Pomona examina le fond de la fiole presque vide qu'elle tenait entre ses doigts et dont elle venait d'ingurgiter une conséquente rasade.

Elle était presque vide. Déjà. Elle l'avait achetée en début de semaine pourtant. Et si elle voulait espérer tenir dans les jours à venir, il lui en faudrait de nouveau. L'apothicaire était quelqu'un de conciliant, mais il refuserait certainement de la fournir encore une nouvelle fois, c'était déjà la troisième fois en un temps record. Une addiction ? Elle ne savait pas trop. Une nécessité, plutôt, dirait-elle.

La notice prescrivait de ne pas dépasser une rasade par jour, Pomona en buvait une par tranches de trois heures, et par instants, pourtant, il lui semblait que cela ne soit pas suffisant. Elle allait se ruiner, si cela continuait. Peut-être devrait-elle envisager de fabriquer ses potions elle-même. Ou de demander l'appui de Zelda. Pomona osait croire que si quelqu'un ne se permettrait pas de la juger, ce serait l'infirmière de Poudlard.

Elle en avait besoin pour garder l'esprit clair, pour ne pas subir les baisses d'énergie qui l'avaient assaillie dans un premier temps. Elle en avait besoin pour pallier à toutes ces nuits d'insomnie, au fait qu'elle ne pouvait se satisfaire que d'environ deux heures de sommeil par nuit (et déjà, elle considérait que c'était bien trop).

Elle fourra la fiole au fond de sa poche. Le reste, elle le gardait pour plus tard. Elle allait devoir en faire l'économie.

Bien sûr, ce n'était pas bien. Mais aux grands maux les grands remèdes. Sa vie, à l'heure actuelle, ne tolérait ni pause, ni repos. Pomona, le jour, se consacrait pleinement à l'enquête épineuse qu'on leur avait confiée, à elle et à Seth. Sa carrière en dépendait, et il n'y avait aucun de ces épais mystères qu'elle pouvait accepter de ne pas voir résolus. Et le soir, la nuit, c'était à la Résistance, qu'elle consacrait tout son temps. Elle refusait de négliger l'un ou l'autre. Et elle ne dormait plus. Même si elle avait eu le temps de dormir, l'aurait-elle pu. Son esprit demeurait sans cesse en éveil. Parfois, elle aimerait lui trouver un interrupteur.

Elle recoupait (pour la dixième fois) les témoignages qu'elle avait récoltés sur l'affaire Colloway, dans l'espoir de trouver un indice, un élément, quel qu'il soit, qui lui aurait précédemment échappée.

Elle avait rendez-vous. Elle le savait, oui, mais, absorbée par son travail, elle n'avait pas vu tourner les aiguilles de l'horloge. Elle sursauta légèrement quand on frappa à la porte du cagibi qui, pour l'heure, lui servait de bureau.

Pomona invita la jeune femme à entrer, une brune en fin d'adolescence. Encore à Poudlard, sans doute.

"Bonjour Mademoiselle Fitz, je suis Athéna Smith. J'ai rendez-vous avec vous afin de discuter d'un certain sujet assez confidentielle."

"Bonjour." la salua-t-elle à son tour. "J'ai déjà entendu parler de toi."

Pas en détail, mais outre le fait qu'elle l'avait croisé de temps en temps dans les couloirs de Poudlard quand elle y étudiait encore, Myria lui avait un peu parlé d'elle. Succinctement. Miyria...

"Que puis-je faire pour toi ?"

Elle le devinait. Le terme "sujet confidentiel" parlait pour lui. Pour la peine, d'ailleurs, elle avait pris soin de verrouiller la porte de son bureau et de l'insonoriser. Il traînait plus d'une oreille indiscrète au ministère.