E

lle devait avoir l'air ridicule, à demeurer là, plantée comme un piquet, en bas des escaliers qui menaient au dortoir des filles, à fixer sans bouger le fauteuil près de la cheminée éteinte où Ron était installé, dos à elle, de sorte qu'il ne pouvait pas la voir d'où elle se trouvait (ce qui, pour le coup, l'arrangeait). Fort heureusement pour elle, la salle commune, à cette heure-ci, n'était pas bien occupée, la plupart des élèves, en cette fin d'après midi, avaient décidé de profiter du soleil et de se rendre dans le parc, si bien que personne n'eut à constater ce que laissait voir de l'extérieur le remue-méninges qui se déroulait à l'intérieur. Depuis sa conversation avec Harry, Hermione s'était promis d'aller parler à Ron, mais promettre, parfois, était plus simple qu'agir, et si Hermione ne se défilait pas face au danger, elle s'était sentie pour le coup très démunie face à ce qui n'avait rien d'un réel danger, pourtant.  À chaque fois, elle se trouvait de bonnes excuses : le moment n'était pas approprié, la situation ne s'y prêtait pas, Ron n'était pas seul... mais cette fois, au moment où elle n'avait rien décidé, ni n'avait pensé se jeter à l'eau, alors qu'elle pensait seulement s'installer sur un fauteuil de la salle commune des rouges et or et lire un peu, elle se rendait compte que le moment était propice. Il n'y aurait personne pour les déranger et les interrompre, et Ron était seul. De toute manière, à moins qu'elle ne joue les lâches au point de remonter fissa dans son dortoir, il semblait évidemment que la démarche la plus logique pour elle soit d'aller trouver Ron et de s'installer avec lui. Et si elle faisait ça, elle n'avait aucune excuse pour ne pas lui parler.

Hermione remua doucement la tête, comme pour intimer ses pensées éparses de se ranger en ordre cohérent, prit une grande inspiration, et cessa d'être statique. Quoi ? Ce n'était pas la mort non plus, après tout, pourtant, quelques détails de son attitude laisseraient presque penser qu'elle se rendait à l'abattoir. Sa démarche était raide et n'avait rien de détendu, et son coeur cognait si fort contre sa poitrine que la jeune femme craignait fort de ne pas être la seule à l'entendre. Elle avait la gorge serré, les mains moites. Bref, se jeter à l'eau n'allait pas être une chose simple. Néanmoins, il fallait bien en passer par là. La jeune femme s'installa donc à côté de Ron, lui adressa un sourire qui devait être un peu crispé, et déposa son livre, dont elle reléguait pour le coup la lecture à plus tard sur la table face à eux.

-Salut. Elle regarda Ron quelques secondes beaucoup trop longues, et songea qu'il était encore temps d'annuler, de faire comme si de rien n'était, et d'entamer la conversation comme de rien, comme si ce jour ne différait pas des autres, comme si elle n'avait pas pris une décision qui devait la rendre différente. Mais au final, elle ne se défila pas. Ron, il faut que je te parle de quelque chose.

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I

l est de ces instants où une flagrante vérité couve sous la cendre et ne peut plus faire autrement que de s'en extraire. Hermione et Ron vivaient l'un de ses moments. L'un comme l'autre s'embarrassaient de questionnements inutiles et de dilemmes qui n'avaient pas lieu d'être. Ils étaient amoureux l'un de l'autre, et ça ne datait pas d'hier, ils se l'étaient montré, à leur manière bien à eux, de mille manières qu'ils avaient décidé de désavouer ensuite, comme toutes ces crises de jalousie que l'un et l'autre avaient pu se faire alors qu'il n'y avait normalement pas de raisons. Il fallait se jeter à l'eau, il fallait se le dire, et il n'y avait en vérité aucune raison d'angoisser, puisque tous les deux partageaient les mêmes sentiments. Et ils devaient bien deviner qu'il en était de même pour l'autre, sans quoi ils ne prendraient pas la peine de se jeter à l'eau, ils laisseraient couler pour ne pas gâcher une belle amitié. Ce fut donc au même moment qu'ils voulurent prendre la parole. Hermione sourit, sentant ses joues rosir légèrement, elle aurait bien aimé lui laisser le privilège de commencer. Mais il fallait arrêter de tourner autour du pot. Alors elle commença, prononçant seulement ce qu'elle s'était répété en boucle depuis qu'elle s'était dit qu'elle irait trouver Ron pour lui avouer ce qu'elle ressentait.

-Harry m'a dit qu...

Mais elle n'eut pas le temps de finir sa phrase, Ron avait repris le parole, la prenant complètement de court. Le coeur de la jeune femme manqua un battement. Ce qui était certain, c'est que quel que soit le scenario qu'elle s'était figuré, qu'il veuille d'elle ou qu'il la rejette, elle ne s'était absolument pas imaginé les choses de cette manière, mais la spontanéité mêlée de maladresse de Ron était touchante à entendre. Et rassurante, car au moment d'avouer ses sentiments à Ron, il lui demandait si elle voulait sortir avec lui. C'était presque trop simple. Et en même, c'était une simplicité vraiment agréable. Elle resta un moment sans rien dire, pas parce qu'elle hésitait quant à sa réponse mais parce qu'elle était tout simplement prise de court. Si elle s'était attendue à ça.

-Ron, tu ne sais vraiment pas t'y prendre avec les filles. articula-t-elle alors finalement dans un sourire. En soi, ça pouvait ressembler à un refus, mais c'était tout sauf le cas, bien sûr. Pour ne pas placer le jeune homme face à une interprétation erronée, elle s'avança vers le rouquin et l'embrassa. Sensation étrange, mais pour autant très agréable, c'est qu'elle en avait envie depuis un bon moment déjà. Au moins je n'ai pas trop à m'inquiéter de la concurrence.

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e n'était certes pas de cette manière qu'Hermione s'était attendue à ce que les choses se passent (en même temps, à force d'expérience, la jeune femme devrait bien savoir que les choses ne se déroulaient jamais de la manière que l'on envisageait, cette part de surprise faisait également le sel de l'existence), mais le résultat était, après tout, le plus important. Elle était amoureuse de Ron, depuis si longtemps qu'elle ne savait même plus à quel moment elle s'était rendue compte de ces sentiments qu'elle portait depuis plusieurs années déjà, il venait de lui donner la preuve certes maladroite, mais touchante, qu'il ressentait la même chose, et c'était tout ce qui comptait. Ça, ce moment, la saveur de leur baiser. Ça se suffisait en soi-même. Pour une fois (et autant dire que c'était rare chez elle), elle n'avait pas la moindre envie de réfléchir, elle avait juste envie de savourer le moment, de ranger ses problèmes, ses considérations, ses ennuis, dans un coin de sa tête. Ce n'était pas, après tout, parce qu'elle faisait une pause de temps en temps, parce qu'elle s'autorisait à être heureuse, qu'elle devait se blâmer pour cela. Elle avait tiré les leçons que Harry lui avaient donné sur ce sujet-là, quand il lui avait parlé alors de sa relation encore toute récente avec Ginny. Et elle devait bien reconnaître que, pour le coup, il avait eu raison et elle avait eu tort. Hermione ne put s'empêcher de sourire, amusée, quand Ron se fendit d'un "merci" à son adresse. Comme si elle devait le remercier de vouloir sortir avec lui. Ou bien était-ce une marque de soulagement ? Dans tous les cas, ça n'avait vraiment rien de nécessaire. Mais c'était une nouvelle marque de maladresse qu'Hermione appréciait en tant que telle. Hermione serra sa main dans celle du rouquin et déposa sa tête sur son épaule, c'était à la fois simple, agréable, et étrange en même temps. Parce qu'elle avait imaginé cette situation souvent, mais lui et Ron étaient amis depuis si longtemps qu'il n'était pas simple de voir ainsi évoluer leurs relations. Même si c'était pour le mieux.

-Harry m'a dit que tu lui avais fait une crise de jalousie, c'est vrai ? demanda-t-elle d'un ton léger.

C'était ainsi qu'elle avait voulu aborder les choses, avant que Ron ne la coupe dans son élan, elle ne posait à présent la question que pour l'amuser. Toute ambiguïté était pour de bon levée à ce stade (ou alors il en fallait beaucoup). Hermione ne savait pas comment la suite allait se passer, et comment le trio de meilleurs amis allait s'organiser après ça, mais Hermione avait envie de croire qu'avoir enfin crevé l'abcès ne pourrait que garantir le mieux pour la suite.

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ermione profita de l'étreinte que lui accordait Ron, la savourant à sa juste mesure. C'est fou, comme tout pouvait changer d'une seconde à l'autre, juste en ouvrant son coeur, juste en mettant des mots sur ce que l'on ressent, en avouant ce que l'on admet pas toujours. Il faudrait un certain temps pour que la jeune femme se fasse pleinement à cette situation nouvelle, parce qu'ils avaient acquis des réflexes, en tant qu'amis, l'un comme l'autre, et que ces réflexes devaient être remplacés par d'autres. Ceci dit, ces derniers étaient l'inverse de déplaisants. Et au fond, c'était effectivement très naturel. Hermione se sentait bien dans les bras de celui qui était à présent son petit ami, bien, tout simplement. Tous ses ennuis, toutes ses craintes, tous ses doutes partaient en fumée, et elle n'avait plus peur, elle se sentait, en vérité, plus forte. Elle avait craint de se laisser dépasser par ses sentiments et d'oublier les véritables objectifs. Elle comprenait bien combien cela était parfaitement absurde, à présent. Car ces objectifs en question ne changeait pas, elle se sentait seulement une force supplémentaire pour les accomplir. Hermione sourit doucement quand Ron lui disait qu'ils étaient destinés. Elle n'y aurait peut-être pas mis autant d'emphase, même en amour, la jeune femme demeurait fondamentalement pragmatique. Il n'empêche qu'il y avait forcément du vrai. Tous les deux se tournaient autour l'un et l'autre depuis une véritable éternité. Hermione ne s'était jamais imaginée avec quelqu'un d'autre (sa période avec Krum n'avait aucun rapport avec ce qu'elle vivait avec Ron, elle avait seulement accepté qu'il s'intéresse à elle, et en partie dans l'espoir de faire réagir le rouquin, d'ailleurs - et ça avait fonctionné, visiblement), et elle n'avait pas l'intention de commencer cette histoire à la légère pour la voir s'achever aussi vite. Elle aimait Ron, et c'était une pensée rassurante, en effet, de se dire qu'ils s'étaient tant cherchés parce qu'il fallait qu'ils se trouvent. Et ils n'y avait plus jamais besoin de chercher, à présent. Hermione se contenta de hocher doucement la tête pour approuver le propos de Ron avant d'afficher un sourire franc avant que Ron ne revienne sur leur première rencontre. À l'époque, c'est certain, ils n'auraient jamais pu imaginer que leur relation évoluerait de la sorte. On ne pouvait pas parler, les concernant, de coup de foudre dès le premier regard, mais c'est ce qui faisait l'intérêt de leur relation, ils avaient appris à se connaître et à s'apprivoiser, ils avaient vécu les moments les plus forts de leurs vies ensemble, cela donnait plus de valeur à leur histoire qu'un coup de foudre incontrôlable.

-C'est sûr, tu avais une gigantesque tache sur le nez et tu n'arrêtais pas de parler la bouche pleine, plaisanta-t-elle, et moi j'étais une petite miss-je-sais-tout irritante.

Et comme on ne change jamais entièrement sa nature, elle savait qu'elle n'avait jamais cessé complètement de l'être, une miss-je-sais-tout, et que, par moments, elle devait continuer d'agacer royalement son entourage.

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était étrange, certes, mais loin d'être déplaisant pour autant, que de refaire ainsi l'historique de leur relation, parce qu'on ne pouvait pas franchement dire que leur relation et leurs sentiments avaient été une évidence dès le départ. Et d'ailleurs, le fait que leur relation ait dû se construire sur la durée, qu'il leur ait fallu s'apprivoiser avant que de se plaire, plaisait bien plus à Hermione que si tous les deux avaient été les victimes d'un coup de foudre. Difficile de rester profondément déterministe dans un monde où les prophéties existaient et donnaient donc à la notion de destin toute son ampleur (quoique leur expérience relevait d'une démonstration canonique de ce que pouvait être l'effet papillon). Certes, il était assez agréable de se dire, comme Ron tout à l'heure, qu'ils avaient été destinés l'un à l'autre, mais Hermione appréciait également de se dire que c'était leurs choix et leurs efforts qui les avaient mené à cet instant précis. Les épreuves qu'ils avaient affronté ensemble avaient renforcé leurs sentiments mutuels, et celles à venir feraient sans doute qu'ils demeureraient intacts... Quoi qu'elle n'était pas contre en affronter un peu moins... même si c'était très mal parti. Hermione sourit légèrement en se rappelant l'épisode du troll. Évidemment qu'elle se souvenait, comment oublier ? Ceci dit, si elle pouvait en sourire maintenant, elle n'en avait vraiment pas mené large à ce moment là, et elle devait tout à l'intervention de Harry et Ron, c'était bel et bien ce qui avait scellé leur amitié, mais avec tout ce qu'ils avaient vécu ensuite, Hermione voulait croire que cette amitié se serait tissée à un moment ou à un autre, même s'il aurait fallu, dans tous les cas, passer outre son caractère ô combien agaçant. Elle ne perdit pas son sourire quand le jeune homme s'excusa de larmes versées il y a sept ans de cela. Bah ! Quel intérêt à revenir là-dessus ? Il y avait prescription. Et puis bon, à l'époque, pleurer dans son coin après avoir essuyé une sale remarque de la part de ses camarade, c'était plutôt monnaie courante, il n'était pas le seul.

-Tu sais, le moment de t'excuser a dépassé sa date de péremption depuis un moment, déjà. répliqua-t-elle d'un ton qui voulait signifier, en gros, que ce n'était pas grave du tout, et que s'il fallait qu'ils jettent un regard en arrière sur leurs vies, il était tout à fait inutile de pointer du doigt ce qui avait pu être négatif.

Elle fixa à son tour l'âtre vide de la cheminée, blottie contre celui qui était devenu son petit ami (et qui, l'espérait-elle, le resterait pour longtemps, malheureusement, certaines de ses décisions risquaient fort de déplaire à son interlocuteur), parfois, les mots n'étaient plus nécessaires, la douceur du moment se suffisait à lui-même.

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ermione était touchée par les propos de celui qui était devenu son petit ami. Certes, elle ne voulait pas croire qu'elle verserait encore des larmes à cause de lui, mais ce pouvait être le cas, plus encore à présent qu'ils étaient ensemble, parce que ce qui venait de Ron lui tenait forcément plus à coeur que si cela venait de quelqu'un d'autre. Et Hermione avait en vérité plus d'une fois pleuré à cause de Ron, à l'abri, après l'une de leurs (nombreuses) prises de tête, ou par pure et simple jalousie. Mais c'était des larmes utiles, qui n'avaient rien de douloureuses, elles jonchaient chaque parcours de vie, voilà tout. Mais elle préférait augurer nombre de sourires plutôt que de larmes versées. Il parvenait, en quelques mots, et en la prenait ainsi dans ses bras, à lui insuffler un optimisme qui lui avait grandement manqué ces derniers temps, alors qu'ils se retrouvaient coincés dans une époque hostile à vaincre ce qui parfois ressemblait plus à des chimères qu'à des ennemis réels. Mais ils frappaient tout aussi fort.

À ce sujet, d'ailleurs, Ron ne manqua pas de lui faire une remarque, quant à son sentiment d'avoir être mis à l'écart, et son envie de ne plus l'être. Logique que ça arrive sur le tapis, ce n'était pas la première fois que Ron exprimait sa frustration sur le sujet... Et c'est un fait, ses accusations étaient légitimes. Hermione ne pouvait pas nier que Harry et elle avaient eu tendance à faire bande à part, ces derniers temps. Et ce n'était pas volontaire du tout, ça s'était fait comme ça, voilà tout, elle n'avait pas un seul instant réfléchi, n'avait jamais voulu que le jeune homme se sente exclu. Elle avait eu seulement plus de difficulté à mettre le jeune homme dans la confidence de tous leurs plans, peut-être parce qu'elle craignait qu'il ne partage pas leur investissement. C'était idiot, bien sûr, il le lui prouvait à cet instant... Mais c'était une erreur qu'elle était bien décidée à ne pas reproduire. Ou du moins, sur le moment, elle y était décidée. En ne voyant pas ce qui pourrait, de toute façon, la faire revenir sur cette décision. L'avenir le lui apprendrait bien rapidement.

-On a jamais voulu te maintenir à l'écart, Ron. affirma Hermione en plantant son regard dans celui du rouquin. Ceci dit, elle ne pouvait nier qu'elle avait bel et bien fini par le faire. Je suis désolée que tu te sois senti exclu, c'était vraiment pas mon intention. Elle marqua une pause, avant d'ajouter du ton le plus sincère du monde : Je te promets que ça ne se reproduira plus.

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e ne serait peut-être pas la dernière fois que la complicité qui liait Harry et Hermione serait un sujet de discorde, c'était assez récurrent, au final, parce qu'il est vrai que l'amitié et la loyauté qu'Hermione avait envers Harry était tout de même très forte, et pouvait par instants prêter à confusion, mais ce qu'elle éprouvait pour Ron était au-delà de ça. Et ses maladresses vis à vis de lui, le fait qu'elle l'ait trop souvent maintenu à l'écart, parce qu'elle n'avait pas envie de trahir ses sentiments, parce qu'elle ressentait davantage le besoin de le protéger, parce qu'elle craignait que confronter leurs opinions ne l'éloigne de lui... C'était totalement absurde, bien sûr, surtout quand on savait combien leur lien pouvait être solide, et avait déjà dépassé bien des épreuves, mais c'était totalement inconscient. Et quoi qu'il en soit, si Hermione Granger était une jeune femme était une jeune femme rationnelle et intelligente concernant bien des aspects de sa vie, quand cela avait traits à des sentiments qui transcendaient tout pragmatisme.

Enfin, inutile de s'appesantir sur la question, il avait été important de mettre ces choses là au clair, Hermione s'était excusée, Ron avait accepté ses excuses, inutile d'en rajouter. Elle préférait laisser cela derrière eux, et aller de l'avant, d'autant que ce qui les attendait à présent, malgré le contexte sombre et peu engageant dans lequel ils évoluaient, était plutôt prometteur, tous comptes faits. Non, mieux valait ne plus en parler et se concentrer sur le reste. Hermione apprécia le baiser que lui adressa Ron avant d'approuver d'un signe de tête quand son interlocuteur lui proposa de quitter la salle commune pour aller faire un tour dehors, dans le parc. Elle était totalement pour.

-Allons-y. approuva-t-elle avec un léger sourire aux lèvres.

Pour joindre le geste à la parole, elle tendit sa main à Ron pour qu'il la serre dans la sienne et qu'ils se rendent tous les deux en direction du parc. C'est vrai que ça ne leur ferait pas de mal de profiter du soleil et du beau temps de ce mois de juin. À force d'être constamment concentrée sur ses objectifs, à force d'être uniquement focalisée sur sa lutte contre Jedusor, elle oubliait les choses les plus simples. Les plaisirs quotidiens, qui pourtant étaient nécessaires pour appréhender le reste plus sereinement. C'était ce que Harry avait essayé de lui faire entendre, elle en avait une meilleure compréhension à présent.

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était si simple, si agréable, si naturel. Ils se promenaient tous les deux main dans la main dans les couloirs de Poudlard, et si la situation avait quelque chose d'un rien surnaturel (car Hermione s'était bien longtemps contentée d'imaginer une situation similaire sans penser qu'elle se réaliserait un jour, et encore moins maintenant), la rouge et or prenait plaisir à découvrir que tout cela n'avait rien de sorcier. Elle se sentait parfaitement bien, à sa place, sa main serrée contre celle qui était désormais très officiellement son petit ami. À ses côtés, elle oubliait tout, elle ne pensait plus à ses préoccupations, celles-là même qui lui avaient laissé croire que laisser parler ses sentiments aurait été une mauvaise chose. C'était la première fois qu'elle était si bien, depuis les débuts de leur voyage temporel, ses pensées les plus sombres s'évaporaient. Elle ne les perdait pas de vue, bien sûr, et elle saurait retrouver la mémoire le moment venue, mais en attendant, elle était tout simplement contente de pouvoir profiter de l'instant présent, de cueillir le jour. Comme quoi, tout était possible, vraiment possible. Alors qu'ils marchaient côte à côte, ils ne prononçaient pas le moindre mot. Ce silence aurait pu être gênant, mais cela ne dérangeait pas le moins du monde la rouge et or. Ils n'avaient pas le moins du monde besoin de combler le silence, leurs présences mutuelles y suffisaient bien largement. Hermione, complètement dans l'instant, fut surprise quand Ron trébucha, et manqua de faire de même à son tour. Son sourire s'élargit.

-C'est rien. répondit-elle, même s'il n'était sans doute pas nécessaire de préciser que ce n'était rien, c'était parfaitement évident.

Ils poursuivirent ensuite leur marche jusqu'au parc. Le soleil du mois de juin caressait agréablement sa peau. Elle se sentait envahie d'un sentiment de profond bien-être, qui ne disparut pas quand Ron proposa qu'ils aillent manger ensuite.

-Le contraire m'aurait surpris. le taquina-t-elle.

Après tout, c'était un fait que Ron était un estomac sur pattes, et d'un autre côté, même si elle était davantage d'humeur à flâner dans le parc pour le moment qu'à se remplir le ventre, la faim pointerait bientôt le bout de son nez. Hermione prit une grande inspiration en appréciant la chaleur du soleil. L'été pointait définitivement le bout de son nez.

-Je me demande ce qui va se passer, après. dit-elle sans pour autant qu'il y ait de véritable inquiétude dans sa vie.

Une simple interrogation, car ces considérations allaient forcément devoir être prises sérieusement en compte à un moment ou à un autre. Mais ils pouvaient toujours les observer sous un jour optimiste.

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optimisme de Ron était une véritable bouffée d'air frais pour Hermione qui, ces derniers temps, avait toutes les peines du monde à voir le verre à moitié plein. Une accumulation de désastres n'avaient pas manqué d'atteindre sa joie de vivre, et elle savait bien qu'elle remonte la pente. Sans Ron, elle n'était pas certaine d'y parvenir. Il n'en avait sans doute pas conscience, mais il lui faisait un bien fou, vraiment. En sa compagnie, tout semblait plus simple, tout paraissait réalisable, et elle-même se sentait plus forte, capable de soulever des montagnes et de franchir n'importe quel obstacle. La jeune femme était vraiment heureuse d'avoir osé franchir le pas (enfin, rendons à César ce qui est à César, c'était Ron qui l'avait fait avant elle), car elle se sentait libérée d'un poids immense, légère et enthousiaste comme elle avait le sentiment de ne plus l'avoir été depuis longtemps. Oh, il y avait encore de nombreuses ombres au tableau, mais la situation paraissait tout de même grandement s'améliorer.

Elle ne pouvait pas être complètement d'accord avec Ron. Parce que, forcément, son côté pragmatique avait tendance à prendre le dessus. Ils avaient une mission à accomplir, et pour cela, il fallait s'organiser et planifier, ils ne pouvaient se contenter de jouer les hédonistes, à cueillir les jours en voyant bien comment les choses se passeraient. Bon, c'est vrai, ils l'avaient souvent fait... Mais tout de même. Il avait raison, il ne servait à rien de s'angoisser pour ce dont ils ne savaient rien, autant le faire pour des choses utiles. Et tant qu'ils étaient ensemble, tout iraient pour le mieux. Ce fut cette remarque-ci qui la rassura certainement le plus, et en laquelle elle croyait le plus. En effet, c'était être ensemble qui importait le plus, et qui leur permettrait d'affronter les choses le plus sereinement possible. Elle y répondit par un sourire, en serrant plus fermement sa main dans celle de son petit ami.

-Je n'en sais rien. répondit-elle doucement quand Ron lui demanda ce qu'il en serait de Luna et de Ginny. À mon avis, Ginny quittera Poudlard. Il n'y a rien qui l'y retienne, au contraire.

Elles n'en avaient pas parlé concrètement, toutes les trois, mais Hermione commençait à bien connaître Ginny. Elle ne montrait aucun intérêt pour ses études (la preuve, elle avait déjà redoublé) alors elle préfèrerait rester avec eux, surtout maintenant qu'elle était avec Harry. Pour ce qui était de Luna, par contre... Hermione n'arriverait jamais complètement à la comprendre.

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était si étrange, et en même temps simple et naturel. Hermione éprouvait comme un sentiment de latence, comme si cet instant appartenait à un temps et à un espace hors du réel. Très certainement parce que ce moment, elle l'avait déjà envisagé et voulu de mille manières, songeant parfois qu'il serait normal qu'il s'accomplisse, se trouvant à d'autres bien orgueilleuse d'imaginer que ce puisse être si simple. Et finalement, ça l'était. Il faudrait sans doute un certain temps à Hermione pour intégrer cette nouvelle place que tenait à présent Ron dans sa vie, même si elle la lui réservait déjà depuis une bonne éternité, à vrai dire. Elle apprécia la douceur de ses lèvres contre les siennes. Ça aussi, c'était naturel, et très agréable par ailleurs. Elle ressentait dans ce baiser tous les sentiments que Ron cherchait à lui témoigner (du moins ne pensait-elle pas se tromper sur ce point), et c'était avec une intention réciproque qu'elle lui rendait son baiser. S'il était admis que la magie existait dans ce monde, la rouge et or était tout de même tentée de croire que c'était ici et maintenant, en ce simple geste qui ne nécessitait ni baguettes, ni formule magique, qu'elle s'exprimait le mieux. Et Hermione l'éprouvait dans toute sa force et toute son intensité. C'était un instant qu'elle savourait pleinement.  Elle ne savait pas combien de temps avait duré ce baiser, parce que le temps s'oubliait dans cet instant, en même temps que tout ce qui pouvait lui envahir douloureusement l'esprit. Elle apprécia également cet instant simple et silencieux. Quand leurs fronts posés l'un sur l'autre, elle plongeait son regard dans celui de son petit ami. Elle aurait pu rester là une éternité, pensait-elle, mais l'estomac de Ron les rappela à une réalité plus trivial.

Hermione esquissa un sourire amusé en guise de réponse au rouquin quand il s'excusa du bruit peu discret qui venait d'émaner de son ventre. Après tout, on ne contrôle pas ses fureurs intestines, on peut simplement les apaiser un peu. Hermione n'avait rien contre le fait de se rendre dans la grande salle et de manger un morceau, à vrai dire. Si son estomac à elle était bien plus discret que celui de Ron, il ne tarderait pas à crier famine, lui aussi. Elle avait faim, en effet. Pas à un point insoutenable, non, bien sûr, mais elle ne bouderait pas son assiette. Et elle se moquait bien d'où ils pouvaient bien se trouver, tant qu'ils profitaient de cette occasion d'être ensemble. Elle approuva donc la proposition de Ron, avant de déposer un nouveau baiser sur ses lèvres, puis de reprendre sa main dans la sienne et d'ouvrir la marche. Il était donc grand temps de se remplir l'estomac, et c'était forte de ce sentiment qu'elle se rendait dans la grande salle, où in dîner copieux les attendait sans doute.

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ermione appréhendait si sereinement la situation et cette relation nouvelle avec Ron qu'elle n'avait pas envisagé un seul instant que se pointer main dans la main dans la grande salle, s'exposer de la sorte auprès des autres voyageurs sans autre forme de cérémonie, était peut-être une façon un peu abrupte de leur apprendre la nouvelle. D'un autre côté, devaient-ils s'en cacher ? Hermione ne le pensait pas. Et elle ne le voulait pas davantage, d'ailleurs. Ils devaient déjà dissimuler tant de choses d'eux-mêmes au quotidien, à commencer par leurs propres identités, elle n'avait pas particulièrement envie de cacher sa relation avec le rouquin, d'autant qu'elle comptait bien en profiter autant que possible, pas au détour d'un couloir vide ou d'une porte dérobée. De toute manière, la rumeur circulerait vite, dans Poudlard, plusieurs élèves les avaient vu ensemble, combien de temps jusqu'à ce que le bruit parvienne jusqu'aux oreilles de Harry, Ginny, Luna et Neville ? Mieux valait quand même qu'ils l'apprennent de leurs bouches.

Hermione ne pensait pas que la nouvelle puisse surprendre qui que ce soit, en définitive. Harry était au courant depuis un moment (et ce devait être d'autant plus agaçant pour lui qu'il entendait tour à tour les confidences de ses deux meilleurs amis sans que ni l'un ni l'autre ne saute le pas. Jusqu'à aujourd'hui, où ils l'avaient finalement fait d'un même élan), il serait sûrement ravi de les voir cesser de jouer sans cesse au chat et à la souris (sans compter que ça lui faciliterait peut-être la tâche, à lui, pour assumer sa relation avec Ginny). Ginny aussi, ne serait pas surprise, et sans doute contente (sans se vanter) pour son frère. Neville n'aurait pas grand chose à en redire. Quant à Luna... Elle dirait sans doute un truc au sujet des nargoles ou une autre absurdité totale du genre. Bref, ils n'avaient pas vraiment d'intérêt à pénétrer dans la grande salle et de faire comme si de rien n'était. Techniquement. Mais Hermione était bien placée pour comprendre les appréhensions de son petit ami, elle éprouvait les mêmes. Ils n'avaient pas forcément le besoin et l'envie d'apprécier les commentaires de leurs camarades tout au long du repas, même s'il ne s'agirait jamais que de taquineries.

-On peut attendre pour leur en parler, si tu veux. suggéra-t-elle dans un léger sourire en détachant sa main de celle de Ron pour illustrer son propos.

Ils pouvaient bien remettre à plus tard la "grande annonce" et profiter encore un petit temps de la discrétion de leur relation. Ils avaient attendu à sept ans. Ils n'étaient franchement plus à ça près.

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