Love today | Saint Valentin | Harry & Farore

    Ce matin là, il fait encore bien froid. Frissonnante, je tire sur ma grosse couverture pour la remonter jusqu'à mes oreilles. Comment pourrais-je un instant envisager de quitter le cocon chaud que j'ai eu tellement de mal à créer ? Mon appartement n'est pas vraiment le plus joli ni le mieux isolé de Pré-au-Lard, il y fait un froid d'enfer en cette saison. Rendue léthargique par la température ambiante, je referme mes yeux avec force, espérant me rendormir aussi sec. Rien à faire malheureusement, la lumière est à présent trop présente dans la chambre. Ces maudits volets sont tellement vieux que je n'essaye plus de les fermer. En fait j'ai presque peur qu'ils tombent sur quelqu'un si je les touche. J'ai bien installé des rideaux, mais franchement ça ne suffit pas, surtout quand on a une fenêtre orientée plein Est. Je grommelle et repousse mes draps d'un coup sec. Le contact soudain avec le froid me fait l'effet escompté. Je serre les dents et cours presque vers la salle de bain. De l'eau chaude vite, vite, viiiiite ! Un ronronnement de satisfaction m'échappe alors que la vapeur d'eau brûlante m'entoure dans petite pièce. J'aimerais pouvoir rester là toute la journée, mais avec le peu d'eau chaude que j'ai, ce ne serait pas tellement possible. Je finis donc par sortir, enroulée dans une épaisse serviette moelleuse. Je trouvais déjà que ma chambre était glacée, mais alors avec les cheveux mouillés c'est une horreur. Au moment où je pense cela, j'éternue brutalement. Prévisible.
Il n'y a pas de mots assez forts pour exprimer mon bonheur en enfilant des vêtements chauds et doux. Tout ce qu'il manque pour que cette journée soit parfaite, c'est du sucre. Je l'admet, je suis une grande psychopathe lorsqu'il est question de chocolat. J'en achète tous les jours chez Honeydukes. Quelle serait l'utilité de vivre juste au dessus de la boutique, autrement ? J'enfile mes bottes fourrées à la laine de mouton avec détermination, enfourne un petit pain dans ma bouche et ferme la porte derrière moi. Comme d'habitude, j'avise le grand escalier qui mène à la porte et opte pour une glissade sur la rampe. J'atterris avec souplesse en bas des marches et sort affronter ce pâle matin de février. Ce n'est qu'en découvrant la vitrine de la confiserie que je me rend compte que nous sommes le quatorze. En même temps, je ne vois pas pourquoi je me sentirais concernée, les couples c'est pas ma tasse de thé. Je hausse les épaules et pousse la lourde porte vitrée de la boutique. A l'intérieur, on dirait un essaim d'abeilles. Il y a tellement de personnes qui parlent en même temps que je ne distingue qu'un bourdonnement agaçant. Aussi discrète qu'une souris, je me faufile dans la queue et double une dizaine de jeunes filles trop occupées à glousser pour me remarquer. J'arrive donc rapidement en caisse.
Mon regard analyse l'étalage derrière la vendeuse. J'avise une boîte en forme de coeur contenant des chocolats à l'allure vraiment délicieuse. J'aimerais bien la prendre pour moi, mais c'est normalement pour offrir... Boarf, j'ai qu'à la prendre et la déguster chez-moi. Personne ne le saura. J'achète donc la boîte grand format et attrape un échantillon à déguster sur le comptoir. Je me tourne vers la sortie tout en mordant dedans et mes yeux accrochent ceux d'un garçon qui fait la queue derrière moi. Je reste un instant à le fixer qui me semble durer une éternité. Quelque chose d'étrange se produit alors. Mes pupilles se dilatent, mon coeur s'affole et je lâche mon sac de courses par terre. Ce genre de maladresse ne m'arrive jamais ! Le fracas me fait revenir un peu sur terre et je rougis en me baissant pour ramasser mon bazar. Sauf que voilà, le garçon s'est baissé en même temps et nos crâne se rencontrent brutalement.

« Ouille ! » Je m’exclame en frottant mon front avec ma main.

Un peu sonnée, je finis par rougir encore plus et récupérer mes affaires. Je ne sais pas bien où me mettre. peut-être que je devrais commencer par m'excuser et le remercier de sa tentative d'aide. Maintenant que je le regarde un peu mieux, il n'est pas si désagréable à regarder. Ses lunettes rondes cachent un regard vert émeraude particulièrement ensorcelant et il a quelque chose de fascinant dans sa coiffure brune indomptable. Il est à peine plus petit que moi à cause de mes talons. sans chaussures il doit me dépasser d'un ou deux centimètres. Je devine à son visage qu'il est jeune. Plus jeune que moi. En fait il est probablement encore à Poudlard. Je devrais me sentir honteuse de reluquer ainsi un adolescent, mais ce n'est pas le cas. Bien sûr j'ai conscience que cette situation est aussi anormale que ridicule, mais je me sens magnétiquement attirée par ce garçon dont je ne connais même pas le nom. Finalement les rouspètements dans la file d'attente me font réagir et je m'incline légèrement, confuse.

« Oh ! Je suis désolée, je ne suis pas aussi maladroite d'habitude ! J'espère que je ne vous ai pas fait mal... » Je dis avec une petite voix douce.

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    J'aurais pu tourner les talons et sortir, poursuivre mon plan pour cette ravissante mâtinée, mais impossible. Mon corps reste planté dans le sol, incroyablement lourd comparé à d'habitude. En revanche, mon âme n'a jamais été aussi volatile, on dirait que des ailes lui ont poussées dans le dos.Je donnerais n'importe quoi pour ne pas me sentir aussi ridicule qu'en cet instant. Non mais sans blague, c'est pas mon genre d'être aussi niaise. Malgré moi, je commence à croire que j'ai été piégée avec un chocolat magique. Le problème c'est que j'en ai mangé plusieurs, et à mon avis le présentoir d'échantillons ne contient pas que des chocolats drogués. Lequel me met dans un tel état ? Aucune idée. Je m'écarte pour laisser la file d'attente avancer mais mon regard ne quitte pas un seul instant le jeune homme qui est en train de payer ses achats. En plus ce n'est vraiment pas mon style de garçon. J'aime les grands roux alors franchement... Je ne vois pas d'autre explication qu'un filtre d'amour. c'est étrange comme une partie de moi a envie de hurler tandis que l'autre a envie de lui sauter au cou. Malgré tous mes efforts, il est fort probable que ce soit la seconde alternative qui se réalise. Ma nature de demi-vélane ne m'aide pas vraiment, vu que ce sont des créatures douées pour la séduction. Je me sens instinctivement attirée par toute idée particulièrement peu chrétiennes qui passent par ma tête. Beurk. Beurk. Non je me refuse à faire ces choses que mon imagination se plait à inventer. Mauvais scénario, mauvais décor, mauvais prince charmant. Malheureusement, lorsqu'il se retourne vers moi, un sourire étire mes lèvres de façon immédiate et incontrôlable. Bon, j'imagine que c'est peine perdue d'essayer de résister. Je le laisse me rejoindre, ignorant royalement l'expression de son visage qui est une preuve écrasante de son malaise face à mon attitude ? Qui ne le serait pas ? Je ne suis qu'une belle inconnue qui lui a fait une bosse et qui ne veut plus le lâcher. Admettez qu'à sa place, vous non-plus vous ne sauriez pas comment vous sauver tout en restant courtois. Toujours pour mon plus grand désespoir, ma main se tend vers lui.

« Je m'appelle Farore. Et toi ? » Dis-je de façon avenante.

Non seulement son prénom ne m’intéresse pas plus que ça, mais en plus je viens de passer du vouvoiement au tutoiement. Je ne suis pas sûre que ce soit très distingué d'agir de la sorte. Ceci-dit, je n'ai pas besoin d'un filtre d'amour pour oublier les bonnes manières. Je ne suis pas une professionnelle du petit doigt en l'air, pour faire bref. Je serre sa main joyeusement avant de remettre la mienne à sa juste place : dans la poche fourrée de mon manteau. Même dans la boutique, il ne fait pas excessivement chaud. Je rêve de l'été, d'une robe courte, d'une baignade dans un ruisseau. Ce serait le paradis. Tiens ça me donne une idée... Pourquoi ne pas ouvrir une station thermale ? Des sources chaudes ? Je suis sûre que je ferais fortune en cette saison. Bon le reste du temps peut-être moins... Et si je pensais à ça genre plus tard ? Hein ? Ouais ça me semble juste. Les joues rougies - et pas uniquement par le froid - je décide de faire une chose particulièrement bête.

« Je peux t'inviter à boire quelque chose ? Je t'ai cogné après-tout, c'est le moins que je puisse faire. » Je dis aimablement.

Ma propre voix me dégoûte. Si j'étais moi-même, je me mettrais une bonne claque bien appliquée. C'est tellement niais que je vais probablement vomir une fois l'effet de la potion dissipé. Je n'ai pas envie de boire en compagnie de se garçon. Et pire encore : je n'ai pas envie de payer ! Ben quoi ? Si vous avez bien suivi je ne vis pas dans le luxe et je viens d'acheter une grosse boîte de chocolats. Je n'ai pas précisément les moyens d'inviter quelqu'un, à moins de ne plus manger jusqu'à la fin du mois après ça.

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    Au final, ce n'est peut être pas plus mal d'être tombé sur un garçon gentil comme lui, après avoir avalé un filtre d'amour. A mon avis l'effet ne va pas durer plus d'une heure ou deux, alors autant passer ce laps de temps en bonne compagnie, n'est-ce-pas ? Je suis ravie de le voir serrer ma main amicalement et se présenter. Ha-William ? Sérieusement ? Je hausse un sourcil, consciente que mon interlocuteur vient d'hésiter pour me donner son propre prénom. Je pourrais trouver ça bizarre si je n'étais pas persuadée qu'il m'en a donné un faux afin que je ne puisse pas le retrouver après ça. Honnêtement, à sa place je ferais pareil. Même moi j'ai du mal à me supporter tout de suite. Je ne m'attarde donc pas sur sa présentation et passe directement à l'étape suivante : l'invitation à aller boire un verre. J'entend presque mon porte-monnaie hurler à la mort quand William accepte de m'accompagner. Au revoir eau chaude, tu vas me manquer jusqu'au mois prochain... Disons que ça m'apprendra à piquer des chocolats sur le comptoir de la confiserie. Ma maman disait toujours de pas manger n'importe quoi sans demander. J'ignorais que les friandises étaient comprises dans le deal. Sauf bien sûr quand c'est un vieil homme dégoûtant qui me les propose. Heureusement, ça, ma mère a eu le temps de me l'apprendre. Du coup, toute contente d'avoir une sorte de rencard avec ce garçon inconnu (j'insiste bien sur le fait que ce pauvre malheureux et moi ne nous connaissons pas), je regarde la porte puis le regarde à nouveau, attendant qu'il m'ouvre galamment la porte. La vrai Farore en moi pique une crise d'hystérie tellement cette attitude de nunuche soumise ne lui convient pas. En temps normal, j'aurais ouvert moi-même la porte. Et peut-être même que je la lui aurait claquée sur le pif, juste pour le fun.

« Alors " Ha...William " ? Tu es prêt ? On peut y aller ? » Je demande avec une pointe d'humour dans la voix.

Pourrais-je être plus claire ? Il faudrait que ce type ouvre la porte avant que je commence à faire des trucs vraiment pénibles et indignes de moi comme entortiller mes cheveux autour de mon doigt ou glousser comme une dinde. On dirait pas comme ça, mais en vérité je suis à deux doigts de m'éclater le crâne contre un mur. Peut-être que je pourrais rester évanouie jusqu'à ce que l'effet soit dissipé ? Non ? Bon tant pis. Une fois dehors, je prends une grande bouffée d'air gelé. Mes poumons agonisent de ce fait, mais je suis trop occupée à profiter du calme pour m'en rendre vraiment compte. C'est dingue, je ne m'en étais pas rendu compte avant, mais il y avait un véritable boucan dans cette boutique ! Je me demande comment je ne suis pas devenue dingue, et pire encore : comment William et moi avons pu nous entendre sans hurler. Tout compte fait... Peut-être qu'on a crié. J'avoue que je saurais pas dire, là. Ma seule consolation si c'est le cas, c'est que les gens avec nous chez Honeydukes auront eu autant de supplice que moi à assister à cette parade de séduction ridicule. Non mais regardez un peu comme je me dandine ! On dirait un paon qui fait la roue. Je me racle la gorge et balaye la rue de mon regard perçant. Ou je vais l'emmener, le minus de Poudlard ? Il me faudrait un endroit assez sympathique pour ne pas le faire fuir mais pas trop cher pour ne pas mourir de faim les prochaines semaines. Tiens en voilà une idée... Et si je demandais son avis à mon " cavalier " ?

« Il y a un endroit que tu préfères ? C'est toi qui choisit. »

Encore heureux que c'est lui qui choisit ! Manquerait plus que je fasse tout le sale boulot. Déjà que c'est moi qui vais raquer pour sa bière au beurre...

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    L'air extérieur est vraiment plus que vigorifiant. On se gèle, dehors. Du coup, je suis plutôt satisfaite quand William prend une décision sage et rapide concernant notre destination. Cela fait un petit moment que je ne suis pas allée aux Trois Balais, c'est un fort bon choix. Un mince sourire s'étire sur mes lèvres, car je me souviens que les prix y sont relativement corrects. Peut-être que je pourrai espérer de manger au moins du pain jusqu'à la fin du mois.

« Super. Allons-y. » Je lui répond en lui emboîtant le pas.

Nous croisons un nombre particulièrement élevé de couples, ce qui a le don de me mettre mal à l'aise. L'effet de cette potion risque de durer un long moment et je ne suis pas sûre de pouvoir le supporter. Ce n'est pas que ce garçon est laid, mais je n'aime vraiment pas les rendez-vous. Surtout le jour de la Saint-Valentin. C'est pas dans mes habitudes de faire comme tout le monde et en même temps que tout le monde. Si je n'avais pas été aussi gourmande avec les chocolats sur le présentoir, je ne serais pas dans cette situation. Mais comment j'aurais pu deviner, aussi ?! C'est pas ma faute si ces débiles ne vérifient pas leur marchandise avant de l'offrir aux clients. William pousse la porte des Trois Balais et je le suis à l'intérieur. La douce chaleur qui provient de la cheminée me fait soupirer de bien-être. Je ne supporte vraiment pas le froid, c'est terrible. Je repère du coin de l'oeil ma table favorite qui est libre, dans le coin sous l'escalier. Étant donné la façon dont j'attire naturellement les regards, j'aime me glisser là où on me voit difficilement. Sans vraiment lui demander son avis, j’entraîne William là où je souhaite m'asseoir. Naturellement, je prends la place la mieux cachée en souriant. Lui, s'installe face à moi. Un serveur passe entre les tables, chargé comme un mulet de commandes. Il ne semble pas vraiment nous remarquer. Profitant d'une demi seconde où son regard se pose sur moi, je passe ma main dans mes cheveux lentement. La réaction est immédiate. Il s'immobilise, me fixe, et nous rejoint en quelques enjambées. Ignorant son expression admirative, je reporte mon attention sur William.

« Je vais prendre un grand chocolat chaud à la cannelle. Et toi ? » Je lui demande, toujours un sourire accroché aux lèvres.

C'est curieux, il ne semble pas tellement sensible à mes charmes comme le sont la plupart des hommes que je croise. Serait-il imperméable à l'attraction naturelle des vélanes ? Je ne crois pas lui déplaire, mais il n'agit pas comme un idiot béa et baveur, ce qui n'est pas le cas en revanche du serveur. Si au début je trouvais que ce rendez-vous était une calamité, je finis par trouver le moment agréable. Ce n'est pas le pire garçon avec lequel boire un verre. Il est trop jeune, binoclard, timide, mais il sait respecter une femme, aussi jolie soit-elle. C'est une qualité que je ne peux ignorer.

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    Je souris au serveur qui s'éloigne finalement avec nos commandes. Vu sa vulnérabilité face à mes charmes, je peux être sûre que nos boissons vont arriver très vite. Tant mieux. J'avoue volontiers avoir soif et besoin de cette boisson chaude. En attendant qu'elle arrive, je m'applique à donner une attention particulière à William. Après tout, c'est avec lui que j'ai rendez-vous, pas avec ma tasse de chocolat chaud. Quoique l'échange des deux pourrait me faire plaisir si je n'étais pas envoûtée par cette fichu potion. Je souris en réponse à sa question. Ok, c'est bon, nous y sommes, il est temps de parler de nos vies, de nos occupations, de nos goûts. C'est dingue comme je n'aime pas ces vieux clichés. Je préfère être surprise. Aussi étrange que ça puisse paraître, je pourrais aimer un homme qui m'embrasserait subitement, en faisant le premier pas, à un moment inattendu. L'éternel rituel des présentations autour d'un verre me barbe. Retenant un soupir, je me lance dans une réponse assez complète, histoire de l'occuper.

« Eh bien, en quittant Poudlard avec mon diplome, je me suis inscrite sur la liste de demandes pour intégrer Sainte Mangouste. Du coup, je suis apprentie médicomage pour le moment. Je veux sauver des vies. » Je dis en gardant le sourire.

J'aimerais pouvoir me lamenter, lui dire que j'ai choisie cette voie parce que j'ai perdu des membres de ma famille et que je veux éviter que le passé ne revienne me hanter, mais non. Vraiment pas. La vérité c'est que je n'ai pas d'histoire dramatique à raconter. Je ne suis pas une traumatisée de la vie, mes parents sont en vie, je suis fille unique, j'ai toujours été populaire, j'ai de vrais amis sur qui compter... La vie est belle, en bref. Je suppose que je me suis lancée dans la médicomagie parce que c'est là-dedans que j'avais le plus de qualités. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? C'est un métier comme un autre, alors si je suis naturellement douée pour ça, pourquoi me fatiguer à faire autre chose ? Voulant éviter à tout prix que William ne me pose une autre question, je joue son jeu et en pose une à mon tour.

« Et toi, tu veux faire quoi après tes études ? Je suis prête à parier que tu vas t'orienter vers le ministère. »

C'est vrai qu'avec ses lunettes rondes et son corps maigrichon, il fait plus bureaucrate qu'aventurier. C'est à ce moment que le serveur refait une apparition pour déposer nos boissons sur la table. Je mets immédiatement mon nez au dessus de ma tasse pour sentir l'arôme du chocolat se mêler à celui du bâton de cannelle. La vapeur chaude me fait frissonner de bonheur. J'enfermerais presque les yeux d'extase. Le serveur m'observe un instant, avant de faire demi-tour à regret. Peut-être aurait-il aimé être à la place de mon chocolat chaud ? Ces hommes, ils ont vraiment des fantasmes curieux.

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    Une fois le serveur parti, non sans traîner les pieds de déception, je reporte mon attention sur William qui répond à ma question. Et ce qu'il me dit me surprend beaucoup plus que ce que j'attendais. Un auror ? Lui ? Faut avouer que ce n'est pas évident au premier coup d’œil. On peut me traiter de superficielle, de méchante, de personne sans aucun tact, mais je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il n'a pas du tout la carrure pour ce genre de boulot, surtout avec ce qu'il se passe en ce moment concernant les partisans de Grindelwald. Il est cinglé ou quoi, le petit binoclard ? Enfin je suppose que ce n'est pas mon affaire, hein. S'il veut aller se suicider sur un champs de bataille au lieu de rester confortablement derrière un bureau, c'est son problème. C'est vrai que j'ai tendance à voir les ennemis actuels du monde sorcier comme une menace importante, à ne pas sous-estimer. Je suis moi-même une cible potentielle car mon sang n'est pas " pur ". Mon sourire malgré tout reste solidement scotché sur mes lèvres, car rien ne peut m'abattre le moral tant que je tiens entre mes mains un chocolat chaud à la cannelle. RIEN.

« D'accord. » Je clos ce sujet de façon simple et nette.

Et je pensais naïvement que notre échange banal s'arrêterai là, mais non. William n'hésite qu'une seconde avant d'entamer le sujet sur l'attirance que je déclenche chez le serveur. Euh, il joue à quoi là ? Non mais je suis d'accord, sur le principe, ça peut surprendre, surtout quand on ne sait pas ce que je suis, mais il pourrait avoir la délicatesse de ne pas discuter de ça, non ? Bon, tant pis, je suppose que sa maladresse est à mettre sur le compte d'un manque certain d'expérience avec les filles. Ce genre de remarque directe, ça passe probablement lorsqu'on s'adresse à un autre pote masculin. Je vais donc faire comme si je n'étais pas offusquée par ses paroles et assouvir sa curiosité un peu déplacée. Toujours souriante, ne laissant rien entrevoir de ma gêne, je lui explique donc la raison (pourtant évidente) de l'attirance du serveur envers moi.

« Mon père est un sorcier et ma mère une vélane. J'ai toujours eu ce genre de contact avec la plupart des hommes. Je t'avoue ne plus vraiment y prêter attention, avec le temps. » Je dis sur un ton neutre mais aimable.

Et puisqu'on est dans le vif du sujet, j'en profite pour faire une remarque qui me titille l'esprit depuis un petit moment.

« Curieusement, tu sembles immunisé contre mes charmes naturels. Ce n'est pas une mauvaise chose, mais c'est inédit. »

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    Si en temps normal je n'aurais pas apprécié de ne pas être capable d'envoûter le jeune William Black, la situation étrange dans laquelle je me trouve me permet de ne pas y prêter plus attention que nécessaire. Au fond, je suis même rassurée de ne pas devoir rajouter un peu de niaiserie supplémentaire à ce rendez-vous qui n'a déjà presque aucune logique. C'est le chocolat enchanté, le responsable. Plus jamais je ne serai gourmande, ça c'est une promesse que je tiens à faire - même s'il est probable que je ne l'honorerai pas une fois la mésaventure oubliée. Je souris légèrement en réponse à son compliment. Ce garçon est-il donc finalement capable de parler comme une personne normalement constituée ? Car pour l'instant tout ce que j'ai pu apercevoir, c'est qu'il bafouille en donnant son prénom et fait preuve d'une timidité rare. Ennuyée par la tournure que prend le rendez-vous, je me sens soulagée lorsque William se lance dans un récit plutôt amusant. Oui je ne doute pas que son ami soit devenu fou au contact d'une demi-vélane. Nous sommes réputées pour être des ensorceleuses. Il n'y a pas de surprise là-dedans, mais c'est malgré tout drôle d'imaginer William confronté à ce problème. Les hommes charmés font bien souvent de piètres compagnons pour leur entourage proche. J'ai déjà eu l'occasion de m'en rendre compte régulièrement.

« Tu as eu beaucoup de chance, alors. Le chant d'une vélane est une arme bien puissante. Plus qu'un sortilège offensif. » Je marque une pause et boit une gorgée de mon chocolat chaud. « Un homme charmé est un homme impuissant. » Conclu-t-elle avec une lueur d'amusement dans le regard.

Je ne tiens pas à l'inquiéter avec ces mots. En fait, je ne suis pas toujours fière d'être ce que je suis. Certes, c'est un avantage dans beaucoup de situations, mais parfois il m'arrive de me demander ce que l'on ressent en étant invisible. Ne pas sentir les regard se tourner vers soi à chaque instant, ce doit être reposant. Mon attention est dissipée par les bruits qui entourent notre table. Des discussions bruyantes et mélangées qui forment un brouhaha assez désagréable. Puis, lorsque je regarde à nouveau William, mon esprit se ferme à toute nuisance extérieure, comme s'il était le centre de mon monde. Bon, au moins il est clair que la potion fait encore effet. Dommage. Un petit sourire se dessine sur mes lèvres alors que je cherche un nouveau sujet de discussion capable de briser le silence un peu plus longtemps. Je trouve finalement mon bonheur dans ce que mon interlocuteur vient tout simplement de dire.

« Cet ami, comment s'en est-il sorti finalement ? En général, il n'est pas simple d'échapper au charme d'une demi-vélane. Nombreux sont ceux qui sont devenus fous et le sont restés. »