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es vacances de Noël n'avaient pas été de tout repos pour le directeur de Poulard, loin de là, et autant l'admettre, elles n'avaient en rien permit à Dippet d'avoir un peu de répit. De contrariétés en contrariétés, il se sentait, en fait, plus exténué que jamais, au point qu'il en était arrivé à la conclusion que cette nouvelle année s'annonçait véritablement sous les pires hospices que l'on puisse imaginer. Nul doute que cette attaque à Pré-au-lard aurait, d'une manière ou d'une autre, des répercussions sur l'école de magie, ça en avait toujours, et à côté de ça, quelle difficulté cela avait été pour lui que de remplacer son professeur de botanique au pied levé ! On ne l'avait vraiment pas ménagé, c'est certain. Et harcelé, demandé, monopolisé de toute part, il en avait pour le moins oublié certaines des obligations qu'il avait voulu remplir "dans l'immédiat". Tenez, il avait mit tellement de temps à aller voir la jeune Gordon, qu'il s'était pourtant juré d'aller voir directement après l'hospitalisation de l'ancienne bibliothécaire de l'époque, que cette conversation en devenait presque caduque. Mais soit, il avait dit qu'il irait la voir, et il avait déjà attendu trop longtemps.

Alors ce jour là, alors qu'il avait réussi à se ménager un peu de temps, il avait décidé de tenir enfin ses bonnes résolutions (que le changement d'année serve tout de même à quelque chose, hein), et d'aller voir l'assistante bibliothécaire à l'heure où il savait qu'elle se retrouverait à son bureau. Toquant à sa porte, elle l'invita en effet à entrer. Sourire charmant aux lèvres, ton aimable, si jeune soit-elle, Dippet n'hésitait pas à considérer Elena comme une personne efficace, et véritablement digne du travail qui lui avait été confié. Il avait presque hésité, d'ailleurs, à lui donner le statut de bibliothécaire, mais il lui avait semblé que c'était encore aller trop vite en besogne. Elle attendrait encore un peu, et ce moment là, elle serait parfaitement prête, et tiendrait son rôle idéalement ? Pourquoi avoir voulu la voir ? Pour des raisons purement pratiques, en définitive, et qui n'inquiétaient pas un travail qu'il estimait au demeurant parfait. Il voulait avoir l'opinion de la jeune femme sur le nouveau bibliothécaire, qui avait à présent eu l'occasion de s'installer à son poste (logiquement)... entre autres...

-Je voulais simplement m'assurer que tout se passait bien pour vous. dit-il après s'être installé sur une chaise, tout en remerciant son interlocutrice. Tout se passe bien avec M. Lynch ?

Autant entrer directement dans le vif du sujet, même s'il y aurait clairement eu sujets plus brûlants à aborder. Mais le fait est que, en aucune manière, le directeur de Poudlard ne mettait en cause l'innocence de la jeune femme quant à ce qui était arrivé à son ancienne supérieure. Il croyait dur comme fer en la thèse du regrettable accident, et celle-ci justifiait amplement qu'il ne cherche pas à regarder au-delà du bout de son nez.

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a réponse que lui fit Elena n'eut rien de bien surprenante, à l'image exacte de ce qu'il avait présumé en lui posant sa question d'usage. À quoi s'attendre d'autre, après tout ? Il était évident qu'il aurait été très mal avisé de sa part que de dire du mal de celui qui était son supérieur devant le supérieur de son supérieur. Elle se devait de dire qu'elle l'appréciait, ou en tous cas, qu'elle allait faire au mieux pour qu'il y ait bonne entente... À moins, bien sûr, que le bibliothécaire fasse vraiment preuve d'une mauvaise attitude à l'égard de son interlocutrice. Au moins, elle avait l'honnêteté d'admettre qu'il lui faudrait encore un peu de temps pour savoir si elle s'entendrait parfaitement avec Daryl. C'est bien. Il appréciait l'intégrité et la franchise. Et il lui semblait que c'était là deux vertus que la jeune femme incarnait à merveille. Évidemment, il ne pouvait pas savoir à quel point il avait tort. Il était certainement la personne la moins bien avisée du monde quand il s'agissait de deviner si quelqu'un était sincère ou non avec lui. Tant mieux pour toute la faune de Poudlard, sans doute, ils étaient tranquilles. Quand Elena lui tendit un faire-part, il le prit entre ses mains avec un léger sourire, une lueur de curiosité dans le regard. Ne découvrant d'abord que l'enveloppe à son nom, il ne devina pas immédiatement qu'il pouvait s'agir d'une invitation au mariage de la jolie blonde. Cela paraissait pourtant logique. Implacablement logique même. Oui, il savait que la jeune femme devait se marier. Avec un autre ancien élève de Poudlard, Caleb Lestrange. Il était toujours assez étrange de voir ses anciens élèves entrer si concrètement dans le monde des adultes. Dippet les avait connu alors qu'ils n'étaient encore hauts que comme trois pommes. Que ça grandissait vite ! Comme ça ne le rajeunissait pas, tout ça. Il avait vécu ce cas de figure tellement de fois qu'il avait l'impression d'avoir au moins une bonne centaine d'années. Il sourit de plus belle en découvrant la présentation du faire-part et son contenu. C'était sans doute stupide et naïf (mais en même temps, il était stupide et naïf), mais il adorait les mariages, ce genre d'événements lui mettaient la larme à l'oeil. Cela le rappelait à son propre mariage, et à sa fin tragique, dont il commençait à peine à se remettre... mais de la pire façon possible... auprès de la pire personne envisageable.

-Merci beaucoup. Je me ferai une joie de venir, si mon emploi du temps le permets. Et le pire, c'est qu'il était sincère. On pouvait lui reprocher de ne rien faire, mais c'était bien loin d'être le cas, il le faisait peut-être mal, mais il le faisait. Et il était également sincère quand il disait qu'il ferait l'effort de venir. Pour lui, aller aux mariages n'était pas une corvée, mais un véritable plaisir. Toutes mes félicitations à vous deux, d'ailleurs.

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l n'existait certainement pas pire juge de la nature humaine qu'Armando Dippet. En fait, dans cette catégorie, il était certainement le pire. D'une naïveté sans précédent. Il ne voyait à son interlocutrice qu'une jeune femme encore toute innocente, d'une douceur rare. Il n'imaginait pas une seule seconde qu'elle le menait en bateau... Comme la plupart des gens qui lui parlaient avec sympathie et non pas avec ce souverain mépris dont il était beaucoup trop familier à son goût. Non, il ne devrait pas se réjouir de ce mariage, en vérité, ni se féliciter de voir ces chers anciens élèves si bien tourner. Il ne devrait pas non plus s'émouvoir en l'observant et en imaginant son tracas, sa crainte, qui se transformerait bientôt en vrai bonheur. Il songeait au stress qu'il avait lui-même éprouvé lors de son mariage, il ne pouvait que comprendre. Il allait d'ailleurs adresser quelques mots rassurants à son interlocutrice, mais ce fut ce moment que choisit une toute jeune élève pour les interrompre.

Sans mot dire, se donnant par la même l'occasion d'observer la jeune femme dans l'exercice de ses fonctions et de constater son efficacité, Slughorn se contenta de regarder la jeune élève interragir avec l'assistante bibliothécaire. S'il n'avait jamais douté de ses compétences, et qu'il avait eu plus d'un écho positif au sujet de l'ancienne bleue et bronze, il admettait que c'était dans ce genre de situations que l'on pouvait véritablement juger des qualités de ses employés. À un moment où quasiment tous les membres de son personnel rivalisaient d'imagination pour lui mener la vie dur et le faire douter de leur nomination. Elena, dans ce petit exercice du quotidien, se débrouillait définitivement très bien.

-Vous êtes vraiment à la hauteur de votre poste. Vous irez loin, Miss Gordon, je le pressens.

Sur ce point, il était certain qu'il ne se trompait pas. Mais si elle irait loin, ce ne serait peut-être pas dans le sens qu'il imaginait. Certainement pas, même.

-Nous parlions du stress que vous ressentiez à l'approche de votre mariage. Il planta son regard dans le sien. Il ne faut pas vous inquiéter, je suis sûr que tout se passera bien. D'autant que je ne doute pas de votre sens aigu de l'organisation.

Comme si Elena avait véritablement besoin des conseils ou des encouragements d'Armando Dippet. N'importe qui en ce bas monde pouvait bien s'en dispenser... faisait mieux de s'en dispenser, même. C'est vrai, le directeur de Poudlard ne manquait pas de bonnes intentions, et s'il prononçait ces mots, c'était bel et bien pour rassurer la jeune femme qui serait, il en était convaincu, la plus parfaite des épouses pour son mari. Et peut-être également, le jour venu, une mère parfaite. L'épisode d'il y a quelques instants en était à ses yeux une preuve plutôt probante.

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l y avait quantité de choses pour lesquelles Armando Dippet n'était pas doué, c'est le moins que l'on puisse dire, et ils sont nombreux, ceux qui pourraient le confirmer (à savoir absolument tous les élèves de l'école et les membres du corps enseignant de Poudlard). Et parmi ses nombreuses tares : son incapacité totale à saisir l'ironie, ou à cerner ses interlocuteurs. À aucun moment, il ne réalisait qu'on le menait en bateau lorsque cela était le cas, il était entouré d'hypocrites, de personnes qui le brossaient dans le sens du poil pour obtenir ses faveurs, et ne se rendait compte de rien, en bon aveugle qu'il était. Évidemment, c'est ce qui finirait irrémédiablement par le perdre. Car c'était bel et bien un mensonge de grande ampleur, une machination dont il ne saurait voir les ficelles et comprendre les rouages, qui allait avoir raison de lui. Définitivement raison de lui. Mais il était, comme toujours, loin de ce genre de considérations, loin de ce qui aurait dû le préoccuper. Et quand il parlait à la jeune femme en face de lui, il ne voyait qu'une demoiselle charmante et très intelligente, à l'avenir on ne peut plus prometteur, qui faisait preuve d'une grande sagesse pour son âge et d'un sens du contact qui ne pourrait que lui servir pour gravir plus tard les échelons et s'imposer comme une femme du monde. Et non, quand elle flattait ses professeurs en disant qu'elle en était arrivée là grâce à leur enseignement, il ne saisissait pas un seul instant ce qu'il pouvait y avoir d'hypocrisie dans son propos. Certes, elle était excellente menteuse et très bonne flatteuse, mais quand bien même. N'importe qui entendant une réflexion telle que celle-ci pouvait y supposer de la flatterie. Mais le directeur de Poudlard n'était pas n'importe qui. Il était moins que n'importe qui. Moins que rien.

-Vos nouveaux collègues doivent être enchantés de la considération que vous leur portez. D'autant qu'ils étaient peu nombreux, les élèves qui estimaient leurs professeurs et avaient de la considération pour leur travail. Il ne croyait pas si bien penser, bien sûr, mais ne gâchons pas ses illusions, n'est-ce pas ? Vous n'éprouvez de difficultés avec aucun d'entre eux ? L'intégration n'a pas été trop difficile ?

Il lui avait demandé si le courant passait avec le nouveau bibliothécaire, n'avait pas encore abordé le sujet de ses collègues. Oui, il avait la ferme intention de lui tenir la jambe. Si elle espérait pouvoir se débarrasser de lui, il allait falloir qu'elle joue serré. La pauvre ! Lui, n'avait rien de mieux à faire. Et si cela pouvait l'aiguiller sur le comportement de ses employés les plus contestables (sans viser personne, hein). Avoir le point de vue d'Elena pourrait le servir à lui, du moins le pensait-il.

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ippet n’était ni stratège, ni calculateur, il n’avait rien d’un prince de Machiavel, pas même amateur, il ne fallait pas bien longtemps pour réaliser cette évidence, et pourtant, pourtant, sous couvert de tout simplement se soucier de l’intégration de son interlocutrice auprès de l’équipe qui encadrait son école de sorcellerie, une part de lui, cette part qui était peut-être un brin vicieuse, qui sait (difficile à concevoir, j’en ai bien conscience), avait espéré pouvoir non seulement en apprendre un peu plus concernant certains membres du corps enseignants, mais également pouvoir voir ses griefs à l’encontre de certains d’entre eux étaient confortés. Il allait vraiment falloir qu’il fasse un sérieux tri entre les différents membres du personnel de Poudlard, une fois la rentrée venue. Pour le moment, ce n’était clairement pas possible, il voyait bien quelles difficultés le simple fait de renvoyer Herbert Beery et le faire remplacer lui avait causé, il ne pouvait se permettre des situations similaires au courant d’une seule année scolaire. Mais il s’était déjà engagé mentalement à refondre l’équipe sitôt la fin de l’année arrivée, sitôt les vacances scolaires venues. On lui reprochait souvent d’être à l’origine de la dégradation de son école et des horreurs qui étaient arrivées à certains de ses élèves, il ne tenait pas à ce que cela se reproduise et pour ce faire, il fallait qu’il sache mieux s’entourer. Qui de mieux qu’une jeune première, efficace et intelligente, qui par ailleurs avait connu tous ces professeurs en tant qu’élève il y a peu, pour faire un choix dans son «élagage» ? À vrai dire non, elle n’était pas la mieux placé, et si le directeur avait enfin su aiguiser son sens du jugement, qui décidément lui faisait ignoblement défaut, il l’aurait bien compris... À la place, il était, sans être prêt, tout de même, à remettre le sort de certains de ses employés entre les mains de la jeune femme, prêt à lui accorder suffisamment de confiance pour que son avis compte. Sombre idiot.

Dippet prit plaisir à entendre les noms des personnes qu’elle pointa du doigt. Il n’aurait manqué que Mathews pour qu’il soit aux anges. Mathews, Sparkley et Potter, sa trinité diabolique. Toutes les trois diablement efficaces et intelligentes, mais qui hésitaient rarement à lui manquer de respect (surtout dans le cas des deux premières) et à remettre en cause une autorité qu’il peinait déjà à faire exister). Entendre qu’elles avaient réservé un si mauvais accueil à Elena le ravissait. Non pas parce que selon lui, la demoiselle méritait d’être mal accueillie, bien au contraire, mais parce qu’elle apportait de l’eau à son moulin. Bien sûr, ce ne serait pas suffisant pour les accuser de qui que ce soit, mais à leur encontre, il prenait véritablement tout ce que l’on voulait bien lui accorder.

-Oh vraiment ? fit-il d’un ton qui n’était, en vérité, pas franchement surpris, mais qui dissimulait tout de même une satisfaction qui aurait été malvenue. Comment agissent-elles en votre présence ? Pour que tout ça ait de la valeur, il lui fallait plus de détails. Ne vous en faites pas, je veillerai à leur parler.

Comme si cela changerait quelque chose. Lui-même n’y croyait pas.

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