mais c'était la force de son intellect qui avait conduit le répartisseur à la conduir jusqu'à la maison des aigles.

-...donc, sans vouloir être indiscrète, de quelle maison fais-tu partie ?

« Sans vouloir être indiscret »... cette remarque avait toujours eu le don de bien faire rire Louisa. Enfin, rire... on se comprend, hein ! Les gens qui insinuaient qu'ils ne voulaient pas violer la vie privée de leurs interlocuteurs étaient ceux qui le faisaient le plus. Louisa voulut répliquer que oui, elle était indiscrète, et qu'elle était à serdaigle, mais elle n'eut rien le temps de dire que la vert et argent avait déjà reprit la parole. De toute évidence, elle avait affaire à une bavarde. C'était bien sa veine ! Louisa détestait les gens bavards. À part Chris. Mais c'était, jusqu'ici, la seule solution.

-Si je connais ton nom et ta maison, et ton année, je serai capable de te retrouver sans plus de mal à la rentrée.

Louisa lança à Ginger un regard interloqué. Et puis quoi, aussi ? Elle voulait qu'elles élèvent les botrucs ensemble ? Visiblement, son interlocutrice était de ces personnes qui aimaient parler, être amis avec tout le monde... et toutes ces choses qui l'agaçaient royalement. Asociale comme pas deux, Louisa préférait de loin la solitude au fait d'accumuler le plus possible d'acquointances, jusqu'à ne plus posséder qu'un nombre conséquent, peut-être, mais stupide, d'amitiés factices.

-On dirait un détective, quand tu parles. Ou l'un de ces psychopathes qui enquête sur ses victimes avant de les assassiner dans leurs sommeils.

Était-ce une blague ? Ou Louisa s'exprimait-elle sérieusement ? Difficile à dire, le ton de sa voix était extrêmement neutre. Il s'y laissa percevoir une légère pointe d'agacement quand, après un léger soupir, elle accepta de répondre aux questions de Ginger.

-Je suis à serdaigle, j'entre en deuxième année.

Elle ne poursuivit pas par le traditionnel « et toi ? ». Elle s'en fichait.

Ginger pensait-elle que l'animosité que l'on pouvait sentir chez la bleue et bronze était seulement dû au fait qu'elle n'appréciait pas les serpentards? C'était faux. Louisa n'appréciait personne, en vérité.

-Oh mais c'est merveilleux! J'ai beaucoup d'amis à Serdaigle! -Tu m'en diras tant. Répliqua la future deuxième année, un peu sèchement.

Louisa se moquait éperduement de savoir quel nombre d'amis avait la jeune fille. Elle se doutait que, puisqu'elle semblait être de ces personnes qui allaient vers tout le monde sans faire la moindre distinction, elle devait effectivement avoir beaucoup d'amis... Mais ça, c'était son problème. Si elle avait envie d'être constamment entourée, de ne jamais avoir la paix, et de perdre son temps en bavardage, c'était son problème, pas le sien. Pas curieuse pour un sous, Louisa n'envisagea même pas de demander à Ginger quels étaient ses camarades de Serdaigle qu'elle avait pour amis. Vu le peu d'amis qu'avait la fille de l'infirmière, il n'y avait de toute façon presque aucune chance pour qu'elles aient des amis communs.

-C'est étrange que nous n'ayons pas eue l'occasion de se rencontrer entre les murs de notre bon vieux Poudlard. Comme quoi des rencontre on en fait partout!

Louisa ne perdit pas le temps à faire la moindre remarque à ce sujet. En fait, elle connaissait Ginger. Ou du moins, elle se souvenait de l'avoir déjà croisé. Elle ne la connaissait pas alors de nom, mais de vue, elle était certaine de l'avoir déjà vu au détour de certains couloirs. Il lui semblait qu'elle était arrivé en Poudlard en plein milieu d'année, raison pour laquelle elle avait daigné lui accorder une minuscule attention. Mais à quoi bon lui en parler? À rien, alors autant garder cette information pour elle.

-Et toi? je veux dire tu as des amis à Serpentard?

Donc, c'était effectivement ce que Louisa avait présumé, elle pensait que c'étaient les bons vieux préjugés qui opposaient les serpentards à ceux des autres maisons qui lui faisaient mettre tant de distance entre elles. Elle se trompait sur elle. Louisa n'avait aucun préjugé sur les maison, elle se contentait juste de n'aimer personne, voilà tout. La jeune fille, décidément peu bavarde, apprit à son interlocutrice la chose telle qu'elle.

-Moi... j'ai pas d'amis.

Elle n'avait pas dit cela sur le ton de la personne qui s'appitoie, bien au contraire. Elle se contentait juste de constater les faits : et dans les faits, elle n'avait pas d'amis, ou presque pas, et cela uniquement parce qu'elle l'avait voulu, et qu'elle se trouvait très bien toute seule.

-Tu es sûre que tu n'as aucun problème avec ça?

Louisa approuva d'un vigoureux signe de tête. Elle était plus que sincère, lorsqu'elle disait que ne pas avoir beaucoup d'amis ne la dérangeait pas le moins du monde. C'est comme ça qu'elle avait toujours (ou presque) vécu. Après la mort de son père, la bleue et bronze s'était fermée aux autres, comme une huître. Ça ne la dérangeait pas du tout, elle était habituée à la solitude, au point qu'elle avait du mal à supporter, à long terme, la compagnie de ses camarades. Elle les trouvait toujours soit trop bruyants, soit inintéressants. Elle n'arrivait pas à les voir autrement. Alors oui, les gens qu'elle arrivait à supporter était rare, mais peu importe. Non, elle n'avait aucun problème avec ça. Elle trouvait l'acharnement de tous ces gens à vouloir s'entourer d'amis parfaitement idiot. Au fond, on vivait et on mourait seul, et on était tous égoïstes, on ne s'entourait des autres que pour satisfaire notre ego. Alors elle préférait être seule que mal accompagnée, quand bien même ça avait l'air d'estomaquer Ginger.

-Si jamais tu as besoin de parler à quelqu'un n'hésite surtout pas à venir me voir, je suis toujours ouverte, j'en ai aidé plus d'une!

Louisa trouvait Ginger beaucoup trop insistante, et ses propos à la limite de la complaisance. Elle avait l'impression que la vert et argent jugeait sa façon de penser, et d'être, comme si son attitude, puisqu'elle différait de la sienne, était anormale et blâmable. Personne n'irait jamais dire à Louisa Sparkley de quelle façon il convenait qu'elle vive ou agisse ! Si elle était heureuse sans ami, alors que tout le monde aille se faire voir. Elle n'avait pas besoin de parler, et elle avait encore moins besoin d'elle. Le seul fait qu'il soit suggéré qu'elle ait besoin d'assistance lui hérissait le poil. Non, vraiment, de quoi se mêlait-elle ? De quel droit pensait-elle en savoir plus qu'elle sur la façon dont elle devait appréhender sa propre existence ?

-Tu sais entre filles il faut se serrer les coudes, sinon, que deviendrait-on? rien!

Cette réflexion eut pour effet de faire décocher une grimace à Louisa. Elle supportait difficilement ce concept de solidarité féminine, qui ne lui donnait que plus l'idée qu'elle confortait la race masculine dans cette misogynie ambiante. Louisa avait toujours su parfaitement se débrouiller par ses propres moyens, elle n'avait pas la moindre intention de devenir l'une de ces personnes assistées, dépendantes de leurs fréquentations, qu'elle détestait tant.

-Tu crois qu'être entouré d'une ribambelle d'amis est la condition ultime de l'accomplissement de soi, peut-être ? Je n'ai pas besoin de ton aide, encore moins de ta pitié. Je n'ai pas d'amis parce que je l'ai décidé.

-Mais tu crois au moins me connaître pour me juger ainsi? je ne suis pas quelqu'un qui court derrière les amis, mais quelqu'un qui est assez ouvert pour faire le premier pas!

La réaction de Ginger n'était pas inattendue pour un sous. Louisa se doutait bien qu'elle n'allait pas accepter de se laisser quasi insulter sans rien répliquer, surtout que la jeune fille semblait avoir du répondant. Mais la bleue et bronze s'en foutait. Elle avait toujours dit les choses comme elle les pensait, sans se soucier de blesser ou non les personnes qui l'entouraient. Si ce qu'elle disait était mal pris, eh bien tant pis, elle préférait dire franchement les choses, faire clairement comprendre sa façon de penser que de passer pour une hypocrite de première catégorie, ou pire en devenir une. Là où Ginger se trompait, c'est que Louisa ne la jugeait pas, elle constatait juste ce qu'était la façon de penser de beaucoup de personnes, et remarquer que ce n'était pas la sienne, voilà tout. Libre à la rouquine de l'interpréter comme elle le voulait... Qu'elle ait une ennemie de plus ou de moins, ça n'avait pas grande importance, pour elle. Il y avait longtemps qu'elle ne se souciait plus de plaire à ses petits camarades.

-Quelqu'un qui ne reste pas planqué seul alors que ça le fait souffrir!

Louisa haussa un sourcil. Était-ce ainsi qu'elle interprétait son attitude ? Si tel était le cas, elle se trompait lourdement. Elle était seule, c'est vrai, planquée si l'on veut (quoi qu'elle n'avait pas le sentiment de se cacher de quoi que ce soit ou de qui que ce soit), mais ça ne la faisait pas souffrir. C'est vrai qu'elle n'était pas la personne la plus heureuse du monde, mais cette blessure qu'elle avait au fond d'elle, elle la devait à la mort de son père, pas à son isolement social, qu'elle avait voulu, voulait, et voudrait toujours.

-Je ne suis pas comme la norme le dicte et alors? Je suis fière d'être unique et si tu veux rester seule toute ta vie... vas y fais toi plaisir! Je ne serais certainement pas celle qui t'en empêchera puisque tu ne veux pas... comment l'as tu dis? ah oui de mon aide ni de ma pitié!

Louisa réagit à cette réflexion, par un léger soupir. L'emportement dont elle faisait preuve était inutile, et pour la jeune fille, ça ne faisait que prouver le fait qu'elle n'était pas aussi unique qu'elle voulait bien le croire. Ce n'était pas son originalité, que Louisa avait reproché à Ginger (si tant est qu'elle lui ait fait le moindre reproche), c'était au contraire son absence totale d'originalité. Elle était EXACTEMENT comme la norme le dictait. Peut-être plus excentrique, oui, mais c'est tout. Elle agissait comme un mouton, à vouloir être au milieu de son troupeau. Et parce que Louisa, justement, était un mouton noir, elle ne cherchait pas à comprendre son point de vue, et s'entêtait à se vanter de ses multiples qualités, sous couvert d'une fierté qui lui donnait les pitoyables caractéristiques du gryffondor moyen dans ce qu'il avait de plus pédant et détestable.
Tant mieux, si elle la laissait rester seule toute ta vie. Louisa n'avait besoin de personne, un point c'est tout. Si c'était inconcevable pour Ginger, eh bien tant pis pour elle.

-Désolé, je me suis laissée emportée...

Louisa fut étonnée de voir Ginger se calmer soudainement. Elle s'était attendue à ce qu'elle tempête encore un moment, s'enferre dans ce qu'elle pensait être vrai, ne tolérant pas qu'on puisse avoir une autre vision de la vie qu'elle.

-J'ai remarqué ça. Tu as le droit d'avoir ton opinion, mais respecter celle des autres n'a jamais fait de mal. Répliqua-t-elle calmement. J'aurais aimé voir ta colère atteindre son climax, je suis presque déçue.

-Désolée de te décevoir mais je suis une personne sérieuse, attentionnée, et très bien élevée

Cela restait à voir. La seule chose certaine au regard de Louisa était que Ginger Gracker était de ces personnes extrêmement spontanées qui partaient au quart de tour sans cesse. Ce que l'on pouvait qualifier de qualité et de défaut. Ce que certains pouvaient trouver charmant. Ce que la fille de l'infirmière trouvait tantôt amusant, tantôt exaspérant. En fait, la bleue et bronze ne savait pas trop si elle trouvait la compagnie de sa camarade plaisante ou agaçante. Cela dépendait des moments, en fait. Il faut dire qu'elles n'auraient, toutes les deux, pas pu être plus incompatibles. Ou de caractères plus opposés, en tous cas. La différence entre elles était si flagrante que leur dialogue tenait presque du surréalisme.

-Moi j'aime les muffins aux chocolat de ma grand-mère!

Et voilà, on avait cette fois atteint les tréfonds du surréalisme. Ginger était-elle tout simplement d'un naturel un peu à part et désarmant... ou était-elle cinglée? Telle était la question que se posait la bleue et bronze à cet instant. Devait-on la trouvait illégitime? Non, répondrait à coup sûr la future deuxième année. N'empêche qu'à certains moments, Louisa se demandait si elle ne ferait pas bien d'avertir le secteur psychiatrique de Sainte-Mangouste afin de s'assurer qu'aucun de leurs patients ne s'était enfuit. Ginger souffrait peut-être de troubles bipolaires ou de skyzophrénie. Et ce qui pouvait passer pour une charmante humeur pouvait déceler quelque chose de plus grave...

-Tu m'en diras tant. répliqua Louisa avec prudence, d'un ton qui n'avait rien perdu de sa neutralité. Les muffins de ma grand-mère étaient peut-être très bons, j'en sais rien, j'ai connu aucune de mes grands-mères.

N'allez pas croire que Louisa avait prononcé ces mots pour que l'on s'appitoie sur son sort. Bien au contraire. Elle l'avait fait pour le seul plaisir de plomber l'ambiance. Elle n'appréciait guère que l'on affiche un sourire béat sans raison légitime à cela.

"Tu as prévu quelque chose pour cette après midi?"

Louisa marqua un temps d'hésitation avant de répondre à cette question. Elle n'avait en vérité rien prévu de particulier. si ce n'est peut-être s'asseoir sur un banc et lire, une activité qui pouvait en rebuter plus d'un mais qui lui plaisait, à elle. Essayer de le faire comprendre à sa camarade la fatiguait déjà, alors elle préférait ne pas s'y essayer. Elle comprenait bien ce que sous-entendait la question de Ginger, et si elle mettait un temps pour y répondre, c'est parce qu'elle n'était pas certaine de savoir si elle voulait ou non passer plus de temps en compagnie de la vert et argent. En fait, Ginger n'était pas totalement antipathique aux yeux de Louisa, mais elle reconnaissait tout de même et sans mal qu'il lui serait très difficile de supporter sa présence à trop long terme. Elle était trop énergique et exhubérante pour quelqu'un d'aussi calme et pondéré qu'elle.

En même temps, Ginger lui offrait une possibilité en or, un moyen de ne pas rentrer trop vite chez elle, pour retrouver son exaspérante génitrice. Parce que oui, à choisir entre sa mère et cette fille qu'elle connaissait à peine, elle choisissait la presque inconnue. On ne pouvait pas faire moins pesant que le temps qu'elle passait avec l'infirmière de l'école de magie. donc quoi que puisse être l'issue de leur conversation, ce serait forcément mieux.

Louisa choisit donc une réponse contenue. Elle pouvait toujours dire qu'elle n'avait rien à faire et attendre de voir ce que Ginger lui proposait, après tout. ça ne lui coûterait rien, et à l'instant où elle en aurait vraiment marre, elle pourrait toujours prendre congé de sa camarade. Elle répondit donc, sans montrer ni enthousiasme, ni réelle exaspération :

-à moins de rentrer chez moi histoire de passer plus de temps avec ma génitrice. Non.

Un jour, sa motivation débordante la mettrait en fâcheuse position. Un jour.

Décidément, la personnalité de Ginger était loin d'être commune. Elle avait le don de destabiliser un peu Louisa, et pour parvenir à cet exploit, il fallait vraiment y aller. Ce n'était pas tant l'immense enthousiasme dont elle était capable qui la déstabilisait que cette capacité qu'elle avait à la supporter malgré tout. Les personnes comme elle, avec le même type de caractère avaient normalement tendance à abandonner rapidement. Et à raison, la fille de l'infirmière possédait un tempérament tout à fait exécrable. Même les individus les plus patients et les plus agréables finissaient par y perdre leur bonne humeur. Pas la rouquine. Apparemment, la miss disposait d'un seuil de tolérance à sa misanthropie exacerbée plus élevé que la moyenne. Bah... tant mieux. La bleue et bronze devait se faire une raison, il n'existait aucune façon pour que la vert et argent perde patience et décide de la laisser à son compte. Tant pis... Tant mieux? C'est drôle, mais en fait, Louisa était toujours incapable de se décider. Appréciait-elle Ginger Gracker ou celle-ci l'exaspérait-elle? En fait, son opinion à son sujet changeait d'une fois sur l'autre, à une vitesse folle. Il fallait sûrement plus d'une conversation pour tout comprendre du personnage qu'incarnait la demoiselle (même si en même temps et paradoxalement, elle était sûrement la personne la plus "nature" que la petite Sparkley ait jamais rencontré).

-Je connais un jeu moldu très drôle, ça me détends… Tu reste assise, tu observe les gens qui passent et tu imagines une histoire en rapport avec eux et essaie de savoir ce qu’ils pensent. Mon amie ma permit de découvrir ce jeu, elle l’appelle la “divine divination".

Tiens, voilà un jeu auquel Louisa n'imaginait pas Ginger jouer. Parce que c'était un jeu qui demandait du calme, de l'observation, de se poser. Et la pile électrique qu'était la demoiselle à côté d'elle ne lui avait jamais laissé supposer qu'elle disposait de ces aptitudes. Mais après tout... Pourquoi pas? Voilà le genre de jeu que Louisa, elle aussi, adorait. Mais généralement, elle y jouait toute seule. Il serait sûrement plus intéressant et stimulant d'avoir une partenaire de jeu.

-Bon, va pour la divine divination.

Et ainsi, assises, elles regardèrent les passants et s'amusèrent à leur trouver une vie, une histoire, un passé, un futur, une raison d'être à tous ces gens qui défilaient sous leurs nez. C'est vrai, ça détendait. Et c'était plus amusant. De cette manière, en parlant d'autres personnes, en vérité, Louisa avait l'impression de mieux connaître Ginger. Elle l'appréciait mieux sous ce jour, calme et créatif. Le temps fila à une vitesse que la bleue et bronze n'avait pas soupçonné, et quand elle jeta un oeil à sa montre, il était grand temps qu'elle s'en aille. Cette fois, sa génitrice allait vraiment râler.

-Désolée, je dois y aller. Elle lui adressa un léger sourire. Je suppose qu'on se reverra à Poudlard?

Sans ajouter un mot de plus, elle abandonna sa... connaissance? Son amie? Seul l'avenir le dirait.