C’était assez rare, mais Caspar ne se trouvait pas au ministère de la magie. Un fait rare, donc, parce que mine de rien le jeune homme passait quand même la plupart du temps au ministère de la magie, bien plus souvent là-bas qu’auprès de son épouse dans leur demeure. Si on devait faire le compte, proportionnellement dans sa vie, il passait donc la presque totalité de son temps à son travail. Mais pour l’heure, en cet instant précis, il n’était pas dans son bureau au ministère de la magie ou encore dans les locaux de ce dernier non plus. Cependant, ce n’était pas pour autant qu’il se trouvait auprès de Charis non plus. Présentement, Caspar se trouvait à Gringotts. Il avait eu besoin de récupérer une certaine somme d’argent, dans le but de régler une certaine affaire et pour ça il s’était donc rendu dans son coffre-fort à Gringotts. Enfin leur coffre-fort, puisqu’il le partageait avec Charis bien évidemment. Même si concernant l’aspect pécunier de leur vie, Caspar considérait que c’était à lui de gérer les choses (et en même temps, à ses yeux, c’était à lui de gérer la plupart des aspects de sa vie). Non pas que Charis soit incapable, mais c’était lui qui travaillait et elle, son rôle, c’était simplement d’être une bonne épouse, sans se préoccuper de ce genre de chose. Ils n’avaient pas réellement besoin de se préoccuper de ça de toute façon, ils faisaient quand même partie des « famille » – si on ne prenait que le « couple », on ne pouvait peut-être pas réellement les qualifier de famille pour le moment – sorcière les plus riches de Grande Bretagne. De base, les Croupton avaient une bonne situation et Caspar avait quand même un travail qui lui permettait un très bon salaire (et il se donnait du mal pour ça d’ailleurs). Mais forcément, l’alliance des Croupton avec les Black, leur situation était donc naturellement aisée. Ce qui n’était pas pour déplaire à Caspar.

Bref, il s’était dont rendu dans son coffre-fort et avait retiré une certaine somme de Galion qui se trouvait maintenant dans son manteau. Il était assez tard au final, Charis allait sans doute l’attendre de pied ferme, le diner déjà prêt, la table déjà mise, pour qu’ils puissent partager ce repas. Ce qui devrait pousser le jeune homme à se dépêcher donc. Mais quand il tourna une seconde son regard, il tomba sur un visage bien connu.

« Bonsoir Harfang. » Dit-il en s’approchant de son beau-frère. Non pas qu’il ait forcément envie de passer du temps avec l’homme, même s’il n’avait rien contre lui. Ils faisaient partie de la même famille puisqu’ils avaient tous les deux épousés des sœurs (mais à ce compte-là, jamais Caspar ne considèrerait Septimus Weasley comme un membre de sa famille…) et sans cela, il n’y aurait aucune raison pour qu’il lui adresse la parole. Et au vu de ce qui s'était passé avec Callidora, Caspar devrait sans doute se retenir. Mais si ça pouvait retarder le moment où il allait rentrer chez lui, ce n’était pas plus mal. « Je vois que tu travail tard. »

Il n’était pas surpris non, en effet, de découvrir que Harfang restait tard par moment au travail. Caspar serait le dernier surpris d’un tel comportement de toute façon, puisque c’était exactement le sien. Et encore, quand le jeune homme rentrait enfin chez lui, qu’il partageait un diner en compagnie de son épouse, ce n’était pas pour autant qu’il ne travaillait plus. La plupart de ses soirées, il les passait dans le bureau de sa demeure pendant que Charis vaquait à ses occupations. Alors non, le sorcier n’était en aucun cas surpris de voir que Harfang travaillait si tard. Ce dernier précisa tout de même que le travail ne manquait pas. En un sens, c’était le genre de « bonne » nouvelle que le jeune homme appréciait entendre. Pour un bourreau de travail comme lui, il aimait entendre le fait que ce dernier ne manquait. Même si quand lui s’en réjouissait, d’autre en avait assez. Mais si Harfang ne manquait pas de travail, ça signifiait que les Londubat ne manqueraient de moyen. Non pas que cela regarde réellement Caspar, ou qu’il y ait une raison pour que ces derniers manquent de moyen mais… eh bien, tout ça n’était finalement que question de réputation. Caspar et Harfang, par la force des choses, étaient liés, qu’ils le veuillent ou non. Concrètement, le jeune homme n’avait rien contre son beau-frère. Il ne faisait pas parti de ses amis, il ne faisait pas parti des personnes qu’il aimait le plus (mais était-il réellement capable d’aimer quelqu’un ? La question se posait en effet), mais cela n’enlevait pas le fait qu’ils étaient liés. La réputation des Londubat allait forcément toucher directement celle des Croupton (et dans le futur, les (ou plutôt le) Croupton n’allaient pas manquer d’arranger la réputation des Londubat d’ailleurs). Ce n’était que pour cela finalement, qu’ils se parlaient tous les deux.

« Je me porte bien. » Répondit-il quand ce dernier lui demanda comment il allait. Ce n’était peut-être pas exactement vrai, mais s’il ne se l’avouait pas à lui-même, Caspar n’allait dans tous les cas pas l’avouer à Harfang. « Et toi ? » Est-ce qu’il en avait quelque chose à faire en soit ? Peut-être pas. Mais comme toujours, le jeune homme savait prendre soin des relations qu’il jugeait importante. Il ne portait pas tant que ça le jeune homme dans son cœur, mais puisqu’ils étaient des membres d’une même famille, il était normal qu’ils discutent cordialement. « Tu rentres chez toi ? »

Demanda-t-il, curieux, sans doute un peu trop d’ailleurs. Il se demandait en effet si son beau-frère se rendait chez lui, dans le but de passer du temps avec sa femme ou… s’il avait l’intention d’aller voir encore ailleurs. Il y avait des choses qui se savaient, Caspar savait parfaitement que Harfang n’était pas du tout fidèle à son épouse et qu’il allait souvent voir ailleurs. Et… au fond, il avait eu l’habitude de le lui reprocher (pas directement, il gardait ses pensées pour lui tout de même) jusqu’à il y a peu.

Harfang va bien et tant mieux sans doute. En réalité, même si son beau-frère n’allait pas bien, cela ne changerait sans doute rien du tout à sa vie, à sa situation. Par la force des choses, les deux hommes étaient liés, mais ce n’était pas pour autant que Caspar espérait forcément que Harfang aille bien. Du moins, il voulait qu’il aille suffisamment bien pour ne pas causer des soucis aux Croupton, en réalité. Tout allait bien pour Harfang, tant mieux donc. Il ne lui souhaitait pas du mal non plus. Parce qu’en soit, Caspar n’avait rien contre son beau-frère en dehors du fait peut-être qu’il valait mieux éviter qu’on sache que ses infidélités étaient nombreuses… histoire que l’aînée des Black ne soit pas trainées dans la boue à cause de lui. Parce que la réputation de Callidora toucherait forcément celle de Charis et donc la sienne. Le même cercle, la même famille, la même réputation, c’était ainsi que les choses marchaient. Mais aussi… Caspar ne pouvait pas nier qu’il tenait peut-être un peu plus à l’intérêt de Callidora qu’il ne le faudrait vraiment, qu’il ne voudrait même. Elle méritait tellement mieux qu’un mari comme celui qu’elle avait, mais il ne dirait pas qu’elle mériterait quelqu’un comme lui non plus.

Son beau-frère lui affirma qu’il avait l’intention de rentrer chez lui. Caspar fit mine de gober son mensonge, mais les deux hommes savaient parfaitement que le Croupton n’était pas dupe. Il se doutait que l’homme n’avait pas vraiment l’intention de retrouver si rapidement son foyer. En soit, encore une fois, tout cela ne le regardait pas du tout. Caspar n’avait aucune raison de se préoccuper de la vie de Harfang et de son épouse, surtout pour des questions si intimes. Cependant, quand son beau-frère lui proposa d’aller boire un verre avec lui, il hésita. Est-ce que Harfang était sincère ? Est-ce qu’il voulait vraiment aller boire ce verre ou c’était une manière pour lui de se montrer agréable ? La question se posait en effet. En temps normal, Caspar aurait sans doute poliment refusé. Non pas qu’il tenait spécialement à retrouver rapidement Charis (même si celle-ci l’attendait sans doute), mais il ne tenait pas spécialement non plus à passer du temps avec Londubat. Sauf que Caspar n’était pas dupe, en effet, il se doutait que Harfang ne se contentait pas juste de rentrer chez lui. Alors oui, il hésitait.

« Pourquoi pas, ça fait longtemps que nous n’avons pas eu la possibilité de discuter entre hommes. » C’était peut-être juste jamais réellement arrivé en fait, surtout que si Caspar avait l’intention de parler des affaires de la famille, il était évident qu’il valait mieux qu’il discute avec sa belle-sœur (et c’était ce qu’ils faisaient, discuter). « Je ne suis pas spécialement pressé de rentrer non plus. »

Affirma-t-il alors, laissant le sous-entendu se placer tranquillement. Quand bien même, il était honnête. Il ne cherchait pas spécialement la compagnie de Charis, du moins pas à tout prix. Même s’il valait mieux qu’il se montre plus présent maintenant.

C’était acté, Caspar et Harfang allaient donc partager un verre ensemble avant de rentrer chez eux, s’ils rentraient chez eux ensuite. Enfin, pour Caspar, c’était sûr qu’il allait rentrer chez lui, il ne savait pas si ça allait être le cas de son beau-frère, mais ce dernier allait sans doute perdre une bonne partie de sa soirée. Et le jeune homme ne pouvait pas concrètement dire qu’il n’appréciait pas l’idée. En soit, le jeune homme n’avait rien contre son beau-frère, mais il ne pouvait pas nier que ce dernier n’était clairement pas digne de leur famille. Enfin, il n’était surtout pas digne de sa femme d’ailleurs. Mais est-ce qu’il y avait vraiment besoin de préciser que Caspar considérait que Callidora méritait beaucoup mieux qu’un homme tel que celui qu’il avait sous ses yeux ? Non, ce n’était sûrement pas nécessaire, même si la situation n’avait pas encore pris pleinement la tournure qu’elle avait prise. Du moins, pas complètement, disons qu’ils ne savaient pas encore tous que leurs actes allaient avoir de sérieuses conséquences.

Ils se mirent donc en route dans le but d’aller s’installer pour boire un verre, maintenant que c’était acté, ils n’allaient pas pouvoir se défiler. Oh, il y avait sans doute clairement pire que de passer du temps avec Harfang quand même, il ne fallait pas exagérer. Le sorcier n’était pas au même titre qu’un traitre à son sang comme Weasley par exemple (un exemple prit parfaitement au hasard bien évidemment, sans rapport avec ce qui pouvait prendre quelque peu la tête à Caspar dernièrement).

« Oh pas vraiment. » Dit-il quand Harfang lui demanda s’il avait des soucis chez lui. Si c’était réellement le cas, le jeune homme ne prendrait sans doute pas la peine de se confier à son beau-frère en réalité. Tout cela serait encore et toujours une question de réputation, d’image et même si leurs familles étaient forcément proches, il n’avait aucune envie de se montrer « faible » en présence de Harfang. Avec Callidora c’était une autre histoire. « Mais disons qu’il faut que je me montre plus présent. » Dit-il pour poursuivre quand même, parce qu’il avait quand même quelque peu lancé le sujet. « Tu vas l’apprendre rapidement, mais Charis est enceinte. »

À moins que Callidora lui en ait déjà parlé, si Charis le lui avait déjà appris. Dans tous les cas, ça ne saurait tarder. Son épouse avait prévu, évidemment, une soirée en bonne et due forme pour annoncer cette nouvelle (somme toute agréable, il était important pour un couple comme eux d’avoir un héritier, mais Caspar ne se doutait pas que ça ne serait pas la seule « bonne » nouvelle du moment), mais la sphère plus intime de leur famille l’apprenait forcément avant. Callidora la première sans aucun doute, ce qui rendait ça quelque peu malsain d’ailleurs.

L’information n’avait aucune raison d’être secrète, quand bien même il était évident que Charis allait l’apprendre en grande pompe au monde sorcier de sang pur. Caspar n’avait pas spécialement de raison de se retenir d’informer son beau-frère que sa femme était enceinte (avant qu’il ne découvre que sa propre femme était également enceinte), puisqu’il allait l’apprendre sans doute très rapidement. Charis prendrait la peine de prévenir Callidora et si la jeune femme décidait de parler à son mari de l’information (ce qu’elle n’avait pas de raison de ne pas faire), il allait donc être rapidement au courant. Maintenant il l’était dans tous les cas.

Caspar se contenta simplement de faire un signe de tête en remerciement des félicitations de Harfang. C’était de mise, c’était une phrase qu’il avait toute raison de prononcer en cet instant précis. Parce que c’était les convenances, on lui apprenait l’arrivée prochaine d’un enfant, il félicitait. Qu’il le pense ou pas, qu’il se réjouisse réellement de cette situation, de cette nouvelle, ça lui était bien égal cependant. Caspar se doutait qu’il n’était pas forcément sincère, mais en même temps les convenances voulaient qu’il dise ce genre de chose. Ce monde n’était qu’apparence et pour le moment, les apparences étaient parfaitement maintenues. Ce qui n’allait pas durer longtemps, cependant, mais pour le moment il n’y avait rien qui sortait du cadre.

« Je me doute bien. » Reprit-il quand son beau-frère affirma qu’il allait voir, l’arrivée d’un enfant changeait une vie. Caspar se doutait que ça devait changer certaine chose, quand bien même il était évident que Charis et lui attendaient ça tous les deux et qu’ils étaient d’ores et déjà prêt à accueillir un enfant. C’était quand même le but de ce mariage après tout, ils ne se mariaient pas pour le plaisir, mais parce qu’ils devaient préserver la pureté de leur sang. « Ça a grandement changé la tienne. »

Il ne put s’empêcher d’ajouter cette petite remarque, quand bien même il ne pensait pas une seule seconde ce qu’il venait de dire. Après tout, il avait parfaitement conscience que son beau-frère ne filait pas droit (alors qu’il devrait, il n’était réellement pas à la hauteur de sa femme, c’était évident). Autant dire que Caspar ne croyait pas réellement au fait que l’arrivée d’Augusta avait changé beaucoup de chose dans la vie de son père. De sa mère certainement, mais de son père c’était difficile à dire. Quand bien même, Caspar n’était clairement pas dans l’intimité de la famille Londubat et u’il se contentait surtout de juger d’extérieur.

Ils parlaient sans vraiment entrer dans les détails, ou plutôt sans se montrer vraiment explicite. Mais en même temps, les deux hommes savaient parfaitement décrire ce qu’il y avait sous ses mots. Caspar n’avait aucune envie que Harfang ne comprenne pas ce qu’il disait après tout. Il n’y aurait aucune raison pour lui de cacher à Harfang ce qu’il pensait réellement. L’homme n’avait pas spécialement changé sa vie depuis la naissance de sa fille et Caspar n’avait pas spécialement l’intention de changer sa vie non plus. Bon, il était évident que les habitudes des Croupton allaient changer, mais ça ne voulait pas dire que la vie de Caspar allait changer du tout au tout. En tout cas, de son côté, il n’avait pas spécialement envie de changer grand-chose. Il allait travailler toujours autant, dans le but d’offrir à sa famille la meilleure des vies possible, puisque celle-ci ne pouvait que passer par l’argent et la réputation évidemment.

Quand bien même, le jeune homme se doutait que son interlocuteur ne pouvait pas complètement le comprendre. En fait, il jugeait que Callidora pourrait vraiment le comprendre, qu’ils étaient bien plus sur la même longueur d’onde ensemble que chacun avec leur « moitié ». Quoi qu’en un sens, Caspar considérait quand même qu’il avait plus de chance que Callidora, parce qu’il se retrouvait avec Charis et qu’il avait beaucoup moins de chose à lui reprocher que Callidora avait à reprocher à son époux. Au moins, Charis ne risquait pas de ternir l’image de leur famille. Harfang ne manqua pas d’aller dans son sens donc et mentionna sa propre fille, en affirmant espérer que les Croupton aient une fille. Évidemment, Caspar savait bien que son interlocuteur ne pouvait pas imaginer une seule seconde qu’il avait envie d’avoir une fille. Oh, une fille ne serait pas une si mauvaise chose, en deuxième lieu s’ils devaient avoir plusieurs enfants. Caspar avait évidemment envie d’avoir un fils, pour hériter de son nom et de tout le reste.

« Avec un peu de chance oui. » Répondit-il dans un sourire qui n’avait rien de sincère, sans que le jeune homme ne cherche à être sincère en même temps. « Je suis sûr que Augusta aura beaucoup de chose à apprendre à sa petite cousine. »

Le jeune homme n’avait rien directement contre la fille de Harfang, mais clairement il n’avait pas plus de respect que ça non plus. Il ne la trouvait pas à la hauteur, de sa mère clairement. Et il ne reprochait pas à Callidora son travail d’éducation, au contraire. Il se disait qu’elle faisait simplement du mieux qu’elle pouvait avec ce qu’on lui donnait. Est-ce qu’il serait aussi délicat avec Charis ? Peut-être pas non.

« Bon, sur ces belles paroles, il est quand même temps pour moi de rentrer. On se revoit bientôt. »

Oh, ils allaient avoir l’occasion de se croiser en effet.