Le nom Lestrange inspire de partout soit du respect, soit de la crainte, il faut dire que les membres de cette famille de sangs purs n'ont jamais caché leurs idées extrémites, et forcément, cela fait jaser. Et je porte ce nom. Mais j'ai bien compris que ça a été de justesse. Ma peau ébène vous aura sans doute mis la puce à l'oreille, elle a mis la puce à l'oreille de tout le monde, y compris la mienne, mais l'affaire n'a jamais été complètement assumée. Je suis l'anomalie, l'enfant présumé de deux parents blancs (quand le jardinier de la maison est noir de peau). Tout le monde sait,personne ne dit rien, mais je sais que l'on parle dans mon dos, que l'on discute ma légitimité et mon héritage, je sais aussi que mon père m'a toujours détestée pour cette raison. Ce mensonge initial, jamais désavoué, a forgé mon caractère et mon identité. Je me suis sentie à part, j'ai eu le sentiment de ne pas avoir ma place au sein de cette famille. Contraste certain entre les préceptes que l'on me martelait, et dont j'ai gardé des traces, et mon intention de m'exclure de ce schéma familial. Petite, et même encore maintenant, d'ailleurs, j'ai été quelqu'un de très solitaire. Petite, je m'enfermais chez moi, je m'excluais naturellement de la masse, je parfaisais mes connaissances, et je me découvrais un intérêt naturel pour les créatures magique.

Au même titre que mon frère (j'ai un frère, mais je ne vous en parlerai pas forcément beaucoup, parce qu'il prend un très grand soin de m'ignorer, que je lui rends bien. Il sait que je ne suis qu'à moitié sa soeur, ça me va bien d'être à moitié sa soeur), j'ai été scolarisée à Poudlard, où j'ai continué de me conforter dans ma position d'outsider. Je n'étais pas faite pour l'enseignement scolaire, je n'étais pas non plus faite pour l'esprit de franche camaraderie supposée animer n'importe qui. Je n'avais d'estime pour aucun de mes camarades, ou presque. Car je fis là la rencontre de Norbert. On dira peut-être le contraire, on affirmera que je me suis servie de lui, mais croyez-le ou non, je l'ai vraiment aimé, à ma manière perturbée et égoïste, mais oui, je l'ai aimé. Les deux parias que nous étions avions trouvé écho dans l'autre, une sorte de miroir inversé. Et puis, Norbert partageait la même passion que moi pour les créatures magiques. J'avais pris sous mon aile une créature récupérée dans la forêt interdite, un chartier. Norbert avait voulu m'en dissuader, vu le caractère teigneux de la bête, mais je n'ai pas écouté. Et au final, mon nouvel animal de compagnie avait bien failli arracher l'oeil d'un de mes petits camarades de classe. Forcément, j'ai manqué l'expulsion, mais Norbert s'est accusé à ma place, et il a été condamné à l'expulsion à ma place. J'ai apprécié son geste, mais je peux admettre que je ne me suis pas montrée très reconnaissante.

Le temps a passé, nous a éloignés, cet épisode a brisé quelque chose. Norbert a changé, moi aussi. Quand décollait sa carrière de magizoologiste, moi, j'empruntais une voie plus obscure. Plus mon mental se dégradait, plus mes idées se radicalisaient. Et je me laissais séduire par Grindelwald et ses idées. Mon chemin et celui de Norbert se sont croisés à plus d'une reprise, entre nous, et je trouve la situation toujours particulière... et un rien ambiguë. Selon moi, je veux dire. Je n'ai pas bien pris la nouvelle de son mariage, encore moins celle de la naissance de son fils.

Plus le temps passe, plus l'instabilité latente qui me caractérise va augmentant. La chute de Grindelwald m'a porté le coup de fatal, et depuis, je suis sujette à des crises d'hypersensibilités qui peuvent être très dangereuses. J'ai été internée plusieurs fois à Sainte-Mangouste, mais je pense avoir trouvé un moyen de me canaliser. Si, pour moi, ça aurait été trahison que de rejoindre Borodine ou ce jeunot de Voldemort, j'ai pris la décision d'intégrer l'Hydre.