Clarice n'était pas mécontente d'être de retour à Poudlard. Oh, reprendre les cours et retrouver sa cour hypocrite d'amis pour qui elle n'avait pas spécialement d'affection et qui n'en avait sans doute pas davantage pour elle n'était pas une perspective si enthousiasmante que ce à ses yeux.

Elle n'avait pas spécialement de considération ou de respect pour ses camarades, leur présence lui épargnaient la solitude, et lui donnait le plaisir d'exercer sur eux une sorte d'influence égoïste qu'elle appréciait en revanche immensément, et ça s'arrêtait là.

Alors non, elle aurait tout à fait pu se contenter de rester chez elle, où elle était aimée et bichonnée. Sur le principe, ça ne pouvait évidemment que la satisfaire, mais sur le principe seulement. Parce que les choses avaient changé, à la maison.

Les tensions constantes entre ses parents, Clarice y était habituée, et elle n'y prêtait même plus vraiment garde, mais il n'y avait pas que cela. Il y avait d'autres choses qui venaient s'ajouter aux autres, et la plus insupportable entre toutes était bien évidemment le fait que sa mère était pleine comme un ballon et semblait sur le point d'exploser.

Clarice était incapable d'accueillir sereinement la venue d'un petit frère ou d'une petite soeur dans sa vie. Être fille unique, c'était tout ce qu'elle demandait, et l'absence totale de considération de ses parents en la circonstance la sidérait complètement. Pour elle, ça ne faisait vraiment pas le moindre sens. Et donc, oui, ses mois de vacances n'avaient pas été, par conséquent, à la hauteur de ce qu'elle avait pu espérer, et elle s'en trouvait sincèrement agacée.

Alors ce n'était pas plus mal d'être de retour à Poudlard, où par ailleurs, elle se trouvait plus d'autonomie et de liberté.

Elle se trouvait dans la salle commune, en train d'échanger une conversation sans saveur avec plusieurs de ses camarades quand elle vit la silhouette d'Octavia monter discrètement jusqu'aux dortoirs. Clarice tenta de se raisonner... non, ça ne la concernait pas, elle ne voyait même pas pourquoi elle en avait quelque chose à faire.

Mais elle en avait quelque chose à faire. A voir Octavia mal en point, le coeur de Clarice se serrait terriblement. Alors elle avait inventé un prétexte pour rejoindre les dortoirs, et avait pris le chemin de celui d'Octavia plutôt que le sien.

"Oh c'est toi... Qu'est-ce que tu fais ici ?"

"Je t'ai vue monter", répondit Clarice d'un ton un peu hésitant, sans trop savoir elle-même ce qu'elle faisait là, en réalité. "Tout va bien ?"

"A ton avis ?"

Même dans leurs réactions, dans la manière qu'elles avaient d'ironiser et d'envoyer paître les autres à la moindre occasion sous le prétexte, peut-être, que ce serait plus facile ainsi, elles avaient clairement tendance à se ressembler, toutes les deux... c'étaient peut-être pour ça qu'elles avaient estimé tout d'abord être des ennemies naturelles.

Tout d'abord, oui, car ce n'était plus le cas à présent. Comment pourrait-elle bien définir leur relation ? A dire vrai, Clarice n'était pas certaine de le savoir elle-même, ou tout du moins de vouloir s'y concentrer. Ce qu'elle savait en revanche, c'est qu'elle avant plus que largement tendance à voir les choses d'une autre manière. Elle s'était dévoilée à Octavia, et ça, naturellement, ça devait changer la donne, ça devait faire une différence majeure, au-delà même de la dynamique qu'il y avait entre elles.

"J'avais juste besoin de relâcher la pression... Je savais que le retour allait être compliqué mais... certains ne manquent pas d'imagination pour tenter de me faire péter les plombs."

Clarice afficha une grimace compatissante. Elle n'était pas du tout surprise de ce qu'elle entendait. Quand il était question de vous pousser dans vos retranchements, certains s'en faisaient le plus malin des plaisirs, et sans envisager d'en éprouver ne serait-ce qu'un semblant de scrupules.

Elle-même aurait pu être de ce bord-là, en réalité, d'ailleurs, c'était toujours d'une manière détachée, sans le montrer totalement, qu'elle prenait le parti d'Octavia. Elle ne comptait pas afficher son soutien publiquement, mais ne pas participer au lynchage en règles était déjà une forme de soutien, au fond.

"Ils seront les premiers à le regretter."

"Je ne m'en inquiétais pas le moins du monde. Je suppose que tu as déjà bien réfléchi à tes représailles", observa Clarice avec un sourire en coin, convaincue de ses dires.

Octavia était une jeune femme intelligente, et elle avait de la suite dans les idées, elle saurait évidemment se défendre contre quiconque chercherait à lui faire du mal ou à lui nuire.

"Et toi, ça va ? Comment ça s'est passé, ton été, finalement ?"

"Pas terrible, ça a pas mal parlé fiançailles et ma mère est tellement grosse qu'on dirait qu'elle va exploser", résuma Clarice sans aucune délicatesse à l'adresse de sa mère. "Quelque part, je suis bien contente d'être de retour, l'ambiance étant franchement bizarre, à la maison."

"Je te donnerai le détail quand ce sera fait, je ne voudrais pas gâcher l'effet de surprise."

Clarice avait bien envie de lui répliquer que si elle ne lui donnait pas le détail, c'était surtout qu'elle ne le connaissait pas, mais si elle ne se permit pas de la piquer à ce sujet, c'est qu'elle avait l'intuition qu'elle se rapprocherait un peu trop près de la vérité. Et bizarrement, oui, elle n'avait pas envie de la piquer et surtout d'appuyer où ça faisait mal, alors que ce serait sans doute si facile, en vérité.

Mais même si Octavia n'avait pas encore d'idée, Clarice avait envie de croire qu'Octavia parviendrait très bien à rebondir : elle la connaissait bien, très bien même, alors elle croyait en elle, et elle était convaincue qu'elle parviendrait à ses fins, d'une façon ou d'une autre, elle n'avait de toute manière pas le choix.

"Et puis, je ne voudrais pas que tu compromettes mes projets. Je te rappelle que je ne te fais pas confiance."

"Et tu as bien raison, je rêve de te tirer dans les pattes", répondit Clarice d'un ton qui ne pouvait pas vraiment laisser suggérer qu'elle était sincère : et pour cause, elle n'était pas sincère du tout. "J'apprécie d'entendre que tu m'imagines suffisamment dangereuse pour préférer me tenir à l'écart", ajouta-t-elle.

Comme à son habitude, elle saisissait toutes les occasions de se laisser brosser dans le sens du poil : c'était sa manière de faire, et elle n'avait pas la moindre envie d'en changer, certainement pas.

"Bizarre comment ? Parce que ta mère est influencée par ses hormones ou pour une autre raison ?"

"Un mélange des deux, je dirais", elle répondit à l'adresse d'Octavia en accompagnant le tout d'un léger haussement d'épaules, car en réalité, elle n'était sûre de rien, à ce stade, mais elle avait ses propres interprétations de la situation, et elle doutait fort qu'elles soient fausses. "C'est entre elle et mon père que c'est bizarre. Enfin je veux dire, ça a jamais été le grand amour, mais là... Et puis, ma mère a pas l'air de comprendre pourquoi je lui en veux. Alors que c'est un peu évident, non ?" dit-elle en tournant son regard vers son interlocutrice.

Elle avait besoin qu'Octavia abonde dans son sens.

« Oui, c’est carrément évident »

L'air de rien, cela rassurait Clarice que de savoir que son interlocutrice comprenait son état d'esprit. Ce qu'elle redoutait, c'était qu'on la reprenne, qu'on lui dise qu'elle dramatisait ou qu'elle exagérait complètement.

Alors oui, elle dramatisait et exagérait, mais c'était la dernière chose qu'elle voulait entendre, et si quelqu'un était capable de comprendre son raisonnement, sa façon de penser, c'était définitivement Octavia, qui après tout la connaissait très bien, suffisamment en tout cas pour savoir plus précisément ce qui lui passait par la tête.

Et c'était agréable de se dire qu'elle était comprise sans avoir besoin de se justifier en long, en large et en travers, sans avoir besoin d'en faire des caisses pour cela.

« Mais à mon avis, elle comprend, elle essaie juste de se défendre comme elle peut, vu qu’elle a pas le choix. »

Très probablement, et c'était le genre de réactions et de parades dont Clarice avait hérité, car elle réagissait exactement de la même façon quand elle se savait en tort. Il était hors de question, bien sûr, d'admettre qu'elle avait déconné ou quoi que ce soit du même ordre, certainement pas. Alors il ne restait qu'une seule chose à faire.

« Je pensais que c’était bizarre dans tous les cas, avec ton père. Qu’est-ce qui a changé ? »

"Je saurais pas trop dire, en fait", répondit Clarice, qui prenait le temps de réfléchir à la question.

C'étaient des sujets qu'elle abordait si peu, que ce soit avec ses parents eux-mêmes ou avec qui que ce soit, qu'il n'était pas forcément facile de mettre des mots dessus. En revanche, elle s'étonnait de découvrir combien mettre des mots dessus, par contre, savait lui faire du bien, plus qu'elle ne l'aurait soupçonné.

"Je crois que c'est surtout qu'avant, il était plus... soucieux de faire semblant. Je sais pas s'il a baissé les bras ou s'ils se disent tous les deux que je suis suffisamment grandes pour qu'ils n'aient plus besoin de prétendre, mais... enfin, avant, c'était latent, maintenant, c'est flagrant... C'est pas grave en soi, hein, je le sais bien que mes parents vivent pas le grand amour, je suis pas bête, mais maintenant j'ai l'impression qu'ils s'en foutent." Elle poussa en soupir. "Fallait déjà que ce soit le cas pour se réjouir de la venue d'un moutard qui aura les mêmes tares que moi."

"C'est vrai que t'es complètement tarée."

Jamais Clarice ne se laissait parler ainsi d'habitude, et pourtant, elle accepte la remarque de son interlocutrice, parce qu'elle savait que ce n'était pas un vrai reproche : et que même, de sa part, ça ne voulait rien dire.

Complètement tarée, oui, c'était ce qu'elle était, effectivement... mais elle considérait vraiment que ce n'était pas un mal... quand on savait en tirer les bonnes conséquences.

"C'est pas ces "tares" qui te définissent, t'es au courant de ça ? T'en feras sans doute beaucoup plus que plein d'autres dans le temps que tu auras que d'autres qui vivront plus d'un siècle."

Clarice baissa les yeux sur la main qu'Octavia venait de serrer dans la sienne. Elle devrait peut-être la retirer, empêcher son geste, mais ça lui faisait beaucoup trop de bien pour qu'elle y renonce.

Presque autant de bien que les paroles qu'Octavia prononça alors, en affirmant qu'elle n'était pas définie par ses tares, et réussirait plus que beaucoup d'autres dans sa vie, si courte soit-elle. Comment ne pas sourire, ne pas avoir chaud au coeur, quand elle entendait ce genre de choses ? Ses parents lui répétaient constamment qu'ils croyaient en elle, mais ils avaient peur, aussi, et cela se ressentait dans chacune de leurs interactions. Octavia, elle, n'avait pas peur... Elle se contentait de la voir comme elle était, précisément comme elle était.

"Je dis pas qu'ils sont pas stupides, je crois qu'ils le sont un peu, mais peut-être qu'ils se sont dit que t'en avais bien valu la peine, toi, après tout."

A cette suggestion, Clarice afficha une mine sceptique. Elle n'y croyait honnêtement pas. Non, à ses yeux, il devait être question d'autre chose, il devait naturellement être question d'autre chose. Et au fond, elle savait déjà quelle hypothèse devait être la même, même si elle n'osait pas franchement en parler.

"Tu t'es pas posé la question ? ... Je veux dire, tes parents qui se parlent à peine, et là, ta mère qui tombe enceinte. Tu crois pas qu'elle pourrait avoir une liaison ?"

Clarice prit une grande inspiration, suivie d'un très large et franc soupir. Elle serra encore plus fort ses doigts dans ceux de son interlocutrice. Elle n'avait plus envie de lâcher prise, jamais. Elle était son emprise sur le réel... et ça lui faisait réellement un bien fou... plus que fou, même.

"Ouais, je me suis posé la question", admit-elle finalement, presque à contrecoeur, parce que ce n'est pas le genre de choses auxquelles on a envie de penser quand il est question de ses propres parents... "C'est... bien possible... et franchement, si c'est le cas... je sais juste pas quoi en penser."

"C'est leurs affaires, il n'y a sans doute pas grand-chose à en penser."

Ce n'était sans doute pas faux, mais c'était finalement la première fois pour elle qu'elle réalisait que ses parents étaient des individus humains, dont les existence ne gravitaient pas totalement autour d'elle, et par conséquent, oui, ils n'étaient pas différents de tous les autres. Ils pouvaient tromper autant que se tromper. Et si c'était le cas ?

Du moment que ça ne nuisait pas à leur famille, du moment qu'ils ne lui faisaient pas l'affront d'un divorce, au fond, c'était leur problème, oui.... mais pas tout à fait quand même, malgré tout, parce que de leurs décisions et de leurs erreurs naissait un petit frère ou une petite soeur (ou pire, des jumeaux), et jamais Clarice n'avait rien voulu de tel....

Alors clairement, elle ne savait pas quoi penser, elle ne savait pas quoi dire ni comment prendre la chose plus spécifiquement. Et même si elle ne se voyait pas déduire quoi que ce soit ici et maintenant, dans l'instant bien précis, elle avait juste besoin de vider son sac, et ça lui faisait du bien de pouvoir le faire avec Octavia.

"Dis-toi que bientôt, ce ne sera plus ton problème... Tu n'as pas à subir les conséquences de leurs conneries. Tu quitteras bientôt la maison, et ce sera bien comme ça."

C'était entièrement vrai, et cela s'apparentait à un futur aussi proche que lointain. Aux yeux de Clarice, c'était une chose compliquée que de se projeter dans cet avenir-là... comme dans aucun avenir, après tout... elle mourrait bien assez tôt, quoi qu'il en soit... mais c'est comme si elle réalisait maintenant que ses années de gamine pourrie gâtée touchaient à leur fin. Maintenant, elle allait devoir serrer les dents et attendre que ça passe, elle n'aurait pas d'autre choix.

"Même si c'est pour vivre avec Alphard Black."

"Ne m'en parle pas", soupira Clarice en répondant à la grimace d'Octavia par une autre. "Tu sais, c'est un peu tentant... de me dire que je m'en fiche, puisque je vais mourir de toute façon." Elle marqua une pause. "Je pourrais juste... partir, je sais pas où, et en faire qu'à ma tête, et mes vieux auront un héritier tout beau tout neuf pour transmettre leur nom et leurs sacrosaintes valeurs", ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel.

"Peut-être que tu devrais. Tout envoyer balader et faire ta vie loin de tout ça le temps que ça dure."

Clarice afficha un fin sourire. Elle savait bien que ce n'était pas une vraie suggestion, qu'Octavia ne le pensait pas réellement, ne pouvait pas réellement le penser, parce qu'elle savait très bien, en réalité, qu'elles étaient toutes les deux dépendantes de la volonté de personnes qui n'étaient pas elles, et que la plupart du temps, elles en étaient bien satisfaites, l'air de rien.

C'était tentant, en fantasme, de songer à ce à quoi ressemblerait sa vie si elle envoyait tout balader, mais ce n'était pas possible. Ce n'était pas un caprice, c'était un fait, il y avait des choses qu'elle ne pouvait pas faire, des frontières qu'elle n'était pas en droit de franchir, et une étape essentielle était d'en prendre conscience, et de bien accepter de le reconnaître. Si ce n'était pas chose facile, c'était chose nécessaire malgré tout, et Clarice elle-même le savait.

Elle, livrée à elle-même ? Malade ou pas, elle serait incapable de tenir plus de quelques jours, elle ne saurait tout bonnement pas comment faire, et c'était une chose qu'elles ne pouvaient logiquement que comprendre. Alors oui, ça n'aurait jamais lieu, ça ne se ferait pas, et elle n'avait pas envie, vraiment, que ça se fasse, mais malgré tout, c'était une chose qu'elle aimait entendre, comme si tout cela avait une vertu apaisante sur elle : impossible de l'expliquer d'une autre façon.

"Qu'est-ce que tu ferais ? Où tu irais ? Si tu décidais de tout envoyer promener, là, tout de suite."

Elle posa son regard sur Octavia et songea un instant à quoi ressemblerait une fugue vers le lointain. Plus troublant encore, elle se demanda ce qu'elle ressentirait si Octavia décidait de l'accompagner. Quelle étrange pensée, à la fois déroutante et... réconfortante ? Elle ne saurait pas l'expliquer autrement, mais c'était bien ce que ça la faisait ressentir en cet instant, une sorte de réconfort qui n'avait pourtant pas beaucoup de sens.

"J'en sais rien... quelque part au soleil, je pense. Il faut beaucoup trop gris, ici... Quelque part où il y a la mer, la plage, la nature..." Elle ferma les yeux, tenta de s'imaginer le frisson d'un vent méditéranéen sur sa peau. "Mais je m'emmerderais sûrement très vite", reprit-elle avec un sourire d'amusement.

"Probablement. Mais au moins t'emmerderas personne pendant ce temps-là."

Clarice se permit de sourire doucement à cette réflexion. Elle emmerdera personne pendant ce temps-là, non, et c'est une pique qu'elle acceptait parce qu'elle sait qu'il y a quand même une personne qu'elle n'emmerde pas, et cette personne, sans l'ombre d'un doute, c'était Octavia.

Elle n'aimait pas qu'on la charrie, mais quand ça venait d'Octavia, ce n'était pas la même chose. Quand ça venait d'Octavia, elle acceptait tout, absolument tout sans la moindre crainte ni la moindre contrainte, sans le moindre doute, vraiment. Oui, elle pouvait accepter ça parce que ça venait d'Octavia. En fait, elle était capable d'accepter un très grand nombre de choses tant que ça lui venait bel et bien d'Octavia.

"J'aime bien cette idée, moi. La plage, la nature... ça a l'air plutôt sympa."

"Mouais, je préfère la ville, moi, à choisir", prétendit de râler Clarice, parce que, après tout, on ne se refaisait pas, pas vrai ?

Mais ce n'était pas totalement faux. La vert et argent était clairement une citadine dans l'âme, une citadine invétérée, mais en même temps, dissoudre sa présence dans cette nature qui ne se préoccuperait pas d'elle, c'était une pensée rassurante. Et en même temps un peu anxiogène. Au final, elle révélait toutes les contradictions de Clarice... et la présence d'Octavia en mettait encore d'autres en valeur, que Clarice faisait mine d'ignorer.

"Je me ferais une place danse ta valise."

Elle voulut répondre quelque chose, mais Clarice fut totalement prise de court par le geste d'Octavia, quand cette dernière caressa sa joue du bout des doigts, avant de venir poser ses lèvres sur les siennes.

Tout d'abord, elle eut un mouvement de recul, mais quelques instants plus tard, ce fut à elle de glisser une main dans ses cheveux avant de l'embrasser en retour, plus longuement, plus passionnément.

"Je suis à peu près sûre", fit-elle, son souffle se déposant contre ses lèvres, "que c'est une très mauvaise idée."

Pour plein de raisons qu'elle ne se sentait même pas la nécessité d'énumérer. Mais en même temps, elle avait envie de continuer, elle avait envie de mettre toutes ses craintes en veilleuse pour mettre tout ça au clair. Elle avait envie de laisser ce moment durer, sans se préoccuper de rien.

"Ouais, t'as raison, il faudrait une valise sacrément grande pour y faire entrer mon égo démesuré."

Clarice afficha un sourire amusé. Ce qui la faisait rire, ce n'était finalement pas tant la nature de son trait d'esprit que le fait qu'elle en soit capable. Les deux vert et argent avaient en commun un orgueil absolument démesuré, et parce qu'il l'était, elle n'en faisait pas une blague, et elles détestaient qu'on le leur fasse remarquer.

Mais Octavia le mettait de côté, elle le mettait de côté pour elle, et Clarice ne savait s'empêcher de se sentir touchée par une telle attention. Elle ne s'était pas attendue à cela, mais cela lui faisait du bien. Ce n'était pas immense, mais sa camarade réussissait à lui faire retrouver son sourire d'une manière dont personne d'autre ne saurait être capable.

"Je crois bien que t'as raison. C'est même la pire idée du monde. Mais j'ai pas envie d'arrêter."

C'était ce que Clarice avait eu envie d'entendre. Car même si elle considérait elle aussi que c'était la pire idée possible. Mais en même temps, est-ce qu'elle devait s'embarrasser de bonnes décisions quand le temps lui était compté ?

Contre les lèvres d'Octavia, Clarice se sentait bien, elle se sentait vivante. Elle n'avait pas envie de renoncer à cela, sous aucun prétexte. Arrêter, là, maintenant, lui donnerait l'impression que l'on tente de la couper de son oxygène. Elle n'était pas prête encore à accepter cela.

"Les mauvaises idées c'est mon rayon."

C'est leur rayon, visiblement, parce qu'Octavia a à peine prononcé ces mots qu'elle plaque à nouveau ses lèvres contre les siennes avec une avidité qui ne manque pas de lui couper le souffle.

"Si on fait ça...", fit Clarice en détachant un instant ses lèvres de celles d'Octavia. Elle voulait la prévenir de ne le dire à personne, mais c'était évidemment inutile. Elles n'y avaient aucun intérêt, ni l'une ni l'autre, alors ce n'était même pas un sujet dont elles pourraient discuter. "Je t'interdis d'y mettre un terme, tu m'as compris ?"

C'était un ordre, un vrai. Pur et strict. Non, sous aucun prétexte il n'aurait le droit de mettre fin à leur histoire : il n'en était pas question.