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lle avait dû faire de son mieux avec les moyens du bord, elle avait amassé ce qu'elle pouvait de cartons, de papier transparent, avait donné au tout le forme escomptée, l'avait assemblé et utilisé le sortilège que lui avait appris son père... Le résultat était assez médiocre. Ces lorgnospèctres improvisés étaient bien moins efficaces que ceux qui avaient été confectionnés à la chaîne dans le Chicaneur, mais Luna était bien contrainte de se contenter de ce qu'elle avait. Bien des inventions fabuleuses de ses parents avaient quitté sa vie dès lors qu'avait eu lieu ce voyage temporel dans cette époque dont elle ne pensait plus vraiment pouvoir s'extirper, même si le travail du département des mystères sur leur cas pouvait leur donner un vague espoir. Alors la bleue et bronze utilisait des stratagèmes tels que celui-ci pour lui faire oublier ne serait-ce qu'un peu cette situation, et le manque qu'elle ressentait, celui que devait immanquablement provoquer chez elle l'absence de son père. Ce fut avec une immense pensée pour lui qu'elle décora ses lorgnospèctres de pacotille de quelques rayures roses et blanche. Le tout achevé, elle déposa ces lunettes de fortune sur son nez. Et décida d'arpenter les couloirs du château, à la recherche d'éventuels joncheruines.

Elle n'avait aucune idée de l'endroit où ses pas allaient la mener. Ça lui était plutôt égal, en vérité, pour peu qu'elle puisse se dégourdir les jambes et profiter de ce dimanche enneigé pour demeurer au chaud dans sa bulle imaginaire, prête seulement à affronter le froid de l'hiver si quelques unes de ces bestioles fantastiques venaient à s'y trouver. Descendant les étages depuis la tour des serdaigles, flânant de couloirs en couloirs, elle se retrouva en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire dans le couloir de quatrième étage. Toujours rien à l'horizon. Soit ses lunettes pour le moins expérimentales étaient très inefficaces, soit il devait y avoir quelque part un cerveau particulièrement embrouillé, pour que s'y logent tous les joncheruines du château. Arrivée à proximité des toilettes des garçons, il lui sembla entendre l'appel d'une voix féminines, un appel à l'aide. La bleu et bronze se figea sur place. Puis, après une légère hésitation, elle entra dans ce lieux que la gente masculine semblait avoir déserté pour l'occasion, laissant la propriétaire de la voix seule. Et enfermée dans l'une des cabines, apparemment.

-Laury ?

Oui, il semblait bien à Luna avoir reconnu la voix de cette petite poufsouffle qu'elle affectionnait beaucoup. La voyageuse temporelle su employer un sortilège approprié, aussitôt, la porte s'ouvrit sur la pauvre deuxième année. Elle lui adressa un sourire, qui augmenta quelques secondes quand elle découvrit de fins résidus, comme des fragments d'étoiles, entourer Lauraleen, à travers ses lorgnospèctres.

-Ils étaient donc chez toi. Dit-elle en relevant ses lunettes sur son crâne. Elle tendit la main à la pauvre jaune et noir qui, visiblement, avait été martyrisée une fois de plus. Viens, sortons d'ici.

Quelqu'un d'autre aurait peut-être interrogé la demoiselle quant à sa présence dans des toilettes réservées aux hommes, mais le fait est que Luna, elle, ne s'étonnait jamais de grand chose.

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istraite par la situation (il faut bien l'admettre, ce n'était tout de même pas commun), la bleue et bronze ne comprit pas immédiatement à quoi faisait référence le "c'est quoi ?" de son interlocutrice. C'est ce regard insistant qu'elle posa sur sa paire de lunettes improvisées qui lui fit comprendre qu'elle parlait certainement de ses lorgnospèctres. Luna ne s'étonna pas de la curiosité de la jaune et noir, mais peut-être pas pour les bonnes raisons : c'est vrai, les lorgnospèctres n'existaient pas encore à cette époque (comme si, à son époque, tout le monde en avait sur le nez), et Laury était quelqu'un de curieux par nature, il n'était pas rare qu'elle pose mille et une questions à la voyageuse temporelle, qui se faisait toujours un plaisir de lui répondre, ravi de l'intérêt sincère qu'elle manifestait à l'égard de ce qui la passionnait, ça changeait des habituels railleries et quolibets. C'était l'une des raisons pour lesquelles Luna appréciait tant Lauraleen, parce que la demoiselle ne laissait pas son esprit être perverti par ce que le commun des mortels qualifiait de censé. Elle acceptait de deviner l'indicible, de croire en l'impossible... Non, Luna n'avait pas l'impression de la faire marcher, puisqu'elle-même croyait en ce qu'elle avançait. Ce n'est pas parce qu'on ne voyait pas quelque chose que cette chose n'existait pas. Il n'y avait que les esprits étriqués pour penser de la sorte. Dans un sourire, Luna releva donc ses lunettes sur sa longue chevelure blonde avant de répondre à son interlocutrice.

-Ça... ce sont des lorgnospèctres, ils me servent à détecter les joncheruines. Elle ne songea pas à expliquer ce qu'était un joncheruine, même si elle n'était pas certaine d'en avoir déjà parlé à la demoiselle. Elle oubliait, par moments, qu'il était bien des choses qui échappaient à la connaissance de tous, si ce n'est à la sienne. La moindre de ses explications nécessitait généralement d'autres explications... On ne se refait pas. Je les ai fabriqué moi-même, je peux t'en faire une paire aussi, si tu veux. ajouta-t-elle en suivant la demoiselle hors de cette pièce fort malodorante (on s'en rendait plus que jamais compte quand on pouvait enfin mettre un pied dehors).

Une fois dans le couloir, le regard de la bleue et bronze suivit celui de sa camarade, qui fixait le paysage à travers la vitre la plus proche : un paysage enneigé. Ça y est, l'hiver était là, et il faisait de l'école de magie, déjà si belle en soi, un décor tout à fait magnifique, que la demoiselle ne se lassait pas de contempler depuis ses yeux globuleux.

-C'est beau, n'est-ce pas ? dit-elle de son habituelle voix douce. Tu restes ici, pour les vacances de Noël ?

Elle savait qu'elle était restée l'année précédente, peut-être en était-il de même cette année ? Si tel était le cas, la bleue et bronze en serait ravie, ça leur laisserait du temps pour bavarder ensemble. Ce début d'année avait été si mouvementé qu'elles avaient à peine eu le temps de se parler depuis le début de l'année, il fallait se rattraper.

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es vacances de Noël, pour Luna, se dérouleraient de toute évidence entre les murs du château. Une fois de plus, où d'autres aurait-elle bien pu se rendre pour célébrer les fêtes de fin d'année ? Bien sûr, au cours des vacances d'été, elle et les autres voyageurs temporels avaient trouvé une solution de repli, et d'ailleurs, c'était une véritable chance. Mais tant qu'ils pouvaient demeurer à Poudlard pendant les autres vacances, il est clair qu'il saisissait l'opportunité, d'autant que si le domaine des Alliane avait été des plus pratiques et appropriés, il n'était plus certain que l'on puisse compter Miyria parmi les alliés des voyageurs. Personne n'avait de véritables certitudes, d'ailleurs, quant à ce qui se passait exactement la concernant. Le fait est qu'on la voyait de plus en plus souvent en présence de Tom Jedusor, et qu'à l'inverse, elle semblait avoir entièrement coupé les ponts avec Pomona Fitz, au point que, lors de la réunion de la résistance, elle n'avait même pas été là, fait que l'apprenti-criminologue avait très rapidement occulté sans qu'on puisse apprendre le fin mot de l'histoire. En bref, si ce n'était pas une évidence pour Lauraleen, c'en était une pour Luna, ce Noël-ci, une fois de plus, elle le passerait au château. Oh, ce n'était pas si mal, au fond. À cette période de l'année, Poudlard se décorait de ses plus beaux atours, et était absolument magnifique à regarder. Oui, on pouvait être bien plus mal loti qu'en passant les fêtes ici. Mais la bleue et bronze devait quand même admettre que cette perspective lui serrait un peu le coeur. Comme l'année passée, le fait de rester là en période de fête lui rappelait ces moments qu'elle aurait dû passer en compagnie de son père, à décorer leurs sapins de toutes sortes d'ornements et guirlandes farfelus, et à s'offrir des cadeaux qui l'étaient tout autant (quoi qu'il n'en était rien selon leurs étranges critères). Enfin, ce n'était pas une raison pour perdre le sourire qu'elle affichait pour l'heure ! Et qui s'était encore élargi à la perspective que la jaune et noir reste aussi. Passer les fêtes avec elle serait plus réjouissant qu'avec certains des voyageurs. On ne pouvait pas dire, malheureusement, que leur petit groupe soit très uni, dernièrement, et qu'il persiste la moindre cohésion entre eux, elle le regrettait.

-Oui, je reste. approuva-t-elle dans un vif hochement de tête. J'espère que toi aussi, je saurais quoi t'offrir, du coup !

Autrement dit, ces fameux lorgnospèctres fait main, et avec beaucoup de coeur. Lorgnospectres dont Lauraleen ne comprenait toujours pas l'usage. Logique, en même temps, puisqu'elle ignorait ce que pouvaient bien être des joncheruines. Pas grave, s'il y avait un domaine sur lequel Luna aimait instruire autrui, c'était bien celui-là. Autrement dit, celui des créatures qui n'existent pas. Et elle se targuait à juste titre d'être incollable.

-Ce sont des créatures invisibles, elles entrent dans ta tête par les oreilles et t'embrouillent le cerveau. Elle repositionna ses lunettes sur son nez. Mais les tiens ont l'air d'être partis. ajouta-t-elle tout naturellement. Puis, calant les lorgnospectres sur ses cheveux blonds. Tu as du temps devant toi ?

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n demandant à Lauraleen si elle avait du temps devant elle (ce qui, en langage universel, semblait devoir signifier qu'elle voulait qu'elles passent encore un peu de temps ensemble - et en l'occurrence, même si Luna était parfois étrangère aux critères de langage universel, c'était bel et bien le cas) , on pouvait croire qu'elle avait réfléchi à ce qu'elles pourraient faire toutes les deux, afin de passer du temps ensemble. En vérité, non, ce n'était pas le cas. Elle avait posé la question dans l'impulsivité du moment, sans réfléchir au fait que certaines personnes attendait de connaître l'intégralité d'un programme avait que de signer. Il faut dire que la bleue et bronze n'avait jamais été de ces personnes qui aiment à tout planifier. De manière générale, elle avait plutôt tendance à prendre les choses comme elles lui venaient, et à réfléchir ensuite. Faire des plans sur la comète, savoir scrupuleusement ce qui était prévu pour elle dans les temps à venir, se fier à un programme strict et rigoureux, ce n'était clairement pas fait pour elle. Elle aimait bien mieux se laisser surprendre, se satisfaire de l'inattendu, ni plus ni moins. Laisser la vie défiler au fil de son imaginaire était pour elle bien plus palpitant que de tout planifier scrupuleusement.

-Je ne sais pas... dit-elle, réfléchissant seulement maintenant au meilleur programme pour elles. Pour peu, bien sûr, que la jaune et noir ait vraiment envie de passer plus de temps en sa compagnie. Et si ce n'était pas le cas ? Elle le comprendrait sans problème, en fait. Elle était habituée à ce qu'autrui préfèrent la solitude à sa loufoque compagnie, elle ne s'en serait pas offusquée. Si tu veux, on peut fabriquer tes lorgnospectres ensemble ? J'ai encore tout ce qu'il faut dans mon dortoir. Un sourire ravi, voire même impatient, éclaira son visage lorsqu'elle considéra soudain à quelle chasse aux joncheruines elles pourraient se livrer, toutes les deux. Courir après des créatures imaginaires (quoique pour elle elles ne l'étaient pas le moins du monde), c'était amusant et plaisant seule, mais encore mieux lorsqu'on était accompagné. Luna en savait quelque chose. Sa quête éternelle du ronflak n'avait plus la même saveur à présent que son père n'était plus là pour courir les créatures monstrueuses avec elle. Comme ça, tu pourras les voir comme moi, et on pourra les chasser ensemble ?

Comme s'il suffisait de si peu pour chasser les mauvaises pensées. Mais cet acte symbolique pouvait bien être un bon début, en définitive.

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una aimait à entendre autant d'enthousiasme dans la voix de la jaune et noir, et à en lire autant sur son visage. Ces derniers temps, où que son regard se tourne, il ne croisait jamais que des mines dépitées, déconfites, les gens qu'elle côtoyait, les gens qu'elle aimait, était généralement de ceux qui, progressivement, s'étaient laissés envahir par l'absence d'espoir. Et la bleue et bronze pouvait difficilement les blâmer pour cela. Elle-même, par moment, sentait son éternel optimisme vouloir prendre la tangente. Les derniers événements n'avait invité personne à se montrer véritablement affable ou ravi... pas même Luna, qui avait tout de même vu les grilles d'Azkaban se refermer sur elle. Avec la résistance, une petite lueur, de ces lueurs qu'il faut entretenir pour les voir grandir, avait vu le jour, et ils s'accrochaient tous à elle pour espérer s'en sortir. Mais ce n'était pas suffisant. Si un sourire venait éclairer un visage, il n'était jamais parfaitement jovial, jamais parfaitement sincère, jamais parfaitement amène, il s'y lisait toujours en filigrane un sentiment ce qu'il y a de plus négatif, qu'il s'agisse d'une certaine douleur, d'une angoisse, d'appréhension... Personne n'était à blâmer pour cela... personne, sauf les circonstances.... et Tom Jedusor. Affubler tous les malheurs du monde à une seule personne ? Oui, c'était possible. C'était possible quand il était question du futur seigneur des ténèbres. En bref, dans un tel climat. Découvrir un sourire aussi sincère était un véritable bonheur, que Luna savourait à sa juste valeur. Certains ne savaient pas voir ces motifs de joie, trop infimes pour leurs regards, mais ce n'était pas le cas de la blondinette. Décidément, passer du temps avec Lauraleen lui ferait du bien. Un soupçon de joie teinté d'insouciance. Tout ce qu'elle aimait ! Le sourire de Lauraleen était communicatif, et Luna étendait ses lèvres depuis une oreille jusqu'à l'autre.

-Suis-moi, alors. fit-elle en lui attrapant le poignet.

Ni une, ni deux, elle entraîna son amie dans des dédales de couloirs et d'escaliers, de son habituel pas traînant, presque sautillant. Durant tout le trajet, elle ne dit rien. Non pas parce qu'elle n'avait rien à dire, mais tout simplement parce qu'elle n'était pas de ces personnes qui se sentaient obligés de meubler le silence à tout bout de champs, parce que ce silence en question les insupportait. Luna était d'avis que, lorsqu'on était en bonne compagnie, le fait de parler ou pas n'avait pas beaucoup d'importance, le principal était d'être ensemble. Elle interrompit sa marche quand elles arrivèrent devant le portrait qui menait à la salle commun, Luna donna le mot de passe, se souciant peu de faire entrer quelqu'un qui n'était pas dans sa maison dans l'antre des bleu et bronze. La laissant entrer, elle lui laissa le temps de découvrir les lieux.

-Tu étais déjà venue ici ? demanda-t-elle dans un sourire.

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l est certain que lorsqu'on rentrait dans la salle commune des Serdaigles, il n'y avait pas grand chose qui puisse entâcher leur réputation. L'on disait souvent des bleus et bronze que c'était des bucheurs, des gens studieux, qui passaient la majeure partie de leur temps le nez plongé dans un bouquin. Les faits.... Oui, bon, les faits donnaient effectivement raison à ces on-dits, mais comme partout, il y avait toujours des exceptions, et Luna en était l'exemple le plus flagrant. Certes, l'on entendait pas un bruit dans la salle commune à cette heure ci, mais il n'était tout de même pas rare que l'ambiance soit plus détendue et convivial. Disons surtout que la plupart des élèves de serdaigles étaient des personnes organisées, pour elles, il y avait une heure pour lire et travailler, et une heure pour bavarder tranquillement au coin du feu. Tenez, aux alentours de minuit, vous ne verrez plus un seul bleu et bronze en train de travailler, mais vous les verrez rire de bon coeur, ils n'étaient pas de marbre, après tout, et à la même heure, passez jeter un oeil à la tour des Gryffondor, vous observerez sans doute le spectacle inverse, des rouges et or le nez plongés dans leurs bouquins et parchemins parce qu'ils n'avaient pas pensé plus tôt au devoir à rendre pour le lendemain. Cliché éhonté, sans nul doute, mais à Poudlard, ils avaient la vie dure. Ce n'était pas pour rien, après tout, que les serpentards et les gryffondors se livraient ainsi une guerre sans merci. Un large sourire vint décorer le visage de Luna quand Lauraleen complimenta les lieux.

-Suis-moi.

Elle avait prononcé ces mots d'une voix enthousiaste, qui résonna dans toute la salle commune, lui attirant les regards courroucés de plusieurs de ses camarades, profondément plongés dans leur lecture ou dans leurs devoirs, mais elle n'y prêta pas la moindre attention, et à la place, préféra guider la deuxième année jusqu'à son dortoir. Il n'était pas difficile de deviner quel lit était le sien. Là où la plupart des lits étaient faits, et les affaires parfaitement rangés, un seul lit était en désordre, et recouvert de mille et uns objets tous plus incongrus les uns que les autres. Luna les dégagea et laissa tomber par terre d'un geste négligé de la main avant de s'y asseoir en tailleur et invita Lauraleen à s'asseoir à côté d'elle. À cette heure-ci, il n'y avait personne. Tant mieux, elles s'évitaient les quolibets des camarades de dortoir de Luna qui, autant le dire, n'étaient pas toujours très aimables avec elle.
Vidant sur le draps une trousse d'ustensiles de bricolages divers et variés, ceux-là même qui lui avaient permis de créer ses lorgnospectres, elle s'adressa à Lauraleen :

-Voilà, tu as tout ce qu'il faut. Tu vas t'en sortir, tu penses ?

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est vrai qu'ils étaient jolis, les reflets de ces papiers colorés et transparents qui laissaient au sol des légères traînées de soleil à même le sol. Luna les admira au même titre que Lauraleen plusieurs secondes durant, admirant cet effet auquel elle n'avait pas songé un seul instant, et qui, à présent, lui sautait au visage. Elle utilisait ce fin papier dans l'assemblage de ses lorgnospèctres improvisées pour mieux garantir leur effet, et parce qu'elle appréciait le rendu final, kaleidoscopique, qui n'était jamais qu'optionnel. Un large sourire fendit ses lèvres alors qu'elle prenait en compte la suggestion d'en faire des objets de décorations, à suspendre au plafond, afin que l'on puisse toujours profiter de son aura lumineuse. C'est vrai que l'idée était tentante, il faudrait qu'elle la garde en mémoire pour un prochain "atelier" de bricolage. Comme quoi, il suffisait souvent de se laisser voir le monde, ne serait-ce que l'espace de quelques secondes, à travers les yeux de quelqu'un d'autres, pour saisir des beautés que l'on avait pas mesuré, des dimensions que l'on avait pas atteintes.

-C'est comme des fragments d'étoiles à même le sol. apprécia la blondinette en penchant légèrement la tête de côté avant de se concentrer à nouveau sur la raison qui les avait poussé à se retrouver dans ce dortoir.

Il est vrai qu'il aurait semblé logique que Luna fournisse ne serait-ce que l'ombre d'une explication à son interlocutrice. De la sorte, elle aurait pu mieux comprendre ce qu'il fallait. On pouvait être très doué et disposer de grands talents de déduction, il n'empêche que les notices explicatives n'existaient pas pour rien. Mais Luna n'était pas quelqu'un de pragmatique, elle s'attardait rarement sur des choses aussi prosaïques que des explications d'ordre techniques. Pourquoi se donner cette peine quand, comme elle, on agissait par instinct avant toute autre chose.

-Attends, je vais te montrer et tu n'as qu'à faire comme moi au fur et à mesure, d'accord ? fit-elle de sa voix douce avant que de s'asseoir en tailleur sur son matelas, de s'emparer d'une paire de ciseaux, et d'entamer la conception de nouvelle lunettes à déceler les bestioles imaginaires. Alors qu'elle était toute affairée à ce processus, elle se permit, comme souvent, de laisser divaguer son esprit, raison pour laquelle, la phrase qu'elle prononça ensuite n'eut pas le moindre rapport avec leur activité. Pourquoi tu étais enfermée dans les toilettes des filles, tout à l'heure ?

Oui, c'était logiquement la question que n'importe qui aurait posé directement au lieu d'attendre si longtemps, mais Luna n'était pas doté d'un esprit dit "logique". Ou tout du moins sa vision de la logique et la manière dont elle l'appliquait au quotidien était sans rapport avec celles du commun des mortels. Tout comme elle-même était sans rapport avec le commun des mortels.

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