Il est vrai que beaucoup de gens auraient fait miroité les atouts de ce projet avant de laisser Herbert faire le sale boulot. Imaginez que Zelda se soit intéressé au spectacle. Le pauvre Herbert en aurait bavé pendant des mois. Et je ne parle même pas de Morticia. Elle n'aurait pas arrêté de le remettre plus bas que terre par pur plaisir de le voir désespéré. Après tout cela, Serya l'aurait relevé et élevé aussi haut qu'elle l'aurait put. Elle en aurait une véritable mission. Mais... En fait... Elle en faisait une véritable mission. Elle s'était déjà mis en tête d'aider Herbert Beery à aller au bout de son rêve. Et elle était ravie qu'il la laisse l'accompagner dans son aventure. Oui, c'était bel et bien de la fierté qu'elle éprouvait en cet instant. Herbert semblait lui faire confiance et il devait bien être le seul. Serya était tout à fait consciente de ce qui se disait derrière son dos ou parfois ouvertement. Elle ne disait rien parce qu'elle refusait de fâcher les gens. Mais ça lui faisait mal. Elle essayait toujours de faire de son mieux. Alors quand on lui répondait qu'elle était la pire des imbéciles, c'était toujours un pincement au cœur.

-Dans ce cas, je vais arranger un rendez-vous avec le directeur, et je vous tiens au courant. Cela vous convient-il?

Il n'y avait aucune raison que cela ne lui convienne pas. Qu'il prenne le rendez-vous permettait à Herbert de s'affirmer un peu et de s'imposer comme créateur du projet. Il la tiendrait au courant et elle n'aurait plus qu'à "appuyer le dossier". C'était un bon compromis pour elle.

-Et bien faisons comme cela alors. Et détendez-vous, il n'y a aucune raison qu'il nous refuse ce petit projet artistique. Il pourrait même se prendre au jeu à la longue.

Serya afficha un petit sourire amusé avant de remarquer une certaine hésitation chez son collègue.

-On pourrait se tutoyer, tu ne crois pas?

Cette fois c'était Herbert qui avait trouvé les mots justes. Aucun adulte de cette école ne lui avait jamais proposé et elle-même ne l'avait jamais proposé à aucun de ces adultes. Ils ne la prenaient pas au sérieux et elle ne les estimaient pas assez pour vouloir se lier avec eux. Désormais, elle ressemblait à une petite fille de dix ans, les yeux pleins d'étoiles et n'osant répondre tout de suite de peur de se réveiller d'un rêve bien trop doux pour être autre chose que le fruit de son imagination. Mais elle voulait parler. Elle voulait dire au monde entier qu'elle était mieux que ce qu'il pensait et qu'Herbert Beery s'en était rendu compte.

-Vous... Enfin... Tu es sérieux?

Bien sûr qu'il devait l'être. Autrement il n'aurait jamais dit cela. Mais c'était tellement difficile à croire pour elle qu'elle préférait vérifier quand même...

-Alors... Amis?

Serya avait juste tendu la main vers lui. Elle n'avait pas osé ajouter quoi que ce soit de peur de trop en dire. Mais pourtant, elle était émue et une barrière de cils retenait avec peine des larmes de joies qui se penchaient au bord de ses yeux.

-Et bien faisons comme cela alors. Et détendez-vous, il n'y a aucune raison qu'il nous refuse ce petit projet artistique. Il pourrait même se prendre au jeu à la longue.

Elle devait avoir raison. Elle avait plus de chances d'avoir raison que lui, d'ailleurs. Elle connaissait le directeur de Poudlard depuis bien plus longtemps que lui, il aurait été un tort que de ne pas accorder de crédit à ses paroles. Herbert pensait vraiment qu'avoir Serya pour lui soutenir lui serait favorable. Parce qu'elle connaissait l'école et ses élèves depuis plus longtemps que lui d'une part, parce qu'elle devait être l'un des rares adultes de l'école à ne jamais s'être mise Dippet à dos d'autre part. Et enfin, parce qu'elle était d'une gentillesse remarquable, et que sa sympathie était communicative. Il était agréable de se retrouver ainsi soudain en compagnie de quelqu'un qui vous soit agréable, après tant de jours d'hostilité. Avec l'arrivée de Serya dans sa vie venait également la perspective de ne plus être seul, enfin. Et cette perspective le réjouissait grandement. Oui, c'était elle qui avait raison. Dippet n'allait pas le manger, après tout. Allez savoir pourquoi il nourrissait tant d'angoisse à l'idée de lui faire part de ses projets. Il devait être l'un des seuls de toute l'école à penser que le directeur représentait dignement l'autorité. Non, il fallait qu'il soit conscient, et si le professeur de soin aux créatures magiques était dans les bonnes grâces de Mr le dirlo, ce serait encore mieux.

Il était peut-être trop tôt pour parler d'amitié entre eux, mais Herbert comprit tout de même rapidement que celle-ci ne tarderait pas à se souder. Serya semblait avoir attendu avec impatience de se trouver un collègue qui ne soit pas complètement névrosé et psychotique, et le professeur de botanique, dans quelques semaines, aurait sûrement réagi comme elle si, soudainement, quelqu'un lui avait proposé qu'ils se tutoient. Suggestion naturel pour beaucoup, mais qui dans ce monde absurde était bien loin de l'être.

-Vous... Enfin... Tu es sérieux?
-Très sérieux. répliqua-t-il dans un sourire.

S'ils se serraient les coudes, cette année pourrait finalement ne pas être forcément cauchemardesque. Peut-être même s'avèrerait-elle distrayante. Il avait maintenant avec lui une acolyte prometteuse. Oui, Herbert allait rapidement en besogne, il ne savait rien de son interlocutrice, et il s'imaginait déjà qu'ils allaient devenir les meilleurs amis du monde. Il le pensait. C'est pour ça qu'il n'hésita pas à répondre quand elle ajouta, lui tendant sa main pour qu'il la serre.

-Alors... Amis?
-Amis. répondit-il en serrant cordialement cette main.

La situation semblait à la limite presque trop solennelle, mais mettez vous à leur place et vous comprendrez leur attitude, se prodiguer mutuellement du soutien leur ferait un bien fou à tous les deux.

-Que dirais-tu d'aller prendre un verre? ça nous permettrait de faire plus ample connaissance et de discuter de notre projet.

-Cela sera avec grand plaisir. Laissez-moi deux minutes le temps de finir avec Géraldine et je suis à vous.

Géraldine? Quelle Gér... Ah oui! Herbert, prit dans ses projets et dans sa conversation, en avait oublié la présence du crabe de feu juste à côté. Tant mieux, d'un côté, il n'était pas franchement friand de ces bestioles, même s'il s'abstiendrait bien d'en dire du mal devant Serya. Les passions des uns et des autres étaient des choses insondables. On s'était beaucoup moqué de son goût pour le théâtre et la musique, les gens faisaient de même avec Serya et sa fascination pour les animaux. L'un et l'autre étaient, en quelque sorte des artistes incompris, à la recherche de compréhension et d'acceptation Alors même s'ils ne se comprendraient pas forcément sur tous les points, ils devaient s'entendre. Ils étaient obligés de s'entendre. Herbert regarda, à distance, c'est vrai, mais un sourire au coin des lèvres, Serya en train de s'occuper de la fameuse Géraldine, elle semblait vraiment faire ce à quoi elle était heureuse. Herbert se promit de s'intéresser davantage à ce qui l'intéressait. Si elle-même pouvait faire l'effort de partager sa passion, cela méritait bien qu'il fasse de même de son côté.
... Cela dit, il aurait moins de mal à partager ses passions quand celles-ci s'orienteraient vers des bestioles un tantinet plus mignonnes et un tantinet moins dangereuses.

-Cela n'a pas de rapport avec notre projet mais pensez-vous que je puisse vous emprunter deux ou trois feuilles de différentes de vos plantes de temps à autres? Certains de mes chéris adorent jouer les difficiles et certaines plantes sont particulièrement compliqués à obtenir.

Herbert sourit. À ce stade de leur conversation, il aurait été bien malvenu de sa part que de refuser ce genre de faveurs à sa collègue. Surtout qu'il n'y voyait pas d'inconvénients. Bien sûr, il ne fallait pas que toutes les réserves des serres soient épuisées par cet intermédiaire, et il ne pourrait pas céder certaines de ses précieuses plantes. Mais d'autres poussaient en surabondance, telles de mauvaises herbes. Ce ne serait pas plus mal si l'on pouvait l'en débarrasser.

-Bien sûr, aucun soucis. Ça va dépendre des plantes dont tu as besoin, mais sinon, pas de problèmes. répondit-il dans un clin d'oeil. Oh, et on a dit qu'on se tutoyait, non?

Hebert n'en tenait pas rigueur à Serya, lui-même avait failli repasser au vouvoiement plusieurs fois, c'était un réflexe à prendre. Mais il lui semblait important d'abolir cette frontière langagière, si ils voulaient vraiment être les amis qu'ils s'étaient promis d'être. Faisant un pas hors de la salle de classe vide, il ajouta, se tournant dans la direction de la jeune femme.

-Si vous voulez, on peut passer directement aux serres avant d'aller aux Trois-balais? C'est sur le chemin, après tout.

Et Herbert n'était pas contre le fait de prolonger un peu le temps qu'il passait en compagnie de sa nouvelle amie.

Quand elle s'occupait des ses animaux, Serya était toujours d'une douceur maternelle sans faille. En donnant à manger à Géraldine, elle lui murmurait des mots pleins de tendresse que la pauvre bestiole ne devait pas comprendre... Mais ça, elle s'en moquait. C'était un peu comme ces gens qui parlent à leurs chiens. Herbert semblait touché mais tout de même pas en confiance. Serya pouvait le comprendre. Il s'agissait tout de même d'un crabe de feu. Petit, d'accord, mais quand même. Et jamais elle ne lui aurait reproché sa distance. Surtout qu'elle ne concernait que l'animal.

-Cela n'a pas de rapport avec notre projet mais pensez-vous que je puisse vous emprunter deux ou trois feuilles de différentes de vos plantes de temps à autres? Certains de mes chéris adorent jouer les difficiles et certaines plantes sont particulièrement compliqués à obtenir.

Et oui, c'était compliqué. Mais comme c'était pour ses bébés, Serya y faisait attention. Mais d'un autre côté, si Herbert Berry pouvait lui donner un petit coup de main, elle ne dirait pas non. Et puis, la plupart du temps, il s'agissait de plante étant des nuisances pour les bons jardins. Elle ne s'était donc pas inquiété de la réponse de son collègue... enfin pas trop.

-Bien sûr, aucun soucis. Ça va dépendre des plantes dont tu as besoin, mais sinon, pas de problèmes.

Ces douces paroles et un petit clin d’œil avaient fini de rassurer Serya. C'était un bonne nouvelle en fait. Lui éviter d'aller chercher ses plantes dans les jardins allait lui laisser plus de temps libre.

-Oh, et on a dit qu'on se tutoyait, non?

Et oui, ils l'avaient dit. Le professeur de soins aux créatures magique l'avait totalement oublié. Elle n'avait pas du tout oublié l'amitié naissante qu'elle avait fini par trouvé, mais plutôt l'habitude à prendre avec. Les changements c'était pas trop son truc habituellement et il allait falloir un petit temps d'adaptation, mais elle y arriverait. Et puis cela ne l'empêcherait pas de son montrer des plus amicale avec Herbert.

-Oui, c'est vrai, désolée... En général je cherche plutôt des plants de pissenlits, de chardons, d'orties et en soi, ce n'est pas insurmontable. J'ai un peu plus de mal avec la Chromolaena odorata, la Clidemia hirta, la Rosa rugosa, la Miconia calvescens ou la Ardisia elliptica. Cela doit aussi venir du fait que je manque d'expérience avec les plantes. Peut-être pourrais-tu m'aider un peu?

Elle avait appris les noms pour des questions de facilité. Mais elle savait aussi qu'Herbert n'y verrait pas de complications et peut-être serait-il heureux de voir qu'il n'était pas le seul à connaître certaines plantes. Bien entendu, elle n'aurait pas été incapable de nommer n'importe quelle plante mais au moins, celles-là, elle les connaissaient.

-Si vous voulez, on peut passer directement aux serres avant d'aller aux Trois-balais? C'est sur le chemin, après tout.

En effet, pourquoi pas? Pour une fois qu'elle s'entendait avec un adulte, Serya serait resté en sa compagnie le plus longtemps possible. L'idée était bonne, mais ce n'était pas la seule chose que Serya avait remarqué.

-Oui, c'est une très bonne idée... Et il semble que je ne sois pas la seule à avoir du mal avec le tutoiement.

Elle avait pris un petit air malicieux et avait légèrement plissé les yeux pour volontairement se faire plus gamine qu'elle ne l'était. Et oui, passer du "tu" au "vous" ce n'est pas si simple tout de même. Surtout pour des adultes ayant l'habitude de l'un plus que de l'autre. Au moins, leur relation allait leur permettre d'y remédier.

-Oui, c'est vrai, désolée...

Dans un haussement d'épaules, Herbert lui fit comprendre que ce n'était pas bien grave. En même temps, il aurait été malvenu de lui reprocher une erreur qu'il allait faire lui-même d'ici quelques secondes. Il était toujours un peu difficile de faire la transition entre tutoiement et vouvoiement. Il en était conscient, et il se promit de ne plus relever ce genre d'erreurs que si elles se faisaient trop nombreuses.

-En général je cherche plutôt des plants de pissenlits, de chardons, d'orties et en soi, ce n'est pas insurmontable. J'ai un peu plus de mal avec la Chromolaena odorata, la Clidemia hirta, la Rosa rugosa, la Miconia calvescens ou la Ardisia elliptica. Cela doit aussi venir du fait que je manque d'expérience avec les plantes. Peut-être pourrais-tu m'aider un peu?

Il était très agréable d'entendre sa collègue et amie parler de ces plantes qui étaient parfaitement dans son domaine de compétences, il n'aurait aucun mal à satisfaire à sa requête. Si l'Herbologie n'avait pas été sa vocation, c'était malgré tout l'un de ses grands domaines de prédilection, et il s'en sortait particulièrement bien, ses connaissances était nombreux. En matière de plantes magiques, il était une vraie encyclopédie. Aucune de ces plantes ne lui étaient inconnues, et elles pouvaient toutes être données à Serya sans le moindre problème, d'autant que certaines d'entre elles étaient même des mauvaises herbes dont il ne serait que trop heureux de se débarrasser.

-Je serai ravi de t'aider.

Il le pensait effectivement, elle allait lui rendre un sacré service en allant voir le directeur avec lui, et en l'aidant à monter son club de théâtre, il était normal qu'il lui rende la pareille. Et puis, vraiment, ce n'était trois fois rien.

-Oui, c'est une très bonne idée... Et il semble que je ne sois pas la seule à avoir du mal avec le tutoiement.
-Désolé. répliqua-t-il dans un sourire. On va finir par y arriver.

Ils se mirent en route, en direction des serres, lieu qui était devenu à présent l'antre d'Herbert. Une fois à l'intérieur, il fit à l'adresse de sa nouvelle amie, dans un sourire :

-Attends cinq minutes, je te cherche tout ce dont tu as besoin. Ne te gênes pas, fais comme chez toi. Évite juste de trop t'approcher du snargalouf, je ne l'ai pas nourri aujourd'hui.

-Je ne bouge pas. Et ne t'inquiètes pas, je ne tiens pas trop à m'approcher de cette plante.

Herbert répondit à cette remarque par un sourire. Cette réflexion était la preuve rassurante que son amie était parfaitement saine d'esprit. N'importe qui d'un tant soit peu sensé ne nourrissait pas de passion plus que douteuse à l'égard des plantes carnivores. Herbert lui-même n'en était pas franchement fan. Il se serait bien épargné d'avoir à supporter la présence de tels végétaux, et surtout d'avoir à les nourrir, entretenir et nettoyer... Mais bon, ça faisait partie du métier, et tout métier avait ses désavantages, même celui qu'il cherchait à tous prix à obtenir un jour (les comédiens étaient des experts en galère quotidiennes). Herb' supposait que certaines créatures parmi les plus effrayantes et répugnantes ne devait pas forcément plaire à Serya (quoique... elle avait baptisé un crabe de feu Géraldine, à partir de là, on pouvait s'attendre à tout). Alors que le professeur de botanique s'appliquait à récupérer toutes les plantes dont son amie pourrait avoir besoin, cette-dernière poursuivait sa conversation.

-Tu connais vraiment toutes tes plantes pieds par pieds ou simplement par espèce?

Herbert ne fut pas tout de suite certain de comprendre tout de suite sa question? Et quand il fut certain de l'avoir comprit, il regretta quelque peu de n'être de toute évidence pas autant investi dans son métier que l'étais sa collègue dans le sien. Herbert imaginait sans mal sa nouvelle amie avoir donné un petit nom à toutes les créatures dont elle s'occupait, et les reconnaître, les distinguer les unes des autres, même si c'étaient à des caractéristiques minimes (pour Herbert, tous les crabes de feu se ressemblaient, mais il imaginait bien qu'elle avait donné à chacun de ses "petits protégés" un petit nom affectueux différent).

-C'est déjà un miracle que je retienne toutes les espèces de plantes, j'ai une mémoire d'escargot... C'est pas le plus pratique, d'ailleurs, quand tu dois apprendre un texte de plusieurs pages.

C'était la vérité vraie. Quand venait l'heure de monter sur scène, Herbert maîtrisait son texte, oui, mais il lui fallait toujours beaucoup plus de temps que le commun des mortels pour assimiler le tout. Des heures et des heures de cogitation, à tourner en rond, c'était presque pathétique. Alors oui, effectivement, qu'il sache quelle plante correspondait à quelle espèce, c'était l'une de ses plus grandes victoires.

-J'abuse peut-être mais est-il possible que je prenne mon fléreur avec nous? Cela fait quelques temps qu'elle n'est pas sortie du château et elle ne t'embêtera pas, promis.

Oh... un fléreur... bah... il haussa les épaules. Visiblement, si l'on voulait profiter de la compagnie de Serya, il fallait accepter qu'elle soit toujours accompagnée d'une foule d'animaux magiques. Bah... à la limite, Herbert avait plus de mal avec les crabes de feu qu'avec les fléreurs. Les fléreurs, au moins, c'était assez... mignon... (de loin, à contrejour).

-Moi ça ne me dérange pas. Je ne sais pas si les animaux sont autorisés aux Trois-balais, mais au pire, on trouvera bien un autre endroit. À la tête de sanglier, par exemple, ça m'étonnerait fort qu'ils interdisent la présence de créatures.

En prononçant ces mots, il récupéra la dernière plante qui pourrait servir à Serya, et lui tendit le plein sachets de verdure.

-Et voilà pour toi! lui fit-il dans un sourire. Alors, il a un nom, ton fléreur?

-Tu connais vraiment toutes tes plantes pieds par pieds ou simplement par espèce?

C'était une question comme une autre mais pour Serya c'était intéressant. Apprendre le nom de toutes ces plantes aurait été presque insurmontable pour elle. En plus elle se ressemblaient toutes. Les seules qu'elle pouvait identifier à peu près étaient celles que mangeaient ses animaux. Alors quand il lui répondit, elle se dit que finalement, elle n'était pas si nulle.

-C'est déjà un miracle que je retienne toutes les espèces de plantes, j'ai une mémoire d'escargot... C'est pas le plus pratique, d'ailleurs, quand tu dois apprendre un texte de plusieurs pages.

Serya émit un léger rire qu'elle réprima en baissant la tête. Toujours le mot pour rire ce jeune homme. Mais sa réponse devait surtout être avec une touche de culpabilité. Elle n'aurait pas su dire pourquoi mais le fait est qu'elle estimait qu'il ne devait pas en ressentir avec elle. Surtout lorsqu'il s'agissait de mémoire.

-Oui, je comprends. Tu sais, j'ai moi-même quelques difficultés à apprendre des textes. Heureusement pour moi, cela ne m'est pas souvent indispensable.

Serya maîtrisait toujours ses sujets, mais plus par expérience que par apprentissage sérieux avant les cours. Elle avait appris ce qu'il fallait à l'école. Maintenant, elle avait ses chéris et les connaissaient assez pour parler d'eux avec ses élèves. Surtout qu'ils le lui rendaient bien. Herbert avait peut-être un peu plus de mal mais il savait faire les choses, et bien. Une qualité dans ce métier.

-J'abuse peut-être mais est-il possible que je prenne mon fléreur avec nous? Cela fait quelques temps qu'elle n'est pas sortie du château et elle ne t'embêtera pas, promis.

Elle avait un peu peur de la réaction de son collègue. Même si il n'avait rien dit, il n'avait pas l'air tout à fait à l'aise devant Géraldine. Du coup, elle lui avait une promesse qu'elle comptait bien tenir. Et puis l'animal dont il était question n'avait rien d'un animal sauvage ou dangereux. Loin de là. Mais elle fut bien vite rassurée.

-Moi ça ne me dérange pas. Je ne sais pas si les animaux sont autorisés aux Trois-balais, mais au pire, on trouvera bien un autre endroit. À la tête de sanglier, par exemple, ça m'étonnerait fort qu'ils interdisent la présence de créatures.

Elle souffla légèrement en entendant qu'il n'avait rien contre et lui répondit dans un sourire soulagé.

-Oh, nous n'aurons pas besoin de chercher à aller ailleurs. Dans les bâtiments elle reste dans mes bras ou sur mes genoux et... Disons qu'ils ont l'habitude là-bas.

Herbert était revenu vers elle et lui tendait un sachet plein des futurs repas de ses bébés. Son sourire s'illumina et elle accueilli son cadeau avec un grand plaisir non dissimulé.

-Et voilà pour toi! Alors, il a un nom, ton fléreur?

Si il avait un nom? Bien entendu. Jamais un animal de Serya était resté anonyme. Oh, bien entendu ils avaient souvent des noms stupides voire vraiment inattendus. Mais ils avaient tous un petit nom. Mais jamais rien de méchant. Du moins pas volontairement.

-Merci! Et, oui. Elle s'appelle Chantal. Je suis sûre qu'elle va te plaire. Elle est adorable.

-Oui, je comprends. Tu sais, j'ai moi-même quelques difficultés à apprendre des textes. Heureusement pour moi, cela ne m'est pas souvent indispensable.

Herbert répondit à cette remarque par un léger sourire à la remarque de Serya, avec qui il était heureux de se découvre des points communs, même si c'était pour qu'ils se découvrent tous deux des défauts quand il s'agissait de retenir un texte un peu trop long. À la différence, effectivement, que dans le métier que le professeur d'herbologie aurait voulu exercer, il n'aurait pas été un mal, pas du tout même, qu'il ait une mémoire d'éléphant plutôt que de poisson rouge. Combien de fois il s'était haï, n'empêche, quand il était encore étudiant à l'école d'art dramatique pour sorciers, de passer autant de temps à plancher sur ces fichus textes. Il mettait deux fois plus de temps que ses camarades à les retenir, et forcément, ben, ça l'handicapait. Herbert souffrait de ce qu'on appelle des défauts de concentration, et c'était vraiment loin d'être facile à vivre dans son quotidien de comédien. Quotidien qui, même s'il commençait seulement à enseigner, lui paraissait déjà extrêmement lointain.

Quand le sujet du nifleur fut abordé et qu'Herbert émit des réserves, pas parce qu'il n'avait pas envie de rester en contact avec cette bestiole (ça, du moment que ça ne le mordait pas, il n'avait rien du tout contre, loin de là), mais parce qu'il se demandait si les pubs acceptaient ce genre d'animaux dans leur ântre. Question d'hygiène, quoi.

-Oh, nous n'aurons pas besoin de chercher à aller ailleurs. Dans les bâtiments elle reste dans mes bras ou sur mes genoux et... Disons qu'ils ont l'habitude là-bas.

Très bien, il la crut. Il se dit qu'elle devait typiquement être ce genre de personnes qui se rendaient dans les institutions publiques avec toujours un animal sous le bras. Dans le fond, le comédien raté trouvait que ça ne manquait vraiment pas de charme. Il était plutôt content, par ailleurs, que les Trois-balais accepte ce genre d'animaux. La tête de sanglier était loin d'être un lieu qui était loin de lui plaire. Trop malpropre, trop glauque... Vraiment loin de ressembler aux endroits qu'il aimait fréquenter. Ils iraient donc aux Trois-balais, lui, Serya et...

-Merci! Et, oui. Elle s'appelle Chantal. Je suis sûre qu'elle va te plaire. Elle est adorable.

Chantal, donc. Entre Géraldine et Chantal, Serya choisissait vraiment des noms atypiques à ses animaux... enfin, pour des animaux, je veux dire. Herbert aimait mieux donner aux animaux des petits noms ridicules genre "poilu" ou "fluffy". Le fait que le professeur de soin aux créatures magiques donne à ses animaux des prénoms humains en disait long sur le regard et l'importance qu'elle leur portait. Mais Herbert ne jugeait pas. À vrai dire, il trouvait cela plutôt mignon.

-Alors... j'attends que tu aies cherché Chantal et on y va, si j'ai bien compris?