12 juillet 1905
Une nuit d'été particulièrement lourde, un puissant orage survole le chalet des Adams. Les éclairs frappent la colline de Easton. Seuls les cris d'une jeune femme viennent briser la puissance du tonnerre. La sage femme et Molly, la servante, s’affairent à éponger le sang et rassurer Mrs Adams. Mr Adams, sur le pas de la porte, ne montre aucun signe d'anxiété, ou de peur pour son épouse.
-"Je crois que je vois...oui c'est sa tête !" annonce la sage femme, tout en conseillant Joyce.
Molly, elle, continu d'éponger le sang. Elle n'ose pas demander mais, malgré tous ses efforts, il y en a toujours trop, quelque chose ne va pas. Une vingtaine de minutes passent dans la douleur et les cris, pour faire place à une immense joie. Le tonnerre gronde toujours au dehors.
-"C'est un garçon !" s'écrit Molly en souriant.
La sage-femme, après avoir coupé le dernier lien qui retenait le nouveau né à sa mère, le place dans un linge propre et le dépose dans les bras de Joyce, haletante mais les yeux brillants, sur le point de pleurer de joie. Tandis qu'elle admire son fils, la sage-femme s'approche de l'homme rester près de la porte, et lui murmure :
-"Monsieur,je suis désolée de vous dire ça mais, votre femme...elle a perdu beaucoup de sang, je ne suis pas en mesure d’arrêter l'hémorragie. Il faudrait un miracle, pour qu'elle survive à cette nuit."
Un miracle ? De la magie, voulait-elle dire ? Non, impossible, il ne pouvait pas. Il fixa son regard sur le sol, à peine touché par la nouvelle, il réagit comme face à tous les problèmes qu'il avait rencontré, en pensant, en se demandant ce qui serait le mieux pour lui, pour sa famille, pour son tout jeune fils. Sa décision prise, il s'adressa à la sage-femme en ces mots, sachant que désormais sa femme était condamnée :
-"Vous avez fait ce que vous pouviez, maintenant partez."
Avec le même ton froid il demanda à Molly de quitter la pièce, et sans un regard vers son épouse il se tourna vers la fenêtre, il observa le ciel obscur au dehors, les étoiles étaient masquées, et seuls les éclairs permettaient de distinguer quelques détails aux alentours. Il passa sa main sur son visage, peut-être pour essuyer quelques larmes, puis il s'assit sur le lit, et fixa longuement son fils, puis Joyce, qui malgré tout souriait.
-"Mickaël, nous avons un fils !" s'écria t-elle, plus heureuse que jamais il ne l'avait vu.
-" Il est magnifique, chérie."
Le teint pâle et les cernes, où se reflétaient la triste lueur des lampes, donnaient à la jeune mère un aspect déjà cadavérique, son regard restait cependant fixe. Elle lui tendit l'enfant, avec le peu de force qui lui restait. Il s'en saisit délicatement. Il ne criait plus, paraissait calme, un tout jeune sourire semblait apparaître lorsqu'il vit pour la première fois son père. Celui-ci le contempla un instant, puis dit, s'adressant au nourrisson :
-"Bienvenue à la vie, Aaron."
Le prénom avait été décidé deux jours avant cette nuit. Aaron était le prénom du père de Joyce, mort durant la guerre. Si ç'avait été une fille, il l'auraient appelés Mary. Il rendit l'enfant à sa mère, qui semblait de secondes en secondes plus faible.
-"Je reviens mon amour" lui dit-il avec un sourire.
Elle ne dit rien, et le regarda passer la porte. Elle sentait que quelque chose n'allait pas.
Ms Adams contourna le grand salon, monta les escaliers, et se rendit sur le balcon. La force du vent le frappa de plein de fouet, la pluie le martelait, et tandis que le ciel explosait une dernière fois, il fondit en sanglots.
24 février 1918
Plus haut, toujours plus haut, encore plus haut. Les nuages étaient gelés, et le trempaient jusqu'aux os, mais ça n'avait pas d'importance. Il n'y avait pas de vent, et le ciel était dégagé. Un jour parfait. La sensation de liberté qu'il ressentait était irréelle. L'astre solaire était de plus en plus proche, tous ses membres ressentaient son énergie, ils ne tremblaient pas, malgré la hauteur. Aaron avait l'impression de cerner tous les horizons, il voyait tout, ressentait la vie, le monde. Il se plaça sur le dos, tout sourire, les bras placés nonchalamment derrière sa tête, et regarda passer le ciel, d'un bleu uni. Soudain, il perdit le contrôle, il bascula en arrière, à une vitesse étonnamment ralentie, et commença à planer vers le sol, et bientôt à plonger, sans rien pour freiner sa chute. La panique s'empara de son corps, le ciel se mit à noircir, et soudain un violent orage éclata, comme pour le pousser vers le sol, de plus en plus vite. Il s'écrasa sur un sol plat, lisse et dur, comme du bois vernis.En ouvrant les yeux, il s'étonna d'être en plein milieu d'une clairière. L'orage grondait toujours, à chaque coup de tonnerre, il tressaillait. Un peu plus loin, tout près d'un saule, il distingua deux formes. Il s'en approcha, et découvrit deux tombes, l'une ancienne, recouverte de lière et de lichen, elle avait été blanche et pure. L'autre était d'un marbre noir et brillant, sans un seul défaut. Il ne savait pas pourquoi, mais la tristesse l'envahit. Soudain, des inscriptions se gravèrent d'elles mêmes sur les dalles : Joyce Adams 1870-1905 & Mickaël Adams 1867-1918. Un éclair frappa le saule de plein fouet, Aaron hurlaTOC-TOC-TOC
Quelqu'un qui martelait la porte du dortoir des garçons. Une voix de femme s'écria :
-" Adams ? Levez-vous, le directeur veut vous parler."
Le jeune garçon s'extirpa de sa torpeur, et se releva. Il était tombé de son lit. Quelques images de son cauchemar lui revenaient encore par bribes. Il enfila un pull, jeta un œil à ces camarades, qui dormaient encore, et alla ouvrir la porte. Mrs Hawkins lui pria de descendre, car le directeur l'attendait dans la salle commune. * Le directeur ? Mais qu'est ce qu'il me veut, à une heure pareille ?* Lorsqu'il pénétra dans la salle commune, un homme aux cheveux grisonnants était assis sur un fauteuil, près de la cheminée, où quelques cendres crépitaient encore.
"Assis-toi Aaron, s'il te plait..." dit-il sans quitter des yeux l'âtre.
Le jeune garçon s’exécuta, tout en fixant toujours le professeur. L'image de la tombe noire lui revint en mémoire.
-"Aaron...je viens de recevoir la visite d'un homme du ministère. Il est venu m'informer que, il y a quelques heures, trois de ces Aurors avaient reçus l'ordre d'arrêter des individus soupçonnés d'utiliser la magie noire. "
Il laissa passer un moment de silence, espérant que le jeune garçon comprenne par lui même, puis continua :
-" Ils ont étés retrouvés, morts...Aaron, ton....ton père faisait partis de ces trois hommes."
Soudain, l'image de la tombe devint nette, remplaçant l'image du professeur, de la pièce où il se trouvait, de la chaleur qui émanait de la cheminée. Il avait mal, très mal. Il refusait de perdre sa seule famille, il aurait voulut hurler au directeur qu'il mentait, que c'était impossible, qu'il était sénile, qu'il ne savait pas ce qu'il disait, que c'était un cauchemar, encore. Sa douleur se mua en rage, il se vit, tirant sa baguette et enflammant la salle commune d'un geste, il se vit détruire le château à lui tout seul, il voulait punir tout ces gens qui n'avaient rien fait, qui l'avaient laisser partir, pour ne jamais revenir, serrer son fils dans ses bras. La vengeance, voilà ce qu'il désirait, en cet instant. Il était désormais orphelin, plus rien ne comptait plus à ses yeux, il n'avait rien à perdre.
Soudain, après un long silence, Mrs Hawkins se pencha vers lui, plaça un bras sur ces épaules, et dit d'une voix chaleureuse :
-" Toute votre maison compatis à votre douleur. Sachez que Gryffondor restera à jamais votre famille."
Le vide l'envahit, il était touché, ne savait plus quoi faire, totalement perdu. Le directeur lui donna une tape amicale sur l'épaule et quitta la pièce. Les personnages dans les tableaux ne dormaient plus, et lorsqu'il remonta se coucher, le cœur vide et meurtri, tous lui dirent : "Courage, vous surmonterez cette épreuve."
Alors il se rallongea sur son lit, oubliant le cauchemar, oubliant la tombe, pour revivre chaque instants passés avec son père. Il versa ses larmes, en silence.
11 mai 1943
Un temps maussade marquait cette matinée. Il faisait frais pour la saison, mais le temps, Aaron ne s'en souciait pas le moins du monde. Trois sorciers expérimentés le suivait, tous d'au moins 4 ans son ainé, mais c'était lui le plus apte à mener la mission, lui le plus rapide, lui le plus rusé, lui que la vengeance appelait. Ils avaient pénétré le bunker, pétrifié ou stupéfixié les gardes, et il sentait qu'ils touchaient au but, ils étaient là. Les cibles, Thomas Bourne, Arthur Mcmillan et Théophile Langman, étaient accusés d'avoir utilisés maintes et maintes fois les sortilèges impardonnables, d'avoir assassiné des centaines de moldus juifs pour la solde de Hitler, et d'avoir aidé le "fürher" a mené le troisième Reich à la tête de l'Europe. Mais le crime qu'ils avaient commis le 24 février 1918 était celui qui les mènerait à leur perte...Stupéfixiant sans un mot un soldat qui empruntait le couloir, il le retînt avant qu'il ne touche le sol, puis continua sa route vers la cible. Des voix s’élevèrent dans la salle où menait le couloir. Un sergent de la Wermacht en sortit, il avait une cicatrice à l’œil. Aaron rentra dans une salle qui bordait le couloir, attendit que l'homme passe devant la porte et le pétrifia. Il contourna le corps inerte et se plaça dos contre la porte.
"Derrière cette porte, les hommes qui ont assassinés mon père* se dit-il
Il dévisagea les trois autres aurors, ils étaient prêts. Ne laissant plus une seconde le séparer de sa vengeance, il ouvrit la porte à la volée d'un coup de talon. Un sortilège fusa de la pièce vers un des aurors, qui eu à peine le temps de le parer. Sa vitesse de réaction lui valut deux entailles sur la joue. Aaron s'engagea dans la pièce, baguette en avant, et envoya au sol deux hommes, avant recevoir un
Expelliarmus chirurgical. Sa baguette vola derrière un bureau, mais il ne chercha pas à la ramasser. Ils avaient déjà détruit tous les enchantements de protections du bâtiment, les cibles n'avaient plus de défenses. Il esquiva un sortilège de mort avant de s'emparer d'une chaise qu'il lança de toutes ses forces au fond de la salle sur un des mages noirs, qui la fit exploser d'un coup de baguette. Mais le temps qu'il s'en rende compte, un auror l'avait déjà stupéfixié. Un sur trois. Les deux derniers avaient retourné un bureau et commençaient à les mitrailler de sortilèges. N'ayant plus de baguette, Aaron estima la distance qui le séparait des deux hommes, mais il ne pourrait rien tenter. Un de ses camarade invoqua en un temps record un bouclier. Les derniers sortilèges des deux hommes vinrent s'écraser dessus comme s'il s'agissait de boules de neiges sur un mur. Tandis que l'un maintenait le bouclier en psalmodiant des formules, les autres se préparaient au dernier assaut. Aaron lui, souriait. Ils étaient piégés. Il profita de la situation pour ramasser sa baguette. Il contempla un instant la mine apeurée des deux mages noirs, puis fit un signe de tête à l'auror qui maintenait le bouclier. Au moment ou celui s’affaissait, il fit voler d'un geste du bras le bureau qui leur servait de dernière protection. Deux sortilèges fusèrent vers les cibles, et un vers les aurors. Aaron ne regarda pas derrière lui et fonça vers eux, il savait qu'il ne les avait pas raté. Il sourit en voyant leur corps s’écraser sur le sol. Soudain, l'image de son père lui revint en mémoire, accompagné par son ancienne colère. Il pointa sa baguette vers l'un d'eux :
- "
Endol.." il fut arrêté juste à temps. Un de ces hommes le regardait, retenant son bras.
-" C'est Bruce, il...est mort."
Il se retourna vers les autres aurors, et posa son regard sur le malheureux. Il ne le connaissait pas vraiment, d'ailleurs il n'a jamais essayé de connaitre ses collègues. Mais c'était par sa faute qu'il était mort, et il le savait. Cette mission, c'est lui qui l'avait soumise au ministre, lui qui l'avait organisé, et c'était lui qui avait mal jugé les risques, aveuglé par sa vengeance. Lassé et triste, il leur dit :
-" Je suis désolé pour lui. Maintenant, on ramène les cibles à Azkaban."
-"Que fait-on pour les moldus ?"
-"Oubliette"
L'auror acquiesça d'un signe de tête et entreprit de leur faire oublier.
2 août 1944
Cela faisait plus de deux ans maintenant qu' Aaron avait quitté le ministère, qu'il vivait dans l'ancien manoir de ses défunts parents, et qu'il errait sur cette Terre sans but. Depuis la mort de son père, sa seule motivation avait été sa vengeance. Mais elle ne l'avait pas ramené. Elle l'avait rendu indécis, mais malgré tout il restait une chose qui lui tenait toujours à cœur : Poudlard. Il devait y retourner, il n'y a que dans cette école qu'il s'était senti heureux, aimé et véritablement vivant. Mais à quoi pourrait-il bien servir ? Professeur ? Après tout il n'était pas un mauvais auror, il saurait surement donner des cours de défenses. N'hésitant plus une seconde, il prit un bout de parchemin, une plume et un peu d'encre et entreprit d'écrire une demande d'emploi au directeur. Sa réponse fut positive, car il lui proposa une rencontre. Aaron prépara ses affaires et parti. Après avoir transplané à Pré-au-lard, il se rendit rapidement vers le grand portail du château. En entrant dans le parc, des dizaines de souvenirs refirent surface (comme cette fois où il avait plongé dans le lac gelé pour impressionner une fille, enfin il s'était tout de même retrouvé à l'infirmerie...laissons cette histoire sans commentaire vous-voulez bien ?) Grimpant quatre à quatre les marches du grand escalier, il se demanda soudain si Dipett se souviendrait de lui. Il était encore professeur lors de son passage à Poudlard. Il arriva devant la gargouille, et un détail lui revint en mémoire
* Quel idiot, je ne lui ai pas demandé le mot de passe.*
Avant qu'il est le temps d'essayer quelques mot de passe bidon, l'escalier s'anima et apparut un petit sorcier ridé, frêle et chauve avec encore quelques rares cheveux blancs et fins. Il se retourna et fut surpris de voir quelqu'un qui l'attendait :
-" Ah, tiens ! Mr Adams. Notre rendez-vous était aujourd'hui ? Eh bien, je devais aller à l'infirmerie mais puisque vous êtes là..."
-"Ne vous dérangez pas pour moi, on peut faire ça en marchant si vous voulez."
Dipett acquiesça et il marchèrent ensemble en direction de l'infirmerie.
-"Alors Mr Adams, on parle encore de votre incroyable prise au ministère. J'avoue qu'avec une telle réussite, je ne m'attendais pas à votre hibou. Mais dites moi, quel poste souhaiteriez-vous avoir ? Nous reprenons bientôt les cours et il se trouve que nous avons peu de postes vacants."
-"Eh bien, avec mon expérience, j'avais pensé pouvoir convenir pour des cours de défense. Mais ce que je souhaite seulement, c'est travailler dans cette école. Poudlard fut comme une nouvelle famille pour moi, lorsque je me suis retrouvé orphelin."
Dipett arrêta sa marche un instant, réfléchit, puis reprit :
-" Eh bien, le poste de défense n'est pas à pourvoir. Cependant il y a un poste qui viens de se libérer, un de nos collègues nous a fait défaut et a dut repartir. Il s'agit du poste de vol sur balai. Et il me semble que vous seriez parfait dans ce rôle. Lors de votre passage à Poudlard, je crois me souvenir que vous ne passiez pas inaperçu sur le terrain de Quidditch, en tant que poursuiveur."
-" Ce serait parfait ! Enfin j'espère que je suis toujours assez souple pour voler sur un balai. J'accepte le poste." dit-il. Il avait enfin retrouvé le sourire.
Le directeur le salua, et Aaron repartit par le parc, un sourire enjôleur sur le visage, des souvenirs pleins la tête.