C'

étaient certainement les vacances de Noël les plus déprimantes qu'elle ait jamais connues, et pourtant, elle avait déjà connu un Nouvel An au-delà de mouvementé il n'y a pas si longtemps que cela. Rien de commun avec cela néanmoins. Au moins, toutes les autres années, elle avait pu réveillonner avec sa famille, parce que sa mère n'était pas dans un coma dont elle ne se réveillerait sans doute jamais. Cette année, elle avait dîné à la table de Poudlard avec son frère, en songeant à Harry, qui ne reviendrait plus jamais, et à la conversation lourde de sens qu'elle avait eue avec lui et dont elle n'avait jamais su confier le contenu à Rhian. Leurs perspectives n'étaient déjà pas bien roses ou enthousiasmantes jusque-là, mais là, elles commençaient à virer au noir le plus total.

Cenlyn en était au point d'avoir hâte de voir les vacances s'achever et les cours reprendre, parce qu'elle avait le sentiment de tourner en rond, là, elle savait que la situation était grave et incertaine, et elle ne pouvait rien faire, elle restait là, sujette à la tourmente, à l'ennui, à l'inertie. Elle avait besoin de laisser son cerveau être submergé par le brouhaha de la foule qui l'incommodait tant en règle générale, juste pour penser un peu moins... ou bien différemment.

Dans tous les cas, la jaune et noir avait décidé de faire un tour dans le parc de Poudlard, histoire de se dégourdir les jambes, dans l'espoir de s'aérer les pensées. Engoncée dans son chaud manteau d'hiver, elle ignorait le froid environnant, autant que ses camarades eux aussi restés pour les vacances. Elle passa autour d'un groupe d'élèves qui faisaient une bataille de boule de neige et sentit, absurdement sans doute, la rage monter en elle. Parce qu'ils s'amusaient quand elle n'y arrivait plus, et ça l'énervait profondément. Elle passa à côté d'elle en les ignorant et son regard tomba sur la jeune femme assise contre un arbre, un livre à la main, qu'elle reconnut immédiatement pour être Clio Brunett. Bref, une fille qu'elle ne supportait absolument pas. Elle pouvait bien se contenter de l'ignorer, bien évidemment, mais au final, elle se sentait surtout l'envie de déverser sur sa rage jusqu'ici contenue sur la cible la plus évidente à proximité. Elle se baissa donc le temps de créer une boule de neige de taille raisonnable, et la lança le plus fort possible en direction de Clio.

-Oups.


   

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C

lio ne manqua pas de répliquer à l'agressivité gratuite de Cenlyn en lui faisant comprendre son mécontentement... et ce n'était pas pour déplaire à la jaune et noir. Après tout, c'était ce qu'elle avait voulu, elle l'avait cherché. Elle était sur les nerfs, la vie ne lui faisait pas de cadeaux, alors elle avait envie de passer ses nerfs sur quelqu'un, et quitte à se choisir une cible (même si, en l'occurrence, c'était surtout que c'était la première personne qu'elle ne pouvait pas sentir qu'elle avait croisée depuis sa sortie dehors), autant en prendre une de qualité, qui ait du répondant. Une joute verbale était quand même plus plaisante qu'un simple acharnement gratuit sur une personne qui ne pouvait pas se défendre... Bon, dans un cas comme dans l'autre, ses parents auraient singulièrement déploré cette attitude, mais quoi qu'il en soit, ses parents n'étaient pas là. Elle était seule, elle n'avait plus que son frère. Alors, après tout... Qu'est-ce que ça pouvait faire. Bien sûr, Clio avait compris que son geste était intentionnel (c'était le but, en même temps, que cela ne puisse pas échapper à son interlocutrice), et elle n'avait pas envie de jouer à son petit jeu, mais qu'elle le veuille ou pas, c'était du pareil au même. Et justement, si elle ne le voulait pas, en vérité, c'était encore mieux.

-Quelle repartie, je vais jamais m'en remettre, répliqua Cenlyn d'un ton amusé. Insupportable, elle l'était, mais il fallait bien plus que cela pour la piquer à vif... Enfin, c'était tout à fait faisable malgré tout. Parce qu'elle était une gamine, et elle avait beaucoup de points faibles, mais en l'occurrence, puisqu'elle faisait tout pour être insupportable, elle ne pensait pas que ce soit une tare en soi. Je suis très bien ici, moi, j'ai pas l'intention d'aller ailleurs, répliqua-t-elle, déterminée, en faisant quelques pas pour se planter juste devant son interlocutrice. Autant aller jusqu'au bout, tant qu'à faire. Quoi, qu'est-ce qu'il y a ? T'as peur qu'une deuxième année te mette une raclée ? En même temps je te comprends, je flipperais aussi, à ta place.

Elle devrait calmer le jeu, en réalité, c'est l'évidence, mais elle en était bien incapable. Elle n'en avait pas fini avec Clio, loin de là.


   

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E

videmment, Clio avait raison, Cenlyn se prenait clairement pour ce qu'elle n'était pas, pour une fille qui en imposait, pour quelqu'un qui était vraiment capable d'intimider les gens alors qu'elle n'était jamais qu'une gamine paumée et un rien agressive, rien de plus. Clio était plus âgée, plus mûre, elle pouvait aisément lui rabattre le caquet, c'est certain. Elle serra les dents quand Clio lui offrit de retourner au bac à sable. C'est vrai qu'elle agissait comme une gamine, et puisqu'elle ne pouvait pas vraiment le nier, ça l'agaçait. En même temps, elle n'avait pas grand-chose à répliquer à ça. pour couper court et garder la face, elle hésitait à balancer une boule de neige dans la figure de son interlocutrice, mais au final, c'était une bonne chose que la jeune femme ait repris la parole, parce que cette attitude n'aurait pas spécialement arrangé ce cas. Sauf que les paroles de la jaune et noir qu'elle ajouta ensuite n'étaient pas pour lui plaire non plus, et la mirent même plutôt mal à l'aise, il faut bien le dire.

-Non mais t'es pas bien, toi..., répliqua la deuxième année.

Ouais, c'était celle qui jouait les gamines et c'était elle qui répliquait que son interlocutrice n'était pas bien. En même temps, ça ne la mettait pas du tout à l'aise que de l'entendre lui parler de ses règles. C'était quelque chose de personnel, qu'elle trouvait même un peu honteux pour sa part, alors franchement, elle n'avait pas envie d'en entendre parler. Non, elle ne découvrait pas les joies des menstruations, des douleurs et des sautes d'humeur qui allaient avec. Les siennes, plutôt précoces, avaient commencé l'année passé. Mais dans tous les cas, elle trouvait plutôt indélicat de parler de ça. A l'âge de Clio, peut-être que ça ne la dérangeait pas, mais du haut des douze ans de la jeune fille, c'était encore tabou. C'était d'ailleurs sûrement parce que Clio s'en doutait qu'elle s'était exprimée ainsi. Mais ce n'était pas le pire à entendre.

-J'ai pas de famille, OK ? J'ai que mon frère...

Et c'était d'autant plus vrai depuis la "mort" de Harry. C'était un sujet vraiment difficile pour elle, parce que son père lui manquait, parce qu'elle était de plus en plus sûre que sa mère ne se réveillerait jamais, parce qu'elle avait perdu Harry...

-Alors je te conseille de la fermer.



   

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M

ais elle allait arrêter de lui parler des changements qui se passaient dans son corps, de ses règles ou d’elle ne savait quoi encore. C’était super gênant, là ! Est-ce qu’il y avait un âge où ça arrêtait de l’être ? Elle n’en savait franchement rien, mais ce qui est sûr, c’est que pour le moment, le sujet la rendait ultra inconfortable. Et donc, Melody en jouait forcément. Evidemment, elle n’était pas bête, elle voyait bien que son interlocutrice n’était pas à l’aise, alors pourquoi est-ce qu’elle n’en profiterait pas, hein… Joie. Bon, dans tous les cas, c’était le genre de conversation qu’elle n’avait même pas pu avoir avec sa mère, ce n’était pas pour voir une ado se permettre de lui faire des réflexions du genre sous prétexte qu’elle était plus âgée. Justement, elle les avait vécues, ces phases, alors elle pourrait peut-être la laisser tranquille avec ça et se mêler de ses oignons, non ? Non, bien sûr… et pour cause, c’était elle qui avait commencé, alors elle ne pouvait vraiment pas se permettre de se plaindre d’un comportement dont elle faisait preuve au centuple. Mais elle était une gamine, et accessoirement une chieuse quand elle s’y mettait, donc il ne fallait pas tant en espérer de sa part.

Mais encore, la petite réflexion sur ses changements hormonaux aurait pu passer, c’était par contre plus délicat de voir son interlocutrice afficher tant d’indélicatesse sur un sujet aussi délicat que sa famille. Bon, elle aussi pouvait être sans compassion au point d’être proche de la cruauté parfois, mais il n’était pas toujours évident de balayer devant sa porte. Et en attendent, elle se sentait vraiment blessé. Oui, elle n’avait que son frère, et c’était douloureux pour elle, parce que sa mère était dans un coma duquel elle ne ressortirait sans doute jamais, parce que son père était mort il y a bien longtemps, parce que Harry était comme mort… Après lui avoir assuré qu’il était le seul survivant de la famille Potter en son temps. Forcément, ça ne l’enchantait pas du tout… mais toutes ces subtilités, Clio ne les connaissait pas, bien sûr.

-C’est le botruc qui se fout de l’hyppogriffe, répliqua sèchement Cenlyn, parce que toi t’en as, des arguments, peut-être ? Ton seul argument, c’est que je suis plus jeune que toi, vive l’originalité ! répliqua-t-elle, grinçante, mais surtout piquée au vif, évidemment, parce que ses propos l’avaient réellement blessé, même si elle nierait sans doute en bloc si on devait d’aventure lui poser la question. Si tes poupées te manquent tant, t’as qu’à retourner jouer avec, toi, c’est pas mon problème.



   

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