Ma vie était parfaite. Du moins, c’était ainsi que je la voyais. Une existence de conte de fée où je ne manquais de rien. Je suis presque sûre que mes premiers mots ont dû être quelque chose comme « Daddy, je veux un hyppogriffe ! ».

Mon père travail à Gringotts comme gestionnaire de patrimoine. En gros, il prend l’argent des riches, l’investit et les rends encore plus riche, faisant de même avec notre fortune familiale. Ma mère, elle, ne travaille pas. Elle est une femme du monde comme un dit. Elle organise en permanence des soirées, des tea party et j’en passe. Mon père travaillant énormément et ma mère étant très occupée avec ses mondanités, ce fut ma Nanny qui m’éleva principalement. Je me souviendrais toujours d’elle. Josiane, une femme qui me semblait être plus vieille que le monde et que ma mère avait ramené de son pays d’origine : La France.

Durant mon enfance, j’appris le français, le piano, la danse, la peinture… Je pouvais passer des heures à jouer dans ma magnifique chambre de princesse pleine de jouets onéreux. Dès que je voulais quelque chose, je le demandais et je l’obtenais alors cela m’était égal de peu voir mon père et de passer des temps interminable assise dans le fauteuil durant l’heure du thé à écouter ma mère rire en parlant à ses amies.

Ma mère d’ailleurs était à mes yeux la femme la plus belle qui soit avec ses longs cheveux blond doré que je lui enviais tellement et ses yeux verts légèrement en amandes. Physiquement, j’ai toujours été le portrait craché de mon père. Elle était drôle, un peu fofolle et dégageait toujours cette étrange odeur de fruits fermentés. Une odeur très sucrée, à peine décelable, mais pas désagréable. Quant à mon père, il était à l’image même du gestionnaire de patrimoine. Droit, sûr de lui et ne parlant jamais pour ne rien dire contrairement à ma mère qu’il était parfois vraiment difficile de faire taire.

Tous les étés, je partais dans une école pour « sorcières de bonnes familles » en Suisse où l’on m’apprenait à devenir une parfaite héritière. J’aimais beaucoup aller là-bas, on faisait beaucoup de choses amusantes comme marcher avec des livres sur la tête ou apprendre l’allemand.

Puis vinrent mes 11 ans et Nanny me conduisit à la gare pour prendre le Poudlard express. Je me souviens à quel point j’étais nerveuse jusqu’à ce que je retrouve mes amies d’enfances durant le voyage. Le Choixpeau m’envoya sans trop de surprise à Serpentard, bien que je fusse la seule de ma famille à y être allée. En effet, mon père est un ancien Serdaigle et quant à ma mère, elle a suivi sa scolarité à Beaubâton.

Les premières années passèrent et un cycle s’installa rapidement. Aux vacances d’été, j’en passais la moitié dans cette fameuse école en Suisse et l’autre moitié avec Nanny et en hiver, comme tous les ans depuis ma naissance, mes parents organisaient deux réceptions grandioses : une pour Noël et une pour Nouvel An.

J’ignore ce qu’il s’est passé exactement au fil des ans. Peut-être que le voile rose pailleté que j’avais devant les yeux s’est estompé peu à peu alors que je grandissais loin de la demeure familiale. Les choses ont doucement commencé à me paraitre moins magique, moins parfaites. Je ne saurais dire quand ni comment, cela s’est juste fait. J’ai commencé à réellement ouvrir les yeux lors de ma 4ème année scolaire et ce, de manière si simple… Je m’étais moqué d’un jeune élève de Poufsouffle ayant reçu une beuglante durant le repas quand celui-ci m’a rétorqué que lui au moins recevait des lettres. Et c’est là que j’ai réalisé qu’après avoir écrit toutes les semaines à mes parents durant près de 4 ans jamais, pas une seule fois, ils n’y avaient répondu. Le seul et unique courrier que je recevais dans l’année était une carte pour mon anniversaire.

Quelques mois plus tard, quand arrivèrent les vacances d’été, je me fis la réflexion que c’était toujours Nanny qui m’emmenait et venait me chercher à la gare. Quand je me suis retrouvée dans l’internat en Suisse, j’ai pris conscience que la totalité du programme consistait avant tout à faire de nous de parfaites futures épouses pour jeunes héritiers.  Le même été, durant le reste des vacances, j’ai remarqué que je ne voyais mon père depuis toujours que lors du repas du soir et que ma mère apportait bien plus d’attention à ses amies qu’à moi. Jamais ils ne me demandèrent comment se passait ma vie à Poudlard.

Au Noël suivant, je me mis à remarquer d’autres détails tout aussi désagréables. Le principal étant que ma mère dont j’avais toujours apprécié le côté exubérant ne l’était que grâce aux effets des alcools qu’elle buvait à longueur de journée et que c’était de là que venait cette odeur fruitée qui la suivait partout.  J’ai aussi pris conscience que jamais nous n’avions passé un Noël ou un réveillon juste en famille. La maison était toujours pleine à craquer de gens qui pour la plupart m’étaient inconnus et dont le regard aviné de certains hommes sur ma silhouette me mettait à présent particulièrement mal à l’aise alors que, encore un an plus tôt, j’étais contente de me dire que l’on me trouvait jolie.

Je crois que le coup de grâce me fut donné l’été qui ponctua ma 5ème année quand, pour la première fois, je pris la peine de vraiment regarder les enfants de la bonne, des bâtards dont personne ne connaissait l’identité du père. Un garçon d’environ 9 ans et une fille qui devait en avoir 4… Tous deux aux épais cheveux bruns, aux yeux bleus et aux lèvres charnues.