C

e matin-là, Hermione avait eu toutes les peines du monde à s'extirper de son dortoir. Elle qui, d'ordinaire, était toujours la première réveillée de son dortoir, quand ses camarades semblaient vouloir ne faire plus qu'un avec leur duvet et se fondre en eux, elle débordait généralement d'énergie, prête à affronter la journée nouvelle. Et "affronter" n'était pas un grand mot, au vu de ce qu'était devenue sa vie. Sa vie et celle de tous les autres voyageurs. Ils n'employaient pas encore les grands mots, mais il était pour autant sans doute grand temps de l'envisager. Ils étaient en guerre. Ni plus ni moins, une guerre froide, certes, un jeu de masques et d'apparences, sans l'ombre d'un doute, mais une guerre tout de même, qui avait déjà fait son lot de blessés, mais aussi et surtout de morts. Un nombre anodin en comparaison de ce qui les attendait, certes, mais qui n'avait rien de négligeable pour autant. Et parce que ce climat lourd et anxyogène, qui laissait peser sur elle une responsabilité pour laquelle elle craignait ne pas être à la hauteur, devenait de plus en plus difficile à supporter, ses nuits étaient généralement blanches, et le sommeil ne la gagnait presque plus qu'à l'heure de se lever.

Elle s'était donc rendue dans la Grande Salle d'un pas traînant, tentant d'occulter la fatigue qui lui alourdissait les paupières. Elle devait être la compagnie la moins agréable du monde, mais ce n'était vraiment pas volontaire. Elle ne pipait mot, elle se contenter de vider assez mécaniquement le contenu de son assiette, se souciant peu du contenu de l'assiette en question, au final. Elle le fit de façon aussi "robotisée" qu'elle avait pu se laver ou s'habiller le matin-même. Son esprit était tout simplement concentré sur moins anodin et moins trivial. Ces derniers temps, elle n'arrivait pas à avoir des considérations heureuses et légères. Elle aimerait vraiment savoir par moments lâcher prise, elle n'y arrivait pas. Elle enviait Harry, qui, tout en étant concerné par leurs problèmes à sa juste valeur, n'en oubliait pas l'essentiel, et s'était déclaré à Ginny. Pour sa part, elle ne se sentait pas capable de faire de même avec Ron. Fallait-il qu'elle attende qu'il se trouve lui aussi sur un lit d'hôpital pour se déclarer ? C'était absurde.

Mais non, elle restait focalisée sur ses priorités. Sans prononcer le moindre mot, toujours, elle avait quitté la grande salle, prête à retourner dans son dortoir pour y récupérer quelques affaires. Elle n'avait pas cours tout de suite, elle avait une heure de battement avant cela, mais elle comptait en profiter non pas sur se détendre, mais pour faire quelques recherches à la bibliothèque. Pas même pour les cours. Aussi singulier cela puisse-t-il paraître de sa part, elle n'accordait que peu d'importance à ses études pour l'heure. Elle était complètement perdue dans ses pensées et considérations. Et là encore, alors qu'elle n'avait pas remarqué la personne qu'elle venait de percuter. Décidément, cela lui arrivait de plus en plus régulièrement.

-C'est moi qui suis désolée, je ne regardais pas devant moi. s'excusa Hermione tout en ramassant son sac, qu'elle avait fait tomber dans la foulée, levant les yeux vers Lexie, une vert et argent à qui elle n'avait jamais parlé. Elle ne faisait pas partie de la liste des soupçonnés de Pomona, et contrairement à Ginny, Hermione ne voyait pas le diable dans tout serpentard, son ton demeurait donc aimable. Je ne t'ai pas fait mal, au moins ?

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H

ermione n'avait jamais prit la peine et le temps de parler à Lexie. Il faut dire, en même temps, que la jeune femme avait eu tendance à restreindre ses relations au cercle très fermé des voyageurs temporels, puis finalement de la résistance. Non pas qu'elle soit entièrement fermée au dialogue, mais l'on ne pouvait pas franchement dire que toutes les "amitiés" qu'elle ou les autres aient pu construire jusque-là leur avaient toujours été favorables. Ceci dit, Lexie lui était sympathique de prime abord, suffisamment agréable pour s'excuser de ce choc que la rouge et or croyait involontaire et pour l'aider à ramasser à son sac, geste qu'Hermione remercia avec un léger sourire. La vert et argent ne faisait pas, selon ses dires, très attention, Hermione non plus... Ça aurait pu s'arrêter là. La jeune femme était toujours déterminée à se rendre à la bibliothèque pour ses recherches, elle n'avait donc pas vraiment le temps de bavarder... Mais Lexie sut retenir son attention de la manière la plus efficace qu'on puisse concevoir, s'agissant d'elle.

Lexie était préoccupée, car l'esprit accaparé par les examens à venir. Ainsi, elle avait affaire à une autre studieuse ? Si quelqu'un était parfaitement à même de comprendre cet état d'esprit, c'était elle. À l'approche d'examens quels qu'ils soient, elle devenait difficile d'accès, préoccupée seulement par ses révisions, perfectionniste, n'ayant à coeur que de réussir. Pas seulement réussir, mais exceller... Oui, Hermione pouvait parfaitement comprendre, même si, contradictoirement, son esprit voguer vers des horizons bien différents, dernièrement, mais elle y mettait ceci dit autant d'investissement et de ferveur que si elle s'était mise aux révisions de ses ASPIC (ce qu'elle aurait fait beaucoup plus tôt que maintenant, au demeurant). La lutte contre Jedusor restait prioritaire, mais la jeune femme se sentait prête à s'en détourner quelques instants. Lexie avait su lui parler. Bien sûr, la rouge et or ignorait que, par la même, elle s'apprêtait peut-être à commettre l'inverse de ce qu'elle cherchait à accomplir. Apparemment, Hermione avait affaire à une travailleuse acharnée, à une demoiselle studieuse, un équivalent d'elle-même, somme toute, difficile de lui refuser un brin de conversation.

-Si, très souvent. admit-elle dans un léger sourire. Même si elle savait toujours faire assez de place dans sa boîte crânienne pour palier à ce soucis. Quoi que là, la coupe semblait pleine, et bien pleine, pour des raisons complètement différentes. Je m'apprêtais à me rendre à la bibliothèque, moi aussi, on peut y aller ensemble, si ça te dis. Ce semblait logique, en même temps, puisqu'elles se rendaient au même endroit, même si sa proposition risquait de compliquer les choses... Les recherches qu'elle avait à faire n'avaient absolument rien d'"officielles", et elle ne pourrait certainement pas les faire sous le nez de la vert et argent s'il devait s'avérer qu'elles s'installent à la même table. Enfin, elle verrait bien. Au pire, elle en profiterait pour s'avancer dans le travail scolaire qu'elle avait jusque-là négligé (même si une telle sentence concernant Hermione semblait des plus absurdes). Au fait, je m'appelle Prudence.

Elle le savait peut-être, même certainement, on avait facilement retenu le nom des voyageurs, vu leur arrivée inattendue à Poudlard qui avait soulevé bien des questions (auxquelles certains, malheureusement, avaient trouvé des réponses), tout comme elle-même avait retenu son prénom, mais puisqu'elles se parlaient pour la première fois, ce semblait être le b.a-ba de la politesse.

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S

ans surprise (car, à ce stade, il aurait été bien impoli de la part de la vert et argent de refuser tout net son invitation à se rendre à la bibliothèque avec elle, quoique certains élèves de serpentard ne se seraient pas gênés), Lexie acceptait de se joindre à elle, ce qui allait sans nul doute retarder les affaires d'Hermione, mais tant pis. Il fallait qu'elle fasse bonne figure, c'était presque un credo, à force de se le répéter depuis qu'ils se retrouvaient dans cette époque, et, qui sait, se retrouver en présence d'une élève qui pouvait côtoyer régulièrement Tom Jedusor (même si Hermione ne la soupçonnait pas être un chevalier de Walpurgis), ça pourrait être un avantage pour elle auquel elle n'avait pas songé de prime abord. Elle firent donc chemin jusqu'à l'antre des amoureux de bouquins que le commun des élèves préféraient déserter avec grande application quand la demoiselle se présenta sous le nom de Lexie. Hermione répondit à cette introduction par un sourire, sans rien songer à ajouter. De toute manière, la demoiselle, visiblement bavarde (ce qui allait ou non arranger ses affaires, elle n'en savait rien encore), avait déjà repris la parole.

Comment ils faisaient en dernière année ? Comment ils faisaient pourquoi ? Hermione hocha doucement la tête pour confirmer qu'elle était bien élève en septième année avant que Lexie ne reprenne, elle lui parlait de toutes les connaissances qu'il lui fallait assimiler, et lui faudrait assimiler dans les deux années à venir. Ce qui devait signifier qu'elle était actuellement en cinquième année, sans doute, et que les BUSE étaient toutes proches. Logique qu'elle se mette la pression, dans ce cas. Hermione se rappelait parfaitement combien, à l'approche de ces examens déterminants, elle s'obligeait à assimiler le plus de connaissances possibles en un temps record, quitte à en accumuler qui ne servaient évidemment à rien. À son humble avis, Lexie ne devait pas être bien différente d'elle de ce point de vue-là. Elle cherchait l'excellence, et forcément, le stress suivait en conséquence. La rouge et or songea à lâcher deux trois mots rassurants à l'adresse de son interlocutrice, mais une fois de plus, elle fut prise de court, car Lexie n'avait pas encore fini, et la question qu'elle lui posa eut le don d'occulter tout ce qu'elle avait pu dire précédemment.

Qu'est-ce qu'elle allait faire quand elle allait quitter Poudlard. Bonne question. Le moment fatidique approchait, et, pour tout dire, Hermione ne cessait de se poser la question. Oh, elle se la serait également posée en d'autres circonstances et d'ailleurs, elle y réfléchissait déjà activement quand elle se trouvait encore dans la bonne époque, sauf que le voyage temporel changeait la donne. Tous autant qu'ils étaient, ils n'avaient pas perdu l'espoir de pouvoir retourner chez eux, et dans ce cas, se construire un avenir concret en 1946 ne semblait pas avoir beaucoup de sens. Là, elle ne cherchait pas tant à savoir les études qu'elle allait poursuivre et le métier qu'elle pourrait faire qu'à trouver un endroit où elle et les autres pourraient se loger et poursuivre leurs actions à l'encontre de Tom Jedusor... jusqu'à ce qu'ils trouvent enfin un moyen de revenir au bercail. Autant dire qu'elle n'avait rien à répondre à son interlocutrice, même s'il n'était sans doute pas bien logique que, à l'approche de la fin de l'année, elle n'ait pas d'idée précise de ce qu'elle comptait faire ensuite.

-Pour tout dire, je n'en sais rien. admit-elle d'un ton qui, pour le coup, ne pouvait pas sembler plus sincère. Puis, dans une tentative sans doute vaine de changer de sujet. Et toi ? Tu as une idée, déjà ?

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J

amais Hermione n'oubliait l'époque où elle se trouvait, désormais. C'était bien évidemment impossible. C'était sa malédiction, son obsession, et le fardeau qu'elle devait porter pour l'heure, et elle y pensait à chaque instant de son existence. Mais elle devait bien reconnaître oublier, parfois, combien certaines choses avaient pu changer et évoluer en à peine cinquante années, à commencer par la condition des femmes, bien sûr. Pour la rouge et or, il était évident qu'elle devait décider elle-même de son destin, et qu'elle pouvait prétendre à une carrière à la hauteur de ses résultats scolaires et de ses compétences, mais aussi brillante une femme puisse-t-elle être à cette époque, il ne lui était pas si simple de parvenir à obtenir le destin qu'elle méritait, et c'était donc tout naturellement que Lexie lui apprit que son destin était plus ou moins tout tracé : se marier, et fonder une famille. Voilà qui était peu alléchant. D'autant qu'il était bien probable - c'était bien l'usage, surtout dans les familles de sang pur - qu'elle ne choisisse pas ce futur époux. Hermione trouvait assez fou que son interlocutrice puisse parler de cela avec une telle légèreté, elle aurait peut-être eu l'indélicatesse de le lui signifier si elle n'avait pas en tête qu'elle-même était supposée se conformer, au moins en partie, à la pensée d'une époque qui n'avait pas manqué d'être altérée depuis.

Cela ne l'empêchait pas, malgré tout, de vouloir réussir ses examens, précisait-elle. Par perfectionnisme. Tout ce potentiel gâché. Hermione trouvait vraiment cela dommage. Elle ne s'imaginait pas capable de se résigner à une vie telle que celle-ci... mais l'un dans l'autre, son avenir à elle était des plus incertains. Si elle ne regagnait jamais son époque, qui sait de quoi sa vie serait fait. Certaines, comme Minerva McGonagall, parvenaient à tirer leur épingle du jeu (et encore, elle était largement sous-employée), mais il s'agissait de cas isolés et très rares. Que faire de toute une vie à une époque devenue familière, mais demeurant inconnue ? Se battre de toute ses forces contre la menace imminente, elle ne voyait que cela, et elle était conservait à l'esprit ce moteur à son existence pour mieux supporter ce qu'elle serait peut-être contrainte de devenir. Quoi qu'elle veuille et quoi qu'elle fasse. Hermione apprécia quand même que Lexie ajoute qu'elle espérait pouvoir prouver sa valeur, de montrer au monde qu'elle n'était pas bonne qu'à être mère au foyer... même si ce potentiel resterait gâché.

-Je suis certaine que tu vaux mieux que la vie que tu te réserves. répondit Hermione sans vraiment savoir pourquoi, alors qu'elle ferait sûrement bien mieux de se taire. Elle la regarda un instant. Peut-être était-ce la crainte de ne pas savoir trouver sa place qui la faisait parler ainsi, dans tous les cas, elle posa une nouvelle question à Lexie, intriguée par cette vert et argent, avec laquelle elle se savait des points communs qui ne pouvait que l'inviter à se mettre à sa place. Si tu avais le choix, qu'est-ce que tu aimerais faire ?

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ermione ressentait une sorte de compassion naturelle à l'adresse de son interlocutrice, qu'elle ne s'expliquait pas vraiment par ailleurs (et qu'elle s'épargnerait sans aucun doute si elle connaissait l'allégeance véritable de l'élève de Serpentard), et qui la poussait à vouloir l'encourager vers une voie différente que celle à laquelle elle se destinait, ou plutôt, à laquelle on la destinait. La solidarité féminine, peut-être ? Le choc des cultures était bel et bien prégnant dans son attitude. Elle avait eu la chance de naître à une époque où on ne lui avait pas dicté le rôle qu'elle devait tenir, où on lui dictait l'opportunité de faire son propre choix, difficile, dès lors, d'accepter que d'autres se complaisent dans cette situation, tout simplement parce qu'elles ne s'imaginaient pas d'autres options. Hermione était encore jeune, c'est certain, mais c'était quelque chose que la vie lui avait enseignée : il fallait se donner les moyens d'avoir le choix, quitte à parfois forcer le destin. Il fallait se battre. Surtout quand, comme Lexie, on avait l'intelligence (de ce qu'elle découvrait de son interlocutrice, cette-dernière n'était absolument pas la dernière des idiotes) et l'ambition (elle ne s'imaginait pas seulement un travail, elle s'imaginait un travail d'autorité au ministère de la magie. Il était vraiment dommage d'étouffer de telles ambitions dans l'oeuf). On ne pouvait tout de même pas se résigner au malheur de la sorte. Et en même temps, c'est sûr, ça ne la regardait pas... Pourtant, elle insista tout de même.

-On a toujours le choix. affirma-t-elle d'un ton certain, qui ne tolérait pas vraiment de contre-argument. Certaines sorcières ont eu de grandes carrières. Si ta famille te brime, comme ça, elle ne mérite peut-être pas que tu lui obéisses.

Elle se mêlait vraiment de ce qui ne la regardait pas, c'est une certitude. Elle ne pensait pas à mal, pourtant. Une part d'elle, seulement, ne pouvait s'empêcher de s'identifier à la jeune femme. Oui, elle ne pouvait pas s'en empêcher. Sans vraiment savoir pourquoi. Peut-être parce qu'elle se trouvait à une période de sa vie où elle n'avait plus autant qu'avant prise sur son destin. Cette situation, celle où elle se trouvait actuellement, n'était pas de son fait, elle n'en avait rien décidé, et elle avait également le sentiment que son avenir dépendrait désormais d'autre chose que d'elle-même. Ce n'était pas pour elle qu'elle vivait, dernièrement, c'était pour les autres, ou plutôt pour la mission qu'elle et les autres voyageurs s'étaient confiés. Alors, quand elle se trouvait face à quelqu'un qui pouvait avoir une prise véritable sur sa vie et sincèrement changer le cours des choses, le cours de son existence, elle ne pouvait évidemment pas se taire. La parole se libérait d'elle-même, et elle ne savait l'arrêter.

-Désolée, je me mêle de ce qui ne me regarde pas.

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ermione était vraiment allée trop loin, beaucoup trop loin. Quels que soient les choix de vie de Lexie, il est évident qu'ils ne la regardaient pas le moins du monde. Elle avait le droit de mener sa vie comme elle l'entendait, et peut-être n'était-elle pas aussi brimée et résignée que ce que la rouge et or s'imaginait. Elle jugeait la situation à partir de ses propres opinions, de ses propres amibitions, ce n'était évidemment pas si simple, ce n'était jamais si simple. Et même si Lexie avait besoin de conseils, ce n'était pas d'elle qu'elle devait en recevoir. Elles n'étaient pas amies, elles étaient de simples connaissances qui, incidemment, parlaient ensemble (et c'était là la plus longue conversations qu'elles aient jamais eu, d'ailleurs), alors elle allait se taire. D'autant qu'elle comprenait bien la situation de son interlocutrice. Elle ne voulait pas décevoir sa famille, elle n'avait qu'eux. Hermione le comprenait d'autant mieux qu'elle saisissait d'autant plus l'importance de la famille que la sienne lui manquait terriblement. Vraiment beaucoup. Voilà deux ans qu'ils avaient fait ce voyage temporel, deux ans qu'elle n'avait pas vu ses parents. Et ils lui manquaient atrocement. Leurs attentions, leurs promenades en forêt, le weekend. Merlin, même le décor austère de leur cabinet de dentiste lui manquait beaucoup. Oui, elle comprenait l'attitude de Lexie vis à vis de ses parents, elle n'avait rien à dire. Elle ne devait rien dire.

-Je comprends. dit-elle simplement en hochant doucement la tête. Désolée, je me suis montrée trop curieuse, c'est dans ma nature, j'y peux rien. Elle s'était sentie l'obligation de s'excuser une nouvelle fois, mais elle considéré que c'était nécessaire. Elle s'était montrée complètement intrusive. Mais elle cesserait de donner son opinion sur la question, c'était une époque différente, des moeurs différentes. Qui sait, elle n'aurait peut-être pas eu une attitude différente si elle était née en même temps que Lexie, et que ses parents avaient tracé entièrement son destin. Tes parents sont fiers de toi, je suis sûre.

Elle ne devrait peut-être pas ajouter cela, faire la fierté de ses parents n'était pas forcément une fin en soi. Mais ça avait l'air de compter pour Lexie. Et au final, pour qui cela ne comptait-il pas. Hermione espérait bien que ses parents seraient fiers de ses choix et de ses décisions. Quoique ses choix et ses décisions ne pouvaient pas leur faire grand chose à l'heure actuelle, puisque, à l'heure actuelle, ils n'existaient au final jamais que dans son esprit. Et pour ce qui était de son interlocutrice, peut-être finirait-elle par décider de s'émanciper. Après tout, elle était encore jeune, elles n'étaient pas à un âge où on prenait pleinement en main son destin (quoique Hermione était bien contrainte de s'y appliquer, étant donné les circonstances plus que singulières). Dans tous les cas, tout cela ne la regardait pas. Même si elle se sentait concernée par son interlocutrice. Allez savoir pourquoi, elle s'identifiait un peu à elle.

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ermione ne pouvait pas reprocher à Lexie de lui parler de ses parents, puisque c'était la rouge et or elle-même qui avait amorcé le sujet en affirmant que ceux de la vert et argent seraient fiers de ses choix quant à l'avenir (même s'il n'y avait vraiment pas de quoi à ses yeux, et surtout, qu'elle ne voyait pas quelle fierté Lexie pourrait tirer du fait de n'être qu'une bête et simple femme au foyer, mais c'était son choix). Il n'empêche que s'entendre tout à coup poser une question sur ses parents lui était douloureux. D'ailleurs, elle sentit son teint blanchir alors que, interdite, elle cherchait quoi répondre à son interlocutrice, pas tant parce qu'elle ne savait quoi arguer que parce qu'il était vraiment difficile et délicat pour elle que d'aborder un sujet qu'elle prenait si grand soin d'ignorer, même si ce n'était pas la meilleure des solutions, loin s'en faut. Elle adoptait, concernant sa famille, la politique de l'autruche, elle se blindait et tentait d'y penser le moins possible. Ce n'était pas toujours très simple, non, même, c'était l'inverse de simple, mais elle n'avait pas trouvé de meilleure méthode pour supporter l'absence de Mr et Mrs Granger. C'est que cela faisait bientôt deux ans qu'elle ne les avait pas revus, et qu'elle était de moins en moins certaine de les revoir un jour. Elle voulait encore espérer, mais ce n'était pas une idée à laquelle il fallait à tout prix se raccrocher, si l'on voulait éviter de perdre toute sanité d'esprit. Alors oui, il lui fallut un certain temps pour rassembler ses pensées avant que de reprendre la parole, mais elle ne manquerait pas de mettre cela sur le compte de la distance, ne sachant pas qu'un tel discours ne pouvait absolument pas prendre avec la jeune femme qu'elle avait en face d'elle.

-Oh, tu sais, ma mère travaille, alors à ses yeux, ce serait plutôt une fierté si j'arrivais à trouver du travail, moi aussi.

Hermione ne put s'empêcher de s'imaginer le sermon qu'elle recevrait de la part de sa mère si elle venait lui annoncer qu'elle n'avait pas l'intention d'étudier ou de trouver un emploi mais compter être femme au foyer. Elle piquerait une crise certaine, c'est assuré. Bien sûr, les moeurs étaient bien différentes, là. Mais cela n'empêchait pas, aux yeux de la jeune femme, de ne pas vouloir donner à sa mère le rôle de la bonne ménagère. De toute façon, aucun sorcier ne savait exactement ce qu'était le métier de dentiste, alors si elle précisait que sa mère en était une, elle y croirait sans doute. Hermione, pensant à tout cela, ne put s'empêcher de trembler un peu. C'était doux et douloureux en même temps que de penser à ses parents.

-Excuse... Elle s'excusait décidément beaucoup trop, il faut vraiment croire que cette conversation la troublait. C'est qu'elle me manque un peu.

Beaucoup.

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ermione savait que parler de ses parents avec quelqu'un qu'elle ne connaissait pas, et qui ne la connaissait pas non plus, de surcroit (quoique Lexie en savait bien plus sur elle que ce que la rouge et or pouvait bien penser), c'était s'aventurer sur une pente ce qu'il y a de plus glissante, mais cela avait été finalement plus fort qu'elle. Elle évitait au maximum d'y penser au quotidien, mais cela n'y changeait rien, ses parents lui manquaient, évidemment, et c'était bien la seule chose qui pourrait la retenir de poursuivre ce voyage temporel aussi longtemps qu'il le faudrait pour vaincre l'ennemi avant l'heure. Elle savait qu'ils ne pouvaient techniquement pas s'inquiéter pour elle, mais elle ne pouvait s'empêcher de s'imaginer que le temps futur s'écoulait indépendamment d'elle, dans une réalité alternative où elle aurait disparu depuis presque deux ans. Elle imaginait leur désarroi, leur tristesse... Et la pensée de celle-ci se conjuguait à sa propre tristesse. Elle savait que ce n'était pas une faiblesse qu'elle devait afficher. Elle ne devait en afficher aucune, de crainte de voir cette faiblesse exploitée contre elle. Non pas qu'elle pense devoir se méfier de son interlocutrice (et pourtant...) mais les faits lui avaient bien rapidement révélé qu'on ne pouvait entièrement se fier à personne. Seulement, Lexie avait su appuyer sur la corde sensible très rapidement, et Hermione s'était vue entraîner dans des confidences dont elle aurait sans doute mieux fait de s'exempter. Oui, vraiment, il fallait qu'elle se ressaisisse. D'une manière ou d'un autre, il fallait qu'elle le fasse.

-Et encore, toi tu sais que tu retrouveras l'an prochain. Elle esquissa un léger sourire. Je ne suis ici que depuis deux ans, mais j'ai l'impression d'avoir étudié à Poudlard toute ma vie. Ça va être étrange de s'en aller.

Voilà donc quelle s'avérait être sa parade, si c'en était bel et bien une, elle se rappelait à son rôle, et redevenait mieux que tout à l'heure Prudence Johnson, l'étudiante supposée débarquée tout droit de l'institut de Salem, et qui n'était ici que depuis deux années. Elle s'était rattrapée juste à temps, d'ailleurs, car portée par une conversation si amicale, elle aurait très bien pu commettre une bévue et omettre le fait qu'elle n'était pas supposée fréquenter ces lieux depuis si longtemps que cela. Quoique son propos se tenait tout de même. Il lui semblait vraiment que cela faisait une éternité qu'ils avaient rejoints le Poudlard de cette époque, et elle ne savait trop comment les choses allaient se dérouler à présent qu'ils n'étaient plus loin de partir. La situation allait être radicalement différente, et soulevait bon nombre de questions auxquelles elle n'avait malheureusement pas toutes les réponses, elle en avait bien conscience. Il allait falloir s'organiser, réfléchir posément à la suite. Ces perspectives n'étaient pas rassurantes. Mais comme, pour l'heure, aucune solution ne semblait se profiler les concernant... Et il fallait bien admettre que cela n'avait rien de bien engageant. Oui, Poudlard à bien des titres avait des chances de bien lui manquer. Cette époque, par contre... elle ne le pensait pas.

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ermione savait qu'elle s'aventurait sur un terrain dangereux. Elle n'avait aucun doute concernant son interlocutrice, elle restait sur sa réserve comme elle le ferait avec n'importe quel autre élève, sans véritable réserve à son sujet, quand bien même elle appartenait à la maison des verts et argent, mais elle voyait bien qu'elle ne se confiait que trop, et si les angoisses étaient nombreuses concernant l'année à venir, il n'était pas temps de s'épancher trop longuement dessus sous peine de trop en révéler. Mais c'était ainsi, Lexie lui inspirait (à tort) confiance, et elle en disait plus qu'il ne fallait (elle déchanterait sans doute bien rapidement quand elle apprendrait que c'était cette même Lexie qui avait enrôlé Armyanski parmi les mangemorts, mais elle n'avait pas encore cette information à sa disposition)... Elle restait un minimum prudente, bien sûr, c'était nécessaire au vu de sa condition, mais même dans la prudence, cette vertu dont elle avait fait son nom au sens propre, on peu commettre des impairs, et des irrécupérables. Mais elle réfléchissait peut-être trop. Après tout, Lexie ne semblait pas défiante outre mesure, elle se contenta d'admettre qu'elle concevait qu'il ne devait pas être simple de quitter Poudlard pour affronter de plain-pied la vie active (à plus forte raison quand on ne venait pas de cette époque, mais ça), avant d'ajouter avoir pour sa part un peu de temps devant elle... C'était vrai, mais que le temps passait vite. Ces deux années, depuis les débuts de leur voyage temporel, avaient filé si rapidement que la rouge et or n'avait rien eu le temps de voir filer. Et elle était partagée entre le fait qu'il se soit passé mille fois trop de choses en ce court laps de temps, et l'impression qu'aucun progrès, non aucun, n'avait été fait.

-Tu as sans doute raison.

Le début d'une nouvelle aventure, oui. Et quelle aventure ! Tout allait changer pour eux au sortir de l'école de magie, c'était une certitude. Des aventures, Hermione en avait vécu beaucoup dans sa courte existence. Bien plus qu'on ne devrait en endurer quand on a à peine 17 ans. Mais cette aventure-ci s'avèrerait certainement bien plus corsée que toutes les autres. Il allait falloir tout repenser, tout réorganiser. Tant de choses à faire, encore... Et ils étaient si loin du compte pour le moment. C'en était désespérant. Enfin, qui sait de quoi demain serait fait ? Nul ne pouvait le dire pour l'heure. Le destin était facétieux possible, elle en avait eu une preuve plus que probante.

-Enfin, avant de songer cela, encore faut-il que j'obtienne mes ASPIC. ajouta-t-elle dans un léger sourire.

Sans grande prétention, elle ne se faisait pas vraiment de soucis à ce sujet (elle déplorerait plutôt de ne pas obtenir de "O" dans chaque matière), mais c'était une manière de se rappeler à l'ordre. L'objectif, au départ, n'était pas de raconter sa vie, mais de réviser.

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E

n effet, il n'y avait très objectivement aucune raison pour qu'Hermione n'obtienne pas ses ASPIC. Elle était une élève brillante, et prétendre le contraire serait aller à l'encontre de l'avis de tous ses professeurs et de toutes les notes qu'elle avait pu recevoir au cours de sa scolarité. Elle savait qu'elle était loin d'être idiote, elle savait que, à moins d'un black out total, il était quasiment impossible qu'elle échoue, mais Hermione était une perfectionniste, et sa crainte de l'échec pourrait être qualifiée de quasi maladive. Au point, tout de même, qu'elle était incapable d'envisager de ne pas obtenir son diplôme à cette époque, alors qu'il n'avait jamais qu'une très maigre valeur et qu'il faudrait certainement qu'elle le reproduise dans le futur. Il y avait de bien plus hautes priorités, et la jeune femme n'oubliait jamais de les faire passer au premier plan, mais à certains instants, elle ressentait n'être que l'étudiante qu'elle avait été jusqu'alors, qui pouvait vraiment penser que ses examens de fin d'année étaient question de vie ou de mort, alors qu'elle se retrouvait confrontée à des situations où sa vie pouvait être très concrètement mise en jeu. C'était quelque part réconfortant d'en revenir par instant à ces considérations triviales, presque absurdes. Tout à coup, tout semblait bien plus simple... Mais ça ne durait jamais qu'un temps, la réalité vous rattrapait toujours bien vite.

En guise de réponse, Hermione adressa un fin sourire à l'adresse de Lexie, qui pouvait tenir lieu de remerciement. Elle avait apprécié sa conversation avec la vert et argent. Plus qu'elle ne l'aurait imaginé. La jeune femme était de compagnie agréable, il faut dire, et la rouge et or s'était découvert un certain nombre de points communs avec elle. De quoi faire déchanter Ginny, qui considérait que quiconque portait sur son uniforme le blason des vert et argent était forcément à fuir comme la peste (bon, d'accord, en vérité, c'était elle qui avait raison, pour le coup, mais passons...). Il était grand temps de se reconcentrer, ce n'était même pas plus mal, car Hermione devait éviter autant que possible de parler d'elle-même et elle s'était dors et déjà beaucoup trop dévoilée à son interlocutrice. Elle ne reprit pas la parole, donc, laissant au silence l'opportunité de se trouver une place confortable, dans ces lieux de toute façon dédiées à l'étude, au calme et à la concentration, et elle se plongea plus profondément dans la lecture de l'ouvrage qu'elle avait sous les yeux, convaincue que Lexie faisait de même de son côté, ne se rendant absolument pas compte qu'elle était à quelques claquements de mâchoire seulement de pénétrer dans la gueule du loup. Elle eut quelque difficulté tout d'abord à se concentrer pleinement, c'est que cette conversation ne s'était pas attardée que sur des sujets anodins, certains étaient plutôt sensibles. Mais en définitive, elle retrouva toute son attention.

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