Illy, c'est un pigeon. Un pigeon qui rêve de s'envoler, à tel point qu'elle en oublie de battre des ailes. Elle pose sur tout ce qui l'entoure ce regard si particulier, de cet émerveillement sans cesse renouvelé où une pointe d'anxiété ne peux s'empêcher d'apparaître parfois. Voir la beauté des choses là où tous les autres ne font que passer en les ignorant, l'attention toute focalisée sur la gazette du sorcier, c'est ce qui aide la jeune femme à se libérer de ses problèmes. Rêveuse, décidément pas terre à terre, Illy a du mal à faire la part des choses, attribuant une importance démesurée à certaines choses au mépris de choses plus vitales. Il n'est pas rare qu'elle saute plusieurs repas au cours d'une semaine faute de liquide, ou que le chauffage lui soit coupé. Qu'à cela ne tienne, Illy préfère rêver sa vie au lieu de la vivre...

Crédule, la demoiselle a tendance à croire sur parole quiconque vient lui parler, si cela est un tant soit peu logique. Elle a l'amitié en très grande estime, et accorde sa confiance facilement. Et pourtant, si elle considère que les autres ne lui mente pas, ce n'est pas car elle croit qu'ils sont comme elle... Car si elle rechigne à mentir ouvertement, Illy est assez douée pour se mentir... à elle-même. En particulier concernant son état, qu'elle cache derrière ce sourire, toujours accroché à ses lèvres. Elle ne va pas bien? Et bien, elle le cachera. Car elle se doit d'être parfaite, même si elle en est terriblement loin.

Cette peur irrésistible de l'échec a développé une étrange forme de dépendance. Car Illy a un besoin compulsif de savoir ce qui l'attend. Et de savoir ce qu'elle doit faire... Le complexe d'infériorité dont elle souffre fait qu'elle place l'opinion d'autrui bien au dessus de la sienne. Elle a besoin de s'appuyer énormément sur les autres, et aime demander leurs avis pour les suivre. Lorsqu'elle se retrouve seule, Illy a tendance à se laisser envahir par le doute, tant la décision semble difficile de peur de commettre une erreur. Très dépendante, elle baissera rapidement les bras si elle ne se sent pas soutenue.

N'ayant aucun recul et aucun esprit critique par rapport aux autres, elle les trouve toujours supérieurs à elle et en déduit que son intérêt est donc de les suivre. Elle a un besoin constant de se faire accepter des autres même s'ils ne lui correspondent pas vraiment, voire ne lui conviennent pas du tout. Pour y parvenir, elle est prête à faire de nombreuses concessions, à se soumettre à leurs avis, ne jamais dire non et faire les corvées dont les autres ne veulent pas.

Sa crainte principale est de se retrouver seule, car Illy se sent incapable de faire les bons choix, de prendre des initiatives. Elle laisse aux autres la responsabilité de construire sa vie...

Craignant avant tout de perdre son lien à l'autre, Illy est presque incapable de se séparer de qui que ce soit, même si cette relation est toxique pour elle.

Elle tourne sur elle-même, inconsciente du regard que les autres portent sur elle. Elle tourne, dans ce cercle imparfait qui ressemble plus à un ovale qu'à autre chose. Une silhouette élancée, fine, presque maigre. Elle semble flotter complètement sous son long manteau beige. Serrés dans ses escarpins, ses pieds continuent leur danse improvisée. Elle ne les aime pas, ses pieds. Elle les trouve trop petits, aux orteils boudinés. Une cheville fine, mais à la malléole mal placée, rendant certaines chaussures douloureuses à porter. Et pourtant, elle les mets quand même. Parce qu'elles sont jolies. Parce que depuis le temps qu'elle les a, Illy considère qu'elles lui portent chance.

Elle virevolte au milieu de la rue, au milieu des pavés. Et la foule s'écarte pour passer, la laissant dans cette bulle de folie douce qui semble l'habiter. Les bras écartés, doigts tendus, ongles rongés mais vernis, Illy tourne. Elle tourne, la tête rejetée en arrière, ses longs cheveux blonds emmêlés se mêlant au vent d'hiver. Ils ondulent dès que l'humidité dans l'air se fait trop présente, à son grand regret. Mais à cet instant, elle n'en a que faire. Car son regard est captivé, plongé loin, très loin dans le ciel, observant la masse de flocons qui tombe lentement sur Londres. Les pupilles noisettes s'attachent à suivre la chute d'un flocon plus gros que les autres, avant de s'intéresser à son voisin. Ses paupières aux cils trop long papillotent un moment, lui faisant perdre quelques miettes de ce spectacle de la nature.

Ses sourcils sont haussés, toujours surprise par cette chute de neige à laquelle elle ne s'attendait pas. Et sur ses lèvres, un sourire heureux s'étale allègrement dévoilant une rangée de dents blanches. L'air frisquet colore ses joues glacées de rouge, mais Illy n'en a que faire. Elle tourne, et le monde tourne avec elle.

Tout s'explique. Tout a une explication, un début, enfoui loin dans le passé ou à l'aube de notre présent...

Si vous voyez Illy galérer avec sa baguette magique... Si vous vous demander pourquoi ses placards sont vides lors d'un détour chez elle... Si un jour tous les mois, elle s'habille en noir...

Illy est née un 3 Octobre, qui n'avait rien de particulier. C'était une naissance parmi tant d'autres à l'hôpital sorcier de Ste Mangouste. C'aurait pû être un événement si le poupon avait été l'enfant du ministre de la Magie, ou d'une quelconque autre personnalité connue. Mais il n'en était rien. Elle n'était qu'Illy Thickey, la fille de Monsieur et Madame Personne, habitants d'un quartier moldu quelconque. Le salaire de brocantier de Zachary, plutôt instable, les laissaient craintifs quant à l'avenir, craignant que l'argent ramassé ne suffise à subvenir à leurs besoins du mois. Aussi, malgré le rêve de son épouse de se comporter en tant que femme au foyer et de, telle une femme aisée, ne rien faire ou presque de sa journée, Mrs Diana Thickey se voyait contrainte de mettre la main à la pâte. Elle filait de la laine, qu'elle revendait pour arrondir les fins de mois.

Et Illy restait à la maison, au milieu de tout ça. Elle appartenait à ce monde sorcier, et ses parents ne jugèrent donc pas utile de l'inscrire à l'école moldue du quartier. Une perte de temps, qu'il disaient. Elle avait mieux à faire. Oh, ils n'étaient pas anti-moldus. Disons simplement qu'ils préféraient que les deux mondes soient séparés, et évitaient les contacts avec leurs voisins. Et si leurs moyens ne leur permettaient pas de louer une maison dans une zone totalement sorcière (qui sont bien plus chères que les quartiers moldus soit dit en passant...), bien, tant pis. Ils faisaient avec.

Sans grande surprise, ils s'aperçurent que leur fille unique (un enfant à nourrir, c'est déjà beaucoup, vous savez...) était bel et bien une sorcière. Ils s'y attendaient tellement, à vrai dire, qu'aucun événement spécial ni aucune fête ne fut mise en place pour célébrer ce jour. C'était juste... normal, et la poêle à frire qui volait au beau milieu du salon, faisant gicler l'huile un peu partout sur le tapis n'y changeait rien.

Diana se révéla vite être une mère surprotectrice, confinant Illy à l'intérieur de l'appartement ou l'accompagnant à chaque fois qu'elle allait dehors, refusant de lui lâcher la main un seul instant. N'étant pas habituée à autre chose, Illy accepta ses manifestations avec joie, laissant à sa mère les pleins pouvoirs sur son existence, ce qu'elle s'employa à faire avec possessivité. La lettre de Poudlard fut un grand choc pour elles deux, annonçant l'arrivée du Poudlard Express ainsi qu'une séparation imminente. Ce jour-là, Illy fut de celles qui pleurèrent dans le train, complètement perdue et angoissée. Répartie chez les Jaunes et Noirs, Illy découvrit la notion de liberté, qui l'effraya beaucoup. Elle s'accrocha aux filles qui partageaient son dortoir, les suivant sans concession et ne rechignant jamais à faire ce qu'elles demandaient pour qu'elles ne l'envoient pas voir ailleurs si elles y étaient. La chose se poursuivit jusqu'à sa cinquième année où, en plein milieu du mois de janvier, un événement imprévu apparut soudainement. Son père s'était fait renversé par une voiture en rentrant du travail. Aussitôt rapatriée chez elle, Illy en resta muette quelques jours, profondément choquée par cette nouvelle, cette absence et ce manque immense qu'elle ressentait.

Il y eu alors une longue période sombre pour la mère et la fille. De part la tristesse. De part la nécessité nouvelle de trouver plus d'argent. Diana mit du temps avant de trouver un emploi, vivant en empruntant de l'argent à des connaissances. Finalement, elle trouva enfin un emploi de préparatrice dans une boutique d'apothicaire. Et Illy dû donc arrêter ses études avant de passer ses BUSE, s'escrimant en tant que commis de cuisine dans un hôtel minable. Cela fut dur, mais la mère et la fille finirent par rembourser les dettes qu'elles avaient accumulées.

Il y a deux ans, sa mère s'est finalement remariée, et Illy s'est vue demander de quitter l'appartement familial. Elle a donc troqué son boulot de commis de cuisine pour un de plongeuse dans un bar, plus prêt de l'appartement minable où elle loge désormais, et légèrement mieux payé.