C’était officiel. Bonnie aurait bien aimé que ça ne le soit, mais ce n’était pas comme si la jeune femme pouvait ignorer la vérité. Elle était enceinte, bel et bien enceinte et l’identité du père ne faisait évidemment aucun doute. En un sens, cette nouvelle devrait normalement la réjouir, mais ce n’était pas complètement le cas. Oh, l’idée de porter l’enfant de Joshua dans son ventre n’était pas si désagréable que ça, bien au contraire… mais ça ne tombait pas bien du tout. Ce n’était ni le moment, ni les bonnes circonstances. Mais en même temps, ce n’était pas comme si elle avait choisi, ça lui tombait dessus sans qu’elle n’ait rien demandé à personne. Et maintenant, la jeune femme ne savait pas vraiment ce qu’elle devait faire. Oh, il y avait une chose évidente… il fallait qu’elle parle à Joshua, qu’elle aille le trouver afin de lui annoncer sa grossesse au risque qu’ils se prennent de nouveau la tête. Mais elle était lâche, elle ne parvenait pas encore à lui en parler… justement parce qu’elle n’avait aucune envie qu’ils se disputent. Ils passaient toujours des bons moments tous les deux et Bonnie avait vraiment besoin de la présence de son petit ami, elle l’aimait tellement qu’elle aimerait juste passer tout son temps avec lui. Mais en même temps, il y avait des sujets de discorde. Malheureusement. La jeune femme avait simplement envie de profiter des instants présents avec Joshua, sauf que ce n’était pas toujours évident. Elle n’aimait pas du tout se prendre la tête avec Joshua, ça lui faisait du mal à chaque fois. Et donc, elle préférait éviter d’aborder encore le sujet. Elle était lâche, tout simplement.

Et donc, Bonnie avait simplement besoin de se changer les idées. Elle sortait un peu moins de son appartement, parce qu’elle ne se sentait pas toujours bien, mais là, il était hors de question qu’elle reste. Parce que Clyde était en train de se noyer dans son canapé et qu’elle avait juste besoin de respirer. Bonnie décida de se rendre aux Trois Balais, ça lui ferait du bien de se changer les idées. Elle avait hésité à envoyer un message à Melody dans le but qu’elle la rejoigne, mais elle ne le fit pas finalement. Elle arriva simplement sur place, commandant une bierraubeurre avant de regarder un peu autour d’elle. Quand elle vit un visage connu.

« Salut Tayla. » Dit-elle dans un sourire en s’approchant de la médicomage. « Ça va ? »

Bon, elle avait juste besoin de parler avec quelqu’un, d’un peu de présence et pourquoi pas la sienne. C’était très bien.

Bonnie adressa un sourire à Tayla quand elle lui affirme qu’elle prend un peu de temps pour elle après une grosse journée. C’était une bonne chose, la jeune femme serait bien la dernière personne à lui reprocher de prendre du temps pour elle. Surtout que concrètement, la sorcière passait quand même son temps à prendre du temps pour elle-même. Enfin, ces derniers temps, tout était un peu plus complexe, mais ce n’était pas le sujet de la discussion. La jeune femme lui retourna la question donc, avant de lui dire qu’elle pouvait s’installer à ses côtés. Dans un nouveau sourire, Bonnie décida de s’installer effectivement avec Tayla. C’était quand même mieux de boire un verre en compagnie d’une amie plutôt que de boire seule dans son coin. Même si Bonnie n’en avait que faire du regard des autres, elle en avait bien conscience. Et puis, elle avait le sentiment qu’elles n’avaient pas parlés ensemble depuis très longtemps avec Tayla. Ce qui était peut-être le cas en réalité, elle ne saurait même plus dire quand elles s’étaient vues pour la dernière fois. Non pas que Bonnie n’ait pas eu envie de voir son amie, mais clairement pas mal de chose changeait après la fin des études, avec la vie quotidienne et tout ce qui pouvait la remplir.

« Ça va, je… prend aussi du temps pour moi. » Dit-elle alors, pour répondre à la question de la jeune femme. C’était le cas, elle avait eu besoin de prendre l’air, de sortir un peu, de voir autre chose que les mûrs de son appartement. Elle n’aimait d’habitude pas être enfermée, mais c’était pire maintenant. Sans doute parce qu’elle ne se sentait pas toujours suffisamment bien pour sortir justement. « Alors qu’est-ce que tu racontes de beau ? » Demanda-t-elle tout en levant le bras pour qu’on lui apporte une bierraubeurre (en espérant que son estomac quelque peu fragilisé accepte de la recevoir).

Elle avait remarqué le parchemin que Tayla avait rangé dans son sac, mais Bonnie n’avait pas envie de lancer le sujet. Si jamais la jeune femme avait envie de lui parler de quoi que ce soit, Bonnie était persuadée qu’elle saurait qu’elle pouvait se confier à elle. Même si elles ne se parlaient peut-être pas aussi souvent qu’avant et que si elles se parlaient maintenant c’était surtout un hasard, ça ne voulait pas dire qu’elles ne pouvaient pas juste tout se confier. Et en même temps, Bonnie ne s’imaginait pas parler de sa grossesse à son interlocutrice pour autant. Mais elle osait se dire que c’était plus particulier.

Bonnie afficha un léger sourire quand son interlocutrice lui affirma que c’était une bonne chose qu’elle prenne du temps pour elle. Oui, la jeune femme ne pouvait clairement pas lui donner tort. D’une manière générale, la jeune femme était de toute façon bien plus dans l’optique de prendre du temps pour elle, d’en profiter un maximum. Elle n’avait pas forcément besoin qu’on lui dise qu’elle devait le faire, elle le faisait pleinement. Cela dit, la situation était quand même un peu plus complexe pour elle dernièrement quand même, elle ne pouvait pas le nier.

En tout cas, la jeune femme se concentra sur ce que Tayla lui disait, parce qu’elle avait quand même envie de savoir comment les choses se passaient pour son amie depuis la dernière fois qu’elles s’étaient vues. Mine de rien, elles n’avaient pas eu l’occasion de se voir beaucoup ces derniers temps. Elle ne se souvenait même pas quand elles avaient eu l’occasion de se voir la dernière fois. Elle l’écouta donc, alors qu’elle lui affirmait que sa vie n’avait pas vraiment changé depuis la fin de ses études, seulement que maintenant elle faisait le trajet de chez elle jusqu’à l’hôpital magique. Bonnie afficha un sourire, Tayla était une femme active, c’était une bonne chose. Elle avait une vie active, elle avait une envie de carrière, alors que de son côté Bonnie n’avait jamais réellement su si elle pourrait travailler. Non pas qu’elle n’en avait pas eu envie, par instant, histoire d’avoir une part d’indépendance. Mais elle ne voyait pas ce qu’elle pourrait bien faire de sa vie pour autant.

« Oh, tu te trompes, ma vie est loin d’être passionnante. » Répondit-elle dans un rire, quand Tayla affirma que de son côté sa vie devait sans doute être plus passionnante que la sienne. Si Tayla pensait que sa vie n’était pas passionnante, elle allait être triste de découvrir que la sienne à Bonnie l’était d’autant moins. Bon, d’accord, elle était enceinte… c’était suffisant pour que ça ait de l’intérêt. Mais forcément, elle était enceinte parce qu’elle avait un amant, et la jeune femme n’avait pas non plus l’intention d’en parler à droite et à gauche. Elle ne pouvait pas le faire, même si elle appréciait énormément son interlocutrice, elle ne pouvait pas lui parler de ce genre de secret. Elle ne l’avait confié qu’à Melody, parce qu’elle savait qu’elle pouvait compter sur elle. « Je suis juste une femme mariée qui a une vie de femme mariée, il n’y a vraiment rien de passionnant. » En soit, si on prenait juste les choses comme ça, c’était clair que sa vie n’était pas dingue de chez dingue. Elle ne travaillait pas, elle ne faisait pas grand-chose de sa vie donc.

La vie n’avait en soit pas réellement besoin d’être passionnante, Bonnie était capable de rejoindre la Tayla, il suffisait d’être heureuse, mais c’était bien là le souci au final. Bonnie n’était pas heureuse. Bon, elle n’était pas si malheureuse que cela non plus, elle s’en sortait bien dans son malheur quand même parce qu’elle avait conscience que la situation pourrait être bien pire que ça. Elle était heureuse avec Joshua, elle avait conscience qu’elle aurait pu tomber sur pire que Clyde en tant qu’époux, mais en même temps on ne pouvait pas non plus dire qu’elle sautait de joie et au vu de la situation, c’était encore moins possible de le faire.

Elle aimerait bien rejoindre pleinement les paroles de son amie sous ses yeux, mais quand celle-ci affirma qu’elle était une femme mariée – ce qu’elle venait de lui dire, en affirmant qu’elle n’était que cela et qu’elle n’avait qu’une vie de femme mariée – avec un époux aimant, qu’elle savait donc comment allait être sa vie… Bonnie ne put s’empêcher de se dire que Tayla la connaissait quand même bien mal. Bonnie ne répondit pas sur le moment, elle se contenta simplement d’observer son interlocutrice avant de reprendre la parole.

« C’est vrai, j’ai de la chance, Clyde est clairement le mari parfait. Je n’aurais pas pu rêver mieux. J’ai énormément de chance que mes parents aient décidé de me marier à lui. Même si je n’ai pas eu mon mot à dire, je sais que j’ai eu énormément de chance. En même temps, je n’avais aucune raison de vouloir donner mon avis, ce n’est évidemment pas ce qu’on attend de moi. » Bon, Bonnie ne devrait sans doute pas se vexer autant que cela, mais en même temps elle n’y pouvait rien. Elle savait bien que Tayla ne lui voulait pas de mal, mais affirmer qu’elle avait une vie d’une femme mariée avec un mari aimant, c’était quand même clairement une erreur. Bien sûr, Bonnie savait qu’elle avait de la chance en soit d’être marié à Clyde parce qu’il ne lui demandait rien de spécial, qu’il ne cherchait pas à ce qu’ils aient un mariage… productif. Mais quand même, elle aurait aimé ne pas se retrouver dans cette situation, pouvoir aimer librement Joshua. « Je sais comment va être ma vie en effet, cramponné à ce rôle de femme au foyer et devoir pondre un tas d’enfant pour que mes parents et ceux de Clyde soient fiers de nous. »

En soit, être une femme au foyer n’était pas quelque chose qui la dérangeait. Elle avait envisagé l’idée de travailler, mais elle ne savait pas réellement ce qu’elle pourrait faire et ne pas travailler était agréable. Le souci n’était pas là, c’était juste… qu’elle était bloquée dans cette situation autant que l’était Clyde d’ailleurs.