Quand il rentrait chez lui, Ignatius se retrouvait seul. Et pour cause, il vivait seul. Il n’y avait aucune raison qu’il retrouve quelqu’un donc quand il rentrait chez lui après une journée au ministère de la magie et en temps normal, ça ne le dérangeait pas du tout, bien au contraire. Ça lui faisait du bien de retrouver un peu de solitude. Non pas qu’il soit un asociale chronique, mais après avoir vu énormément de personne pendant sa journée de travail, souffler un peu était plaisant. Mais par moment… c’était lourd. Ignatius se rendait bien compte que ces derniers temps, il trouvait sa solitude assez pesante. En grande partie sans doute parce qu’il aimerait bien parvenir à se confier à quelqu’un. Il pourrait le faire, en soit, il pourrait très bien parler de tout cela à quelques amis (Lindsay notamment, il le ferait peut-être mais pour le moment ce n’était pas le cas) ou tout simplement sa mère mais… non, il ne le faisait pas encore pour le moment. Peut-être qu’en un sens, le jeune homme avait envie de croire que tout pouvait revenir à la normal s’il se contentait simplement d’ignorer tout ça. Mais en même temps, il n’était pas dupe, il savait que rien n’allait pouvoir revenir à la « normal ».

Il se sentait donc de plus en plus oppressé dans son appartement, et ce fut pour cette raison qu’il avait décidé de le quitter et de sortir un peu faire un tour. Il ne savait pas exactement où il allait se rendre, mais il avait simplement besoin de prendre un peu le large, de respirer, de penser à autre chose. Même si ça n’allait pas forcément évident. Il prit donc la décision de se rendre aux Trois Balais, se disant qu’il allait y avoir quand même un peu de monde et que ça ne serait pas une mauvaise chose, bien au contraire. Il avait besoin de voir du monde, pas forcément parler avec eux, juste en voir.

Mais quand il s’approchait du comptoir dans le but de pouvoir commander une bierraubeurre – il n’allait pas venir aux Trois Balais et consommer autre chose qu’une bierraubeurre après tout – Ignatius ne put que regretter la décision qu’il avait prise. Harfang Londubat… rien que lui, super. S’il y avait une personne qu’il n’appréciait pas, c’était bien lui. En même temps, il n’y avait aucune raison qu’il l’apprécie après ce qu’il avait fait dans leurs « jeunesses », quand il lui avait piqué son coup de cœur de l’époque. Et s’il n’y avait que ça. Forcément, Harfang le vit et ne se retint pas de le saluer. Ignatius ne prit pas la peine de le saluer en retour, il n’avait aucune envie de faire le moindre effort là. Harfang lui demanda comment il allait, après lui avait dit que ça lui faisait plaisir de le voir et… il lui demanda des nouvelles de Agrippine. Là, tout de suite, il n’y avait clairement pas de sujet plus sensible que sa sœur en ce moment.

« Quoi, tu vas pas me faire croire que tu n’as pas été lui demander toi-même ? » Soupira-t-il, pas forcément d’humeur à apprécier la présence de son interlocuteur. « J’allais bien avant de te voir Londubat. »

C’était faux, mais il avait envie de lu dire ça.

Ignatius ne savait même pas pourquoi il ne se contentait pas juste de faire demi tour, d’abandonner Harfang à son verre et de penser à autre chose. Parce que concrètement, le jeune homme se sentait vraiment mal à l’aise. Et pas seulement parce que Harfang parlait de sa sœur (et que le jeune homme avait un côté un peu possessif avec Agrippine, à tort clairement). Ignatius se contenta donc de lever les yeux au ciel quand son interlocuteur affirma qu’il donnait toujours l’impression de péter la forme, en sous entendant donc évidemment que ce n’était pas le cas. Mais ce ne fut rien contre ce qu’il affirma ensuite, quand il parla de nouveau de sa sœur et du fait... qu’ils ne parlaient pas beaucoup.

Ignatius détestait vraiment entendre Harfang parler de sa sœur de cette manière. Le jeune homme savait bien que celle-ci avait une vie bien plus délurée que la sienne (en même temps, on ne faisait pas moins délurée que sa vie à lui, donc Agrippine n’avait pas besoin de se donner beaucoup de mal pour en avoir une plus grande... même si elle se donnait du mal). Pour autant, il n’avait aucune envie d’imaginer sa sœur faire... ce genre de chose avec son ancien camarade d’école. Avec qui que ce soit déjà, mais clairement pas avec Harfang. Ce dernier qui avait le don d’enfoncer encore plus le couteau dans la plaie. Parce que forcément, il ne put s’empêcher de lui parler de son célibat.

« Et toi, toujours heureux en ménage ? » Répondit-il en ne répondant donc pas à la question de son interlocuteur.

Parce que oui effectivement, il était toujours célibataire. Et plus que célibataire d’ailleurs. Dans le genre homme sans aucune expérience, on se tenait bien. Et en soit, c’était un sujet forcément un peu délicat. Parce que Ignatius n’avait aimé qu’une seule femme dans sa vie, une femme qui s’était mariée deux fois avec des personnes autre que lui évidemment. Ignatius n’avait aucune envie que la conversation tourne autour de ce sujet. En même temps, en un sens, le jeune homme ne pouvait pas nier que ça serait sans doute bien mieux d’ailleurs s’ils ne parlaient pas du tout.

« Tu en donne pas l’impression en tout cas, à traîner dans les pubs si tardivement. » Et en même, temps, ce n’était en soit pas si grave que ça et Ignatius se doutait que Harfang n’en aurait que faire. Mais que pouvait-il répondre d’autre ? Sans répondre aux questions de son interlocuteur d’ailleurs, parce qu’il n’avait aucune envie d’y répondre du tout. Si c’était pour constamment rabâcher la même chose, son célibat, le fait que Harfang était proche de sa sœur (non, vraiment c’était ignoble de penser à ça).

Ignatius se retint de justesse de lever les yeux au ciel quand Harfang affirma que c’était justement parce qu’il faisait la tournée des bars si tardivement que son mariage se portait si bien. Mais bien sûr, le jeune homme allait évidemment le croire. Et le pire dans tout cela, c’était qu’il lui disait ça avec un sourire aux lèvres et qu’il prit la peine de lui tapoter l’épaule, comme s’ils étaient amis. Si le jeune homme n'était pas capable de prendre sur lui, il n’aurait pas manqué de le repousser. Ou alors, c’était plus de courage qu’autre chose dont il manquait. Bref, il ne supportait pas ce genre de comportement, que ça soit verbale ou gestuel de la part de son interlocuteur. Alors qu’ils savaient tous les deux qu’ils ne s’appréciaient pas, Harfang jouait comme s’ils étaient amis. Comme s’ils avaient même une raison de se parler. Et en prime, il lui donnait des leçons ? Lui qui passait son temps à tromper sa femme. Ignatius le savait et le pire c’était qu’il avait pour maîtresse sa propre sœur. Bon, en fait, le jeune homme ne manquait pas de se faire des idées, mais il était persuadé que Harfang fréquentait sa sœur et ça ne pouvait que rajouter encore plus au fait qu’il n’aimait pas le jeune homme sous ses yeux.

Ça, et tout ce qu’il lui disait. Quand Harfang affirma que même lui était capable de trouver chaussure à son pied, ça avait le don d’agacer sérieusement Ignatius. Parce qu’il savait bien qu’il ne le pensait pas vraiment et surtout que c’était une manière pour lui de le prendre de haut. Ce qui avait donc, clairement, le don de l’énerver. Et en prime, ce dernier ne manqua pas de lui proposer ses services pour l’aider.

« Non, merci, je n’ai pas besoin de ton aide. » Répliqua-t-il sèchement, parce qu’il était juste incapable de faire autrement. Bon, peut-être que Ignatius aurait effectivement besoin de cours de séduction, mais en même temps ce n’était pas comme s’il cherchait à séduire non plus. Il savait bien qu’il devait se faire une raison, que Lindsay ne sera jamais une femme pour lui, mais ce n’était pas pour autant facile de passer à autre chose. Et… bref, il n’était pas doué, il ne savait pas comment s’y prendre, il ne savait même pas s’il arriverait à quoi que ce soit (et clairement à son âge ça trainait quand même sacrément), mais il n’avait dans tous les cas aucune envie que Harfang l’aide. « Je préfère être libre que mal accompagnée. Ce n’est pas la quantité qui fait les choses. »

Oui, bon, le jeune homme n’était pas forcément plus doué en réparti, mais en même temps il le pensait vraiment. Il n’avait aucune envie d’avoir des relations pour avoir des relations (après tout, sinon il en aurait déjà eu… ou pas en fait). S’il devait en avoir une, ça allait forcément compter et c’était la seule chose qu’il devrait prendre en compte.

Ignatius se contenta de lever les yeux au ciel quand Harfang précisa qu’il n’avait pas la moindre idée de ce qu’il manquait. En réalité, le jeune homme se faisait une vague idée de ce qu’il ratait, de ce qu’il pourrait avoir dans d’autres circonstances, ce genre de chose. Mais il était évident que le jeune homme n’allait pas donner le plaisir à son interlocuteur de répondre, bien au contraire. Ignatius avait conscience que Harfang s’amusait seulement de la situation, qu’il cherchait à le mettre en colère, à le blesser même peut-être. Et le pire, c’était que ça marchait tellement bien. Ignatius prenait sur lui, mais ce n’était pas pour autant qu’il adorait le fait de pas avoir de vie sentimentale. Techniquement, il avait des sentiments, mais c’était envers une personne qui ne manquait pas d’en avoir pour un autre (comme c’était le cas depuis son adolescence). Forcément, ça rendait tout ça plus compliqué. Mais forcément, ce n’était en aucun cas avec Harfang que le jeune homme avait envie de parler de ça. Bien au contraire.

Même quand Harfang avait raison en affirmer qu’il y avait plus d’une femme merveilleuse en ce bas monde, sans doute. Et encore, Ignatius était assez d’avis que Lindsay était sans aucun doute la femme la plus merveilleuse de ce bas monde, mais encore une fois le jeune homme manquait clairement d’objectivité. Enfin, Harfang n’avait pas besoin qu’il lui réponde, en aucun cas. Et Ignatius, en fait, s’épargnerait assez bien de continuer cette conversation, tant la présence de l’homme lui était insupportable. Mais ce n’était rien encore en comparaison de ce qu’il ajouta ensuite. Evidemment, l’homme savait parfaitement qu’il ne supportait pas quand il parlait de sa soeur, surtout de cette manière. Il n’avait aucune envie d’imaginer Agrippine dans les bras de ce coureur de jupon de bas étages, quand bien même l’homme avait conscience que sa soeur était loin d’être une sainte (sur cet aspect ils étaient quand même bien différents, mais ce n’était pas le seul en réalité).

« Tu ne veux pas avoir plus de respect pour ma soeur ? » Répondit-il de nouveau particulièrement sèchement, parce qu’il était bien incapable de faire autrement ? « Que tu n’en ai pas pour toi c’est une chose, mais tu peux quand même en avoir pour elle. »

Bon, l’homme avait conscience que ça ne servait à rien qu’il défende sa soeur - déjà parce qu’elle savait parfaitement se défendre elle même -, parce qu’elle avait choisi sa voix, que si elle couchait avec Harfang (ce qui n’était pas le cas, mais Ignatius l’ignorait évidemment) c’était un choix qu’elle avait fait, mais il n’y pouvait rien. Et puis ça l’emmerdait royalement que ce type lui parle de sa soeur de cette manière. Et il savait bien qu’il en avait conscience en plus, qu’il devait faire ça justement parce que ça l’emmerdait et qu’il le savait. Mais Ignatius ne parvenait pas à prendre sur lui.

Ignatius ne se retint pas de lever les yeux au ciel en entendant Harfang affirmer qu’il respectait sa sœur, contredisant donc ses propos. Forcément, il n’était pas spécialement étonné de l’entendre le contredire, affirmer qu’il la respectait énormément, alors que Ignatius pensait tout le contraire. En même temps, si les deux hommes avaient la même vision des relations, du monde, de la vie en général, ça se serait. Ils avaient presque le même âge – et c’était encore plus triste dis comme ça, quand on savait certaine chose au sujet de Ignatius et son incapacité à construire une relation, à l’inverse de son interlocuteur – mais ils ne vivaient pas du tout de la même façon. Outre le fait que l’un était marié (et bien plus expérimenté que l’autre) et l’autre non, il y avait surtout le fait qu’ils ne considéraient pas la vie de la même façon. Ils n’avaient tout bonnement pas le même caractère. Et si seulement Harfang pouvait ne pas se préoccuper d’Agrippine, ça lui enlèverait quand même une sacrée épine du pied.

Quand bien même, et pour le plus grand malheur de Ignatius, Harfang n’avait pas tort en affirmant que sa sœur n’avait clairement pas besoin de lui pour prendre sa défense en son absence. Au vu du caractère de la jeune femme, encore une fois bien différent de son frère, il était évident qu’elle n’avait pas besoin de son aîné pour prendre sa défense. Et en même temps, Ignatius ne se voyait pas entendre l’homme parler ainsi de sa sœur, sans réagir. Il n’y pouvait rien, il savait bien que sa sœur était très libre sur beaucoup de point – le parfait opposé de son frère –, mais il n’aimait pas l’idée qu’elle et Harfang puissent s’entendre (et pas seulement en parole visiblement, quand bien même Ignatius se laissait surtout prendre par la vantardise de son interlocuteur qui lui cachait bien les nombreuses vestes que Agrippine lui mettait). Qu’elle fasse ce qu’elle voulait avec qui elle voulait, mais concernant Harfang ça avait beaucoup plus de mal à passer. Sans doute parce qu’ils ne s’étaient tout bonnement jamais entendu.

« Je sais parfaitement que ma sœur peut se défendre toute seule. » Répondit-il en tentant de ne pas perdre confiance, même si ce n’était pas facile en face d’un homme tel que Harfang. « Mais ça s’appelle l’esprit de famille. Si tu étais capable de te préoccuper de ton épouse et de ta fille, je suis sûr que tu comprendrais. »

Bon, il s’avançait un peu, mais Harfang ne cachait pas réellement son potentiel de séduction et quand on était marié, normalement, on ne faisait pas ce genre de chose. Même non marié d’ailleurs, mais Ignatius était un peu trop de la vieille école sans doute.

Quand Harfang affirma qu’il était « touché », Ignatius n’y croyait pas réellement. Et en un sens, c’était sans doute parce que l’homme sous ses yeux ne cherchait pas spécialement à le lui faire croire non plus. C’était ce qui avait le plus le don de l’agacer chez Harfang, cette manière de prendre les choses à la légère, de s’amuser de ce qu’il pouvait bien lui dire. Oui, ça l’agacer et il n’avait pas spécialement envie de le lui montrer, cependant… on ne pouvait pas réellement dire qu’il y parvenait tant que cela. Harfang avait le don pour le pousser à bout, pour savoir exactement quoi lui dire afin de l’énerver au plus haut point. En même temps, quand on connaissait les sujets qui avaient tendance à énerver Ignatius, ce n’était pas vraiment difficile d’appuyer dessus. Globalement, il y avait sa famille donc, sa mère, mais surtout sa sœur. Définitivement, à chaque fois que l’homme prenait la parole pour parler de sa sœur, Ignatius ne pouvait pas s’empêcher de serrer des dents.

Harfang commença par affirmer que la famille Tuft avait énormément de chose à lui apprendre, concernant l’esprit de famille. Cette façon de lui parler l’agaçait prodigieusement donc, parce que justement… le jeune homme avait conscience que son petit discourt n’était pas forcément convainquant. Sa famille était loin d’être parfaite et encore, Ignatius ignorait encore la moitié de sa véritable histoire. Autant dire qu’on ne pouvait pas dire que les Tuft pouvaient réellement se permettre de donner des leçons aux Londubat. Même si visiblement Harfang ne prenait vraiment pas la peine d’être un bon mari, ou encore un bon père de famille.

Mais évidemment, l’homme ne s’arrêta pas là puisqu’il lui affirma que sa sœur ne faisait que dire du bien de sa mère. Autant dire qu’il y avait plusieurs choses qui l’agaçait encore une fois. Le fait que son interlocuteur ait la possibilité de parler à sa sœur au point que celle-ci se confie concernant leur mère et bien évidemment le fait que Agrippine dise du mal de leur mère. Bon, évidemment, Ignatius ne doutait pas une seule seconde que les propos de son interlocuteur était ironique, il savait bien que Agrippine préférait tous les supplices du monde plutôt que dire du bien de leur mère. Sans qu’il ne sache encore pourquoi.

« Dans tous les cas, ce ne sont pas des choses qui te regardent. » Répliqua-t-il, clairement à court d’argument. Ignatius aimerait bien pouvoir lui répliquer quelque chose qui puisse enfin lui faire fermer son clapet, que Harfang ne puisse plus rien dire à son encontre, qu’il arrête de lui prendre la tête avec sa sœur. Malheureusement, on ne pouvait clairement pas dire qu’il était doué pour ce genre de chose. Et dans tous les cas, le jeune homme était bien trop sensible dès qu’il était question de sa sœur. « Et ça n’enlève rien à ce que j’ai dit. »

Même si c’était un peu complexe, Ignatius était le frère de Agrippine et son sens de la famille à lui le poussait à la défendre coûte que coûte.

En un sens Ignatius savait bien que quoi qu’il dise, ça n’allait pas faire grand-chose à Harfang. En même temps, si le jeune homme avait dû avoir une quelconque influence sur son interlocuteur, ça se saurait. Ce n’était clairement pas le cas. Autant dire que l’homme pouvait clairement parler dans le vide, sans que son interlocuteur ne s’en préoccupe. Mais bon, Ignatius n’allait quand même pas se retenir de dire ce qu’il avait à dire quand même, il ne pouvait pas s’empêcher d’avoir envie de protéger sa jeune sœur. Même si, clairement, Agrippine était la dernière personne qui avait besoin d’être protégée, elle prenait sa vie en main, elle faisait les choses à sa convenance sans se préoccuper des conséquences. Du moins, c’était ce que Ignatius se disait, c’était ainsi qu’il voyait les choses. Et clairement, le jeune homme n’avait pas besoin de prendre la défense de sa sœur, mais il ne pouvait pas s’en empêcher pour autant.

Harfang ne cacha pas le fait qu’il n’avait donc que faire de ce que Ignatius lui disait, ce qui lui faisait une belle jambe. Mais l’homme ne manqua pas d’en rajouter une couche, en affirmant qu’il devrait se détendre, parce que sinon il allait commencer à croire qu’il avait des sentiments bizarres pour sa sœur. Ignatius serra des dents, il ne put s’empêcher de se sentir mal à l’aise. Il était évident que ce n’était pas le genre de chose qui était réel, Ignatius aimait sa sœur bien sûr, mais comme une sœur, pas du tout d’une manière déplacée. Cela dit, ça n’enlevait pas le fait qu’il puisse se sentir mal à l’aise parce qu’il était toujours mal à l’aise avec ce genre de sujet.

« Ton niveau ne s’améliore pas visiblement. » Répliqua-t-il, toujours les dents serrées.

Il n’avait pas réellement plus de réparti que cela. Il n’y avait pas forcément de moyen pour elle de répondre à tout cela, quand bien même il aimerait clairement avoir plus de réparti quand même. Cela dit, quoi qu’il dise, le jeune homme savait dans tous les cas que le sorcier sous ses yeux n’allait pas s’en préoccuper une seule seconde, qu’il allait se contenter de balayer ses mots d’un revers de la manche et continuer son jeu avec sa sœur. Encore une fois, Ignatius ne pouvait pas empêcher sa sœur de vivre comme elle le voulait – il savait bien qu’elle était un électron libre quand même –, mais il ne pouvait pas nier que s’imaginer qu’il puisse arriver quoi que ce soit entre sa sœur et cette personne en particulier, ça ne l’enchantait pas du tout.

Harfang ne semblait pas s’inquiéter des propos de Ignatius, mais en même temps on ne pouvait pas dire que le jeune homme s’imaginait capable de toucher son interlocuteur avec les propos qu’il venait de tenir. C’était juste une manière pour lui de réagir d’une façon, de dire au moins quelque chose à ce que le jeune homme avait affirmé. Parce qu’il était évidemment particulièrement mal à l’aise d’entendre de tels mots. Surtout que ça concernait sa sœur. Bon, d’une manière général dès qu’il était question de femme, le jeune homme ne manquait pas d’être mal à l’aise, mais forcément dit comme cela, avec sa sœur en prime… c’était n’importe quoi et Ignatius avait simplement eu envie de dire quelque chose.

Sauf que ce n’était pas vraiment utile en soit et Harfang ne manqua pas de le souligner d’ailleurs, en affirmant que la répartie du jeune homme n’était clairement pas améliorer, qu’il se devait de faire tout le travail. Ignatius serra des dents encore une fois, à force il allait finir par les voir se casser dans sa mâchoire, lançant un regard noir à son interlocuteur.

« Parce que tu prends ça pour un jeu ? » Demanda-t-il, en se doutant parfaitement de la réponse. Évidemment que le jeune homme s’amusait, il s’amusait de lui, il se moquait, il prenait tout cela à la légère alors que Ignatius avait tendance à prendre la situation bien trop au sérieux. Globalement, Ignatius avait surtout tendance à prendre toutes les situations trop au sérieux, il peinait à se relâcher un peu. Cela dit, ce n’était pas quelque chose dont il avait l’habitude, ce n’était pas pour rien qu’il était à ce point différent de sa sœur. « Je ne vois même pas pourquoi je perds mon temps avec toi. »

Encore une fois, le jeune homme avait bien conscience de la pâleur des propos qu’il était en train d’affirmer, mais en même temps il était sincère. Ignatius perdait clairement son temps en compagnie de Harfang et ce n’était pas vraiment quelque chose qu’il découvrait, mais c’était agaçant de voir à quel point il était en train de s’amuser de la situation, alors qu’à ses yeux rien de tout cela n’était drôle, bien au contraire. Il n’y avait rien d’amusant à imaginer un homme tel que celui qui se trouvait sous ses yeux en train de faire des cochonneries avec sa sœur, cela dit, le jeune homme n’était dans tous les cas jamais à l’aise à se dire que sa sœur faisait juste n’importe quoi avec n’importe qui. Enfin, Ignatius ne se permettait pas non plus d’imaginer sa sœur dans ce genre de scène, il n’avait pas du tout ce genre de pensée envers elle, c’était… malsain.

Bref, il n’aimait définitivement pas cette conversation et elle avait vraiment le don de le faire sortir un peu de ses gonds, sans pour autant que quiconque ait de raison de craindre quoi que ce soit de sa part.

Harfang avait vraiment le don de dire précisément tout ce que Ignatius n’avait pas envie d’entendre. C’était une évidence même, Harfang et lui ne pourraient jamais s’entendre. Et ça allait bien au-delà du fait que l’homme ne se cachait pas de coucher avec sa sœur, Ignatius savait de toute façon que sa sœur ne se retenait pas spécialement de coucher avec un tas de personne, ce qui prouvait bien que les enfants Tuft n’avaient rien à voir tous les deux. Ça allait bien au-delà, c’était simplement qu’ils n’étaient clairement pas compatibles mentalement tous les deux. Ils n’avaient pas du tout le même caractère, la même façon de voir les choses, la même vie. Ils étaient bien trop différents. Et le pire était évidemment le fait que l’un d’entre eux ne se retenait pas pour bien le chercher, pour lui dire précisément ce qu’il n’avait pas envie d’entendre.

Peut-être que secrètement, le jeune homme avait envie de devenir le meilleur ami de son interlocuteur, mais qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre. Évidemment, Ignatius se doutait bien que Harfang ne devait pas croire plus que lui à ce qu’il était en train de dire. À la limite, le jeune homme se disait que son interlocuteur se contentait simplement d’apprécier de le croiser parce qu’il s’amusait à ses dépens, ce qui n’était pas du tout quelque chose qui plaisait à Ignatius. Enfin en même temps, il n’y avait vraiment pas grand-chose qui plaisait à Ignatius et encore moins quand ça concernait Harfang Londubat sous ses yeux.

« C’est ça, ne prend pas tes rêves pour une réalité. » Répliqua-t-il, sans forcément payer de mine. C’était bien ça le souci, en soit Ignatius n’avait juste aucune répartie valable. Sans doute qu’il s’amuserait bien plus si jamais il avait justement plus de répartie, s’il savait se défendre ou encore s’amuser du malheur des autres, mais ce n’était pas son cas. Ce qui ne l’empêchait pas par moment d’avoir les choses en main, de savoir s’imposer – sinon il ne s’en sortirait pas dans son travail –, mais dès que ça devenait trop personnelle, que ça le touchait de trop, il perdait tous les moyens. « Je vais m’épargner ta présence plus longtemps. » Il déclarait forfait en somme, mais en même temps ce n’était pas comme si Ignatius s’imaginait capable de s’en sortir dans une telle situation.

Il n’avait aucune répartie, il ne savait pas jouer de la façon dont Londubat jouait. Bon, en un sens, plus l’homme lui tenait la jambe, moins il passait du temps avec Agrippine et ça serait une bonne chose, mais c’en était définitivement trop pour Ignatius, il ne pouvait pas plus supporter. Il avait définitivement besoin de prendre la tangente, il n’en pouvait plus.